Auteur/autrice : Instant-Chris

  • 1979, l’année qui changea le monde, Episode 15 : Reggatta de Blanc

     

    [kleo_pin type= »circle » left= »yes » right= » » top= » » bottom= » »]          « FOCUS » : un article de fond sur un thème que nos rédacteurs ont sélectionné.

     

     

    L’année 1979 est définitivement une année-charnière, comme la fin d’un cycle. Elle scelle le sort des dernières utopies. Le monde prend une pelle et enterre à la hâte les cadavres encore fumants de nos illusions perdues. Après 1979, rien ne sera plus vraiment comme avant…

     

    Coincée à la fin d’une décennie qui paraît un peu creuse, durant laquelle les dirigeants politiques semblent manquer de charisme (le pâle Carter face au cowboy médiatique Reagan, VGE après De Gaulle et Pompidou), l’année 1979 n’attire décidément pas les flashes. Et pourtant… Que d’événements considérables ont eu lieu cette année-là, autant de tremblements qui ont marqué la face du monde et dont on ressent encore les répliques quarante ans plus tard.

    Révolution iranienne, arrivée de Saddam Hussein au pouvoir en Irak, début de la Guerre d’Afghanistan qui mènera à la chute de l’URSS et à l’apparition du terrorisme islamiste, second choc pétrolier et crise économique mondiale, paix entre Israël et l’Egypte, fin des Khmers Rouges… Il n’est pas insensé de penser que 1979 a en réalité été l’année la plus importante de l’après-Seconde Guerre Mondiale.

     

    Never Mind The People

    Du côté de l’Angleterre, l’arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher en mai 1979 laisse présager des lendemains bien douloureux. Le pays se débat en effet dans une crise économique et sociale terrible, ultime convulsion d’un monde en pleine mutation. Les usines et les mines de charbon ferment les unes après les autres, laissant sur le bord de la route deux générations de Britanniques, condamnés au chômage de masse et à une inéluctable paupérisation.

    « L’hiver du mécontentement », le roman de Thomas B. Reverdy, dont le nom a figuré sur la liste du Goncourt en 2015, a pour cadre cette Grande-Bretagne de 1978-1979, paralysée par des grèves monstrueuses qui vont finir par propulser à la tête du gouvernement une inconnue, Margaret Thatcher, femme inflexible.

    Le pays entre dans une nouvelle ère, celle des jeunes loups aux dents aiguisées, bientôt connectés à l’ensemble de la planète, sans morale, sans dieu, vénérant le fric plus que leur propre mère. Ils préparent la grande révolution à venir, celle qui n’a pas besoin de grand soir, de rêves romantiques, d’idéaux en stuc… Ils veulent prendre les commandes de la City, devenir banquiers, actionnaires, hommes d’affaires, assureurs, courtiers, avocats fiscalistes… Et les ouvriers qui crèvent dans leurs bâtiments de briques insalubres, ils s’en foutent, à vrai dire…

     

    « Le reste, on va le liquider. Privatisations, faillites en série, licenciements massifs. Ce sera les grands soldes d’hiver, avant changement de collection (…). Les chômeurs seront de plus en plus nombreux. Mais au moins, ils seront de droite. »

     

    C’est dans ce contexte que paraît l’album « Reggatta de Blanc » du groupe de rock britannique The Police. Sorti le 5 octobre 1979 chez A&M Records, ce disque, à l’image de la société anglaise qui entre dans une période de mutation profonde, va permettre au groupe de sortir de la mouvance punk dont il était encore peu de temps avant l’un des piliers, avec The Clash, en saupoudrant dans sa musique des ingrédients tels que reggae, world music, pop ou rock.

    Le gris bleuté de la pochette, avec ces trois blondinets qui fixent l’auditeur potentiel d’un regard glacial, en cette fin d’année 1979, ne laisse cependant pas présager un seul instant que ce jeune trio deviendrait, en un temps record, le groupe de rock le plus demandé, adulé et imité de la fin des 70’s. Tout juste un an après le succès de leur premier album, « Outlandos d’Amour », la bande à Sting a le vent en poupe et compte bien surfer sur l’immense succès des « Roxanne » et autres « Can’t Stand Losing You » qui continuent d’inonder les programmations radio.

    Avec ce deuxième opus, le trio anglais se doit donc de frapper un grand coup. Il reproduit ainsi la recette imparable du premier album, avec cependant de savantes petites retouches qui vont contribuer à propulser The Police au sommet des charts du monde entier. A commencer par « Message In The Bottle » ou « Walking On The Moon » qui contiennent tous les ingrédients de tubes planétaires, avec leurs mélodies immédiates, cette petite touche reggae et des arrangements qui s’affinent nettement.

     

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    Car cette année 1979 est définitivement l’année de l’explosion du reggae à l’international, marquant le virage radical d’un certains nombre de groupes, qui surfent sur la vague initiée par Bob Marley et son oeuvre ultime, « Survival ». Dans son sillage, donc, des albums majeurs vont venir ajouter leur petite pierre à l’édifice, rendant universel et planétaire le discours de la musique jamaïcaine : « Reggatta de Blanc » de Police, « London Calling » de Clash, « Aux Armes et Caetera » de Serge Gainsbourg ou encore le hit infaillible des Specials, « Gangsters »…

     

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    « Reggatta de Blanc » est un album qui étonne par son originalité, sa fraîcheur et le son minimaliste qu’il dégage. La singularité de Police réside aussi dans le fait qu’ils ont su créer une musique avec des espaces et des silences qui la rendent unique. Le son cristallin et aérien de la Fender d’Andy Summers est sans conteste la marque de fabrique du groupe. La frappe ravageuse, précise et opportuniste de Stewart Copeland pose les bases d’une rythmique carrée qui sous-tend l’ensemble.

    Ajouté à cela, un son travaillé, peaufiné et affiné par une multitude d’effets que maîtrise à la perfection le trio anglais et la basse ultra perfectionniste et inventive de Sting qui vient compléter cet assemblage délibérément rock. Mais pas que… Grâce aussi à un manager (Miles Copeland, le frère de Steward) redoutablement efficace, le trio va sortir une des plus innovantes et surprenantes galettes de l’histoire du rock, en cette fin des années 70. Il en résulte un album net, précis, efficace, dont vous ne ne pourrez pas écarter grand chose…

    Les Anglais ont vite appris de leurs erreurs et les corrigent dès leur second album, avec notamment moins d’approximation dans l’écriture, ce qui donne un disque plus homogène. C’est au détriment des titres les plus bruts et rock, puisque la musique de The Police se lisse sensiblement et l’aspect pop l’emporte désormais sur l’énergie brute, clef de voûte de l’exercice précédent. Si les influences reggae sont omniprésentes (« The Bed’s Too Big Without You », « Walking On The Moon »…), des sonorités électroniques apparaissent sur la popisante « Contact », alors que l’intro au piano de « Does Anyone Stare » installe une ambiance blues, nouvelle pour le groupe.

    Avec « Reggatta de Blanc », The Police fait son trou et est au sommet de son succès, à défaut d’être au sommet de son art, atteint en 1983 avec l’album ultime, « Synchronicity ». Mais ce disque défriche le terrain et assoit définitivement la popularité des Londoniens. L’ascension est fulgurante, comme le sera la carrière du groupe qui s’achèvera au bout de six ans et cinq albums. Il n’en faut pas plus pour écrire la légende du groupe et de ses membres, et inscrire « Reggatta de Blanc » dans la grande histoire du rock.

    En cette fin de la décennie 70, The Police ont certes acquis une certaine reconnaissance en France, avec leur premier opus « Outlandos d’Amour », mais c’est certainement leur passage live le 23 décembre 1979 sur la scène du Théâtre de l’Empire, dans le cadre de l’émission musicale Chorus, qui va établir définitivement la réputation du groupe. C’était donc il y a quarante ans et c’était bien…

     

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  • Antoine Holler, le blues dans la peau

     

     

    Découvert en première partie de Kool and the Gang ou encore James Hunter, Antoine Holler est un artiste rare formé sur les meilleures scènes de Chicago. Auteur-compositeur et interprète, il a collaboré avec de nombreux artistes, de Charles Pasi (Blue Note Records) à Lucky Peterson, en passant par Carla Bruni.

     

    Né à Paris, Antoine Holler commence à jouer de la guitare à 12 ans. Gamin, c’est le film « The Blues Brothers » qui sert de déclencheur. Au-delà des poursuites de voitures, il y découvre le blues et c’est un véritable choc. Ses références absolues sont BB King, Jimi Hendrix et Buddy Guy. A 18 ans, il décide de faire de la musique son métier et part à Chicago, aux racines mêmes de sa passion.

    Chicago, la ville qui concentre alors la crème du blues, des stars aux clubs mythiques… C’est là-bas qu’Antoine Holler va poser ses valises pendant un an, et se confronter à ce monde auquel il rêve tant d’appartenir. Il y est non seulement accueilli à bras ouverts et respecté, lui, le petit Frenchy sorti de nulle part, mais a la sensation étrange d’être « presque chez lui ».

     

    « Dans les années 90, il y avait ce phénomène des guitar heroes. Mark Knopfler, Eric Clapton, Slash… Et il se trouve que tous les musiciens que j’admirais étaient avant tout des guitaristes. »

     

    Avec son comparse Charles Pasi, Il partent à la découverte des clubs, là même où bat le coeur de la ville et où il feront leurs premières armes, en participant à tout ce que Chicago compte de jam sessions et de boeufs improvisés. Ils auront l’occasion de partager la scène avec de grands noms tels que Willie Kent, Melvin Taylor, Jimmy Burns ou Charlie Love.

    A son retour en France en 2005, Antoine Holler participe à la composition et l’enregistrement du premier album de Charles Pasi, « Mainly Blue ». Les dix titres de ce premier opus sont presque tous signés par les deux potes, et prouvent que le blues hexagonal recèle avec ces deux jeunes musiciens en devenir des auteurs-compositeurs au talent et à la fraîcheur indiscutables.

     

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    Après avoir accompagné Carla Bruni pendant deux ans, sur la tournée qui a suivi la sortie de son deuxième disque, « No Promises », Antoine Holler enregistre à son tour son premier album, « Love In Stereo » en 2009, désormais seul aux commandes. Et il faut reconnaître que ce disque est une bien agréable découverte, tant il nous réserve quelques belles surprises. Les compos, tout d’abord, car les dix titres proposés ici (+ l’interlude) sont signés par le chanteur / guitariste. C’est dire déjà la patte du bonhomme…

     

    « Ces deux années en tournée avec Carla Bruni ont été très formatrices, en tant que musicien accompagnateur, entre concerts et passages télé, mais ça m’a encore plus déterminé à mener à bien mon propre projet. »

     

    Côté couleur musicale, « Love In Stereo » est un opus teinté dans le bleu le plus pur, avec un mélange électro et acoustique du plus bel effet. Côté musiciens, l’épine dorsale est assurée par Jimi Sofo à la basse, Yoann Schmidt à la batterie et Fred Dupont aux claviers, renforcée sur plusieurs titres par l’excellent K-Led Bâ’ Sam à la slide sur « Introducing the Moon », le subtil et talentueux Damien Cornelis aux claviers sur « Love In Stereo », le Bass-Master Clive Govinden et… l’incontournable Charles Pasi à l’harmonica sur deux titres, « Money Won’t Bring You Pride » et « Easy Way, Easy Go ».

     

    « Côté jeu de guitare, Antoine Holler fait étalage de tout son talent sans en rajouter, restant dans la subtilité et la finesse, et sans jamais chercher à vous aligner de solos trop longuets, pour démontrer à ceux qui en douteraient qu’il maîtrise autant sa six cordes que les grands guitaristes qu’il admire. » (Frankie « Bluesy » Pfeiffer pour Blues Magazine)

     

    En 2014, Antoine Holler sort son Ep « No Regrets ». Un disque beaucoup plus marqué au sceau du folk et de la pop que son premier album, qui nous fait découvrir d’autres facettes de son talent. Son timbre de voix métissé et la sensibilité de son jeu de guitare vous transportent au travers de mélodies contagieuses et élégantes. Au croisement du jazz, du blues et de la soul, la musique d’Antoine Holler dépasse les frontières et les styles.

     

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  • Pierre Soulages fêtait ses cent ans le 24 décembre

     

     

    Pierre Soulages, un des plus grands artistes vivants, fêtait ses cent ans le 24 décembre 2019. Retour sur 80 ans de création, des brous de noix de ses premières oeuvres à l’Outrenoir, en passant par les fameux vitraux de l’abbatiale de Conques.

     

    Pierre Soulages fêtait donc son centième anniversaire ce mardi 24 décembre. Et le père de l’Outrenoir travaille toujours. Trois des œuvres exposées dans le cadre prestigieux de l’exposition-hommage du Louvre, qui a débuté le 11 décembre, ont d’ailleurs été peintes en 2019. Retour sur plus de 80 ans de carrière du plus grand artiste français vivant.

     

    « Enfant, je préférais tremper mes pinceaux dans l’encre noire plutôt que d’employer des couleurs. On m’a raconté que je faisais de grands traits noirs sur le papier, j’aurais répondu que je faisais de la neige », racontait Pierre Soulages en 2009, lors de la rétrospective organisée par le Centre Pompidou pour ses 90 ans. Il rendait ainsi le blanc du papier plus blanc en mettant du noir…

     

    Pierre Soulages a toujours aimé le noir : « Ce fut la couleur de mes vêtements dès que j’ai pu les choisir. Ma mère était outrée. Elle me disait : ‘Tu veux déjà porter mon deuil ? » », racontait-il à l’AFP en février dernier. Et c’est aussi en noir qu’il s’est marié en 1942 avec Colette, dont il partage la vie depuis 77 ans. En 1979, Pierre Soulages a commencé à ne mettre que du noir sur ses toiles, inventant ce qu’il a appelé l’Outrenoir, un autre « champ mental que le noir ».

     

     

     

    Le choc de Conques

    Pierre Soulages est né en 1919 à Rodez, dans l’Aveyron. Son père, un carrossier qui fabrique des charrettes, meurt alors qu’il n’a que sept ans. Il est élevé par sa mère et sa sœur plus âgée que lui. Enfant, il s’évade en fréquentant les artisans de son quartier. Il en gardera un goût pour les outils, utilisant des pinceaux de peintre en bâtiment ou fabriquant lui-même ses instruments.

    Lors d’un voyage de classe, il visite l’abbatiale romane de Conques (dont il créera les vitraux, bien des années plus tard), un choc esthétique qui décidera de sa carrière : « C’est (…) là, je peux le dire, que tout jeune, j’ai décidé que l’art serait la chose la plus importante de ma vie », disait-il dans un entretien à la Bibliothèque Nationale de France en 2001.

    Il peint régulièrement à partir de 1934 et monte à 18 ans à Paris pour préparer le concours de l’Ecole des Beaux-Arts. Il est admis mais il trouve l’enseignement médiocre et décide de retourner à Rodez.

    La période de la guerre est mouvementée : il est mobilisé en juin 1940, démobilisé début 1941, il étudie à l’Ecole des Beaux-Arts de Montpellier, puis travaille dans un vignoble sous une fausse identité pour échapper au travail obligatoire en Allemagne.

     

     

     

    Soulages, ce n’est pas que le noir

    La carrière de peintre de Pierre Soulages commence réellement quand il s’installe à Courbevoie, en banlieue parisienne, avec Colette, en 1946. D’emblée, ses œuvres sont abstraites. Il combine d’épaisses lignes verticales, horizontales, obliques, comme des idéogrammes. Il peint sur papier avec du brou de noix, sur des verres cassés avec du goudron.

    Au-delà de Conques, il a été impressionné par l’art pariétal, dans lequel il puise ses couleurs. Des couleurs sourdes, de l’ocre au noir en passant par le rouge ou des bruns plus ou moins intenses. Pierre Soulages a employé le brou de noix, le goudron, le noir de fumée, le noir d’ivoire, toutes matières organiques qui réfèrent à l’art de la préhistoire, aux premiers signes tracés à l’aide d’un morceau de charbon de bois dans l’obscurité des grottes. La peinture de Pierre Soulages dialogue avec la Peinture elle-même…

    A partir de 1951, Soulages pratique aussi la gravure, sur plaques de cuivre. Ses estampes de petite taille utilisent toutes ces couleurs, en contraste avec le noir. Il réalise plus tard des lithographies où il utilise des couleurs plus vives, rouge vermillon, jaune vif, bleu. Puis des sérigraphies (c’est une sérigraphie de Soulages qui est d’ailleurs utilisée pour l’affiche du festival d’Avignon en 1996). Sur papier, il peint des gouaches où il introduit des bleus intenses et lumineux.

    Dans ses peintures des années 1950-1970, il fait contraster des formes noires avec des fonds colorés, puis il fait apparaître les couleurs du fond en raclant le noir. Ou bien il fait contraster le noir avec le blanc.

     

     

     

    L’outrenoir : le noir et la lumière

    C’est en 1979 que Pierre Soulages invente le mythique Outrenoir et ces toiles, pour lesquelles il est le plus connu, où il n’utilise que le noir. En 2009, lors de la rétrospective du Centre Pompidou, il expliquait à l’historien de l’art Hans-Ulrich Obrist que l’Outrenoir est né alors qu’il était en train de « rater une toile. Un grand barbouillis noir ». Déçu par le résultat, il est allé dormir. « Au réveil, je suis allé voir la toile », racontait-il. « Et j’ai vu que ce n’était plus le noir qui faisait vivre la toile mais le reflet de la lumière sur les surfaces noires. Sur les zones striées, la lumière vibrait, et sur les zones plates tout était calme ». Un nouvel espace s’ouvre, pour lui, devant la toile : « La lumière vient du tableau vers moi, je suis dans le tableau ».

     

    « Pour ne pas limiter ces peintures à un phénomène optique, j’ai inventé le mot Outrenoir, au-delà du noir, une lumière transmutée par le noir et, comme Outre-Rhin et Outre-Manche désignent un autre pays, Outrenoir désigne aussi un autre pays, un autre champ mental que celui du simple noir. » (Pierre Soulages)

     

    Il se met alors à jouer avec la matière de la peinture noire qu’il travaille avec des outils, créant du relief, la rendant luisante ou mate. Dessus, la lumière produit des changements de couleur. D’une toile en trois panneaux (Peinture 222 x 449 cm, 30 septembre 1983) qu’il avait observée chez lui à Sète, près de la Méditerranée, et qu’il présentait au Centre Pompidou en 2009, Pierre Soulages a dit : « Certains matins, elle est gris argent. A d’autres moments, captant les reflets de la mer, elle est bleue. A d’autres heures, elle prend des tons de brun cuivré (…). Un jour, je l’ai même vue verte : il y avait eu un orage et un coup de soleil sur les arbres qui ne sont pas loin de là ».

     

     

     

    Voir Soulages, de Conques à Rodez

    Les vitraux de l’abbatiale de Conques, une commande publique, sont une des grandes œuvres de Pierre Soulages. Elles lui ont demandé sept ans de travail, entre 1987 et 1994. Pour les 104 verrières, il a imaginé un verre particulier, créé avec le maître-verrier Jean-Dominique Fleury. Il utilise l’opacité et la transparence qu’il a réparties pour faire varier les intensités lumineuses en fonction de l’heure du jour : cela a donné des effets de couleurs inattendus. Des lignes fluides, obliques, légèrement courbes, courent sur le verre.

    Un autre lieu qu’il faut visiter absolument pour rencontrer Soulages, c’est le musée qui lui est consacré dans sa ville natale et qui possède le plus important ensemble de ses oeuvres. Le Musée Soulages de Rodez a ouvert ses portes en mai 2014. L’artiste en a accepté l’idée à condition qu’il soit ouvert à d’autres artistes. Il a fait une donation de 500 pièces au musée, dont de nombreuses gravures, des gouaches, des encres, des brous de noix, des huiles sur toile et tous les travaux liés à la création des vitraux de Conques (notamment les cartons). Il y a ajouté quatorze peintures dont un Outrenoir de 1986.

    Pour ses cent ans, le Louvre rend hommage à Pierre Soulages en exposant dans le Salon Carré une sélection d’une vingtaine d’œuvres couvrant toute sa carrière, prêtées par les grands musées du monde (du 11 décembre 2019 au 9 mars 2020). Le Centre Pompidou expose également une sélection de 14 des 25 œuvres de l’artiste conservées dans sa collection, dont sept provenant du legs de Pierrette Bloch jamais encore montrées au Centre. Le Musée Fabre de Montpellier, qui possède une collection importante de Soulages, lui rend aussi hommage avec un parcours enrichi de nouvelles oeuvres, dont des prêts.

     

    Source : France Info Culture

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Pierre Soulages, derrière le noir, la quête de la lumière

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Pierre Soulages, quand la matière devient lumière

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Le Siècle Soulages à Rodez

     

     

     

  • Il y a vingt ans, Invader envahissait l’Amérique

     

     

    En 2018, le street artist français Invader fêtait ses vingt ans d’invasion de tous les murs de la planète en diffusant sur Instagram de petites vidéos de ses oeuvres réalisées en 2000 à Los Angeles. Des images rares…

     

    Il y a un an précisément, l’artiste français Invader, connu pour ses célèbres mosaïques apposées sur les murs du monde entier, organisait une exposition à Los Angeles, afin de fêter dignement ses vingt ans de street art. À cette occasion, il publiait sur son compte Instagram des archives vidéos de ses actions réalisées dans la ville californienne au début des années 2000. De son propre aveu, il s’agit là « d’archives incroyables » (« amazing archives » dans le texte d’une légende qu’il a postée). Et en effet, on a rarement eu l’occasion de voir l’artiste ainsi en action…

    Sur la première vidéo, on le retrouve donc le 31 décembre 1999, en train d’installer LA_11 (LA pour Los Angeles, et _11 signifiant qu’il s’agissait du 11ème Space invader apposé sur un mur de la Cité des Anges) sur la célèbre enseigne géante « Hollywood » qui surplombe la mégalopole américaine :

     

    https://www.instagram.com/p/BoHFPuQDZGg/

     

     

    Dans une seconde séquence publiée sur son compte Instagram, il indique dans la légende que parfois, les choses ne se déroulent pas tout à fait comme prévu… Sur ces images, datées de décembre 1999, on le voit installer un Space Invader, juste au moment où un homme un brin menaçant intervient et l’intime de cesser ce qu’il est en train de faire. L’artiste s’exécute en retirant la mosaïque encore fraîche et la mention « Game Over » apparaît à l’image :

     

    https://www.instagram.com/p/BoJGh8xjhPf/

     

     

    Enfin, sur une troisième archive assez brève, on le voit installer au moins quatre spécimens d’envahisseurs :

     

    https://www.instagram.com/p/BoMOR60j-zG/

     

     

    Des images rares qui ne sont pas sans nous rappeler celles tournées par Thierry Guetta – aka Mr Brainwash – et utilisées dans le film de Banksy, « Exit through the gift shop ». Cette astucieuse critique de l’intérêt soudain du grand public pour le graffiti était sorti en 2010 en France. Guetta s’y présente comme le cousin d’Invader et déclare vivre en Californie depuis (presque) toujours… Il y aurait tourné des milliers d’heures d’images, présentant des street artistes internationaux en action, dont Banksy. Sans que l’on sache d’ailleurs qui avait manipulé qui… Comme on peut le voir sur les images, Invader est finalement contrôlé par la police à l’issue de la pose du fameux LA_11…

     

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    Pour mémoire, Invader célébrait le lancement de son projet artistique par l’invasion de Paris en 1998. Certes, deux ans plus tôt, le 1er mai 1996, le tout premier Space Invader, PA_001 (PA pour Paris, la suite vous l’avez ?) était installé passage de la Main d’Or dans le XIème arrondissement. Il aura fallu attendre ensuite deux années pour que PA_002 n’apparaisse à son tour sur un mur de la Rue Quincampoix en mars 1998. Ces deux premiers envahisseurs ont malheureusement depuis été détruits… Mais ces archives vidéos nous rappellent aussi que Los Angeles fut parmi les toutes premières villes à être envahies, après Paris.

    Alors aujourd’hui, 22 ans après ses débuts, ce sont pas moins de 3500 envahisseurs qui ont fleuri sur les murs des villes du monde entier. L’année dernière, à l’occasion de cette première exposition qui lui était consacrée à Los Angeles, après avoir reproduit des milliers de silhouettes pixelisées d’aliens tirées du célèbre jeu d’arcade Space Invader à travers le monde, l’artiste décidait de faire une entrée remarquée sur le marché de l’art. « Une majorité des oeuvres de l’exposition sont déjà vendues (trois jours après le vernissage) », assurait Lauren Every-Wortman, étonnée de la longueur de la file d’attente lors de l’ouverture.

     

     

     

    Répartie sur plusieurs salles, l’exposition « Into The White Cube » mettait en exergue les différentes pratiques artistiques d’Invader. On y retrouvait ainsi ses fameuses mosaïques représentant son monstre favori, sous la forme d’une pizza géante (dont l’original se trouve à New York) ou du Big Lebowski. « Ce sont quelques reproductions sur plexiglas de ce qu’il a fait dans les rues de Paris, Londres ou Los Angeles », détaillait Lauren Every-Wortman, fière de pouvoir présenter une réplique de la première oeuvre produite à Los Angeles, en 1999.

     

     

     

    Pour immortaliser ses oeuvres, avant qu’elles ne risquent d’être dérobées et vendues au marché noir, l’artiste prenait ainsi des photographies de chaque création le lendemain de leur installation, au petit matin. Une série de clichés était ainsi exposée dans la galerie, permettant de jouer à « où est Charlie ? » avec les oeuvres de l’artiste. « Certains fans font de la réactivation de ses oeuvres et recréent celles qui sont volées », raconte la commissaire.

     

     

     

    Mais le travail d’Invader ne s’est pas cantonné aux monstres pixélisés : « l’exposition présente des pièces en avant-première, comme des badges géants ou des pièces sur canevas ». Sur ces toiles, normalement réalisées sur ordinateur, l’artiste décide de revenir à ses premières amours pour la peinture, en créant des emojis pixelisés. Dans la dernière salle, on retrouvait une série plus ancienne de pages de catalogues de maisons d’enchères, sur lesquelles Invader a tagué son blase à la bombe. Enfin, le public pouvait découvrir une partie de son travail via une vidéo portant sur son travail de street-artist la nuit.

     

     

     

     

    En octobre 2018, Invader publiait d’ailleurs une nouvelle édition de son invasion de Los Angeles, intitulée « Invasion Los Angeles Updated Edition 1999 – 2018 », après avoir installé de nouveaux Space Invaders dans la Cité des Anges, parmi lesquels ceux-ci que l’on aime tout particulièrement… « Il a notamment envahi le Hollywood Sign, rappelle Lauren Every-Wortman. C’est un jeu de les trouver, même si certaines ont été volées depuis ».

     

    https://www.instagram.com/p/BiwrV3ojkGx/

     

    https://www.instagram.com/p/BixbaEAjmND/

     

     

    Et pour finir, nous rejoignons Invader dans son atelier, pour un petit cours de céramique dispensé par le maître himself…

     

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  • Rick Owens : Collection Aztec Printemps-Eté 2020

     

     

    En septembre 2019, Rick Owens nous présentait la collection Aztec, dans le cadre prestigieux du Palais de Tokyo à Paris. Pour sa collection printemps-été 2020, le créateur américain s’est inspiré de ses origines nord-américaines, avec pour sources d’inspiration trois thèmes forts et dans le feu de l’actualité de l’époque : sa mère d’origine mexicaine, l’actrice Maria Félix et le débat qui fait rage au sujet du mur à la frontière mexicaine.

     

    Comme la saison dernière, lorsque le créateur avait littéralement mit le feu à l’esplanade du Palais de Tokyo, Rick Owens récidive en nous présentant une nouvelle collection aussi impressionnante que sa mise en scène. Des mannequins à l’allure étrange, signature de la marque, défilent dans des robes démesurées, des vestes aux épaules XXL et des vêtements extra-larges. La géométrie quasi-parfaite des vêtements subjugue. L’ensemble de la collection est presque architectural. Le show est puissant, envoûtant, presque effrayant, mais, une fois encore, réussi.

    Ici, ni podium ni tapis rouge. Seul le cadre brut des marches du Palais de Tokyo habille le défilé du maître. Un bassin est aménagé spécialement pour l’occasion, alimenté par une série d’énormes tuyaux qui y déversent une eau à l’éclat particulier. Pour ouvrir le show, de la fumée s’échappe des fameux tuyaux avant qu’un cortège en robe noire ne marche au bord de la piscine, brandissant de longs mâts. Les modèles plongent leurs piques dans l’eau, se soulevant et se séparant en rythme, afin de produire une joyeuse cacophonie visuelle de bulles. Éphémères et implacables, flottantes et glissantes, elles fournissent un fond éthéré mais doux au décor général.

     

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    Les modèles arborent des coiffes pharaoniques, science-fictionnelles et rétro-futuristes, évoluant au beau milieu des tours environnantes, évocation en noir & blanc des plus poétiques du « Metropolis » de Fritz Lang, vite démentie par les tableaux suivants, beaucoup plus colorés. Owens convoque ses origines mexicaines, par sa mère, et fait bien évidemment référence aux problèmes frontaliers actuels dans son pays natal, aux États-Unis, qui rendront désormais plus difficile une éventuelle visite à sa famille qui vit encore plus au Sud, de l’autre côté du mur. Face au discours officiel prônant la construction d’enceintes, le renforcement des frontières et le repli des Etats-Unis sur eux-mêmes, Rick Owens, Américain vivant et travaillant en Europe, lui oppose avec son show cette réponse naturelle, afin d’y honorer ses racines.

    Car les créations d’Owens, ornées de paillettes, d’or, de motifs multicolores, de cuir verni, de pastels et de fleurs sculpturales, à la fois explosives et festives, constituent toujours un retour aux sources, avec des lignes pures et extrêmes. Cette collection nous fait ainsi naviguer entre peur sacrificielle et fascination païenne, entre passé et futur, entre les pyramides de l’Egypte ancienne, les temples aztèques et certains personnages directement tirés d’un épisode de Star Wars… Rick Owens y célèbre la femme universelle, de la Reine de Saba à Cléopâtre.

     

     

     

  • London’s Clubbers dans les 80’s

     

     

    « Habillez-vous comme si votre vie en dépendait ou ne vous dérangez pas », telle était la recommandation de Leigh Bowery quant au code vestimentaire à adopter pour pouvoir participer à ses soirées organisées au légendaire club Taboo, juste à côté de Leicester Square à Londres, dans les années 80.

     

    Leigh Bowery, designer, performer et superstar des nuits londoniennes, était le maître de cérémonie sulfureux de la scène du club underground Taboo au milieu des années 80. Tel un canevas humain éclaboussé de peinture et de maquillage outrancier, il importa au Taboo son carnaval étrange, sur fond de drogue, de psycho-glamour et de débauche poly-sexuelle. Le célèbre portier du club, Mark Vaultier, tendait un miroir aux clubbers qui attendaient à l’entrée et leur posait la question fatidique : « Est-ce que vous vous laisseriez entrer ? »

     

     

     

    En 2013, l’exposition « Club to Catwalk » au Victoria & Albert Museum de Londres nous présentait des créations de John Galliano, Vivienne Westwood, Stephen Jones, Betty Jackson, Paul Smith, Pam Hogg, Katharine Hamnett, Rifat Özbek ou Leigh Bowery et visait à mettre en lumière à quel point la mode des années 80 a émergé directement de la scène musicale underground et des règles draconiennes d’entrée dans certains clubs prisés par la communauté gay. Car il fallait y briller…

    « Club to Catwalk » nous offrait ainsi un aperçu fascinant du monde des designers britanniques, débutants dans les années 80, et qui ont ensuite acquis une renommée internationale, grâce à leur esthétique audacieuse, directement influencée par la culture scandaleuse des clubs de Londres. Avec chaque nouvelle soirée se constituaient de nouvelles tribus de style. L’exposition célèbre les looks extrêmes des sous-cultures londoniennes des années 80, entre Fetish, Goth, Rave, New Romantics et High Camp. L’expression « The blink-and-you’ll-miss-it scene » désignait cette scène sulfureuse où les clubs fêtaient rarement leur premier anniversaire, même si le goût pour la subversion et l’individualité totale et absolue persista tout au long de la décennie.

     

     

     

    John Galliano, qui a étudié au Central Saint Martins Art College de 1981 à 1984, se souvient d’ailleurs que les jeudis et vendredis, « le collège était presque désert. Tout le monde était à la maison pour travailler ses costumes pour le week-end ». Quant à Trojan, une star du Taboo et l’ancien amant de Bowery, il se coupait à moitié une oreille un soir, dans une sorte de happening hédoniste et extrême, car comme il l’expliquait dans un article qui lui était consacré dans le magazine The Face en 1986, « il en avait tout simplement marre de voir son style copié par les filles du Taboo ».

    Claire Wilcox, la responsable de la mode au Victoria & Albert Museum de Londres et commissaire de l’exposition « Club to Catwalk » en 2013, déclarait qu’elle tenait à réfuter l’hypothèse selon laquelle la mode des années 80 se résumait à « des vêtements colorés et des permanentes ». Alors certes, pas d’épaulettes, remplacées avantageusement par des robes pour homme, des accessoires fétichistes signés Vivienne Westwood, des tenues de pirate, un dance floor et un juste-au-corps en Lycra violet avec sa gaine pour pénis intégrée…

     

    Claire Wilcox évoquait en 2013 comment l’esthétique de ces clubs londoniens, beaux et grotesques à la fois, fut cruciale dans l’émergence de la mode grand public des années 80.

     

    Pensez-vous que l’exposition vise à restaurer la réputation de la mode des années 80 ?

    Je l’espère, en tout cas ! Nous faisons évidemment référence à Lady Di, mais nous ne présentons délibérément aucune de ses tenues. Et pour tout dire, il y a très peu d’épaulettes dans l’exposition… Il s’agit plus ici de la mode des écoles d’art ; nous avons des designers incroyables, comme John Galliano, qui débutait tout juste sa carrière à l’époque, mais aussi Vivienne Westwood, « l’enfant terrible de la mode », qui a été absolument radicale tout au long des années 80. Il s’agit également de faire appel à des designers influents qui ne sont pas nécessairement aussi connus aujourd’hui, comme John Flett et Michiko Koshino. Nous voulions montrer comment ce que les clubbers portaient à l’occasion des soirées au Taboo a pu avoir une influence majeure, bien au-delà des murs du sous-sol du club. Créateurs, musiciens, artistes et danseurs sortaient ensemble ; ce croisement entre culture club et monde réel était donc inévitable…

     

    Pouvez-vous donner un exemple de ce croisement entre club et monde réel ?

    L’exemple classique est la chemise New Romantic, que l’on fait blouser, avec son col cassé, particulièrement appréciée par la princesse Diana et ses amis. A cette époque, les créateurs enjambaient deux mondes et apportaient la vitalité et la fraicheur de la scène club, en la mélangeant à ce qu’ils avaient pu apprendre dans les écoles de mode. Stephen Jones créait des chapeaux pour ses amis clubbers, certes, mais il faisait aussi des chapeaux pour la reine…

     

    Comment la musique du club a-t-elle influencé la mode ?

    Cela dépend en grande partie de la façon dont les gens dansaient. Le style « Rave », c’était en substance comment s’habiller au mieux pour transpirer, mais comme l’un de ces New Romantics me l’expliquait un jour : pour eux, il ne s’agissait pas de danser mais de se contenter de remuer le plus esthétiquement possible afin d’éviter de ruiner leurs costumes extravagants… Si vous regardez les premières pièces, qui sont assez précises et utilitaires, elles sont associées à la musique robotique de 1979 ou 1980, puis vous entrez dans la phase historique, lorsque les clubbers se sont plus tournés vers les costumiers de théâtre, pour leurs tenues du samedi soir. Vers la fin de la décennie, vous trouvez de plus en plus de « bodycon », et les vêtements deviennent plus moulants, avec beaucoup de Lycra, jusqu’à la dernière tenue représentée, de la collection « White » de 1990 par Rifat Özbek, qui se situe quelque part entre Rave et New Age.

     

    Compte tenu de la complexité et des nuances de la scène, ce devait être une exposition difficile à organiser…

    La chose à retenir à propos de la culture clubbing londonienne de cette époque, c’est que personne ne portait deux fois la même tenue. Nous présentons d’ailleurs cinq tenues de New Romantics, créées et portées entre 1979 et 1980, et elles sont toutes radicalement différentes. Il y avait chez ces tribus de style aux univers esthétiques très divers une capacité tout à fait rafraîchissante à refondre et recycler, nuit après nuit.

     

    Il est impossible de parler de la culture des clubs londoniens dans les années 80 sans évoquer Leigh Bowery. Quelle a été sa contribution ?

    Ce que les gens oublient, c’est que Leigh Bowery était un grand couturier… Quand il a débuté, il a fait un voyage d’affaires à Tokyo avec d’autres designers britanniques. Il a reçu de nombreuses commandes d’acheteurs potentiels, mais il ne donna pas suite car il ne s’intéressait en fait qu’aux pièces uniques. Le seul objectif qu’il se fixait était de mettre en scène tous les soirs une performance la plus époustouflante possible, et de voir son inspiration diffusée à la fois aux mondes de la mode et des arts. Le business ne l’intéressait pas… Et les tenues signées Leigh Bowery que nous présentons dans le cadre de cette exposition représentent l’extrême de la mode club ; le club qu’il concevait comme un lieu d’expression esthétique. Finalement, son corps est lui-même devenu le théâtre de ses propres performances, et j’adore ce concept !

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

  • 1979, l’année qui changea le monde, Episode 14 : Entretien avec Amin Maalouf

     

    [kleo_pin type= »circle » left= »yes » right= » » top= » » bottom= » »]          « FOCUS » : un article de fond sur un thème que nos rédacteurs ont sélectionné.

     

     

    L’année 1979 est définitivement une année-charnière, comme la fin d’un cycle. Elle scelle le sort des dernières utopies. Le monde prend une pelle et enterre à la hâte les cadavres encore fumants de nos illusions perdues. Après 1979, rien ne sera plus vraiment comme avant…

     

    Coincée à la fin d’une décennie qui paraît un peu creuse, durant laquelle les dirigeants politiques semblent manquer de charisme (le pâle Carter face au cowboy médiatique Reagan, VGE après De Gaulle et Pompidou), l’année 1979 n’attire décidément pas les flashes. Et pourtant… Que d’événements considérables ont eu lieu cette année-là, autant de tremblements qui ont marqué la face du monde et dont on ressent encore les répliques quarante ans plus tard.

    Révolution iranienne, arrivée de Saddam Hussein au pouvoir en Irak, début de la Guerre d’Afghanistan qui mènera à la chute de l’URSS et à l’apparition du terrorisme islamiste, second choc pétrolier et crise économique mondiale, paix entre Israël et l’Egypte, fin des Khmers Rouges… Il n’est pas insensé de penser que 1979 a en réalité été l’année la plus importante de l’après-Seconde Guerre Mondiale.

     

    Bien des événements emblématiques de notre époque, de la chute du mur de Berlin à l’écroulement des tours du World Trade Center, partent ainsi du même point : 1979. Une année où sont survenus des bouleversements tels qu’on en subit encore les conséquences, soutient l’écrivain Amin Maalouf.

     

    En 1979, le monde est ébranlé par deux événements majeurs : la révolution iranienne, qui va propulser l’ayatollah Khomeiny au pouvoir, et la révolution conservatrice au Royaume-Uni, marquée par l’élection de Margaret Thatcher. Ces révolutions enclenchent ce qu’Amin Maalouf, écrivain franco-libanais, qualifie de « grand retournement » et dont nous subissons toujours les secousses. Dans son tout dernier essai, « Le naufrage des civilisations » (paru cette année chez Grasset), l’auteur de « Léon l’Africain », de « Samarcande » et d’une dizaine d’autres livres (et membre de l’Académie française) écrit que les événements de cette année fatidique ont métamorphosé les sociétés humaines et conduit les civilisations au bord du précipice.

     

    Vous établissez l’année 1979 comme celle marquant le début des dérèglements mondiaux. Pourquoi ?

    Il y a des dates qui deviennent en quelque sorte des marque-pages dans le grand registre du temps, signalant la fin d’un chapitre et le commencement d’un autre. En 1979 se sont mis en place les paramètres politiques et intellectuels qui ont façonné le monde tel que nous le connaissons aujourd’hui : la montée de l’islamisme radical et, plus généralement, des tensions identitaires ; et la montée d’une nouvelle forme de gestion économique, caractérisée par un reflux des politiques sociales et par une dénonciation de l’« Etat-Providence ». Les deux événements emblématiques de cette évolution sont le triomphe de la révolution iranienne, en février 1979, avec la proclamation par l’ayatollah Khomeiny d’une République islamique ; puis, trois mois plus tard, en mai, au Royaume-Uni, la victoire électorale de Margaret Thatcher et l’avènement de ce qu’elle a appelé sa « révolution conservatrice », qui allait influencer les dirigeants du monde entier.

     

     

     

    Ces deux phénomènes ne sont pas semblables. Pourquoi les relier ?

    Il est vrai qu’il y a d’énormes différences entre les deux événements, entre les deux personnages, comme entre les deux conservatismes. Mais ils ont provoqué, sur l’ensemble de la planète, un « retournement » durable des idées et des attitudes. Leur proximité dans le temps n’était sûrement pas le résultat d’une action concertée, mais elle n’était pas non plus le fruit du hasard. Je parlerai plutôt de « conjonction ». C’est comme si une nouvelle « saison » était arrivée à maturité, et qu’elle faisait éclore ses fleurs en mille endroits à la fois. Ou comme si « l’esprit du temps » était en train de nous signifier la fin d’un cycle, et le commencement d’un autre. Désormais, c’est le conservatisme qui se proclamera révolutionnaire, tandis que les tenants du « progressisme » n’auront plus d’autre but que la conservation des acquis.

     

    Commençons par les turbulences identitaires. Pourquoi frappent-elles surtout le monde arabo-musulman ?

    Dans mon dernier livre, je m’efforce de trouver les raisons pour lesquelles ma région natale, le Proche-Orient, a connu une dérive identitaire meurtrière. Je ne prétends pas expliquer l’ensemble du phénomène, mais j’essaie d’offrir quelques pistes de réflexion. En partant de ma propre expérience. Je suis né à Beyrouth, et j’ai eu le triste privilège d’assister, en avril 1975, de la fenêtre de mon appartement, au massacre qui fut le déclencheur de la guerre du Liban. À partir de là, la coexistence entre les ressortissants des diverses communautés a été rompue. Jusque-là, elle fonctionnait à peu près, même si elle n’a jamais été idyllique.

     

     

     

     

    Mais le Proche-Orient a été secoué par d’autres événements. Vous montrez du doigt les actions de Nasser, le dirigeant égyptien qui a renversé la monarchie en 1952. N’est-il pas tout à la fois héros et fossoyeur du monde arabe ?

    Nasser arrive à un moment clé de l’histoire de cette région et du monde. Lorsqu’il prend le pouvoir en 1952, il est vu comme un libérateur. Il renverse une monarchie discréditée et redonne aux peuples arabes leur fierté. Il atteint son moment de gloire en 1956 lorsqu’il nationalise le canal de Suez et sort politiquement gagnant de son différend avec la France, le Royaume-Uni et Israël. Il devient un leader de stature mondiale, et une idole pour les foules arabes. Mais sa manière de gouverner se révèle désastreuse. Il nationalise à tour de bras, réprime l’opposition et pousse vers la sortie les communautés dites « égyptianisées » — des centaines de milliers de Grecs, d’Italiens, de Juifs, de Syro-Libanais, de Français, etc. — dont certaines étaient installées dans la vallée du Nil depuis plusieurs générations, voire plusieurs siècles. En 1967, il perd la guerre contre Israël. Et le monde arabe ne s’est jamais relevé de cette défaite.

     

    L’échec de Nasser signe la montée d’une autre force politique déjà bien ancrée dans le monde arabo-musulman, l’islamisme. Et c’est l’Iran de Khomeiny qui va s’en emparer, n’est-ce pas ?

    La révolution khomeiniste de 1979 va effectivement marquer une victoire spectaculaire pour l’islamisme politique et ébranler la civilisation arabo-musulmane. L’Iran, bien que n’étant pas un pays arabe, va se faire le champion des causes que défendait jusque-là le nationalisme arabe, notamment le soutien aux mouvements palestiniens et le combat contre Israël. Les monarchies arabes sont blâmées pour leur faiblesse face aux Occidentaux. L’Iran leur apparaît comme une menace mortelle.

     

     

    Mais d’autres événements vont alimenter l’islamisme ?

    Là encore, 1979 est une année charnière. La révolution iranienne éclate donc en février. En mars, le premier ministre laïque du Pakistan, Ali Bhutto, est exécuté par des militaires prônant l’application de la loi coranique. En juillet, Washington commence à armer les moudjahidines islamistes afghans. En novembre, des militants radicaux prennent d’assaut la grande mosquée de La Mecque et ébranlent le pouvoir saoudien, ce qui le pousse à se durcir considérablement. Enfin, en décembre, l’Union soviétique envahit l’Afghanistan, ce qui déclenche une mobilisation sans précédent dans le monde arabo-musulman, et précipite la défaite du communisme.

     

    Et nous vivons toujours les effets de cet ébranlement ?

    Bien des moments emblématiques qui ont façonné notre époque, de la chute du mur de Berlin en 1989 à l’écroulement des tours jumelles de Manhattan en 2001, trouvent effectivement leur origine dans les événements de cette année-là.

     

    L’autre événement clé du grand retournement dont vous parlez est la révolution conservatrice. Vous l’attribuez à Margaret Thatcher. En quoi est-ce important ?

    L’avènement au pouvoir de Margaret Thatcher en 1979 n’aurait pas eu la même portée s’il ne s’inscrivait pas dans un mouvement profond et ample qui allait dépasser très vite les frontières du Royaume-Uni. Son socle reposait sur le soulèvement des acteurs économiques, et plus généralement des possédants, contre les empiétements de l’État redistributeur des richesses. Cette révolution avait comme programme de diminuer l’intervention du gouvernement dans la vie économique, de limiter les dépenses sociales, d’accorder plus de latitude aux entrepreneurs et de réduire l’influence des syndicats.

     

     

     

    Et cette révolution a rapidement touché la planète entière ?

    Elle s’est révélée, en effet, fort attrayante. Et elle s’est propagée très vite. D’abord vers les États-Unis, avec l’élection de Ronald Reagan en novembre 1980 ; puis vers le reste du monde. Les préceptes de la révolution conservatrice anglo-américaine seront adoptés par de nombreux dirigeants de droite comme de gauche, parfois avec enthousiasme, parfois avec résignation. La révolution conservatrice a mis fin à la « timidité » qu’éprouvait jusqu’alors la droite dans le débat politique et intellectuel, notamment sur les questions sociales. C’est là une dimension difficile à saisir, mais elle est essentielle pour comprendre le bouleversement qui s’est opéré dans les mentalités, partout dans le monde. La domination qu’exerçaient jusque-là les idées et le vocabulaire de la gauche s’est effritée.

     

    Quels ont été ses résultats ?

    Ils ont été nuancés. Le triomphe d’un capitalisme décomplexé a eu pour effet de libérer des forces économiques puissantes, et de favoriser le décollage des plus grandes nations non occidentales, comme la Chine ou l’Inde. Mais il a accentué les inégalités, au point de créer une petite caste d’hypermilliardaires, chacun d’eux plus riche que des nations entières ; et il a désavantagé de vastes couches de la population, qui se sentent aujourd’hui marginalisées, et même délaissées.

     

    Vous parlez de naufrage des civilisations, alors que le professeur Samuel Huntington, dans son livre phare de 1996, parle de « choc des civilisations ». Y a-t-il une différence ?

    Samuel Huntington a prédit que le monde allait se constituer en sept ou huit blocs, ou « aires de civilisation ». Pourtant, ce qui caractérise l’humanité aujourd’hui, ce n’est pas une tendance à se regrouper au sein de très vastes ensembles, mais une propension au morcellement, au fractionnement, souvent dans la violence. C’est évidemment vrai dans le monde arabe, mais c’est également vrai en Europe, et ailleurs. Partout dans le monde, il y a au sein des sociétés humaines de plus en plus de facteurs qui fragmentent, et de moins en moins de facteurs qui cimentent.

     

    Faut-il donc conclure à l’inexorable naufrage des civilisations ?

    Les années à venir vont très probablement nous apporter des secousses majeures. Mais je reste persuadé que l’on finira par connaître une prise de conscience, et un sursaut. C’est dans cet espoir que j’ai écrit mon livre.

     

     

    Entretien avec Jocelyn Coulon pour L’Actualité (09 octobre 2019)

     

     

     

  • 1979, l’année qui changea le monde, Episode 13 : McDonald’s

     

    [kleo_pin type= »circle » left= »yes » right= » » top= » » bottom= » »]          « FOCUS » : un article de fond sur un thème que nos rédacteurs ont sélectionné.

     

     

    L’année 1979 est définitivement une année-charnière, comme la fin d’un cycle. Elle scelle le sort des dernières utopies. Le monde prend une pelle et enterre à la hâte les cadavres encore fumants de nos illusions perdues. Après 1979, rien ne sera plus vraiment comme avant…

     

    Coincée à la fin d’une décennie qui paraît un peu creuse, durant laquelle les dirigeants politiques semblent manquer de charisme (le pâle Carter face au cowboy médiatique Reagan, VGE après De Gaulle et Pompidou), l’année 1979 n’attire décidément pas les flashes. Et pourtant… Que d’événements considérables ont eu lieu cette année-là, autant de tremblements qui ont marqué la face du monde et dont on ressent encore les répliques quarante ans plus tard.

    Révolution iranienne, arrivée de Saddam Hussein au pouvoir en Irak, début de la Guerre d’Afghanistan qui mènera à la chute de l’URSS et à l’apparition du terrorisme islamiste, second choc pétrolier et crise économique mondiale, paix entre Israël et l’Egypte, fin des Khmers Rouges… Il n’est pas insensé de penser que 1979 a en réalité été l’année la plus importante de l’après-Seconde Guerre Mondiale.

     

    17 septembre 1979, ouverture officielle du premier McDonald’s en France. Ça, c’est pour la version officielle… Car l’histoire a été réécrite de toutes pièces : c’est en effet un certain Raymond Dayan qui a importé la marque comme le concept du fast-food en France sept ans plus tôt, en 1972, alors que la maison-mère américaine était très sceptique quant à la viabilité d’une implantation dans notre doux pays.

     

    Cet anniversaire ne serait donc qu’une escroquerie barbouillée de ketchup et surmontée d’une rondelle de pickle ? Ce 17 septembre 1979, c’est pourtant encore aujourd’hui très officiellement la date gravée dans le marbre de l’histoire du géant américain de la restauration rapide, ainsi que sur la façade de la première enseigne McDonald’s ouverte en France, à Strasbourg. « Nous étions des pionniers », se souvient Michel Ksiazenicer, le premier franchisé. « Cependant l’accueil fut plutôt chaleureux, et les réactions des Alsaciens plus curieuses qu’hostiles », comme nous indique le site de la maison-mère. Sans doute… Car ça fleurait bon le bonheur qui dégouline entre deux buns, à en croire le reportage du journal télévisé de l’époque.

     

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    Mais il n’en reste pas moins que l’histoire a été réécrite de toutes pièces… Car McDonald’s cherche en fait depuis quarante ans à effacer des tablettes un homme, Raymond Dayan, celui qui importa la marque comme le concept du fast food en France sept ans plus tôt, en 1972, après une première expérience à Chicago. Les hamburgers en France, McDo n’y croit pas et accorde une licence à des conditions plus qu’avantageuses à l’entrepreneur français, qui obtient de surcroît l’exclusivité sur tout le territoire.

    Raymond Dayan est ainsi autorisé à ouvrir jusqu’à 150 restaurants et la licence lui est accordée pour trente ans. Mais surtout, les conditions financières négociées par l’homme d’affaires sont royales : il ne doit reverser que 1,5 % de son chiffre d’affaires à la maison mère contre près de 20 % aujourd’hui pour un franchisé McDo lambda.

     

    « Je suis vraiment l’incarnation du rêve américain, le seul pays au monde où un émigrant qui a l’esprit d’entreprise et qui a une nouvelle idée, peut venir, y concrétiser son projet et réussir. La France, c’est le pays de l’excellence culinaire. Et venir y importer un concept tel que le hamburger, McDonald’s n’y croyait évidemment pas. Manger avec les doigts, souvent debout, les Américains pensaient que les Français ne s’y mettraient jamais… » (Raymond Dayan en 1984)

     

    Le premier McDo ouvre donc, non pas à Strasbourg en 1979, mais à Créteil, en région parisienne, le 30 juin 1972. Un fast food qui existe d’ailleurs encore aujourd’hui… Les débuts sont cependant quelque peu laborieux. Si les curieux se pressent à Créteil pour voir ce nouveau concept qui cartonne aux Etats-Unis, la mayonnaise ne prend pas immédiatement.

    Raymond Dayan a beau ouvrir un second McDonald’s sur les Champs-Elysées à Paris en 1973, il faudra attendre trois ans pour que ses restaurants cessent de perdre de l’argent. Mais à la fin des années 70, l’homme d’affaires est le roi du hamburger. Il est à la tête de quatorze restaurants qui servent 6 millions de repas par an et réalisent 60 millions de francs de chiffre d’affaires (près de 33 millions d’euros actuels en prenant en compte l’érosion monétaire).

     

    « En 1972, après avoir ouvert le premier McDonald’s à Créteil, j’ai du trouver très rapidement des gens qui sachent faire des hamburgers pour mes autres restaurants. Comme j’étais le premier à lancer le concept, j’ai du former le personnel…  » (Raymond Dayan en 1972)

     

    McDonald’s réalise alors son erreur et propose dans un premier temps à Raymond Dayan de racheter ses restaurants. Celui-ci refuse et la marque américain contre-attaque en invoquant le non-respect de ses règles d’hygiène. S’ensuit une terrible bataille juridique remportée finalement par le géant américain en 1982. Si l’entrepreneur français gagne le procès en première instance, il perd finalement en appel et doit rebaptiser ses 14 restaurants O’Kitch. La marque sera rachetée ensuite par le belge Quick, qui veut se faire une place au soleil sur le marché français.

    Aujourd’hui la filiale française de McDonald’s est l’une de plus florissantes du groupe. Près de 1500 restaurants, 69.000 salariés et 1,8 million de repas servis par jour. Elle se paie même le luxe de posséder le McDo qui réalise le plus gros chiffre d’affaires du monde, celui des Champs-Elysées à Paris, l’artère sur laquelle Raymond Dayan avait ouvert son deuxième restaurant en 1973. Manger avec les doigts, parfois debout, les Français s’y sont finalement mis…

     

     

     

  • Le film « Les Bronzés font du ski » fête ses quarante ans

     

     

    Vendredi 22 novembre 2019, le film culte « Les Bronzés font du Ski » de Patrice Leconte fêtait ses quarante ans. Un coffret vient de sortir afin de célébrer comme il se doit cet anniversaire. L’occasion de replonger avec délectation dans l’ambiance de ces bonnes vieilles vacances de ski à l’ancienne…

     

    Le 21 novembre 1979, le film « Les Bronzés font du Ski » de Patrice Leconte débarquait donc sur grand écran. Des bronzés au style caractéristique et à l’esprit moqueur qui imposaient des dialogues rentrés depuis quarante ans dans l’inconscient collectif. Inoubliable aussi : la musique signée Pierre Bachelet, qui nous transporte instantanément sur les pentes de Val d’Isère, là précisément où a été tourné le film. Une station pas loin d’être devenue un lieu de pèlerinage…

    Après « Les Bronzés », sorti exactement un an plus tôt, le 22 novembre 1978, qui avait fait 2,3 millions d’entrées, un bon résultat mais pas un record pour l’époque, c’est le producteur Yves Rousset-Rouard, oncle de Christian Clavier, qui persuade la troupe du Splendid et le réalisateur Patrice Leconte d’ajouter un deuxième volet à la série, qu’un troisième épisode viendra compléter en 2006.

     

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    A sa sortie, « Les Bronzés font du Ski » marche, mais sans déchaîner les foules, faisant moins d’entrées que le premier volet (1,6 million). Le film s’impose cependant au fil du temps et de ses nombreuses rediffusions à la télévision, « 17 à ce jour », précise Patrice Leconte, comme l’un des incontournables de la comédie française, « propulsant avec un petit turbo », ajoute-t-il, sa carrière ainsi que celle de ses acteurs.

     

    « C’est aussi un film qui ne vieillit pas », souligne Patrice Leconte, estimant que « des films du Splendid, c’est sans doute le plus familial ».

     

     

    Le réalisateur se souvient aussi d’un tournage parfois un peu compliqué. Notamment la fameuse scène de la dégustation de la liqueur de crapaud. « Ça nous faisait rire, c’est aussi bête que ça. Cette espèce d’étincelle dans l’oeil me plaît énormément. Et c’est vrai que lorsqu’on regarde la scène chez les Savoyards qui les recueillent, on sent qu’ils ne sont pas loin d’éclater de rire ». Et voilà comment « Les Bronzés » ont révolutionné la comédie à la Française.

     

    « La troupe du Splendid vient du café-théâtre ; le café-théâtre a rebattu les cartes et vraiment modifié la donne du spectacle vivant en France. C’était une nouvelle génération qui était beaucoup plus libre, mais surtout plus proche du public et des thématiques propres à la jeunesse de ces années 70. » (Alexandre Raveleau, Auteur de « Les Bronzés, la véritable histoire » paru aux Ed. Hors Collection)

     

    Et dire que la troupe du Splendid ne voulait pas à l’origine tourner cette suite au premier volet, « Les Bronzés », sorti un an plus tôt. Mais quarante ans plus tard, chaque passage télé des « Les Bronzés font du Ski » continue à faire tomber les records d’audience les uns après les autres.

     

     

    « Sur un malentendu »

    « Ecoute Bernard, je crois que toi et moi on a un peu le même problème, c’est-à-dire qu’on ne peut pas vraiment tout miser sur notre physique, surtout toi. Alors si je peux me permettre de te donner un conseil, c’est : oublie que tu n’as aucune chance, vas-y, fonce ! On sait jamais, sur un malentendu, ça peut marcher. » (Michel Blanc, dans le rôle de Jean-Claude Dusse, à Gérard Jugnot, dans celui de Bernard)

     

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    « Vous avez de la pâte ? Vous avez du suc ? » 

    « Vous avez de la pâte ? Vous avez du suc’ ? Alors, avec la pâte vous faites une crêpe, et puis vous mettez du suc’ dessus ! » (Bruno Moynot dans le rôle de Gilbert Seldman, à Marie-Anne Chazel alias Gigi, qui travaille dans une crêperie)

     

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    « Quand te reverrais-je… »

    « Quand te reverrai-je, pays merveilleux, où ceux qui s’aiment, vivent à deux… » (Jean-Claude Dusse chantant sur un télésiège où il est bloqué pour la nuit)

     

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    « Excusez-moi, mais vous êtes en train d’uriner sur ma voiture. » 

    (Bruno Moynot, jouant Gilbert Seldman, à Gérard Jugnot, dans le rôle de Bernard)

     

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    « L’année prochaine, je skie au mois de juillet » 

    « Moi j’ai acheté cet appartement du 15 au 30, si tout le monde dépasse d’une demi-journée, qu’est-ce qu’il se passe ? L’année prochaine, je skie au mois de juillet. » (Bernard au locataire précédent de son appartement)

     

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    « Copain comme cochon » 

    « Copain, c’est son nom. On l’a appelé comme ça, Copain comme cochon... »  « Mais bouffez-le, votre cochon ! » (Jérôme, médecin généraliste joué par Christian Clavier, et un couple qui lui amène un cochon à soigner)

     

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    « Le planter de bâton » 

    « Monsieur Dusse, ce qui ne va pas, c’est le planter du bâton. »  « Je vais te le planter, le bâton, moi ! » (Le moniteur de ski et Jean-Claude Dusse)

     

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    « Je sais pas ce qui me retient de te casser la gueule ! La trouille, non ? Ouais, ça doit être ça… » 

    (Michel Blanc et Thierry Lhermitte, alias Popeye)

     

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    « Conclure » 

    « Ça veut dire qu’éventuellement, si vous étiez au bout du rouleau, on pourrait envisager de conclure ? » (Jean-Claude Dusse à Nathalie – Josiane Balasko – et Gigi, quand ils attendent les secours dans la montagne)

     

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    « Je suis végétarien ! » 

    « C’est quoi les petits trucs blancs dedans ? »  « Ça, c’est les vers. Ben oui, comme ça, il y a de la viande aussi. »  « Je suis végétarien ! » (Jean-Claude Dusse et les montagnards qui leur font goûter une spécialité locale, la fougne)

     

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  • 1979, l’année qui changea le monde, Episode 12 : Asteroids

     

    [kleo_pin type= »circle » left= »yes » right= » » top= » » bottom= » »]          « FOCUS » : un article de fond sur un thème que nos rédacteurs ont sélectionné.

     

     

    L’année 1979 est définitivement une année-charnière, comme la fin d’un cycle. Elle scelle le sort des dernières utopies. Le monde prend une pelle et enterre à la hâte les cadavres encore fumants de nos illusions perdues. Après 1979, rien ne sera plus vraiment comme avant…

     

    Coincée à la fin d’une décennie qui paraît un peu creuse, durant laquelle les dirigeants politiques semblent manquer de charisme (le pâle Carter face au cowboy médiatique Reagan, VGE après De Gaulle et Pompidou), l’année 1979 n’attire décidément pas les flashes. Et pourtant… Que d’événements considérables ont eu lieu cette année-là, autant de tremblements qui ont marqué la face du monde et dont on ressent encore les répliques quarante ans plus tard.

    Révolution iranienne, arrivée de Saddam Hussein au pouvoir en Irak, début de la Guerre d’Afghanistan qui mènera à la chute de l’URSS et à l’apparition du terrorisme islamiste, second choc pétrolier et crise économique mondiale, paix entre Israël et l’Egypte, fin des Khmers Rouges… Il n’est pas insensé de penser que 1979 a en réalité été l’année la plus importante de l’après-Seconde Guerre Mondiale.

     

    En France, les premiers jeux vidéo font leur apparition dans les années 70 et vont connaître un engouement immédiat, qui ne se démentira plus. Le jeu Pong sur Atari VCS (Video Computer System) fait une entrée fracassante au coeur des foyers français, tandis que les premiers jeux d’arcade viennent supplanter les bons vieux flippers dans les cafés. La Révolution est en marche et ne pourra plus être stoppée.

     

    L’idée de créer le premier jeu vidéo remonte en fait à 1951. Ralph Baer, un ingénieur américain, future icône des gamers, se voit confier la mission de concevoir le meilleur téléviseur au monde par la société qui l’emploie, le fabricant de postes de télévision Loral Electronics. Rien que ça… Il pense y intégrer un module de jeu, mais l’idée ne sera pas retenue. A noter aussi que cette année 1951 voit la naissance de la société Sega au Japon, en pleine guerre de Corée, dont l’activité principale est l’importation et la maintenance de juke-boxes, à destination des bases militaires américaines présentes sur le territoire japonais durant le conflit.

     

     

     

    Le tout premier jeu vidéo de l’histoire sera finalement créé un an plus tard, en 1952, par un Anglais, A.S. Douglas, un chercheur de l’Université de Cambridge qui tente d’illustrer sa thèse sur l’interaction entre l’homme et l’ordinateur. Il s’agit d’un jeu de réflexion prénommé « OXO », dans lequel l’humain joue contre l’ordinateur. La règle semble simple mais constitue néanmoins une gageure technologique majeure : le gagnant est le premier des deux joueurs qui réussira à créer un alignement de points.

    OXO, considéré comme le premier jeu vidéo de l’histoire, même si ce fait est contesté par certains historiens du jeu vidéo, n’est en fait que la transposition à l’écran d’un  jeu vieux comme le monde : le Morpion. Mais OXO n’aura aucun succès… Et pour cause, l’ordinateur sur lequel il a été conçu, l’EDSAC, ou Electronic Delay Storage Automatic Calculator, à savoir le tout premier ordinateur primitif à tubes à vide électronique, n’existe qu’à l’université de Cambridge…

     

     

     

    En 1958, Willy Higinbotham, un physicien du Brookhaven National Laboratory (centre de recherche nucléaire gouvernemental) crée le premier jeu vidéo multi-joueurs de l’histoire, sur un ordinateur analogique couplé à un oscilloscope : un jeu de tennis dénommé « Tennis For Two ». A l’origine, l’ordinateur servait en fait à calculer les trajectoires des missiles nucléaires ! Le court est une simple ligne horizontale sur laquelle un point rebondit.

    Il ne déposera aucun brevet pour cette première console de jeu car il n’y croyait pas… C’était pour lui un simple amusement conçu dans le but d’amuser les physiciens pendant les pauses café ! Le jeu vidéo multi-joueurs est donc né grâce à la guerre froide !

     

     

     

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    En mai 1962, trois étudiants au MIT, S. Russel, J.M. Graetz et W. Wiitanen, créent « SpaceWar! », le premier vrai jeu sur ordinateur (un PDP-1 conçu par la firme informatique américaine DEC, pour Digital Equipment Corporation, dont 50 exemplaires furent construits entre 1959 et 1970). Le jeu sera fourni avec chaque ordinateur vendu, au prix unitaire de 120.000 dollars de l’époque (par comparaison, la Cadillac Eldorado Biarritz était vendue 7 286 $ en 1959). « SpaceWar! » est un shoot ’em up multidirectionnel en deux dimensions qui met en scène deux vaisseaux dans un combat spatial, et qui doivent échapper à l’attraction d’une planète. Un étudiant qui deviendra célèbre dix ans plus tard y fera ses premières armes : Nolan Bushnell, le futur concepteur du mythique « Pong ».

     

     

     

    En 1967, Ralph Baer réalise enfin son rêve, à savoir d’offrir un nouveau rôle au poste de télévision, en créant les premiers jeux jouables sur une télé : un jeu de tennis et un jeu de voitures. Baer est ainsi le véritable inventeur de la console de jeu, dont il dépose le brevet en 1968. Le premier jeu vidéo sur télé est né : « Chase Game », dans lequel un joueur pourchasse l’autre, qui disparaît lors d’une collision (un peu dans le même genre que Pac-Man). Amusée par le jeu, la direction ne s’oppose pas au projet et demande à l’équipe d’améliorer le prototype.

     

    Game Chassis, TV Game Unit (1967)

     

    Game Chassis, TV Game Unit (1967)

     

     

    En 1971, Galaxy Game, la toute première borne d’arcade, est conçue à l’université de Stanford mais ne sera pas diffusée à grande échelle. Deux mois après Galaxy Game, Nolan Bushnell conçoit une machine au look futuriste : le Computer Space, un remake de « SpaceWar! » (dont il était fan) dans un boîtier très design et moderne ; c’est la vraie naissance des bornes d’arcade pour le grand public.

     

     

     

    En 1972, l’Odyssey est conçue par l’icône des gamers, Ralph Baer, et commercialisée par Magnavox. La toute première console de salon est née ! L’Odyssey utilisait un système de calque que l’on déposait sur l’écran du téléviseur. Le grand public est cependant resté assez hermétique au concept… La console est encore considérée comme une extension de la télé et non comme un véritable appareil dédié au jeu, et beaucoup pensent à tort qu’elle fonctionne uniquement sur les téléviseurs de marque Magnavox…

    Finalement, contre toute attente, le fait de pouvoir désormais jouer sur une télévision est un concept tellement inédit et révolutionnaire en ce début des années 70 qu’il nécessitera un certain temps d’adaptation pour que le public l’intègre pleinement.

     

     

     

    Cette même année 1972 voit la naissance d’un futur géant du jeu vidéo, Atari. Atari est à l’origine une entreprise américaine fondée par Nolan Bushnell et Ted Dabney, considérée comme pionnière et fondatrice de l’industrie du jeu vidéo, devenue française en 2003 suite à son rachat par Infogrames. Elle se spécialise d’abord dans le développement des jeux vidéo mais se diversifie rapidement dans la fabrication de bornes d’arcade, de consoles de jeux ou d’ordinateurs personnels.

    Les deux compères avaient initialement choisi le nom de « Syzygy » mais comme celui-ci était déjà déposé, ils se sont alors rabattus sur Atari, un terme japonais issu du jeu de Go.

     

     

     

    Il aura donc fallu attendre 20 ans, et l’arrivée des ordinateurs à la maison, pour que le jeu vidéo prenne son envol. C’est « Pong », créé en 1972 par Nolan Bushnell, le PDG de la firme américaine Atari, qui marquera l’entrée en force du jeu vidéo dans le quotidien des gens et qui sera le tout premier jeu vidéo à connaître un succès planétaire. Le principe de Pong, c’est le tennis, tout simplement… La balle est lancée à partir du milieu de l’écran, dans une direction aléatoire, et les joueurs doivent se la renvoyer. Et Pong va faire un véritable carton…

    Avec « Pong », Bushnell veut lancer un jeu simple et facile à comprendre (contrairement à Computer Space). Il sortira dans la foulée la borne d’arcade Pong, programmée par le génial Al Alcorn. Environ 10.000 bornes furent commandées, début du succès-story pour Atari !

     

     

     

     

    En 1973, c’est la création de Konani, une société japonaise de développement et d’édition de jeux vidéo, l’une des plus importantes et célèbres du secteur. En 1974, Nintendo sort un jeu d’arcade basé sur un pistolet optique : « Wild Gunman ». À ses débuts, en 1889, la société produisait des cartes à jouer japonaises : les Hanafuda. C’est à partir des années 1970 que Nintendo a diversifié ses activités en concevant des jouets et des bornes d’arcade. Elle a été l’une des principales sociétés précurseurs du jeu vidéo. En 1975, Taïto sort « Gunfight », le premier jeu à utiliser un vrai microprocesseur plutôt que des transistors.

     

     

     

    En 1976, La marque Coleco (Connecticut Leather Company) lance la Telstar, première console Pong utilisant des circuits intégrés (circuits analogiques auparavant), vendue 50$. On dénombrera neuf modèles différents et Coleco rencontrera un vif succès.

     

     

     

    La même année, Fairchild Camera & Instruments lance son « Video Entertainment System », renommé « Channel F », la première console à utiliser des cartouches et à disposer d’un microprocesseur. Du côté de chez Steve Jobs & Steve Wosniak, futurs fondateurs d’Apple et employés à l’époque chez Atari, ils mettent au point « Breakout », sur une idée de Nolan Bushnell ; un jeu révolutionnaire de nouvelle génération, un casse-brique, qui sera conçu et réalisé en seulement cinq jours.

     

     

     

    En 1977, Atari sort sa console Pong pour les foyers à 99$, l’Atari Pong C100, et passe à la vitesse supérieure en présentant dans la foulée une console de jeux ultra-puissante : l’Atari Video Computer System (VCS), renommée ensuite Atari 2600. A l’origine du projet, son petit nom de code était « Stella »… Elle sera lancée en décembre au prix de 199$, avec deux manettes et un jeu fournis. L’Atari 2600, c’est LA console mythique de l’histoire du jeu vidéo !

     

     

     

    Toujours en 1977, Nintendo embauche Shigeru Miyamoto et sort sa première console de jeu « Pong », conçue en collaboration avec Mitsubishi Electronic : la Color TV Game 6. Alors, Miyamoto, ce sera accessoirement le co-créateur des franchises Super Mario, Donkey Kong, The Legend of Zelda, Star Fox, F-Zero et Pikmin pour le compte de Nintendo. Certains des jeux de ces séries sont considérés comme les meilleurs de leur génération, comme Super Mario Bros., Super Mario 64 ou The Legend of Zelda: Ocarina of Time. Un bon petit gars plein d’avenir…

     

     

     

    1978, année majeure dans l’histoire du jeu vidéo… Taito Corporation sort « Space Invaders ». le jeu connaît d’abord un succès-monstre au Japon, avant de devenir le tout premier « Blockbuster » de l’histoire du jeu vidéo. C’est aussi le 1er jeu d’arcade qui sauvegarde le meilleur score. A partir de « Space Invaders », rien ne sera plus jamais comme avant…

    De son côté, Magnavox lance l’Odyssey 2 aux USA, pour tenter de concurrencer l’Atari 2600. L’Odyssey 2 possède un clavier permettant de rentrer son nom dans les jeux, ou même de taper de petits programmes basiques, sans pouvoir néanmoins les sauvegarder…

     

     

     

    1979… Je vous parle d’un temps que les moins de… de 50 ans ne peuvent pas connaître… Mais pour les autres, et plus particulièrement ceux nés entre 1960 et 1969, cette année 1979, c’est la double-peine. Tandis que les bornes d’arcade commencent à fleurir un peu partout en France, précipitant la disparition programmée des flippers et divers autres jeux mécaniques de cafés, Atari nous assénait un deuxième coup sur la tête, en sortant « Asteroids », en réponse au « Space Invaders » de Taito.

    « Asteroids » sort donc en novembre 1979. Le succès est absolument phénoménal, au point qu’il demeure le jeu d’arcade le plus vendu de l’histoire d’Atari, avec environ 70.000 unités produites. La demande fut si importante qu’Atari arrêta la fabrication de « Lunar Lander », le premier jeu vectoriel de la firme, sorti seulement trois mois plus tôt, pour augmenter la capacité de productions des bornes « Asteroids ». Deux cent unités « Asteroids » restèrent ainsi habillées d’un meuble « Lunar Lander »… Sega a par la suite exploité le jeu dans les salles d’arcade japonaises.

    Le 17 juin 1980, « Asteroids » et « Lunar Lander » sont les deux premiers jeux vidéo à être enregistrés au United States Copyright Office. « Asteroids » a ensuite été adapté successivement sur Atari 2600, Atari 7800, Atari 8-bit (1981), Atari 5200 (prototype seulement) et Game Boy (1991). Il est depuis régulièrement réédité sur des supports de nouvelles générations, notamment à travers des compilations comme « Atari Anniversary » et « Atari Anthology ».

     

     

     

    Depuis « Pong » sorti en 1972, le jeu vidéo n’a eu de cesse que d’évoluer. Après Super Mario Bros, le tout premier héros de jeu vidéo né en 1985, les premières consoles de jeu apparues au milieu des années 80, de Game Boy à Playstation, en passant par XBox, vont bouleverser l’univers du jeu vidéo. Au point qu’aujourd’hui, on peut vivre des histoires complètement dingues en ne bougeant pas de son canapé, dans une réalité complètement reconstituée.

    Et mieux encore, partager ces aventures et des émotions avec une infinité d’autres joueurs partout sur la planète, grâce au jeu vidéo en réseau. Aujourd’hui, un Français sur deux pratique un jeu vidéo de façon régulière. Autant d’hommes que de femmes, d’ailleurs… La moyenne d’âge des joueurs qui était de 21 ans en 1999 est aujourd’hui de 35 ans. Petits et grands, finalement, même combat…

    Et cerise sur le gâteau, un succès mondial qui permet à la France de pousser un grand cocorico, puisque selon le rapport annuel du Syndicat des Editeurs de Logiciels de Loisirs, la France est le deuxième plus important créateur de jeux au monde, après les Etats-Unis.

    Mais ça, c’est une autre histoire…