Auteur/autrice : annef131

  • Happy 45, Monty Python Sacré Graal !

     

     

    Pour tous ceux qui seraient trop jeunes pour s’en souvenir, Monty Python, c’est une troupe britannique composée de six humoristes qui se sont rencontrés à la fac et se produisent dans des spectacles composés de sketchs, jusqu’à ce que la BBC leur propose de créer une série TV échappant à toute censure.

     

    Ainsi, durant 45 épisodes, de 1969 à 1974, les Monty Python travaillent leur style, comme les collages surréalistes dans les images d’animation. Chaque émission est une succession de sketchs unis par un fil conducteur qui lui donne son identité propre. En 1971, ils font leur première incartade au cinéma avec leur long-métrage « La Première Folie des Monty Python », une anthologie des meilleurs sketchs du show TV « Monty Python’s Flying Circus ». En France, la série a été diffusée pour la première fois dans l’émission « Continentales d’été » à partir du 1er août 1991 sur FR3, à l’époque où l’idée d’Europe faisait encore sens…

     

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    En 1975, avec la sortie de leur second long métrage,  « Monty Python : Sacré Graal ! », le succès est tel qu’il dépasse largement les frontières du Royaume-Uni. Suivront « La Vie de Brian » en 1979 et « Le Sens de la Vie » en 1983. Ils seront même invités à se produire dans un show à New-York qu’on peut voir en version filmée dans « Monty Python à Hollywood » (« Monty Python Live at the Hollywood Bowl ») en 1980.

     

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    Un temps séparés, ils suivront chacun leur chemin sur des projets différents avant de se retrouver en 2013, alors que l’un des membres de la bande de joyeux drilles, Terry Jones, annonce lors d’une conférence de presse à Londres la reformation de la troupe, en même temps qu’un nouvel et ultime spectacle. Les dix représentations données en juillet 2014 afficheront complet ; 20.000 tickets partis en 45 secondes pour la première. La troupe désormais à cinq (Graham Chapman est décédé en 1989) joue ses meilleurs sketchs pour son spectacle d’adieu. La dernière représentation sera rediffusée dans le monde entier (sur Arte pour la France).

    La seule parenthèse à leurs carrières solo respectives fut leurs retrouvailles en 2009, pour un reportage tourné à l’occasion des 40 ans de leur première apparition à l’antenne de la BBC. Pour fêter cet anniversaire, Bill Jones tourna un documentaire racontant en six épisodes l’histoire des Monty Python par eux-mêmes : « Monty Python, toute la vérité ou presque ».

     

     

     

    En 2015, c’est un autre anniversaire que fêtaient le distributeur Park Circus et Sony Pictures : les 40 ans de la sortie du film « Monty Python and the Holy Grail ». Pour un soir seulement, une version nouvelle, complètement musicale, était diffusée le 14 octobre 2015. Plus de 500 cinémas britanniques participaient à cette soirée unique avant la sortie par la suite d’une version DVD / Blue Ray dans les pays anglophones.

     

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    Une seconde vie pour ce film tourné avec des bouts de ficelle (et quelques noix de coco) et financé par des groupes de rock fans comme Led Zeppelin ou Pink Floyd (deux millions d’entrées pour seulement 250.000 dollars de budget de tournage). Terry Gilliam a souvent raconté que le National Trust leur avait refusé de tourner dans les châteaux, les accusant de ne pas respecter la dignité des lieux, ce qui avait obligé la troupe à découper de faux décors en carton peint et à tourner plusieurs scènes simplement dans un parc en plein centre de Londres. L’occasion de voir et revoir ces scènes tordantes, de se remémorer toutes ces anecdotes de tournage et de vérifier si Arthur et ses chevaliers ne trouvent finalement pas le Graal chez Harrod’s…

     

     

    Et en cadeau, « Monty Python and the Holy Grail » en Lego…

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    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Monthy Python Official

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Live at Aspen » (1998)

     

     

     

  • Jim, interview fleuve…

     

     

    On ne présente plus « Une Nuit à Rome », cette saga en quatre tomes éditée chez Grand Angle et dont le premier opus est paru en 2012. Instant City avait déjà rencontré son auteur et dessinateur, Jim, pour une première interview en 2015. Le temps passe… Il passe aussi pour Marie et Raphaël, qui dans le premier cycle (tomes 1 et 2) avaient quarante ans et qui en ont maintenant cinquante (deuxième cycle, tomes 3 et 4).

     

    Pour ceux qui ne connaissent pas la saga, Marie et Raphaël se sont aimés lorsqu’ils étaient tous deux étudiants aux Beaux-Arts, et se sont promis, avant que la vie ne les sépare, de se retrouver pour une seule nuit, à Rome, le jour de leurs quarante ans. Et de renouveler leur promesse pour leurs cinquante ans.

    A Instant City, nous étions très curieux de savoir comment les personnages allaient évoluer entre : que sont-ils devenus ? Où en sont-ils dans leur vie ? Est-ce que Raphaël est resté fidèle à Sophia ? Est-ce que Marie a enfin trouvé un homme qui lui aura donné envie de rester ?

    Nous étions aussi désireux et heureux de retrouver un auteur, Jim, son univers, ses personnages, son trait, sa bande de copains. Car à côté des histoires d’amour des personnages principaux se raconte aussi toute l’évolution d’un groupe d’amis qui traversent le temps. Ce temps qui se fixe sur des objets, des décors, des changements d’atmosphère.

    Et puis nous étions, comme tous les lecteurs assidus de la série, fébriles de savoir de quelle manière Marie aurait physiquement vieilli sous le crayon de Jim. L’écriture scénaristique du second cycle a dû être extrêmement délicate. L’auteur aura-t-il osé vieillir Marie ou sera-t-elle restée une icône pop éternellement jeune et jolie ? Et Raphaël ? Comment le dessin rendra-t-il son vieillissement ? Aurons-nous affaire à de « vieux beaux » ou Jim aura-t-il osé en faire des gens ordinaires comme vous et moi ?

    On imagine bien les voir se retrouver plus mûrs, plus stables, plus ancrés dans leur vie, plus heureux et épanouis, autour d’un verre, d’une table de restaurant, juste pour partager un repas, riant et discutant à tout rompre, rattrapant dix ans de vie sans nouvelles. Puis décider d’un simple regard entendu de s’en tenir là et de se dire au-revoir en bons amis.

    De nombreuses questions taraudent ainsi les amoureux de la saga : on se demande si on va repartir sur un nouveau rendez-vous à soixante ans ou pas. Sans doute que non, on imagine bien que ce serait un peu redondant. Mais alors, comment va se terminer cette histoire ? Quelle fin suffisamment inattendue pour réussir à surprendre les fans de la BD tenus en haleine depuis huit ans ?

    C’est très intéressant de voir de quelle manière chacun d’entre nous aura sa propre imagerie de la scène de retrouvailles. Vont-ils se revoir, vont-ils s’aimer ? Vont-ils enfin se mettre en couple ?  autant de scénariis possibles que de lecteurs.

    Voilà, à notre avis, le plus grand défi que Jim avait à relever : faire vieillir Marie, vraiment, et proposer un scénario suffisamment surprenant et original. Une fin digne de Marie, en somme !

     

     

     

    L’INTERVIEW-FLEUVE

     

    IC : Bonjour Jim. Alors ça y est, c’est fini…. Vous venez de boucler le cycle 2 (tome 4) de la saga « Une Nuit à Rome » ?

    Jim : Eh oui, la parenthèse se referme. J’avoue ne pas avoir le sentiment de les quitter parce que j’en ai fait le tour, mais parce qu’il serait étrange de lier sa vie d’auteur à deux personnages… Besoin et envie de raconter d’autres histoires. Et puis, la force de cette histoire, c’est ce morceau de vie, ce sont les questionnements autour de leur promesse d’origine…

     

    IC : Est-ce que vous pouvez nous retracer un peu la chronologie de cette saga ? Comment ça a commencé, ce qu’il s’est passé durant ces huit années ?

    Jim : « Une Nuit à Rome » est né de mon intérêt pour les films français sensibles, ce type d’histoires… et d’une envie de me dépasser graphiquement, après quinze ans de dessin humoristique… j’avais envie de découvrir d’autres façons de faire…

     

    IC : Qu’est-ce que ça fait de mettre le dernier coup de crayon à une histoire qui dure depuis huit ans ?

    Jim : Un album, c’est deux ans… Là, j’avais surtout la problématique au jour le jour d’avancer mes planches, et de voir que je me rapprochais de la fin. Chaque album est une montagne à gravir, arriver à la fin est un vrai plaisir, on va enfin pouvoir voir si ce qu’on a prévu dans son coin touche les gens, les emporte, et les bouleverse… Tant qu’on est seul, c’est très théorique, on espère des ressentis proches du sien, mais on ne sait jamais vraiment. On espère, on se projette…

     

    IC : « Je redoutais un peu la fin de l’histoire. J’avais peur d’être déçu ou frustré » écrit Lys 1656 sur un site de vente. Racontez-nous toute la période de création du scénario de fin : avez-vous ressenti une grande pression liée à l’attente des lecteurs que vous pouviez imaginer et à votre volonté de ne pas les décevoir ?

    Jim : L’enjeu était énorme, une mauvaise fin pouvant gâcher toute la série, finalement. Je ne cérébralise pas beaucoup. J’ai eu l’idée de cette fin, et je savais que c’était la fin. Comme si c’est quelque chose qui arrivait à des personnes réellement, et que je devais raconter ça. Il ne nous viendrait pas à l’idée de changer la vie des gens autour de soi, ce qui leur arrive est ce qui leur arrive. Et bien là c’est pareil, je raconte leur vie, comme si elle existait…

     

    IC : Avez-vous beaucoup échangé avec votre entourage pour recueillir leur avis ?

    Jim : Quand j’ai une idée, j’en cause, oui, toujours. Pas comme un test, mais qui vit dans mon entourage est obligé de partager mes emballements, donc je balance toujours les idées. Et je vois comment elles accrochent, effectivement. Souvent, on vérifie ainsi que c’est bien ressenti, si on a besoin de régler quelque chose. Je crois que je frotte souvent mon enthousiasme aux autres, qui sont des lecteurs possibles. Ainsi, je prends la mesure en temps réel.

     

    IC : Avez-vous changé plusieurs fois de version ? Pouvez-vous nous faire la confidence des autres fins que vous aviez imaginées et avec lesquelles vous avez hésité ?

    Jim : Absolument aucune autre (Rires). Si j’étais mystique – ce que je ne suis pas – je dirais que c’est comme capter des vies qui existent, et juste devoir les raconter. Je savais que c’est ce qu’ils devaient vivre, parce que c’était une pirouette, pas un happy end cul-cul, et que ça me semblait le sens de la vie… Les emmerdes ne sont jamais loin, il ne faut jamais baisser sa garde… et je savais que Raphaël avait déconné la nuit de ses cinquante ans. En réalité, il y a beaucoup d’éléments dans le tome 3 qui allaient dans ce sens… mais n’en disons pas plus pour ceux qui n’ont pas lu !

     

    IC : Quelle a été la décision la plus difficile à prendre ?

    Jim : Aucune idée, il n’y a pas de décision difficile à prendre quand on est instinctif. On sent que ça doit être ça. D’un point de vue graphique, choisir une couverture est sans doute la décision la plus difficile à prendre, car c’est se priver de toutes les autres options. Sur la couverture, Delphine et moi avons beaucoup cherché sur les couleurs, car elles ne venaient pas facilement…

     

    IC : De quelle idée êtes-vous le plus heureux ?

    Jim : L’idée de départ de la série. « A vingt ans, ils se sont promis de passer ensemble la nuit de leurs quarante ans. » C’est limpide, et ça va être difficile d’avoir une nouvelle idée comme ça. Et une page dans le tome 4 où Raphaël appelle sa maman. Les héros de BD ont rarement de parents, et je trouvais au contraire particulièrement intéressant de faire un point sur sa vie, et de penser à sa maman encore en vie. De s’arrêter, de la remercier, de la rassurer sur ce qu’on vit. C’est évidemment une façon pour moi de le dire à ma maman.

     

    IC : Quels retours avez-vous de votre public ?

    Jim : Je suis très serein, maintenant que le tome 4 est sorti, de voir combien il accomplit sa mission de clore la série. J’ai eu de très beaux retours de lecteurs. Il faut dire que j’ai ajouté vingt planches, je tenais à ce qu’il soit le plus complet possible, et à l’écrire sans avoir le sentiment de me restreindre narrativement. Je crois qu’il est bien plein, riche.

     

    IC : A la lecture des commentaires sur le net, il semble que le tome 4 apparaisse comme étant le plus « abouti », c’est un mot qui revient souvent.

    Jim : C’est une vraie chance. Ça veut dire que nous avons été dans la même direction, les lecteurs et moi. Personnellement, j’adore écrire les fins. Je trouve ça passionnant à écrire. Je réalise que jamais je n’ai écrit un album aussi vite, d’ailleurs. Je pense qu’il s’est écrit en quatre ou cinq jours. Mais en réalité, pendant toute l’écriture du tome 3, dès que j’avais des idées, je les notais dans un fichier que je ne relisais pas. À la fin du tome 3, j’ai réouvert le fichier, j’ai tout relu, et il a suffi d’agencer les idées, de trouver leur ordre, de faire les liens. Tout le tome 4 était là. En réalité, je l’ai écrit en cinq jours… et deux ans.

     

    IC : Finalement, l’amour, c’est mieux à cinquante ans ?

    Jim : Je ne crois pas. C’est mieux quand on est amoureux, surtout.

     

    IC : A la lecture des réactions des lecteurs, changeriez-vous quelque chose au scénario ?

    Jim : Ça c’est une vraie question que je ne me pose pas. Par flemme, et parce que l’idée est de ne pas y revenir, donc laisser les quatre tomes comme ça, et place aux projets futurs. C’est nettement plus emballant !

     

     

     

    IC : La ville de Rome tient une place encore plus importante que dans les trois précédents volumes. Des planches entières, absolument magnifiques, montrent la ville. Combien de voyages avez-vous effectué à Rome au cours de ces huit années ? Comment fonctionnez-vous ? Vous prenez des photos ? Vous allez sur internet ? Rome ne va-t-elle pas aussi vous manquer ?

    Jim : Rome ne sera jamais trop loin… J’ai dû aller six fois à Rome. J’ai fait beaucoup de photos effectivement, et réfléchi à l’histoire sur place. Certains éléments s’écrivent en fonction de choses vues, comme ce couple âgé en terrasse dans la lumière du soir. C’est une photo prise en marchant vers le festival BD de Rome où j’étais invité. J’aimais l’image, et elle m’a inspiré cette vision. Mais je vais essayer de ne plus trop aller à Rome, j’ai plutôt envie d’aller dans de nouveaux endroits, m’inspirant de nouvelles histoires…

     

    IC : Sète sert également de décor dans ce tome 4. Parlez-nous de cette ville et du lien qui vous attache à elle.

    Jim : Sète, c’est du copinage. J’habite à côté. Graphiquement, c’était intéressant, et géographiquement idéal, car sur le parcours, à mi chemin entre Paris et Rome. Je ne suis pas particulièrement attaché à Sète, en réalité, je me sens plus proche de Montpellier, qui est plus… ma ville.

     

    IC : Quelques bonnes adresses ?

    Jim : À Sète, je conseille le marché du dimanche matin, et quelques restos à ambiance type « La Mauvaise Réputation », quand mon ami Christian nous y embarque…

     

    IC : Un lecteur évoque, je cite, « des morceaux de musique emblématiques de l’époque, réalisant comme une bande-son de l’histoire » (Commentaire de Bdotaku). Parlez-nous des ces morceaux de musique choisis.

    Jim : Dans le tome 1, j’ai placé quelques titres emblématiques, comme Gerry Rafferty… C’est plus un jeu personnel, comme quand j’évoque l’âge d’Étienne Daho, qui m’a toujours paru un grand frère symbolique. Je me souviens de mon effroi quand j’avais vingt ans, de découvrir qu’il en avait trente. Je le trouvais si proche de mon univers, et en même temps, qu’il ait dix ans de plus que moi me paraissait incompatible… mon Dieu, c’était un vrai adulte, déjà…

     

    IC : Que restera-t-il de cette tranche de vie ? Pouvez-vous nous citer quelques « meilleurs » et « pires » souvenirs liés à cette aventure ?

    Jim : Je ne crois pas avoir de pire souvenir, je n’en vois aucun, en tout cas. Les meilleurs sont liés aux rencontres, aux visages, au gens, au plaisir d’avoir touché certaines personnes, la façon d’en parler, d’être attaché à cette histoire, le lien qui s’est créé entre Marie, Raphaël, et eux. Souvent, les lecteurs ont le sentiment de me connaître en venant vers moi en dédicace, car nous avons partagé quelque chose en commun. Jeté un même regard sur certains éléments de la vie, sans doute ?

     

    IC :  Il suffit de regarder un peu votre page facebook pour comprendre qu’ « Une Nuit à Rome » et Jim sont devenus deux éléments d’un même mythe, au point de ne faire plus qu’un. « Une Nuit à Rome », c’est une communauté de 3 750 followers, une saga qui dure depuis huit ans, des fans qui se retrouvent pour des dédicaces, des éditions spéciales (neuf albums différents pour quatre tomes), des fêtes, des rencontres, des chats entre lecteurs. En résumé, c’est plus qu’une BD, c’est un univers tout entier avec vos fans.

    Jim : En réalité, ce ne sont pas neuf albums différents, mais aujourd’hui dix-huit albums différents en langue française… sans compter les coffrets et les traductions à l’étranger. Oui, c’est assez dingue, ce qui se passe avec cette série, il y a un aspect magique, quand un tel pont se crée entre un public et une histoire.

     

     

     

    IC : Cet engouement, on le doit beaucoup au personnage de Marie et à vos dessins sexy à souhait. Elle est belle et plaît beaucoup. Posters, puzzles, mugs, sacs en toile, étiquettes sur une bouteille de vin ou de champagne, calendriers… On retrouve Marie sous toutes les déclinaisons.

    Jim : Le personnage de Marie a su toucher un public, et je suis régulièrement contacté par des gens qui souhaitent la décliner sur différents supports. Et j’avoue apprécier cette idée, c’est toujours un plaisir, si les produits sont de qualité. On a même poussé la vanne avec mon ami Gaston en faisant croire que des préservatifs Marie allaient sortir. Il avait fait un visuel avec un imprimé de Marie sur le latex, et je l’avais fait suivre sur mon facebook. Je me souviens qu’on nous a demandé à quels parfums étaient les préservatifs. La réponse « Parmesan et Mozzarella » a achevé de nous trahir… (Rires).

     

    IC : Dans combien de pays la BD a-t-elle été traduite ? Comment se vend la saga à l’étranger ?

    Jim : Néerlandais, Espagnol, Italien, Allemand, Croate… Maintenant que la série est complète, j’espère qu’elle va s’exporter davantage…

     

    IC : « Une Nuit à Rome », c’est aussi une affaire de famille. Vous rédigez le scénario, dessinez les planches. Votre épouse, Delphine, coloriste, met en couleur et prête ses traits à l’héroïne. Votre fils, Ulysse, transcrit la BD en roman. Votre frère Philippe a co-écrit avec vous plusieurs courts-métrages. Vous avez aussi une fille, Emma. Cela vous agace-t-il que l’on vous parle d’une affaire de famille ou au contraire, êtes-vous ravi de pouvoir travailler en famille ?

    Jim : Ce n’est pas un choix, c’est venu comme ça. Au plus simple. Après, j’ai dû travailler avec une trentaine d’auteurs, et tous n’étaient pas des cousins éloignés, je vous rassure (Rires). Mais parfois, des rapprochements se font naturellement, c’est le cas ici. J’ai souvent embarqué des amis et des copains dans des projets, c’est surtout lié à un talent précis, à l’envie, et à la disponibilité le moment venu. Il est clair que pour adapter le récit en roman, Ulysse était idéal.

     

    IC : Parlons cinéma, votre autre passion.

    Jim : J’avoue avoir un petit penchant pour les acteurs et les images qui bougent avec du son, oui.

     

    IC :  Lors de notre dernière Interview en 2016, vous nous disiez que 2017 serait l’année des tournages. Vous aviez plusieurs projets en cours. Vous parliez d’une co-réalisation avec Stéphane Kot, d’une autre avec le réalisateur Bernard Jeanjean et d’une adaptation de votre BD en deux tomes, « L’érection ».

    Jim : Eh bien nombre de ces projets sont toujours dans les tuyaux, mais ont changé de producteurs, ou sont en recherche de réalisateur… et j’envie l’optimisme que j’avais en 2016, qui prenait des couleurs de naïveté ; mais le monde de la BD donne de mauvaises habitudes, on signe avec un éditeur, on sait que l’album va sortir. On signe avec un producteur, lui-même ne sait pas si le film se fera un jour. En 2020, j’ai donc progressivement appris à ne plus la ramener sur les projets en cours, et j’essaie de n’en parler que lorsqu’ils sont du présent.

     

    IC : En 2016, il y a eu aussi l’adaptation au cinéma de votre BD « L’invitation », un film de Michaël Cohen avec également Nicolas Bedos.

    Jim : Un joli film, très fidèle à la BD et une rencontre formidable avec Michael, une bien belle personne.

     

    IC : Le film a fait combien d’entrées ?

    Jim : Je n’ai pas de chiffres, mais bien trop peu. Ça m’a permis de voir de l’intérieur combien le jour J des sorties dépend de la distribution en salle, de la distribution des acteurs, du budget alloué, de la concurrence en face, du désir simplement des spectateurs, de la météo, et que les films ne sortent pas tous logés à la même enseigne.

     

    IC : Quels ont été, côté cinéma, après la sortie du film « L’invitation », les retours positifs et négatifs pour vous en tant qu’auteur et scénariste ?

    Jim : Je ne crois pas qu’il y ait eu de lien. Il eut fallu que ce soit une tempête au box office pour parler de changement, mais là il n’y a pas eu de tempête.

     

    IC : Quels sont vos projets côté cinéma ?

    Jim : « Une Nuit à Rome » est toujours dans les tuyaux, « L’érection » aussi. « Détox » aussi. Et je travaille sur deux scénarios, dont un en tournage, « Belle Enfant ». Ce sera mon premier film, et c’est une très belle aventure. Mais même en le tournant, je n’en dirai pas plus, tant que ce n’est pas fini. La prudence reste de mise, pas d’effet d’annonce. Juste le nez à hauteur du guidon, et nous travaillons avec l’équipe.

     

    IC : Côté BD, vous avez démarré un projet avec Antonin Gallo : « Détox ». Le tome 1 est sorti en 2019, le tome 2 cette année. L’histoire de Mathias d’Ogremont, un chef d’entreprise hyper actif qui part pour une cure de désintox, sans smartphone ni connexion.

    Jim : Inspiré par mon ami Christian, qui a vécu un stage détox. Il y avait deux solutions, le suivre et aller vivre un stage détox pour essayer d’approcher ces sensations, ou… faire deux albums de son expérience, et me l’approprier en restant tranquillement chez moi (Rires). C’est aussi la découverte du travail avec Antonin Gallo, qui a été un magnifique partenaire sur ces deux albums.

     

    IC : Est-ce que c’est facile de passer à autre chose, ou bien Marie restera t-elle toujours présente dans votre vie finalement ?

    Jim : Je travaille beaucoup sur « Belle Enfant », et c’est donc très facile de passer à autre chose. Mon souci actuel est que le film me prend tout mon temps, et m’empêche de me relancer dans un autre projet BD (hormis « L’étreinte », un projet que nous travaillons avec Laurent Bonneau au dessin).

     

     

     

    IC : Peut-on dire que Marie, c’est LA deuxième grande rencontre de votre vie ?

    Jim : On peut le dire, même si c’est un peu sentencieux, non ? C’est une création, un personnage de papier… mais il est clair qu’il y a un avant et un après sa création… mais j’espère bien faire de nouvelles belles rencontres de papier prochainement… !

     

    IC : « Raphaël et Marie vont beaucoup me manquer »  commente Arnaud V. Certains fans réclament, non pas une suite, mais un prologue : un cycle qui raconterait les jeunes années d’étudiants aux Beaux-Arts de Marie et Raphaël.

    Jim : Si j’écoutais les fans, je ferais une suite, c’est ce qu’ils me demandent en dédicace… L’idée de leur rencontre à vingt ans, c’est plutôt une idée perso. Comme un pied de nez, une façon de ne plus avoir à dessiner Marie âgée. On a ce pouvoir, donner à vivre des personnages sans être prisonnier du temps, comme nous le sommes dans la réalité. Pourquoi s’en priver ? C’est surtout l’idée de parler de la jeunesse dans les années 80, 90, comme une sorte de manifeste anti-nostalgie. Je ne pense pas que c’était mieux avant, j’aime les téléphones, j’aime qu’on puisse filmer en 4K, avoir des GPS pour se retrouver, des ordinateurs…

     

    IC : Quelle est la question qu’on ne vous a jamais posée en interview et à laquelle pourtant vous auriez plaisir à répondre ?

    Jim : Je crois bien que ce n’est pas celle-ci, et j’avais dû essayer de m’en tirer également par une pirouette (Rires).

     

    IC : Et pour finir, comment imaginez vous la suite ?

    Jim : La suite en général ? C’est compliqué comme question. J’aimerais surtout garder le goût d’inventer des histoires, que ça ne me quitte pas. Que le plaisir soit toujours là, ce plaisir amateur de tester des choses. C’est curieux, c’est comme si certaines personnes savaient profiter de la vie, de l’instant présent… et d’autres la regardent, un petit pas à côté, se disant que la raconter, ou s’en inspirer, ça peut donner des choses insensées…

    En avançant en âge, le nombre de livres à faire diminue. Trop de livres à écrire et si peu de temps à venir… Longtemps, je suis parti comme un chien fou : une idée m’amusait, je la développais en BD. Maintenant, je vais faire encore quoi ? Dix ? Vingt livres ? Une part d’innocence a disparu, je n’ai plus envie de partir comme un chien fou sur un livre qui prendrait la place d’un autre…

    J’aimerais aller vers des récits qui touchent vraiment les gens, aller plus droit vers l’intime, les ressentis importants, ceux qu’on tait… Je suppose que ce sont des questionnements qui touchent tous les quinquas, aller à l’essentiel. On commence à être chatouillés par l’urgence… J’ai le sentiment d’avoir une chance folle, je fais des projets qui me plaisent, et j’ai la chance d’avoir des lecteurs qui me renvoient beaucoup en retour. Si ça peut juste continuer…

    J’aimerais arriver à un 50/50 BD et Ciné, est-ce que ce sera le cas ? Je ne sais pas. J’y travaille, mais comme dit le petit sage vert : « difficile à prévoir… Sans cesse en mouvement est l’avenir… ». Alors on fait ce qu’on a à faire et on attend. Et on verra bien.

     

    Jim c’est aussi :
    Un cœur qui bat…

    Des livres coups de cœur :
    Je lis soit des livres de développement personnel, soit des livres de cinéastes ou d’acteurs…

    Des sons coups de cœur :
    Boum-boum, boum-boum.

    Des films coups de cœur :
    « Juste un Baiser », encore et toujours. Et la série « Succession », pur bonheur. Et tellement d’autres !

    Un apéro coup de cœur :
    Le prochain…

    Un plat coup de cœur :
    À huit ans, mon cousin Laurent, du haut du plongeoir. Une belle envolée pourtant, on y croyait tous très fort. Et puis plaf. Le ventre a tout pris. Il est ressorti de la piscine mort de rire, et je crois que ça reste le meilleur plat qu’il m’ait été donné d’apprécier. Avis de fin gourmet…

     

    Propos recueillis par Anne Feffer

    Photos utilisées dans l’article avec l’aimable autorisation de © Jim Thierry Terrasson

     

     

     

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    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Bande Dessinée : Une Nuit à Rome (2012) » (24 juillet 2015)

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Jim, de la bande dessinée au cinéma » (05 septembre 2015)

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Jim, les coulisses de la création » (16 mai 2016)

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Michael Cohen, l’invitation » (19 mai 2016)

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « L’érection selon Jim » (02 juillet 2016)

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Ulysse Terrasson, un auteur plein de promesses » (26 mai 2016)

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Jim et Hubert Touzot, exposition croisée à la galerie Octopus » (14 décembre 2018)

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Ulysse Terrasson, l’interview Nuit à Rome » (30 juillet 2020)

     

     

     

  • Lee et Jackie : élevées pour être riches

     

     

    Lee Radziwill est décédée le 19 février 2019 à New-York, il y a un peu plus d’un an, à l’âge de 85 ans. Qui ça ? Caroline Lee Radziwill, ou encore Caroline Bouvier. Ce nom-là vous dit-il quelque chose ? Bouvier n’est-il pas le nom d’une certaine Jacqueline, aussi appelée Jackie Bouvier, alias Jackie Kennedy, alias Jackie Onassis ? Caroline était sa sœur. C’était également le prénom de sa fille.

     

    Caroline (1933), de son vrai nom Bouvier, est née quatre ans après sa sœur ainée Jacqueline (1929). Toutes deux portent un nom de famille composé : Lee Bouvier. Lee étant le nom de leur maman, Janet Norton Lee, elle-même fille de James Thomas Lee, un immigrant irlandais ayant quitté l’Irlande au XIXe siècle et devenu avocat.

     

    Crédits : © John F. Kennedy Presidential Library and Museum, Boston

     

     

    Janet Norton Lee et ses deux filles, Jacqueline et Caroline

    Toutes deux ont vécu un chemin de vie parallèle, qui n’est pas sans rappeler celui des frères Kennedy, pour lesquels les journalistes avaient parlé de « malédiction des Kennedy ». 

    ✓ L’une s’est mariée avec un prince : Stanislaw Albrecht Radziwill, d’origine polonaise. L’autre avec un président : John Kennedy.

    ✓ Toutes deux se sont mariées trois fois.

    ✓ Toutes deux ont eu deux enfants : un garçon d’abord, puis une fille (Anthony et Anna – John Jr et Caroline), nés les mêmes mois : novembre (Anna et John Jr) et août ( Anthony et Caroline)

    ✓ Leur fils est mort le même année à un mois d’intervalle : John Jr Kennedy meurt le 16 juillet 1999 d’un accident d’avion. Anthony Rasziwill décèdera un mois plus tard, le 10 août 1999 d’un cancer. L’un avait 39 ans, l’autre 40 ans. 

     

    Crédits : © Andy Warhol

     

     

    Outre leur parcours familial très similaire, ce que l’on sait moins, c’est que toutes les deux ont eu également le même amant : l’armateur grec Aristote Onassis. Lee fut la première à rencontrer le riche homme d’affaires au printemps de l’année 1963, cette même année où John Kennedy fut assassiné à Dallas. Onassis avait offert au mari de Lee le poste de directeur de sa compagnie d’aviation. Puis il était devenu l’amant de Lee. Souhaitait-il déjà à l’époque se rapprocher de la Maison Blanche ?

    Malgré la réputation sulfureuse d’Onassis, qui pourrait nuire à la prochaine campagne présidentielle de JFK, Jackie Kennedy accepte d’accompagner sa sœur sur son yacht en octobre de la même année. Des photos volées ayant été prises, le président détourne alors l’attention du public américain en permettant un reportage sur les enfants de la Maison-Blanche, qui présente la célèbre photographie avec son fils jouant sous son bureau.

    Onassis avait promis à Lee de l’épouser, c’est finalement avec sa sœur qu’il se mariera. En 1968 a lieu le remariage de Jackie avec Onassis, que Lee Radziwill vit comme un outrage. Pour la calmer, Onassis lui offre alors une propriété à Athènes, qu’elle revend aussitôt.

    Depuis leur plus jeune âge, les deux sœurs avaient été conditionnées par leur mère pour épouser un homme riche et en vue, ce qui leur vaudra d’être surnommées « les Geishas » par Truman Capote. C’est en effet de Lee Radziwill que le réalisateur s’est inspiré pour son personnage de Holly Golightly dans « Diamants sur Canapé » avec Audrey Hepburn. 

     

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Lee Radziwill, la soeur rivale de Jackie Kennedy » (Figaro Madame, 18 février 2019)

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Jackie, Janet et Lee » (J. Randy Taraborrelli, Ed. Saint Martin’s Press, 30 janvier 2018)

     

     

     

  • Ulysse Terrasson : L’Interview « Nuit à Rome »

     

     

    Ulysse Terrasson vient de publier son second livre. Il s’agit d’une adaptation de la BD « Une Nuit à Rome », réalisée par son père, Jim, dont le tome 4 vient de paraître chez Bamboo Eds.

     

    On retrouve avec bonheur l’auteur de « Plein de Promesses », sorti en 2018, et son style à la sensibilité toute particulière, fait de chapitres courts et de formules poétiques, comme autant de concentrés d’humour, de tendresse et de douceur. Car Ulysse Terrasson est talentueux dans l’art d’exprimer l’intimité de ses personnages. Celui de Sophia en est la pleine illustration. L’auteur sait comme nul autre pareil amener le lecteur à comprendre de l’intérieur les agissements de ses personnages. Il ne décrit pas des faits. Il n’est pas dans l’histoire événementielle, cette forme d’histoire qui articule la narration et l’événement. Il s’agit d’une histoire qui se ressent et d’une narration qui se devine à travers l’intériorité des protagonistes.

    L’exercice d’adaptation est peu confortable et plutôt glissant. Un travail d’équilibriste entre la trame narrative, impossible à contourner, et le besoin de développer l’univers intime des personnages.

    Instant City a pris plaisir à retrouver cet auteur attachant pour une nouvelle interview très riche. Des retrouvailles après deux années trop longues à notre goût. Le temps qu’il aura fallu à ce jeune écrivain de 25 ans pour nous offrir de nouveaux moments de grâce par l’exploration d’autres personnages, avec ce don qu’a Ulysse Terrasson de nous faire voyager dans l’intériorité d’hommes et de femmes qui parfois nous ressemblent, parfois non.

     

    IC : Votre premier livre « Plein de Promesses » est paru il y a deux ans. Quel est le bilan de la sortie de votre premier livre ?

    UT : J’en garde le souvenir d’une expérience incroyable. On est toujours très heureux et très fier de voir son premier roman publié. Les ventes ont dépassé mes espérances. Bien que je ne m’intéresse pas tant que ça aux chiffres, mais plus à l’écriture et au travail en lui-même, c’est dingue de se dire qu’autant de gens ont acheté et lu le livre. J’ai reçu de nombreux retours positifs. « Plein de Promesses » est en quelque sorte devenu mon CV : je l’ai donné comme on donne une carte de visite. Cela m’a permis d’approcher les artistes que je chéris. C’était magique. Un livre, c’est beaucoup de travail, de patience, d’investissement, mais à la fin ça devient un produit dans une librairie et, si on a de la chance, un tremplin pour en écrire d’autres.

     

    IC : Que s’est-il passé durant ces deux années ?

    UT : J’ai déménagé à Paris avec mon amoureuse. J’ai fait des petits boulots. Je ne sais pas, j’ai joué au bowling… (Rires). Et puis, surtout, j’ai écrit. Beaucoup. Des nouvelles. De nombreuses nouvelles. L’intention n’était pas de publier, mais de découvrir, d’apprendre, d’expérimenter de nouvelles techniques d’écriture. Parallèlement à cela, j’ai démarré un gros projet dont la réalisation va nécessiter trois ou quatre ans de mise en place. Alors quand l’éditeur d’« Une Nuit à Rome » m’a contacté pour savoir si cela m’intéresserait d’écrire l’adaptation de la BD en roman, j’y ai vu l’occasion de faire une pause.

     

    IC : Justement, comment l’idée de cette collaboration père-fils est-elle née ?

    UT : Le tome 3 de la BD venait de sortir. Bamboo, l’éditeur, et mon père, l’auteur, voulaient faire un événement autour de cette fin de cycle : une adaptation au cinéma et un roman. Ils ont pensé à moi et j’ai accepté. C’est une histoire que je chéris depuis toujours. J’ai vu mon papa travailler dessus lorsque j’étais tout jeune adolescent. J’ai vu les planches, les doutes, j’ai parfois posé pour l’aider à dessiner certaines silhouettes. Bref, c’est devenu une histoire de famille : mon père s’occupe du scénario et des dessins, ma mère des couleurs, le fils du roman. Question : qu’est-ce que ma sœur attend pour y apporter son grain de sel ? (Rires). Au-delà de ça, les thèmes développés dans « Une Nuit à Rome » me touchent particulièrement : la nostalgie de la jeunesse, la difficulté d’être adulte. Le travail, la famille, l’amour : toutes les histoires tournent plus ou moins autour de ces trois sujets.

     

    IC : Le thème du père était déjà très présent dans votre premier ouvrage. Il revient sur le devant de la scène, avec cette adaptation faite par son fils.

    UT : Oui. Le thème du père était déjà, comme vous l’avez souligné, très présent dans mon premier roman. Parce que c’est un thème très présent dans la littérature : je pense à John Fante, je pense à « L’Odyssée », je pense à « Star Wars ». Ou parce que le cordon ombilical est difficile à couper… (Rires) J’ai la chance d’être le fils d’un artiste que j’admire. Alors, pourquoi me priver d’une telle collaboration ?

     

    IC : Quelle est la différence entre la BD et le roman ? Les lecteurs de la BD vont-ils retrouver dans le roman la même histoire, les mêmes textes ?

    UT : J’espère que oui. À vrai dire, j’ai essayé d’écrire deux romans en un : un pour ceux qui ont déjà lu la BD avant, un pour ceux qui ne l’ont jamais lue. Ce qui m’a intéressé, c’était de permettre à la première catégorie de lecteurs d’entrer dans la tête des personnages, d’en savoir un peu plus sur eux, d’apprendre à mieux les connaître ou, du moins, à les connaître différemment. Et puis, pour la seconde catégorie de lecteurs, de proposer un roman tout ce qu’il y a de plus indépendant. Une histoire, des personnages, des phrases… Un roman, quoi !

     

    IC : Comment avez-vous articulé texte original et roman ? Quelle est la part du texte issu de la BD et celle issue de votre propre créativité ?

    UT : Il a fallu avant tout faire preuve de méthodologie. L’avantage était que je connaissais la BD par cœur. Si « Plein de Promesses » était construit sur la base d’une série, avec tout un tas de petites unités, pour « Une Nuit à Rome », la base était davantage cinématographique. Il y avait un début, un milieu, une fin. Il y avait des exigences narratives. D’abord, j’ai retapé tous les dialogues sur mon ordinateur : en termes de volume de texte, ça faisait déjà un petit roman. Ensuite, j’ai découpé le texte en chapitres. J’ai établi un plan de l’histoire, scindé ses étapes, assimilé comment l’œuvre était construite. Je me suis arraché les cheveux. J’ai rajouté des choses, j’en ai supprimé d’autres. J’ai douté, j’ai arrêté de douter. Finalement, j’ai terminé. Si le roman s’inspire de la BD, je refusais d’en faire un simple copier/coller. Je pensais à Abdellatif Kechiche et à Ghalya Lacroix, absorbant le roman graphique de Julie Maroh, « Le bleu est une couleur chaude », pour en faire leur scénario de « La Vie d’Adèle ».

    Il y avait trois challenges à réussir, en gros. Le premier, c’était de traduire en langage romanesque ce qui forme l’essence du roman graphique : l’aspect visuel. Par exemple, au début de la BD, il y a chez Raphaël une peinture accrochée à un mur. Cette toile est censée dire son époque aux Beaux-Arts. Cette toile m’a beaucoup embêté, au début. Et puis, j’ai eu l’idée de cette boîte rangée dans un placard, remplie de son ancien matériel à peinture, en souvenir du passé, au cas où. Et paf, c’est devenu une idée littéraire, comme ça. Le second, c’était de faire en sorte que le lecteur s’attache à l’intimité des personnages, s’attarde sur leur intériorité, et en découvre quelque chose de nouveau, quelque chose de plus que dans la BD, parce que sinon à quoi bon en faire un roman ? Le troisième, enfin, c’était de réussir à jongler entre l’histoire, la vraie narration pure et dure qui n’a jamais été mon fort, et mes petites digressions, ces moments d’intimité ajoutés, durant lesquels on entre dans la tête des personnages, ce qui parfois ralentit l’action.

     

    IC : Certains lecteurs pourraient ressentir une rupture de style parfois, entre des chapitres plus narratifs et d’autres plus introspectifs. Les premiers plutôt liés à la BD et les seconds venant de vous. On sent selon les chapitres deux univers dans un même roman, deux écritures et deux sensibilités : la vôtre et celle de votre père.

    UT : Ah merde, pourtant je voulais qu’il n’y ait qu’un seul souffle… Mais c’est possible. Il y a deux écritures dans ce roman, même si j’ai essayé de n’en faire qu’une, comme on peut dire grosso modo qu’il y a deux styles d’écriture : l’écriture à l’américaine, dans laquelle on se focalise sur l’histoire, dont l’objectif est de pousser le lecteur à tourner la page, et l’écriture à la française, où ce sont plus les mots qui sont mis en avant, les petites phrases, les détails du quotidien… On ne lit pas vraiment Proust pour le scénario. (Rires)

    C’est dans ce cadre que nous avons élaboré le projet du roman « Une Nuit à Rome ». Parce que mon père a proposé dans sa BD une histoire visuelle, dont les dessins traduisent la sensualité, j’étais dès le début face à un obstacle : il m’était matériellement impossible de montrer le corps de Marie à chaque page – d’autant plus que je ne suis pas un grand fan des descriptions. Là où dans la BD mon père montre le côté femme fatale de Marie, mystérieuse et inaccessible, belle, je me suis dans le roman plus intéressé à l’intériorité de Raphaël face à elle, ce qu’il voit, ce qu’il croit comprendre et ce qu’il ne comprend pas. J’ai voulu raconter cette histoire autrement. Certains m’ont fait la réflexion, d’ailleurs. On m’a fait remarquer que la sensualité de Marie ressortait moins dans le roman que dans la BD. C’était un risque, qui découle du choix de me concentrer sur les sentiments des personnages. De m’intéresser moins au corps de Marie, mais à ce qui se passe dedans. D’exprimer sa vérité avec des mots, des détails, d’entrer dans sa tête, de pointer du doigt ce qui exprime son émotion, de l’humaniser en somme. J’ai voulu la montrer autrement.

     

    IC : Quelle a été votre moteur pour l’écriture de ce roman ?

    UT : Je me souviens que, quand j’étais petit, j’aimais beaucoup les romans « Star Wars ». Les films, je les connaissais par cœur, et pourtant j’aimais lire les romans ensuite. Mais pourquoi ? Je n’avais vraiment pas mieux à faire ? Qu’est-ce que je trouvais aux romans que je n’avais pas dans les films ? Je pense que c’est ça qui a été le plus fort moteur pour l’écriture de ce livre : redécouvrir l’histoire, à travers un angle différent. Le cinéma et le roman proposent deux expériences différentes : au cinéma, on reçoit le film d’un coup, dans sa globalité, alors qu’un livre, on le picore, un chapitre après l’autre ; finalement, c’est assez rare de le gober d’une traite. Dans une salle de cinéma, je ne fais pas de pause, je suis emporté dans le flot de l’action, de l’histoire, les images défilent sans me laisser le temps de souffler. Mais dans un bouquin, rien qu’en changeant de chapitre, je fais un break. Je me pose la question de continuer ou non. Devant un film, il n’y a que le film ; devant un livre, il y a moi et il y a le livre. C’est une expérience différente ; c’est une relation différente, même. Et j’aime ça. Et c’est pourquoi les novellisations se doivent de n’être pas tout à fait pareilles aux films « Star Wars », à la BD « Une Nuit à Rome ». J’ai fini par comprendre qu’il fallait traduire l’expérience d’un medium à travers les outils de l’autre. Et c’est ce que j’ai essayé de faire.

     

    IC : Quel est le personnage qui vous a le plus inspiré ?

    UT : Indéniablement, Sophia. C’est un personnage assez peu développé dans la BD, et pourtant je l’aime beaucoup, elle m’émeut profondément. D’ailleurs, le passage que je préfère dans le roman est celui où – spoiler alert – le train arrive à Fignac, Raphaël l’a laissée tomber, elle est seule avec son chat, et elle remarque son père qui l’attend sur le quai de gare, et… et stop : pour savoir ce qui s’y passe, lisez le livre ! (Rires)

     

    IC : Autant Marie est attachante dans la BD car elle est très belle, autant dans le roman elle apparaît plus comme une diva capricieuse et inconséquente. Est-ce comme cela que vous l’avez abordée ?

    UT : Pas du tout. Pour moi, Marie est un personnage en perdition, qui a besoin d’aide. J’ai de la compassion pour elle parce qu’elle ne sait pas très bien ce qu’elle fait. Je crois que Marie est le genre de personne qui, depuis son enfance, a toujours entendu et vu les gens s’extasier sur elle à cause de sa beauté. Elle a reçu tous les suffrages, toutes les attentions, mais parce qu’elle est belle. Et c’est terrible. Marie me touche parce qu’elle vit un genre de tragédie. Comment se défaire du « tu me plais parce que tu es jolie » ? Comment être plus que ça aux yeux des autres ? Prenons le début de l’histoire, par exemple. Elle se tient en haut d’une falaise et elle se jette dans l’océan. Mais pour quoi faire ? Pour en finir ? Pour fracasser sa beauté, ainsi se venger ? Pour ressusciter ? Mystère et boule de gomme… Selon moi, Marie n’est pas une diva capricieuse et inconséquente, c’est un être humain avec des failles, des regrets et de la peur. De la peur, surtout : la peur de vieillir. Et cette peur-là, je crois, c’est le fondement d’« Une Nuit à Rome ».

     

    IC : Une nuit à Rome pourrait donc être perçu comme un roman sur la crise de la quarantaine ?

    UT : Carrément ! (Rires) Marie et Raphaël se sont rencontrés à l’école des Beaux-Arts. Tous deux rêvaient d’être artistes. Marie est celle qui est restée la plus proche de ce rêve : elle est prof dans le milieu qu’elle affectionnait plus jeune. Raphaël, lui, est maintenant dans l’immobilier : il vend des appartements. Voilà grosso modo la situation initiale. Et puis, BAM ! Ils se retrouvent face à un choix : continuer leur vie normalement, avec tout ce que cela compte de routine, de pilotage automatique ; ou s’en aller, partir, et peut-être retrouver les anciennes sensations, la bouteille de rosé, la jeunesse perdue, le sexe sans l’habitude, les nuits blanches… C’est un choix d’autant plus difficile que, s’ils ont la nostalgie de leurs vingt ans, ils ont surtout quarante ans bientôt. Ils ont des vies bien engagées. Ils comprennent que ça va être tout le temps un peu ça. Que les surprises ont été remplacées par les responsabilités. Et ils ont peur. Et c’est ça, cette crise, qui est le thème central d’« Une Nuit à Rome ». Cette impression d’inachevé.

     

    Interview par Anne Feffer

    © Photo Ulysse Terrasson : Manon Caré

    © Photo à la Une avec l’aimable autorisation de Jim Thierry Terrasson

     

     

     

     

  • Histoire d’un Hit : « Der Kommissar » de Falco (1982)

     

     

    1982. Johann Hölzel a 25 ans. Né à Vienne en Autriche, il sort son premier album solo « The Einzelhaft » (le mitard). Celui-ci compte dix chansons, parmi lesquelles « Der Kommissar », le second morceau de la tracklist.

     

    Durant 3 minutes 52, Falco parle de drogue, de rap, de descentes de police, de dealers, de gangs et de murs tagués, le tout en allemand teinté d’un très fort accent autrichien, avec quelques mots et expressions anglaises ou italiennes. Un vrai charabia… Et pourtant ! Très vite, « Der Kommissar » sort en single et grimpe jusqu’à la première place en Autriche avant de passer les frontières pour atteindre la France. En quelques mois, il gagne le Royaume-Uni, franchit l’Atlantique et en mars 1983 se positionne en tête des charts aux Etats-Unis.

    Du jamais vu ! « Der Kommissar » fait le tour de la planète et devient un succès international. Inspiré par la new-wave et le rap américain, le morceau se vend à plus de 7 millions d’exemplaires dont 1 million en France, où la chanson est reprise en français sous le titre « Clair commissaire » par Matthew Gonder. Surnommé « le premier rappeur blanc », Falco est aussi le premier à aligner un titre en allemand au classement du Billboard et le seul germanophone à avoir été n°1 aux Etats-Unis. Une légende.

    Falco (en hommage au skieur sauteur à ski Falko Weisspflog, médaille de bronze aux championnats du monde épreuve grand tremplin en 1978) sortira un second album en 1984 qui fera un flop, puis un troisième en 1986, « Rock me Amadeus » qui sera à nouveau un grand succès, numéro 1 du Hit-Parade aux USA pendant trois semaines. Il décède à 40 ans dans un accident de voiture en République Dominicaine, percuté par un bus. Le film « Verdammt wir leben noch » auquel participe Grace Jones, retrace sa vie et sa carrière fulgurante et incroyable.

    A noter également que Falco compte parmi ses fans les plus inconditionnels le groupe Metallica qui reprend certains de ses titres assez régulièrement en concert…

     

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    Music video by Falco performing Der Kommissar (Original Video)

    © 1982 GIG Records, Markus Spiegel Ges.m.b.H.,Vienna, Austria

     

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    Music video by Falco performing Der Kommissar (U.S. Official Video)

    (C) 1982 GIG Records, Markus Spiegel Ges.m.b.H.,Vienna, Austria

     

     

     

     

     

  • Insiders : une saga haletante en 10 volumes

     

     

    « Insiders » – Bartoll (scénario) + Garreta (dessin) – 10 tomes – Editions Dargaud – 2002/2011

     

    Un Conseil qui comprend tous les membres mafieux du monde et dirige la planète en sous-terrain. Des gouvernements corrompus et marionnettes. Deux présidents en quête de vérité et une femme, agent spécial, prête à devenir le bras armé de cette vérité.

     

    Avec la saga « Insiders »,  on est dans la BD d’action, entre espionnage et guerre, politique et mafia. Le texte est extrêmement dense, ainsi que le scénario qui demande beaucoup de concentration au départ pour entrer dans l’intrigue. On aimerait que les dessins soient plus lents, avec davantage de gros plans et moins de plans larges ou panoramiques qui passent trop rapidement d’un instant à un autre sans prendre le temps de souffler ou d’apprécier le détail, ou encore de réfléchir davantage à une situation donnée avec plus de zooms.

    On trouve dans certaines planches, des cartouches avec des informations réelles : le scénario est présenté comme une œuvre de fiction, mais plusieurs références renvoient à des faits ou des instances réelles qui donnent envie au lecteur d’aller y voir de plus près et de faire quelques recherches sur le net pour vérifier les informations. On sent derrière l’histoire à grosses ficelles, des parcelles de vérité glissées entre les vignettes.

    On est entre « XII » et « Mission Impossible » version féminine. En première lecture, on a du mal à croire à cet agent à qui tout réussit, façon James Bond. Mais en seconde lecture, on est happé petit à petit par le texte, le contexte et les références un peu mystérieuses et complotistes. On sent l’influence journalistique de l’ancien grand reporter qui en a vu de belles et le laisse entendre en décryptant des rouages secrets visibles à travers certains grands événements du monde.  Dans la série « plus c’est gros, plus ça passe », de l’Afrique à l’Afghanistan, puis de la Russie à la Chine, on se laisse entraîner dans cette grande saga de 10 volumes sur les pas de Najah.

    Jean-Claude Bartoll est espagnol. Il est né en 1962 (57 ans). C’est un ancien grand reporter qui a travaillé pour des agences de presse internationales. Renaud Garreta (54 ans) est diplômé de l’Ecole Supérieure d’Arts Graphiques, auteur de la trilogie « Fox One » et de la série « Le Maître de Benson Gate » avec Fabien Nury.

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Insiders @ Editions Dargaud

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Insiders @ Humanoïdes Associés

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Interview de Renaud Garreta

     

     

     

  • Silence Plateau | Fargo (Policier, 1996)

     

     

    Au premier abord, Fargo, des frères Coen, est un film de série B complètement idiot, et ennuyeux au possible. Un vendeur de voiture financièrement aux abois fait appel à deux malfrats de seconde zone pour kidnapper sa femme, et demander une rançon à son riche beau-père. Ça, c’est le premier degré…

     

    Et puis on se dit que si « Fargo » fait probablement partie des cent meilleurs films de tous les temps, c’est sans doute qu’il y a une raison. Alors on se force à persévérer. Et en effet, on prend conscience que ce film est un petit bijou :  un vrai « exercice de style ». Le style Coen… Des personnages on ne peut plus ordinaires, plutôt loosers, sortis du fin fond du Minnesota, un déclencheur (ici, le kidnapping) qui tourne au fiasco, des psychopathes décérébrés, et un paysage d’horizons enneigés qui s’étendent à l’infini.

    Les frères Coen partent d’un fait divers, à la fois horrible et très banal. Grâce à un comique de situation fait de décalage, à la fois dans les personnages (une enquêtrice enceinte jusqu’au cou), comme dans les situations qui dégénèrent (la scène de kidnapping), ou dans les dialogues (dont on se demande « mais qu’est-ce que ça vient faire là ? », au beau milieu d’une scène dramatique), ils arrivent à transformer le pitoyable en jouissif.

    En fin de parcours, on comprend le génie des frères Coen : génie de création, pour l’imagination de chacune des scènes construites comme des sketchs humoristiques, génie des dialogues, dont l’absurdité et le décalage face à la situation nous coupe le souffle, génie du jeu d’acteurs, qui parlent et agissent avec placidité dans une situation pourtant stressante, génie de direction photo avec des plans images époustouflants, génie de la BO enfin, avec une musique efficace de Carter Burwell, fidèle parmi les fidèles.

    Face à tant de bêtise, « aurez-vous le courage d’en rire » ? C’est le message de l’affiche du film, et toute la philosophie du cinéma des frères Coen.

     

    Instant-City-Fargo-02

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Liens externes » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Ciné Cinéma Facebook

     

     

     

  • Berceuse Assassine : sous le bitume, la terre des Indiens

     

     

    « Berceuse Assassine » de Philippe Tome (scénario) et Ralph Meyer (dessins)

    ☯ Série en 3 tomes – 2001 – Dargaud – Edition intégrale en 2008

     

    La couverture est jaune-orangée, comme les dessins d’indiens qui se mêlent aux trottoirs de la ville et de ses buildings, pour prendre racine dans la terre des ancêtres, sous le bitume des blancs.

     

    « Berceuse Assassine » est la chronique d’un couple déchiré qui s’aime mais ne se supporte plus. Martha est en fauteuil roulant, Telenko est chauffeur de taxi. L’histoire prend tout son sens au volume 3 avec l’apparition de Dillon. C’est, me semble-t-il, le meilleur des trois volumes. Il apporte profondeur et poésie à l’ensemble de l’oeuvre et touche le lecteur.

    Les dessins cuivrés aux tons ocres, jaunes, bruns, noirs, sépias, sont parfaits pour le scénario et l’on se réjouit de la rencontre entre Tome et Meyer qui fonctionne à merveille. Les planches du tome 3 devant et autour de la maison de Dillon sont fabuleuses. L’idée des ces serpents orangés qui s’entremêlent à l’urbain est forte. L’amitié dans le zoo autour de ces animaux autrefois sauvages est très émouvante.

    Et si la BD fonctionne si bien, c’est qu’elle allie un scénario fouillé plein de rebondissements à la qualité des dessins. Chaque volume apporte à l’histoire le point de vue d’un des personnages : chacun, l’un après l’autre, justifie la situation par un vécu tout à fait personnel, inavouable, portant le poids de la souffrance non-dite, de la solitude, de l’emprisonnement intérieur.

    Une soirée tragique, trois angles de vue, trois histoires différentes mais imbriquées et l’analyse des sentiments humains qui prend toute sa mesure au tome 3 au cours duquel toutes les croyances vont être remises en perspective à la lumière de révélations bouleversantes.

     

    Berceuse Assassine Edition Intégrale

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Berceuse Assassine @ Bédéthèque

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Editions Dargaud

     

     

     

  • Les stations de Métro fantômes réhabilitées

     

     

    C’est un projet original : réhabiliter les vieilles stations de Métro abandonnées en salles de spectacle, lieux d’exposition, piscine, boite de nuit, restaurants…

     

    Certaines stations ont été abandonnées au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, d’autres ont été construites mais n’ont jamais accueilli aucun voyageur, d’autres enfin servent de centres de formation pour les techniciens de la RATP. Quatorze stations sont ainsi concernées. Un jeune architecte parisien, Manal Rachdi, a imaginé ce que pourraient être ces stations New-Age. Avec Nicolas Laisné, ils ont revisité la station Arsenal et ont mis en image le résultat de leurs recherches.

    Contactée, la RATP n’a pas caché sa réticence à ce projet. Les stations de Métro fantômes vont sans doute alors le rester encore longtemps : squattées, dégradées, elles ne sont plus aux normes et nécessiteraient des investissements colossaux pour être réhabilitées. Actuellement, seuls les adeptes de l’exploration urbaine sillonnent les rails. Un autre projet, celui de la réhabilitation des tunnels de la  voie de chemin de fer de la petite ceinture propose aquariums, salles de cinéma et bars. Quant aux rails, ils pourraient céder leur place à des jardins potagers.

     

     

     

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] OXO Architectes

     

     

     

  • David Guetta : David avant Guetta…

     

     

    Né en 1967 à Paris du signe du Scorpion (51 ans cette année), platiniste et remixeur, David Guetta sort son premier single en 2001 (« Just a Little More Love ») suivi de l’album éponyme en 2002. Douze ans plus tard, il est le patron incontesté de l’électro pop.

     

    On trouve de nombreux articles dans la presse sur David Guetta. Mais très peu sur Pierre David… A Instant City, nous nous sommes interrogés : qui était Pierre David avant Guetta ?

    Né à Paris, il a grandi dans la capitale et y a fait la fête. Son papa est restaurateur. A treize ans, il est davantage attiré par l’univers électro que par l’ambiance punk. A la télévision, c’est l’époque de l’émission « Hip Hop » dans laquelle l’animateur Sydney invite des rappeurs à scratcher, popularisant ainsi une musique sans réel instrument : le scratching et le sampling.

    Il fait ses études de droit à la faculté de Nanterre Paris X mais c’est la musique qui va le happer. Il devient ainsi une des figures des nuits parisiennes. D’abord disc-jockey, il se lance dans des mix sets (enchaînements fluides de plusieurs musiques, généralement en fondu pour éviter les silences, pré-enregistrés et avec un calage de tempo pour garder un rythme uniforme).

    Le Troll, la Factory et le Broad, aux Halles, deviennent son terrain de jeu et sont les trois premières boîtes dans lesquelles il a mixé. A l’époque, c’est la House puis l’Acid House qui cartonnent et l’échantillonnage devient à la mode. On prend un extrait musical, un son, et on le réutilise en boucle dans une nouvelle composition musicale.

     

    « Quand j’ai commencé à paris, le DJ était anonyme, un moins que rien. Un jour, je suis allé à Londres, et j’ai vu que là-bas, où la musique house cartonnait déjà, toutes les lumières étaient braquées sur lui. J’ai investi toutes mes économies dans des disques d’électro et à mon retour, j’ai passé un marché avec les patrons de boîtes qui m’employaient : je renonce à mon cachet mais, en contrepartie, je fais ma propre programmation et ma propre promo », déclare-t-il dans une interview.

     

    Il mixe sur Radio Nova, au Palace, au Broad, aux Bains-Douches, à la Centrale, au Rex… Pierre David sympathise avec Kien, un directeur artistique freelance qui organise des soirées branchées et travaille aussi au Broad. Ils deviennent amis et s’associent. Le Broad devenant trop petit, c’est Kien qui propose à David que les soirée « Unity » se fassent au Rex Club dont il est le directeur artistique.

    Kien et Guetta multiplient les voyages à Londres, New-York et dans tous les grands clubs du monde pour voir ce qui se fait de mieux ailleurs. Ils importent des concepts en France et vendent leurs prestations aux plus grands clubs : le Rex, la Centrale ou le Boy, puis au Club Folies Pigalle en 1990 et au Queen sur les Champs-Elysées en 1992, dont il devient le directeur artistique.

    Il rencontre alors Cathy dans une boîte de nuit du Sud de la France. Elle est serveuse aux Bains-Douches. Il est timide et introverti. Ils se marient en 1992. La suite, nous la connaissons tous. David devient Guetta, mixe à Ibiza en 1996, puis dans des festivals internationaux avec sa soirée clef en main, « F**** Me I Am Famous », et le nom « Guetta » se décline désormais comme une marque sur une variété de supports, rendu célèbre grâce à son premier album « Just a Little More Love » sorti en 1991 et vendu à 250.000 exemplaires.

    Aujourd’hui, une soirée avec le patron mondial de l’électro pop (selon DJ Magazine) se négocie autour de 35.000 euros…