Catégorie : Télévision

  • Comment le titre de Phil Collins « In the Air Tonight » a influencé Michael Mann, le réalisateur de « Miami Vice »

     

     

    Il y a 40 ans, le 09 janvier 1981 précisément, sortait le titre « In The Air Tonight », premier extrait de l’album « Face Value » de Phil Collins. Ce morceau constituera la première incartade en solo du batteur / chanteur, suite à sa prise de distance avec Genesis deux ans plus tôt, et marquera le début d’une carrière très prolifique. A tous ceux qui avaient entre 15 et 20 ans en 1981, cette chanson parle forcément et rappelle quelques souvenirs gravés à jamais dans leur mémoire, entre slows langoureux et échanges de salive interminables…

     

    Dans « In The Air Tonight », Phil Collins exprime toute la colère ressentie suite au divorce d’avec sa première femme, Andrea Bertorelli. On y trouve ainsi des paroles d’une violence rare, telles que « If you told me you were drowning, I would not lend a hand » (« si tu me disais que tu te noyais, je ne te tendrais même pas la main »). Le chanteur dut d’ailleurs se justifier plus tard, en expliquant que la noyade à laquelle il faisait allusion était purement symbolique.

    « In The Air Tonight » devint le titre emblématique de la carrière de Phil Collins, pour sa production atmosphérique, l’originalité de sa structure, son thème sombre et l’intensité de sa rythmique. Avant qu’il ne sorte en single, Phil Collins proposa le morceau à son groupe de l’époque, Genesis, mais ses acolytes refusèrent de l’intégrer à leur répertoire, jugeant la chanson trop « simple ». Le succès de l’album « Face Value » fut tel qu’il incitera pourtant Genesis à changer ensuite radicalement de direction musicale. Le clip de la chanson, réalisé par Stuart Orme, a été parmi ceux diffusés le premier jour de lancement de MTV en 1984.

    Une légende contemporaine est née autour de cette chanson : les paroles feraient référence à un fait divers, à savoir une noyade accidentelle durant laquelle un proche de la victime ne lui vint pas en aide, tandis que Collins aurait été témoin de la scène mais n’aurait pas pu intervenir à temps. Parmi les différentes variations de cette légende urbaine, certaines prétendent que le chanteur aurait invité par la suite cette personne à l’un de ses concerts et l’aurait fixée du regard durant toute la chanson, ou bien qu’un projecteur aurait été braqué sur elle. Eminem fait également référence à « In The Air Tonight » dans son tube « Stan ». Le Stan en question, qui s’adresse dans la chanson à son idole, Eminem lui-même, compare sa situation personnelle à la noyade décrite dans la chanson de Phil Collins.

    Mais quel rapport avec Michael Mann et la série « Miami Vice », me direz-vous ?

     

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    I can feel it coming in the air tonight
    Oh, Lord
    And I’ve been waiting for this moment for all my life
    Oh, Lord
    Oh, Lord…

     

    Le 16 septembre 1984, deux mois après le lancement de la chaîne musicale MTV le 19 juillet de la même année, le premier épisode de la série « Miami Vice » produite par Michael Mann est diffusé sur le réseau NBC. « Miami Vice représentait un changement radical vis-à-vis de tout ce qui était produit pour la télévision à l’époque ». Pour la première fois, une série est construite autour de la musique qui est censée l’habiller. Et pour cause, le cahier des charges qualifie le projet de série « MTV Cops ». C’est ainsi que « Miami Vice » se distingue par sa mise en scène faisant constamment référence à la culture new wave et à la musique des années 1980, avec pour coeur de cible la « Génération MTV ».

     

    « J’ai beaucoup regardé MTV, à l’époque, et « In the Air Tonight » était mon morceau de musique préféré », dit Mann, qui réalisera et produira ensuite quelques monuments du cinéma des années 90, entre « Heat », « The Insider » et « Ali ».

     

    Ça n’est donc pas un hasard si nous retrouvons « In The Air Tonight » dans la playlist du premier jour de diffusion de MTV aux Etats-Unis en juillet 1984, dans le pilote de « Miami Vice » comme dans le tout premier volet de la série, intitulé « Brother’s Keeper », diffusé le 16 septembre 1984 sur NBC… Car Michael Mann conçoit chaque épisode comme un clip vidéo, où la musique est forcément omniprésente. Contrairement aux autres séries de l’époque qui utilisent des réinterprétations de chansons rock, les producteurs de « Deux Flics à Miami » destinent plus de 10.000 dollars par épisode à l’achat des droits d’auteur des tubes de l’époque. Et pour un musicien, pouvoir placer un de ses titres sur la série était immanquablement un gage pour stimuler ses ventes. De nombreux artistes ont ainsi vu une ou plusieurs de leurs chansons habiller des scènes de « Miami Vice ».

    Dans la bande-son de ce premier épisode, outre l’habillage musical du compositeur d’origine tchèque Jan Hammer, également responsable du générique, on retrouve The Rolling Stones, Cyndi Lauper, Lionel Ritchie et Rockwell. Quant au titre de Phil Collins, il illustre magistralement la séquence devenue culte, lorsque Ricardo Tubbs et Sonny Crockett, au volant de sa fameuse Ferrari Daytona Spyder noire, se rendent à un rendez-vous avec le trafiquant de drogue colombien Esteban Calderone. Le non-moins célèbre fill de batterie intervient au moment où Crockett sort d’une cabine téléphonique et monte à bord de la voiture.

     

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    « C’est probablement la séquence-prototype de Miami Vice », déclarait le réalisateur de l’épisode, Thomas Carter, au magazine TIME en 1985, tout en se félicitant d’avoir eu l’idée de génie d’utiliser la chanson de Collins pour cette scène.

     

    Mais parmi les centaines de titres qui furent utilisés dans les 108 épisodes de 52 minutes, ainsi que dans les trois épisodes de 90 minutes, Michael Mann avouera plus tard que c’est vraiment « In The Air Tonight » qui aura le plus collé au rendu visuel souhaité par le producteur. « Cette chanson est tellement bonne, en termes d’ambiance et de mélodie. Elle aura définitivement marqué de sa patte le programme ». Mann a étudié à la London Film School dans les années 60 et il cite souvent en référence « Alexandre Nevski », la composition de Sergei Prokofiev adaptée à l’écran par le réalisateur Sergei Eisenstein, « la plus parfaite collision entre la musique et l’image ».

    Car Mann voulait dès le départ insuffler à la série une sorte de sens hollywoodien du spectacle. « Avec Miami Vice, nous faisions des films d’une heure, pour la télévision ». Et qui dit cinéma et grand écran dit musique et bande-son. C’est ainsi qu’ils adoptèrent une méthodologie différente de ce qui pouvait se pratiquer sur les séries concurrentes de l’époque. Les rushes des épisodes étaient livrés chez Jan Hammer, qui jouait directement sur l’action qui se déroulait à l’écran, sans être dirigé par Michael Mann. Ce dernier n’intervenait ensuite que pour d’éventuels ajustements. Quant au montage final de chaque épisode, il se faisait en fonction de la bande-son, quitte à couper ou à raccourcir certaines scènes pour qu’elles collent parfaitement à la musique.

    A noter également que « Miami Vice » fut la première série-télé a être diffusée en stéréo. Tout ça pour dire, Michael Mann doit beaucoup à la chanson de Phil Collins…

    Pardon ? Comment ça, « In The Air Tonight » n’est pas un slow ?? Mais… Mais je me vois encore, à quinze ans, danser langoureusement sur cette chanson !

     

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  • Lupin : du mainstream sinon rien

     

     

    A l’heure des plateformes de streaming (Netflix, Canal+, OCS, Prime Video, Apple, HBO…), toujours plus compétitives en terme de contenu, où l’on nous propose des séries à la qualité qui dépassent souvent celle de certains longs-métrages de cinéma, « Lupin » tente le pari de réinventer le grand récit populaire, universel, en essayant de plaire à un maximum de spectateurs.

     

    Là où le principe même de la série a été révolutionné dès la fin des années 90, avec des contenus conçus pour toucher tel ou tel public en particulier (« Oz », « Six Feet Under », « The Wire », « Sopranos »…), avec l’idée que chacun pouvait avoir sa propre série, pour « Lupin », les auteurs ont quant à eux imaginé conquérir la plus large audience possible, maintenant et tout de suite, sans même choisir une cible en particulier, non… Avec cette nouvelle version de Lupin remis au goût du jour, c’est comme la devise des supermarchés : « Tout doit disparaitre ! » et « Grandes remises au rayon fromages ! »

    Arsène Lupin appartient au cercle de ces références emblématiques tirées de l’imaginaire collectif. Bien que les livres à la gloire du gentleman-cambrioleur n’aient jamais été ouverts par les plus jeunes, que la série avec Georges Descrières soit maintenant trop ancienne pour que la plupart d’entre nous s’en souviennent vraiment, ou que la chanson de Dutronc ne soit plus que rarement jouée à la radio ou à la télé, il y a malgré tout cette griffe, cette marque, qui est parvenue à traverser les décennies et évoquer encore aujourd’hui quelque chose au plus grand nombre. Et tout cela suffit à visualiser le personnage en frac et chapeau-claque, tour à tour élégant et sophistiqué, détroussant les baronnes de leurs bijoux tout en butinant leur cœur…

    Ce qui aurait pu tout d’abord paraître audacieux et original, en utilisant l’image consensuelle et sympathique d’Omar Sy pour incarner ce Lupin 2.0, va finalement très vite s’avérer aussi le principal défaut de cette nouvelle version du gentleman-cambrioleur. Le comédien originaire de Trappes, vivant désormais à Los Angeles, est pourtant incroyablement fédérateur. Il est incontestablement très aimé des Français, avec cette image réconfortante et joviale qu’il se trimballe depuis le SAV, avec son copain et faire-valoir Fred Testot.

    Seulement voilà, Omar Sy, n’est pas un très bon comédien. Et il ne l’a jamais été. C’est une nature. Il peut être drôle et il a le rire communicatif, l’oeil qui frise, certes, mais cela ne peut pas suffire quand il faut, tout au long d’une série, assurer des scènes plus dramatiques ; lorsque il est censé, par exemple, pleurer la mort d’un compagnon auquel il tenait particulièrement. Son jeu s’avère alors extrêmement limité. Ce qui semble être un comble, quand on sait quel héros emblématique il incarne, à savoir le maître du déguisement et du travestissement, celui qui peut être n’importe qui d’autre. Gênant…

    Sans même oser évoquer un autre problème de taille qui a ici son importance. Une importance capitale… Il est noir et aussi assez grand. Ce n’est donc pas très évident à se figurer le héros originel dans un tel récit, lorsque le personnage doit, à l’insu de tous, se dissimuler derrière une simple moustache et une casquette, devant les caméras de surveillance et divers autres dispositifs de contrôle. C’est là justement où intervient la fameuse « suspension d’incrédulité ». Le spectateur devra tacitement accepter tout et n’importe quoi, jusqu’à ce non-sens total. On assiste alors à des scènes pour le moins ridicules, durant lesquelles on diffuse des portraits-robots de Lupin, mais que jamais personne ne parvient à reconnaître le coupable. Exactement comme lorsque Superman enlève son costume, chausse des lunettes et devient Clark Kent, sans que personne ne fasse le lien entre les deux.

    Une autre maladresse qui plombe sacrément cette histoire de vol de collier et de vengeance larvée, c’est qu’en voulant cocher toutes les cases du progressisme, alors que la thématique du sujet ne demandait pas autant de zèle, l’intrigue et les protagonistes vont voir leur quête court-circuitée par des petits moments embarrassants, comme si on nous balançait, au moment le moins opportun, des spots télé contre le racisme, la violence faite aux femmes ou tout autre sujet lié à l’actualité sociétale du moment. Ainsi, à plusieurs reprises, on nous sert à la louche des sorties totalement hors sujet, liées à des revendications féministes ou, concernant le héros, à des interactions avec des protagonistes racistes comme on en fait plus.

    Des allusions douteuses et grossières, voire des comportements ignobles, émanant de surcroît de personnages qui dans la vraie vie n’auraient jamais l’occasion de se comporter de la sorte. Ce commissaire-priseur, par exemple, ou encore cet homme d’affaire immensément riche et extrêmement cultivé, qui a forcément par son travail des relations professionnelles avec toutes sortes de nationalités. Et tout deux se permettraient de plaisanter sur sa couleur de peau ou sur son appartenance à telle ou telle espèce de primate ? Désolé mais ça ne fonctionne pas car c’est juste inconcevable. Les dialoguistes arrivent ainsi à mettre dans la bouche de leurs acteurs des allusions ou des formules dignes des pires beaufs racistes façon Dupont-La Joie, ou d’enfants dans la cour de récréation. Tout ceci rend finalement l’ensemble maladroit et stupide.

     

    Alors, si on accepte avec mansuétude, comme postulat de départ, ces choix éditoriaux putassiers, pour se focaliser sur ce qu’on tente de nous vendre, à savoir le grand évènement Netflix du moment, la série popcorn et ultra-fun par excellence, le feuilleton qui pourrait même détrôner « La Casa del Papel »… Eh bien, comment dire… Oups…

     

    Il résulte de ces choix pour le moins hasardeux qu’avec « Lupin », on a très vite l’impression de regarder une série policière TF1 sous anabolisants, croulant sous de multiples références mal recyclées (à commencer par « Thomas Crown » et « Le Prestige »…). Mais une série TF1 quand même… La réalisation est certes nerveuse et rythmée, avec des plans très courts, surtout pour éviter au spectateur de trop se concentrer sur la piètre qualité de la mise en scène comme de la photographie. Afin de donner une vague impression d’opulence et apporter à l’ensemble une ampleur « cinématographique », mais surtout pour masquer la pauvreté des décors, on saupoudre le tout de plans tournés avec un drone et de mouvements de caméra circulaires, trop systématiques pour être honnêtes.

    Il y a bien quelques scènes d’action, surtout concentrées dans le premier épisode, avec le vol du collier au Louvre, mais qui là aussi paraissent au final bien cheap. Car tout est bien trop mécanique et terne. Le récit et les enjeux manquent quant à eux d’immersion. Quitte à tourner avec peu de moyens, on aurait pu imaginer une mise en scène plus organique, collant plus aux semelles des personnages. En l’état, on se contente de travellings inutiles, qui tentent de donner le change à des scènes toutes aussi statiques les unes que les autres.

    Si la réalisation reste dans l’ensemble assez fluide et le rythme des épisodes sans temps mort, c’est d’abord lié au fait que les acteurs doivent débiter leur texte très vite, trop vite, probablement dans le but de ne pas ennuyer un spectateur ingrat, sevré au zapping intempestif, télécommande dans une main et téléphone portable dans l’autre.

    Côté scénario, là encore, force est de constater que tout est téléphoné de bout en bout, en enfilant des coups de théâtre et des surprises émoussés, avant même qu’ils ne produisent l’effet escompté, comme avec un collier de nouilles. Peut-être un bon point pour les flash-backs et notamment le jeune acteur qui interprète le rôle-titre à 15 ans. Probablement les passages les plus réussis du programme, parce qu’ils apportent justement un peu de pose et de romantisme.

    Si Omar Sy prodigue autant de sympathie et de chaleur autour de lui, malgré son jeu calamiteux, dans le registre du charme et de l’humour, qu’en est-il du reste de la distribution ? Il est évident que dans cette production, la direction d’acteur importe peu. Tous les comédiens font ce qu’ils peuvent pour faire exister leur personnage, mais là encore, on croit voir un feuilleton estampillé TF1. Les policiers, en tête, sont réduis à une somme de clichés et de lieux communs assez consternants. Alors, face à ce constat d’échec à renouveler le genre, où chercher d’autres pistes pour donner du relief  à tous ces rôles ?

    Il y a bien Nicole Garcia (on se demande bien ce qu’elle vient faire dans cette galère, sinon cachetonner…) qui apporte un peu de grâce et de tact, avec sa classe habituelle. Une bonne histoire de ce genre, c’est aussi un antagonisme réussi. Ici, le salaud de service est totalement raté. Voilà un méchant tout droit sorti d’un épisode de « Joséphine Ange Gardien » ou de « Scoubidou » (mais pourquoi est-il aussi méchant ?… Pasqueeeeeuuu !!). Alors en effet, oui, Il est très très méchant, odieux, colérique, vociférant, sans une once de subtilité, affublé de tous les défauts de la terre et bien raciste, en prime. On a du mal à croire d’ailleurs qu’il ait pu rester marié tout ce temps avec son épouse incarnée par Nicole Garcia, qui semble plus mesurée, concrète, réelle.

    Au final, c’est tout au plus embarrassant et grossier, car on sent tellement dans cette version de Lupin l’envie de caresser sans cesse le spectateur dans le sens du poil et de le placer évidemment du bon côté du manche. Des gens riches, cons et racistes. Des policiers débiles, au Q.I. pas plus élevé que celui d’une vache, et un héros qui touche à peine le sol. Parce qu’il serait noir et que ce genre de rôles est rarissime dans le paysage audiovisuel comme cinématographique, on devrait donc tous être cléments et juger du bien-fondé de l’entreprise, en fermant les yeux sur l’incurie de ce que l’on nous propose ? On y voit là une sorte de discrimination positive balourde, où on nous explique qu’importe si tout cela est intrinsèquement de qualité ou pas. Non, le héros est noir et ça c’est vraiment super !

    Soit…

    Régulièrement tartignole dans sa manière de voir notre époque, voulant coller à l’actualité et avec ce souci constant de tout aseptiser, « Lupin » loupe pas mal de coches et se vautre dans la veulerie la plus crasse.

    Quant à l’histoire et ses péripéties, tout semble tellement simple et plié d’avance, pour ce héros bien falot et sans substance. Jamais on ne le voit préparer ses tours de passe-passe. On a beau nous le montrer dans son repaire de Fantômas, enfoncé dans son gros fauteuil design Habitat, avec tous ses écrans et ses costumes en fond, jamais on ne sait comment il parvient logistiquement à mettre au point ses coups seul, sans équipe ou presque. Il a bien un ami d’enfance, un brocanteur fadasse, mais très gentil.

    A force de trop d’ellipses et de deus ex machina, toutes ces facilitées scénaristiques tuent l’histoire globale et donnent l’impression que l’on regarde une longue bande-annonce à la gloire de ce héros. Aucune difficulté ne semble le contraindre ou le mettre dans l’embarras. On devrait donc appeler cette série « Super Arsène », tant son héros semble sorti tout droit d’un Marvel, plutôt qu’inspiré des écrits de Maurice Leblanc.

    Le Lupin de Netflix a toujours trois longueurs d’avance sur tout. Il a le don d’ubiquité, est passe-muraille ou peut encore changer la matière à sa guise. C’est Thanos, en fait. Le mot d’ordre ici, c’est « ta gueule, c’est magique, c’est comme ça et voilà, circulez ! ». À croire que le simple fait d’avoir hérité de son père cet « Arsène Lupin, gentleman-cambrioleur », qui va d’abord devenir le livre de chevet du jeune Assane Diop, va ensuite conférer au héros une somme de pouvoirs magiques qui lui permettront de réaliser tous les tours dont il nous gratifie tout au long de ces cinq premiers épisodes.

    Bref, une série française de plus qui fait « sploutch » pour avoir voulu plaire au plus grand nombre, qui a tout misé sur le crédit sympathie de son acteur principal en faisant l’impasse sur tous les autres personnages. Des péripéties mal fichues et rarement excitantes. Le jeu binaire de la plupart des comédiens qui, hélas, n’ont pas grand chose à se mettre sous la dent en terme de développement psychologique. Quant au succès et à l’engouement que « Lupin » connaît, il faut admettre que c’est un sacré mystère, lorsque l’on sait que les mêmes fans qui crient ici au génie vont aller chipoter sur le final d’autres séries définitivement plus dingues.

    Les moins convaincus se contenteront de trouver la série agréable, sympa, fraîche, malgré son avalanche d’improbabilités, de paresses scénaristiques et d’acteurs sous-employés… Bien, bien, bien… En tout cas, « Lupin » bénéficie un peu partout d’une incroyable bienveillance, pour ne pas dire d’un assentiment unanime. Comme quoi, les goûts et les couleurs…

     

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  • Les Barbapapa ont 50 ans !

     

     

    Avec cette année 2020 qui vient tout juste de s’achever, et qui aura été si particulière à bien des égards, nous avons presque failli oublier que les Barbapapa avaient fêté leur cinquantième anniversaire. Comment ça, les Barbapapa ont cinquante ans ?! Eh oui, déjà, car c’est bien en 1970, précisément le 19 mai, à Paris, que Talus Taylor et Annette Tison imaginaient ces personnages parmi les plus mythiques de la télévision française des années 70.

     

    L’histoire commence comme ça, au débotté, par le petit bout de la lorgnette… Annette et Talus se promènent paisiblement au jardin du Luxembourg. Soudain, Talus Taylor est perturbé par les cris stridents d’un enfant, sans doute insupportable, même pour l’époque, réclamant à ses parents une chose qu’il balbutie en ces termes : « Baa baa baa baa ».

    Talus Taylor, ne parlant pas français, demande aussitôt à Annette Tison ce que le « petit chiard » a voulu dire. Dans la seconde, et sans reprendre son souffle, Annette Tison lui explique que le bambin réclame tout simplement une friandise… dont le nom est « barbe à papa ». Et voilà !

    Un peu plus tard, au restaurant, le couple se met à dessiner sur la nappe un personnage inspiré par la friandise… Le résultat est rose et tout en rondeur. Et lorsqu’il s’agit de lui donner un nom, Barbapapa s’impose tout naturellement.

     

    « En me promenant dans le jardin du Luxembourg, ne comprenant pas le français, j’entendais les enfants prononcer « Baa baa baa baa », j’ai demandé à Annette Tison ce que ça voulait dire. Elle a rigolé en me disant que c’était de la barbe à papa, car avant d’être colorée en rose, la barbe à papa était blanche, comme celle du grand-père. Un peu plus tard, au restaurant, nous avons dessiné sur la nappe notre nouveau personnage. Et puis, il a fallu lui donner un nom. Nous sommes tombés d’accord sur Barbapapa, et comme je ne savais pas le prononcer, je ne savais pas non plus l’épeler, et je l’ai écrit en un seul mot ! C’est ainsi que Barbapapa est né, un peu au Jardin du Luxembourg, et un peu sur le coin d’une nappe en papier de la Brasserie Zeyer. » (Talus Taylor)

     

    Un très bon anniversaire aux Barbapapa et accessoirement à notre enfance !

     

    La famille Barbapapa, créée en 1970 par Talus Taylor et Anette Tisson

    © 2020 Alice Taylor & Thomas Taylor (All Right Reserved)

     

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  • Six Feet Under : la mort, cette soeur, cette mère, cette amie…

     

     

    C’est dans la même veine que des séries télé telles que « Oz », « Deadwood », « The Wire » (« Sur Ecoute »), « Carnival Row », « The Sopranos » ou « Rome », toutes diffusées sur HBO et devenues des références en la matière, que se situe « Six Feet Under ». Il faut dire que dès 2000, la chaine câblée envoie du très lourd, avec tous ces programmes inventifs, audacieux et précurseurs, chacun dans son thème.

     

    Et il faut admettre que ses concurrentes directes auront bien du mal à donner le change. HBO va ainsi rayonner pendant au moins dix ans, sans aucune ombre au tableau ni adversaire digne de ce nom pour venir lui disputer sa place. Quant à Alan Ball, le créateur de « Six Feet Under », il avait fait sensation au cinéma deux ans plus tôt avec son film « American Beauty », une fable grinçante qui disséquait au microscope la société américaine et ses grands thèmes inusables, entre famille, sexe, argent et mort.

    Avec cette série en cinq saisons, Alan Ball souhaite approfondir encore ces mêmes sujets, mais en poussant au maximum tous les curseurs. Ce qui l’intéresse avant tout, cette fois-ci, c’est d’aborder plus particulièrement le thème universel de la mort. Alors quoi de plus logique pour cela que de situer l’histoire de « Six Feet Under » au sein d’une famille à la tête d’une entreprise de pompes funèbres. Tout va donc s’articuler autour du quotidien de la famille Fisher. Et chaque épisode obéira au même rituel, avec en ouverture le décès d’une personne différente.

    Dans « Six Feet Under », on assiste ainsi à un festival de morts atroces, voire absurdes ; cette grande roue de la fortune pour chacun de nous, et la mort qui la fait tourner. Cette dernière a en plus de l’humour à revendre. Avec cette série, en parallèle à l’évocation de la vie privée des divers personnages, nous découvrons tout ce qui tourne autour de l’activité de pompes funèbres, entre l’accueil des familles endeuillées, l’embaumement et les différentes étapes de la préparation des corps.

    Dès le premier épisode de la saison une, Alan Ball nous met à l’aise avec le sujet central de la série et il est donc hors de question pour lui d’édulcorer les aspects les plus durs de cette profession et de tout ce qui s’y rattache. Alors rien ne nous sera épargné. Il va nous falloir affronter la grande faucheuse droit dans les yeux…

    La force de cette histoire, racontée de façon « balsacienne », avec moult détails et une précision d’antomologiste, c’est qu’en même temps qu’elle nous saisit, nous foudroie, elle ne cherche jamais à nous intimider pour autant. On suit le parcours de chacun des personnages, dans tous les cas de figure, de l’insignifiant, du détail trivial aux grandes étapes de sa vie. On va ainsi les suivre jusqu’au bout, jusqu’à leur propre mort aussi.

     

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    C’est ce qui rend cette série si précieuse et bouleversante, finalement. Car jamais cela ne s’était produit, dans la trajectoire d’un récit conçu pour la télévision. On peut bien-sûr perdre tel ou tel personnage en route, ou nous laisser le bénéfice du doute concernant le destin de chacun. Mais ici, non. Chaque personnage est écrit, détaillé, de telle manière qu’il devient à la longue une extension de nous-même.

    Dès le tout début du premier épisode de la saison une, le personnage dont on peut raisonnablement penser qu’il est central, meurt dans un accident de voiture. Le ton est donné. Dès lors, on ne pourra plus s’appuyer sur aucun rempart ni aucune référence. Chacun des épisodes constituera une expérience immersive dans la vie de ces gens, avec leurs qualités, leurs défauts, et jamais rien ne nous permettra de penser que quoi que ce soit leur est acquis.

    Ce qui apporte également tout son sel à « Six Feet Under », ce sont ces morts qui parlent aux vivants, avant que ceux-ci ne trépassent à leur tour. Cette idée, qui n’est pas forcément originale, va pourtant servir, tout au long de la série, de passerelle entre les personnages et eux-mêmes, finalement. Quand on se ment en permanence, qu’on élude certaines questions, pour remettre à plus tard le moment où il faudra forcément les affronter, on prend le risque de se retrouver dans une impasse dont il sera impossible de s’échapper.

    Notre présence en ce bas monde est brève et la lisière entre vie et mort est aussi mince que du papier à cigarette. Il faut donc tâcher de regarder les choses en face le plus vite possible, pour éviter de souffrir aussi longtemps qu’il nous en sera possible.

    La famille Fisher, tout d’abord perçue comme dysfonctionnelle, va se révéler finalement bien ordinaire, à tel point que le mimétisme et l’empathie nous sautent à la figure très rapidement. Alan Ball et ses scénaristes prennent le temps d’exposer tous les sujets qui leur tiennent à cœur et rien n’est laissé au hasard. Tour à tour, on déteste chacun des personnages pour en préférer d’autres, avant que ceux-ci ne tombent également en disgrâce, pour finir par revenir sur le podium.

    Au final, on tremble pour chacun d’eux, tant il est clair qu’au fil des épisodes, ils deviennent des proches. Car cette famille pourrait être la vôtre, avec tout ce que cela comporte de mensonge, de lâcheté, d’hypocrisie, d’arrogance et de faux semblants. Et on se reconnaît aisément dans tous ces traits de caractère. Rarement une série aura aussi bien dépeint l’être humain dans ce qu’il a de plus organique. Et rien ne nous sera épargné jusqu’au final. Seule certitude à la fin : c’est de toute façon toujours la mort qui a raison.

    Avec « Six Feet Under », le créateur de la série ne se concentre pas seulement sur le scénario. Ce sont aussi des formes qui sont inventées. Et ces formes qui s’expriment, sont belles. À commencer par les fondus qui ne sont pas noirs mais blancs. Cela confère à l’ensemble un certain détachement, comme pour nous prévenir… « Attention, ne vous attachez pas trop à tout ce que vous vivez, que vous voyez ou que vous aimez. Votre passage sur terre est bref. Concentrez-vous alors sur l’essentiel. »

    Alan Ball instille également de la facétie dans ses récits, avec des ruptures de ton, des inserts étonnants, comme par exemple ces séquences de comédies musicales. Il y a bien-sûr la musique du générique et le son de la clarinette qui, là encore, apporte une certaine légèreté, voire une dissonance, au sujet qui va être traité. Dans ce générique, cette imagerie s’y matérialise sous la forme de symboles forts, à commencer par ces deux mains qui se lâchent en une gestuelle gracieuse et élégante, puis la représentation de la mort, avec la morgue, le cimetière, le cercueil, la pierre tombale et le corbeau, l’ultime témoin de tout cela…

    Ce qui prédomine finalement et qui rassure, c’est la douceur et la délicatesse avec lesquelles on nous explique que cela ne sert à rien de s’évertuer à trop vouloir se cramponner, et qu’il faut savoir lâcher prise, quand le moment l’exige. Certains diront que c’est la manière protestante de voir les choses et de les appréhender au mieux.

    Reste qu’arrivé à la conclusion des cinq saisons et de leur ultime épisode, on se sent triste de quitter des personnages qui nous ont semblé si familiers, mais en même temps apaisé, libéré d’un poids. Les derniers plans sont tellement magnifiques qu’on pleure, bien-sûr, mais probablement de soulagement. Claire quitte le foyer pour enfin partir vivre sa propre existence. Dans le rétroviseur de sa voiture, on voit un instant Nathaniel, en joggeur, courir sur le trottoir comme il le faisait si souvent, puis on le dépasse et sa silhouette s’estompe. Il disparaît.

    Apprendre à continuer à exister malgré tout, sans nos chers disparus, et vivre heureux, coûte que coûte, en attendant la mort. Cette ineffable, surprenante, irrévérencieuse et ponctuelle mort que l’on appréhende avec tant d’interrogations. La série « Six Feet Under » aura en tout cas tenté de répondre à toutes nos questions.

     

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  • Chapeau Melon et Bottes de Cuir : « Pop » font les bulles de champagne

     

     

    Diana Rigg nous a quittés le 10 septembre de cette année. Inutile de rappeler qu’elle aura interprété l’un des personnages les plus iconiques des années 60, dans une certaine série britannique intitulée « The Avengers », plus connue en français sous le nom de… « Chapeau Melon et Bottes de Cuir ».

     

    Et vous l’aurez compris, nous parlons évidemment de Madame Peel… Car ce personnage apparu sur le petit écran en 1965, dans la quatrième saison de « The Avengers », aura sûrement été à cette série ce que Sean Connery fut à la franchise James Bond, à savoir une évidence. Avec Emma Peel, nous avons bel et bien affaire à la plus iconographique, la plus charismatique et la plus charmante représentante de cette Angleterre des années 60, en pleine ébullition sociale, vestimentaire et artistique. Durant trois années, de 1965 à 1967, soit trois saisons et 51 épisodes, Diana Rigg symbolisera à elle seule le « Swinging London » ; toute une esthétique, presque une philosophie.

     

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    Dès le générique, avec sa musique enjouée, lyrique et pop, signée Laurie Johnson, nous voici instantanément transportés dans un monde où les règles tangibles sont abolies. Il ne règne plus ici que classe, fantaisie, humour et style. Cette séquence d’introduction gravée dans notre psyché, où l’on nous présente deux personnages flegmatiques en diable, « So British », illustre parfaitement le contenu du programme. Même si nous sommes à une époque où l’on peut encore faire référence à l’alcool sans risquer de s’attirer les foudres des ligues de morale – et dieu sait que le champagne coule à flot tout au long des épisodes – ce champagne qui gicle d’une bouteille sabrée au colt appartient à ces symboles utilisés pour exprimer toute la légèreté, l’insolence, voire l’insouciance de la création de Sydney Newman.

     

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    Du souvenir indistinct de notre enfance où nous regardions, sidérés, ce feuilleton, c’est bien cette femme bardée de cuir, spécialiste en art martiaux et en bons mots, qui s’avance en premier dans notre mémoire sélective. Purdey et ses jambes interminables, associée au fringant Mike Gambit, Tara King et sa mine insupportablement ingénue, ou encore Cathy Gale, la toute première héroïne du programme, n’auront pas su vraiment tenir la dragée haute à Emma Peel et relever le défi de marquer durablement une époque et de cristalliser tout un basculement.

    Pourtant, pas de mini-jupe plissée ou autres tenues trop sexy… Pas plus de tubes de l’époque que de revendication vindicative à portée politique, pour une émancipation de la femme. Non, Emma Peel est représentée comme l’égale de John Steed, ni nunuche (Tara King), ni jouant de ses attributs féminins (Purdey), pour séduire ou tromper l’ennemi. Tout s’établit dans un parfait équilibre, agencé et maîtrisé. Nous aimons ce personnage totalement libre, d’une intelligence rare, sachant donner le change le cas échéant, à coups de mawashi geri dans la tronche des importuns.

     

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    Bien-sûr, « Chapeau Melon et Bottes de Cuir », c’est aussi John Steed, interprété par Patrick Macnee, présent tout au long des quinze années que dura le show, affichant une constance à toute épreuve, avec ce semi-sourire et l’œillet invariablement à la boutonnière. Mais de toutes celles qui l’accompagneront durant ses péripéties et ses enquêtes loufoques, c’est encore et toujours elle, Madame Peel, qui se rappellera à notre bon souvenir. Son regard, avec ses yeux soulignés au eye liner, si reconnaissable, sa coupe de cheveux et ses combinaisons zippées signées Pierre Cardin.

    L’autre particularité de cette série, lorsque l’on revoit des épisodes au hasard des saisons, avec au programme des cybernautes, des rats géants, des méchantes nannies qui se révèlent être en fait des hommes grimés, assis sur des fauteuils roulants dont les accoudoirs sont équipés de mitraillettes, des savants fous… c’est bien la folie, la liberté totale proposée épisode après épisode. C’est ce mélange subtil d’absurde, d’humour noir et de flegme, qui devient le signe reconnaissable entre tous de nos voisins Britanniques, et qui est poussé ici à l’extrême.

    Rares sont les programmes de cette époque qui peuvent ainsi encore être regardés aujourd’hui, avec toujours autant de plaisir et de délectation. « Le Prisonnier », « Les Mystère de l’Ouest », ou même « Les Envahisseurs », gardent encore peut-être aussi cette aura qui transcende le sujet même de leur contenu. Etrangement, on ne relève plus le manque de moyens évident, certains décors approximatifs ou des acteurs secondaires moyens. Car ces séries ont su bâtir des mondes uniques, des dimensions parallèles qui malgré les années qui défilent, resteront des objets de fascination uniques en leur genre.

     

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    Plus encore que de la simple nostalgie, « Chapeau Melon et Bottes de Cuir » correspond précisément à ce courant libertaire, jamais contraint à des modes ou des enjeux économiques, dans le but de plaire à tels publics plutôt qu’à d’autres. Pour preuve, cette série restée dans les annales n’a jamais été copiée, jamais égalée dans sa dinguerie et sa singularité. Si, peut-être, peut-on retrouver parfois ce ton surréaliste dans le jeu des acteurs d’une autre série britannique en deux saisons, diffusée sur Channel 4 en 2013, « Utopia ».

    Mais c’est quoi, au juste, un genre, une atmosphère à la « Chapeau Melon et Bottes de Cuir » ? Eh bien, c’est d’abord une certaine étrangeté, mais aussi des rues de Londres vidées de leurs passants, des détails, des objets usuels, anodins, qui peuvent finalement se révéler dangereux, voir létaux, ou encore des jouets, comme des petits ballons, recyclés en armes mortelles. Et puis, ce sont également ces méchants débonnaires et souriants, le tout baigné dans un parfum décalé et absurde.

    Dans le dernier James Bond officiel avec Sean Connery au générique, « Les Diamants sont éternels » (1971), on retrouvait ainsi ce ton enjoué et loufoque, en particulier dans les agissements des deux tueurs placides, Mr Wint et Mr Kidd, engagés pour assassiner notre agent secret au service de sa Majesté, sorte de duo à la manière des Dupont et Dupont, mais en version psychopathe.

     

     

     

    Si on devait dresser la liste des références qui nous viennent à l’esprit en pensant à cette série, il y aurait tout d’abord le peintre René Magritte et son tableau « L’Homme à la Pomme », pas uniquement pour le chapeau melon que le personnage de la toile arbore, mais pour cette composition incongrue où sont convoqués en même temps l’humour et le non-sens.

    « Chapeau Melon et Bottes de Cuir » restera ainsi à tout jamais la référence pop absolue, et plus particulièrement ces trois saisons avec madame Peel, au diapason de cette époque bénie ; pétillant et léger comme des bulles de champagne, stylé comme les costumes de John Steed et les combinaisons de sa coéquipière, fantasque et poétique, cette vision d’un monde sans trace de mauvais goût, où même les vilains restent polis…

     

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  • Les Mystères de l’Ouest, délicieusement décalés

     

     

    Quatre saisons diffusées aux Etats-Unis de 1965 à 1969 sur le réseau CBS et à partir de 1967 en France, dont la première en noir et blanc, soit 104 épisodes au total, font des « Mystères de l’Ouest » probablement l’une des séries les plus originales des années 60-70.

     

    « Les Mystères de l’Ouest », étonnant mélange de western, de science-fiction et de fantastique, saupoudré d’une bonne dose d’humour et de dérision, nous racontent les aventures trépidantes de James West et Artemus Gordon, deux agents très secrets au service du président Ulysses S. Grant, dans les années 1870. Pour les besoins de leur mission, les deux compères vivent et se déplacent à travers l’Ouest américain à bord d’un train luxueux.

    West et Gordon, deux hommes prêts à tout pour faire respecter la loi et déjouer les plans nécessairement infâmes d’ennemis de l’ombre, parmi lesquels le célèbre docteur Miguelito Loveless, homme de petite taille mais grand esprit malfaisant ; un génie du crime capable de créer d’improbables machines meurtrières pour ourdir de terribles complots contre les Etats-Unis d’Amérique.

    Le personnage du Dr Loveless, qui apparaît dans dix épisodes des « Mystères de l’Ouest » entre 1965 et 1968, certains parmi les meilleurs de toute la série, est incarné par le génial Michael Dunn. Génial n’est pas un vain mot, tant l’acteur était doté d’un quotient intellectuel hors du commun (178, soit 18 points de plus qu’Albert Einstein). Il commence en effet à lire tout seul à l’âge de trois ans, gagne peu de temps après plusieurs concours d’orthographe nationaux. Très doué pour le piano et doté d’un beau brin de voix, il se lance dans une carrière de pianiste de jazz, mais il rêve de faire carrière au cinéma. Michael Dunn est hélas atteint de nanisme et souffre de malformations osseuses qui rendent ses déplacements difficiles.

    Malgré son handicap, il pratique néanmoins divers sports – comme la natation et le patinage – et exerce de nombreux métiers, dont celui de détective dans un hôtel, avant de débuter sa carrière au cinéma et à la télé à l’âge de 28 ans. Il jouera dans plusieurs films, surtout d’horreur, et sera nommé pour l’Oscar du meilleur acteur de second rôle dans « La Nef des Fous » en 1966.

    Mais le rôle qui le rend célèbre est définitivement celui du savant fou des « Mystères de l’Ouest ». Véritable génie du mal, Loveless est cependant un méchant des plus sympathiques, grâce à sa verve, sa bonne humeur et les numéros de chant et de musique dont il nous gratifie à chacune de ses apparitions. Déguisé en Robin des Bois, Shérif d’une petite ville emprisonnée dans un tableau dans lequel il a piégé les autres personnages, Michael Dunn écrase de sa petite taille ses partenaires, par sa présence et son jeu d’acteur. Il chante, joue du piano et danse, cabotinant sans cesse pour notre plus grand plaisir…

    Les épisodes des « Mystères de l’Ouest » se caractérisent par un schéma immuable. Nos deux héros sont confortablement installés dans leur train luxueux. Ils se voient confier une mission et se rendent sur les lieux soit en train soit à cheval. Un groupe de malfrats dirigé par un grand méchant – souvent fou et qui rêve de diriger le monde, à l’instar de la série des James Bond – commet des exactions.

    Jim se fait ensuite capturer, souvent après avoir cédé aux charmes d’une femme perfide. Artie, qui pratique à merveille l’art du déguisement et qui utilise des gadgets sophistiqués, vient à son secours. Nos deux amis parviennent à s’échapper, grâce à l’ingéniosité d’Artie (Ross Martin) et aux talents physiques de Jim (Robert Conrad), et finissent par mettre hors d’état de nuire les méchants.

    Les moyens de la série, malgré des costumes raffinés et des décors luxueux, se révèlent assez limités. Les malfrats sont toujours incarnés par le même groupe de cascadeurs, que l’on reconnaît très vite au fil des épisodes. Nos héros arrivent toujours dans la même demeure, dont le hall et l’escalier nous sont rapidement familiers. La balustrade de la galerie à l’étage est invariablement brisée, suite à la chute du bandit avec lequel Jim se bat…

    Tout le monde se souvient ainsi du jour où la série débarqua en France en 1967, pour ensuite compter à partir de 1973 parmi les programmes phares de l’émission « La Une Est à Vous », produite par Guy Lux et présentée par le regretté Bernard Golay. Les téléspectateurs tombèrent vite sous le charme des aventures rocambolesques, anachroniques et uniques en leur genre, dans la production télévisuelle de l’époque.

     

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    Impossible d’oublier ce générique animé, où l’on voyait un cow-boy entrer dans un bar, terrasser un ennemi invisible d’un coup de revolver avant d’assommer d’un uppercut une jeune femme qui s’apprêtait à poignarder notre beau héros. Oui, le politiquement correct n’était pas encore passé par là. Les histoires faisaient trembler et rien que les titres nous promettaient quelques délicieux frissons ; « La nuit du lit qui tue », « La nuit du détonateur humain », « La nuit des barreaux de l’enfer », « La nuit de la machine infernale » ou encore « La nuit de l’engin mystérieux »… Autant de nuits restées depuis gravées dans nos mémoires.

    Tout cela faisait trépigner les enfants que nous étions, et d’autant plus que tout se finissait bien… Nos deux comparses remontaient ensemble dans le train qui leur servait de quartier général et repartaient sillonner l’Amérique, vers de nouvelles missions tout aussi périlleuses. C’était il y a bien longtemps, mais la série mérite toujours autant d’être redécouverte, même s’il n’est plus question de la regarder avec la naïveté d’autrefois.

    Car l’originalité de la série réside également dans son double niveau de lecture. Première série délibérément gay de l’histoire de la télévision, sous l’influence de son producteur Michael Garrison qui, contrairement aux moeurs de l’époque, affichait ouvertement son homosexualité, « Les Mystères de l’Ouest » assume ainsi un côté parodique et échevelé, avec une volonté évidente de liberté et d’autodérision, à commencer par son titre original, « Wild Wild West ».

    Il est fort probable que cette caractéristique ait pu échapper à l’époque aux jeunes téléspectateurs  que nous étions, mais c’est définitivement ce qui a désigné « Les Mystères de l’Ouest » comme « la grande série classique la plus mal comprise de l’histoire de la télévision », ainsi que le mentionnent Martin Wincker et Christophe Petit dans leur « Guide Totem des Séries Télé ».

    Et effectivement, en y regardant de plus près, on remarquera d’abord les costumes très ajustés de nos deux héros, notamment celui de Robert Conrad, alors qu’aucune autre série western classique ne moulera autant le corps de ses acteurs. Et puis quelques plans rapides, quasi subliminaux, nous offrent un gros plan sur les fesses de Jim, là aussi impensable dans une série diffusée à l’époque, de surcroît destinée au grand public…

    Dans la plupart des épisodes, Jim est capturé et exposé, parfois même écartelé, pantalon ultra-moulant et torse nu, dans des positions à la limite d’une revue SM… Tandis qu’Artemus Gordon se travestit régulièrement en femme, haussant le timbre de sa voix et semblant prendre un plaisir immodéré à cet exercice de travestissement en talons hauts. Et ça ne semble pas être que pour les besoins de sa mission… Artemus Gordon, premier drag queen de la télé ? Ça pourrait faire sens…

    James ne tombe jamais amoureux, même s’il semble se laisser parfois séduire. Des femmes sont souvent invitées à bord du train, à la fin des épisodes, mais elles ont plutôt « un rôle décoratif » et sont probablement débarquées à la station suivante, laissant nos deux héros savourer leur intimité retrouvée… Deux hommes vivant dans un train, symbole ô combien équivoque, qui ne laisse guère de doute quant à leur orientation sexuelle.

    L’esthétique sado-masochiste, qui nous aura probablement échappé à l’époque, semble encore davantage s’affirmer dans les épisodes où apparaît le Dr Loveless, jaloux du corps d’athlète de James West. Pour s’en convaincre, un court extrait du dialogue final de l’épisode « La nuit du printemps meurtrier » (Saison 01, Episode 27). Nos deux amis regardent d’un air triste le lac dans lequel Miguelito vient de se noyer – du moins le croient-ils – et ça donne :

    Artemus : « Tu ne veux pas le croire mais c’est ainsi, il est mort. »
    James     : « Tu as peut-être raison. La haine est un lien aussi fort que l’amour. »
    Artemus : « Que veux-tu dire ? »
    James     : « Il va me manquer. »

     

    Alors, avec « Les Mystères de l’Ouest », aurions-nous affaire à la toute première série crypto-gay de l’histoire ? Pourquoi pas, sachant que son créateur Michael Garrison était un homosexuel affirmé et assumé ; une transgression audacieuse et plutôt légère pour l’époque, qui nous invite à la regarder désormais d’un œil moins naïf et plus coquin. Honni soit qui mal y pense…

    En tout cas, « Les Mystères de l’Ouest » reste encore aujourd’hui la série western la plus originale de l’histoire de la télévision. Mécomprise, elle mérite d’être redécouverte pour en saisir toute l’ironie, l’inventivité et ce décalage délicieusement absurde qui lui permet finalement de ne pas trop prendre de rides et de fêter cette année son 55ème anniversaire. Allez, pour finir, découvrons (ou redécouvrons) l’épisode 01 / Saison 01 datant de 1965.

     

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  • Retour sur la série anglaise mythique des 90’s : Absolutely Fabulous ou Ab-Fab

     

     

    A l’aune des années 80, les gays n’avaient pas encore vraiment trouvé leur série télé fétiche. Attention, pas l’un de ces programmes où l’on essaierait de singer cette communauté et ses représentants par le truchement d’infâmes caricatures démagogiques pour familles lyophilisées qui ne devraient surtout pas vaciller devant leurs postes, mais une série qui viendrait bousculer les codes. Et puis explosa sur nos écrans la bombe « Absolutely Fabulous »…

     

    Car dans tous ces programmes, de manière éparse et incongrue, on y secouait des ersatz d’homosexuels, tels des épouvantails, sans que l’on saisisse vraiment le but avoué de la manoeuvre. L’initiative, au bout du compte, se révélait souvent maladroite, en verrouillant toujours et encore les idées reçues par des stéréotypes éculés, rances.

    Dans les années 2000, il y eut bien quelques tentatives à la télé, pour essayer d’illustrer en image la culture « Gay » et décrypter le mode de vie de ces hommes ou ces femmes homos. Bof, bof, bof… Toujours trop lisse. Des séries anglaises ou américaines ont aussi tenté de séduire les spectateurs, mais en vain. Les plus connues, de « Queer As Folk » à « Angels in America », en passant par « The L World » ou la dernière en date, « Looking », essaient depuis une quinzaine d’années de braquer les projecteurs sur des microcosmes LGBT urbains, de petites bulles dans lesquelles frétillent des panels représentatifs de ce que serait la communauté Gay aujourd’hui. Bref, de la discrimination positive en infusion servie dans un joli service en porcelaine…

    Avec ces séries, on peut donc assister à de bien gentillets enfilages de perles et d’anecdotes sur la vie de tous les jours et les états d’âme de tous ces métrosexuels qui s’aiment entre eux. Le problème, qui rend l’exercice en général peu crédible, c’est qu’ils sont tous jeunes, beaux, blancs (avec ici et là peut être un Latino ou un Afro pour donner cette petite touche Benetton qui fait encore mouche…), parfaitement sculptés dans ce moule à fantasmes d’une représentation qui n’existe pas vraiment dans la vraie vie… Bref, tout cela sonne hélas parfaitement faux…

    Alors que ces séries conçues spécialement pour la télé et le câble, toujours plus nombreuses, accessibles et généralement de bonne facture, devraient en toute logique entacher sérieusement la crédibilité des films réalisés pour le cinéma, on constate paradoxalement que c’est plutôt au cinéma que les gays sont le mieux représentés, avec originalité, audace et le souci de s’accompagner de véritables questionnements, en tentant d’éviter le piège de la sempiternelle version gay de « Sex and the City ».

    On se souviendra ainsi de « Maurice » de James Ivory, ou vingt ans plus tôt de « Reflet dans un Œil d’Or » de John Huston, deux films qui parlaient à deux époques différentes de la difficulté d’être ou de vivre en tant qu’homosexuel dans une société aveugle et sourde, toute entière trempée dans un bain amniotique d’hypocrisie complaisante.

     

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    Plus récemment, « Moonlight » de Barry Jenkins retraçait le parcours d’un jeune garçon afro-américain dans une banlieue de Miami, à trois époques différentes de sa vie, durant lesquelles, se découvrant gay, il devra essayer d’exister tel qu’il est ; une histoire sur l’identité, sur ce que nous sommes et comment le savoir et l’accepter. Un film réalisé par un noir, avec uniquement des acteurs noirs au générique et comme sujet central la perception de l’homosexualité chez les Afro-Américains. Autant dire, une sacrée révolution…

    Mais revenons à présent au sujet premier… Car paradoxalement, et c’est probablement là où réside toute l’ingéniosité de son concept, la série anglaise « Absolutely Fabulous », diffusée sur BBC Two entre 1992 et 2004, n’a jamais mis en avant des personnages ouvertement gay ou évoluant dans cet univers.

    Avec Ab Fab (diminutif du titre de la série, employé pas les aficionados), on avait plus affaire à une ambiance, un ton, mais surtout à la fibre même, l’ADN de ce que pouvait être le gay de ces années 90 et ce à quoi il aspirait, en référence à un mode de vie, de la musique à la culture, en passant par le relationnel, le vocabulaire ou encore la situation propre à l’époque.

    Les deux héroïnes de ce feuilleton, Patsy et Edina, ne renvoyaient pas à une image policée et constructive qui tendait à dire : « regardez, on est pareil, on veut la même chose, on souhaite être en couple, adopter des enfants et passer des week-ends à la campagne avec un gros chien pleins de poils ». On était en effet bien loin, en ce début des années 90, des sermons en camaïeu de ce simulacre de « Mariage Pour Tous » qu’on a tenté de nous vendre récemment…

     

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    Ces deux nanas, qui évoluaient dans le milieu de la mode et de l’évènementiel, étaient complètement déjantées ; des quadras bien tassées, refusant de vieillir et de se plier aux normes de la société. Elles menaient des vies totalement à rebrousse-poil du tout un chacun, égoïstes et hédonistes à souhait. Et c’est en toute désinvolture qu’elles pratiquaient l’alcoolisme, la toxicomanie, la chirurgie esthétique à toute heure de la journée… Ces deux pouffiasses hystériques ne reculaient devant aucun excès, dans le seul but de contenter leur appétit de clinquant et d’éphémère.

    Le gay, en ce début des années 90, se reconnaît immédiatement dans cette ode à la liberté et à l’individualisme. Plus qu’une série gay ou une série Queer, c’était un hymne décomplexé à la vacuité, au plaisir sous toutes ses formes, à la vulgarité et tout un tas d’autres éléments pouvant se raccrocher au chapelet de l’insouciance et ce luxe si rare que l’on tente désespérément d’enfermer dans un flacon à l’abri du temps qui passe : la jeunesse… Mais « Absolutely Fabulous » était avant tout une série ultra drôle scénarisée et produite par Jennifer Saunders, la créatrice et actrice principale de ce show, moitié du duo « French & Saunders ».

    Pourtant, l’idée d’ouvrir les esprits à un peu plus de tolérance est un combat qui pourrait même remonter aux années soixante. Cette décennie avait déjà proposé bien des programmes assez subversifs… A commencer par la série « Les Mystères de L’Ouest », dans laquelle James West arborait ses petits futals hyper moulants lui dessinant bien les fesses, ou ses vestes spencers lui arrivant au-dessus des hanches… Sans parler des rapports intrigants qu’il entretenait avec son acolyte Artemus Gordon, adepte du travestissement sous toutes ses formes… Ou à ces scènes de bagarres avec des marins musclés dans des bars uniquement fréquentés par des hommes, tout droit sortis des illustrations de « Tom of Finland ».

    Mais « Absolutely Fabulous » reste indiscutablement la série la plus proche de ce qu’était il y a encore vingt ans le mode de pensée de quiconque se revendiquait « Gay ». Comme le dernier rempart avant l’uniformisation des esprits…

     

    25 ans après la première diffusion française sur Canal+ de la série « Absolutely Fabulous », retrouvons avec délectation la VOST jusqu’alors introuvable de cet épisode culte de la saison 3 datant de juin 1996 (Canal Jimmy).

     

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  • Lunettes Noires pour Nuits Blanches

     

     

    En 1988, Thierry Ardisson réinvente l’interview télé. Il y aura un avant et un après « Lunettes Noires pour Nuits Blanches », même si l’émission du samedi soir n’a duré que deux ans.

     

    « Salut bande de nazes ! », « C’est en exclu, Lulu ! » ; ces formules en voix off de Thierry Ardisson, ponctuant son émission pour couche-tard du samedi soir, « Lunettes Noires pour Nuits Blanches », résonne encore dans bien des têtes. Elle n’a pourtant duré que deux ans, de septembre 1988 à juin 1990. À l’époque, Ardisson s’est fait connaître avec « Scoop à la Une », sur TF1 et « Bains de Minuit », sur la Cinq.

     

    « Si on vous donnait la tranche horaire des Enfants du Rock, qu’est-ce que vous feriez ? » Claude Contamine, alors directeur des programmes d’Antenne 2, n’attend pas longtemps la réponse à la question qu’il pose à Thierry Ardisson, convoqué dans son bureau. « Je ferais non pas une émission de rock, mais une émission rock, rétorque l’intéressé. Je parlerais non seulement de chanteurs, mais aussi d’écrivains, de peintres, de comédiens. Le rock est plus un état d’esprit et une culture qu’une musique. »

     

    Ardisson propose donc un magazine d’une heure 30, coproduit avec Catherine Barma, avec « 50 % de musique, 25 % d’interviews et 25 % de reportages », n’en déplaise aux amoureux du rock’n’roll, orphelins de leur émission. « Et comment vous l’appelleriez ? », interroge Contamine. En face, le jeune loup se souvient d’un slogan imaginé pour l’annonceur d’un journal « underground » où il travailla neuf ans plus tôt, dans le quartier des Halles. « J’avais trouvé un titre pour les Lunettes Glamor : lunettes noires pour nuits blanches » ; une des nombreuses griffes de l’ex-publicitaire, à qui l’on doit aussi les célèbres « Ovomaltine, c’est de la dynamite ! », « Vas-y Wasa ! » et « Lapeyre, y’en a pas deux ! ».

    « À partir de ce moment-là, ce qui était génial, c’est qu’on avait une liberté quasi totale », raconte Ardisson. Séquence nostalgie. En cette fin des années 80 souffle un vent de liberté qui touche tous les secteurs et presque tous les pays. En 1988, en URSS, Gorbatchev accélère les réformes qui vont aboutir, un an plus tard, à l’effondrement du rideau de fer soviétique, le mur de Berlin tombe, le dictateur roumain Nicolae Ceausescu est renversé, la France célèbre le bicentenaire de sa révolution.

    Dans l’air du temps, l’animateur invente un ton, sarcastique et provocateur. Antenne 2 veut une émission « branchée ». Lui déglingue les codes de l’interview, inquisiteur émoustilleur des intimités du show-biz. Une bouffée d’air frais salutaire, quand tous les autres animateurs font simplement de la promo. Son arme choc : l’interview-concept. Il y a en aura jusqu’à cinquante…

     

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    « À l’époque, on connaissait le questionnaire de Proust. C’était la seule interview formatée. Pourquoi toujours commencer par Bonjour, comment allez-vous ? ». Voici le « chouchou », « le jeu le plus naze de la télé », « l’antiportrait chinois » (« Si vous étiez une cicatrice », « Si vous étiez une catastrophe »), les « questions cons » (qui vont faire un tabac), le « blind test » (retrouver les titres de tubes), « l’auto-interview » (celle de Gainsbourg/Gainsbarre fait toujours le buzz sur la Toile aujourd’hui), sur fond de « Night Clubbing », musique du générique de l’émission signée Iggy Pop, au rythme de laquelle défilent les photos des invités « warholisés » ; portraits pop jaune, vert, rose et flanqués de lunettes noires.

    Le combat avec les invités-victimes semble pourtant douteux. L’émission ne se déroule pas en direct, et Ardisson a tout loisir de faire sauter au montage les dérapages incontrôlés. Celui-ci s’en défend. « Je n’ai jamais voulu faire l’émission en direct. Non pas par peur, mais parce que vous ne tenez pas les gens jusque tard dans la nuit si vous ne coupez pas les moments où on s’ennuie ». Aucune séquence n’a été censurée ? « Jamais, jure-t-il. Quand on dit montage, on pense souvent censure. C’est faux ! ». La censure vient d’ailleurs. « À un moment, il ne fallait pas inviter Jean-Edern Hallier parce qu’il avait écrit un pamphlet qui s’appelait « L’honneur perdu de François Mitterrand » », se souvient-il. Or, le président socialiste venait d’être réélu. « Il ne fallait pas non plus inviter maître Vergès parce qu’il avait défendu Klaus Barbie. C’était hallucinant ! Dieu sait si je hais Barbie, mais quand même ! »

     

    Les invités ne savaient pas à quelle sauce ils allaient être cuisinés. « Sauf Juppé, qui était alors secrétaire général du RPR », se souvient Ardisson qui s’exclame : « Il faisait l’auto-interview. C’est là que j’ai compris qu’il ne ferait jamais carrière. Il y avait une partie où moi je lui posais des questions. Et une autre où il chaussait les lunettes noires et où lui se posait les questions. C’était surréaliste ! Il n’y arrivait pas, jouait faux, jouait mal. Je me suis dit qu’il avait du souci à se faire, lui qui se lançait dans une carrière politique ! »

     

    L’enregistrement a lieu au Palace. La célèbre discothèque parisienne n’en est plus à ses heures de gloire, mais elle n’en reste pas moins l’endroit où il y a des mignonnes. Les langues s’y délient et les tabous explosent. Ardisson adopte un ton libertaire et libertin, parle sexe, drogue, « comme on en parle dans la vie ». Dès la première, le 17 septembre, il lance à Guesh Patti, qu’il tutoie : « Es-tu pour la légalisation de certaines herbes magiques ? » La chanteuse du hit « Etienne, Etienne », réplique : « Je trouve plus sympathique de l’avoir en douce ».

    La Marie-Jeanne, que l’animateur « ne considère pas comme une drogue », est omniprésente, du moins verbalement, chaque semaine. Mais quand Ardisson affirme que « la drogue, ce n’est pas de la merde », la ligne rouge est franchie. On n’est plus dans une transgression du langage. C’est du dérapage. Les Inconnus l’étrillent dans une parodie qui tourne toujours sur YouTube. L’époque est à une prise de conscience. 1988, c’est aussi l’année de la première conférence mondiale sur le sida.

     

    « L’époque autorisait certains débordements », jus­tifie le producteur qui assure avoir été « juste naturel ». Il plaide encore : « Je n’ai jamais fait la propagande de la cocaïne, moi qui ai eu tant de mal à m’en sortir. Je trouve toujours ridicule de dire que la drogue, c’est de la merde, car jamais personne ne va payer 120 sacs un gramme de merde. Partant de là, il faut aller au fond des choses pour expliquer pourquoi mieux vaut ne pas en prendre. »

     

    Deux mois après le lancement de l’émission, en 1988, deux millions de téléspectateurs sont au rendez-vous le samedi soir, souvent des night-clubbers qui attendent le générique de fin pour aller s’encanailler. Le succès vient aussi de la mise en scène. Ardisson arrive devant la discothèque en 404 coupée. En réalité, « elle était tirée par un camion spécial parce que je ne savais pas conduire ».

    Puis il y a l’ambiance, les volutes de fumée des clopes tirées comme si chacune était la cigarette du condamné, les rythmiques des clips (marque de fabrique des années 1980) qui montent à la tête, les verres d’alcool avalés comme autant de ponctuations, les figurants rasés, cloutés, badgés. « Il fallait donner tous les signes de la nuit, se souvient le producteur. Je procédais comme pour un film, en usant au maximum de l’illusion ».

    Ardisson a sabordé « Lunettes »… « Ma connerie est d’avoir annoncé dès le début la fin, pour juin 1990. Il fallait être fou ! Je ne voulais plus faire d’antenne ». Mais n’affiche aucun regret. Vingt ans après, les Dechavanne, Ruquier, de Caunes, Fogiel étaient-ils ses héritiers ? L’orgueilleux réfute ces ambitieux qui « ont tellement envie de faire de la télé », alors que lui, n’en voulant pas, pétrifié par le trac, aura gravi les marches du succès, simplement mû par le plaisir, interviewant en deux ans 800 stars, dans un esprit de pionnier.

     

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    Trente ans après la rencontre avec Gainsbourg, l’émission reste une référence dans la carrière d’Ardisson. Sur la Toile, les internautes commentent encore cette séquence durant laquelle l’animateur « parvient à faire sauter la carapace du fumeur de gitanes, dévoile un personnage attachant, tantôt pudique, tantôt outrancier, toujours libre ». L’auto-interview reste un moment d’anthologie. L’animateur, lui, se souvient ému de la genèse de cette « histoire » diffusée le 8 avril 1989.

     

    « Un jour, j’ai reçu un coup de fil de Philippe Lerichomme, qui était l’homme de confiance artistique de Gainsbourg. Serge veut faire une émission spéciale avec toi. Il veut que ce soit tourné l’après-midi. Moi, l’après-midi, je trouvais ça nul mais bon, je n’avais pas le choix. Avec Catherine Barma, on monte l’émission, on lui fait rencontrer Antoine Blondin, Béatrice Dalle et d’autres artistes qu’il voulait voir. Je n’en revenais pas. »

     

    Ardisson admire Gainsbourg… Il évoque avec gourmandise comment il a passé ses invités à la moulinette de l’interrogatoire. L’actrice au parfum de scandale, révélée quatre ans plus tôt dans « 37°2 le Matin », brille par son ennui. Gainsbarre ironise sur ses frasques en trinquant avec l’auteur des « Enfants du Bon Dieu », son complice « d’alcool et de commissariats ».

    Sur la scène du Palace, Étienne Daho chante « Heures Hindoues ». Gainsbourg taquine Bambou et parle, comme s’il n’avait pas le temps, de leur garçonnet, Lulu. On dirait une émission testamentaire. Ardisson se souvient : « À la fin de l’enregistrement, j’ai demandé à Lerichomme : Pourquoi est-ce que Gainsbourg m’a fait ce cadeau ? Et là, il m’a répondu : Gainsbourg rentre à l’hosto demain, il a une chance sur deux d’y rester et il a voulu faire sa dernière télé avec toi. J’étais pratiquement en larmes ».

     

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    Interview de Thierry Ardisson publié dans Le Figaro Culture le 17.08.2009

     

     

     

  • Quand Burger King invite l’Amérique à manger comme Andy

     

     

    Oui, vous ne rêvez pas, c’est bien Andy Warhol en personne qui prête son image à une publicité Burger King… Voici l’histoire du détournement du film « 66 Scenes from America » réalisé en 1982 par le producteur danois Jørgen Leth.

     

    En termes de retombées publicitaires, le Super Bowl est probablement le plus grand événement sportif de la planète. Chaque année, à l’occasion de la finale du championnat de football américain, les plus grandes marques se disputent chaque espace à grands coups de millions de dollars. Le Super Bowl LIII n’a pas fait exception à la règle, en mettant à l’honneur cette année un invité inattendu… Andy Warhol. Plus de trente ans après sa mort, la star du Pop Art a ravi la vedette au groupe de rock Maroon 5, qui s’est produit sur scène à la mi-temps du match.

     

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    Cet étonnant spot publicitaire de 45 secondes, diffusé lors de la finale suivie par pas moins de 103 millions de téléspectateurs, et représentant Andy Warhol dégustant tranquillement un whooper, le sandwich mythique de Burger King, est en fait un extrait du film « 66 Scenes from America » réalisé en 1982 par le producteur danois Jørgen Leth. La séquence se conclut par un hashtag énigmatique, #EatLikeAndy.

     

    « Les spots publicitaires traditionnels diffusés lors du Super Bowl sont toujours très dynamiques. Ça doit péter de partout, avec des plaisanteries, de grosses vannes et des célébrités. Notre pub est à part et prend la forme d’une oeuvre d’art, presque silencieuse, mais pourtant très puissante. » (Marcel Pascoa, directeur marketing de Burger King)

     

    « 66 Scenes from America », sorte de road trip décalé, comme une série de cartes postales, fait défiler durant 39 minutes tout ce qui peut symboliser l’Amérique. Paysages, villes, personnes, motels, diners, autoroutes, un cactus, un réfrigérateur, la Bannière étoilée, un barman mixant avec dextérité un Martini Dry, un Bloody Mary puis un whisky au citron, des chauffeurs de taxi new-yorkais, deux avocats, une écolière de sept ans…

    Tout y passe, et parmi ces 66 tableaux, une scène de 4:30 minutes, très warholienne, dans laquelle l’artiste new-yorkais mange un hamburger… Ce premier film de Jørgen Leth consacré aux États-Unis englobe le grand et le petit, du symbole à l’anecdote. Il collecte les images d’une nation qui reste énigmatique et opaque aux yeux des étrangers sur de nombreux points, mais reflète aussi l’image de notre propre culture.

     

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    « Au-delà de la simplicité du spot, il a une signification plus profonde », déclarait la société dans un communiqué de presse. « Il fait référence à l’une des citations parmi les plus emblématiques de Warhol sur la singularité des États-Unis : Ce qui est étonnant à propos de ce pays, c’est que les consommateurs les plus riches achètent finalement les mêmes choses que les plus pauvres. »

    Pour la petite histoire, Jørgen Leth dévoile qu’Andy Wharol aurait préféré, pour le tournage de la séquence, prendre plutôt un hamburger de chez McDonald que le Whooper de Burger King, car il trouvait le « design plus sympa ». Ne disposant pas de restaurant McDonald à proximité, la production s’est finalement rabattue sur Burger King afin de ne pas perdre de temps, pour le plus grand bonheur de la chaîne de restauration rapide… D’où le clin d’oeil de Burger King sur sa page Twitter le soir de la finale du 03 février 2019 : « ce qui compte, ce n’est pas avec qui vous flirtez, mais qui vous ramenez à la maison »…

     

     

     

    https://www.instagram.com/p/BtcW39VHu6A/?utm_source=ig_embed

     

     

    Burger King avait bien entendu obtenu au préalable la permission de la Warhol Foundation (une petite ligne de crédit indique d’ailleurs « Andy Warhol utilisé avec la permission de la Fondation Andy Warhol »), ainsi que celle des représentants de Leth, à commencer par son fils.

     

    « L’une des particularités de la négociation avec la Warhol Foundation était que nous ne voulions pas changer ou toucher le film de quelque façon que ce soit, qui aurait pu déroger à son intention artistique première », déclarait Marcelo Pascoa, directeur marketing monde de Burger King. « Nous savions donc que la meilleure chose à faire était de garder la séquence telle qu’elle avait été conçue en 1982. »

     

    Burger King avait lancé sa campagne #EatLikeAndy sur les réseaux sociaux quelques jours plus tôt, avec un mystérieux teaser intitulé « L’art prend du temps », représentant la mascotte de Burger King peignant et demandant aux abonnés de s’inscrire à un « Mystery Box Deal », en partenariat avec DoorDash, le service de livraison de repas à domicile.

     

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  • Il y a 40 ans, Goldorak débarquait en France

     

     

    Goldorak, le célèbre robot de combat japonais, est apparu pour la première fois à la télévision française le 03 juillet 1978, dans l’émission « Récré A2 » sur Antenne 2.

     

    Lundi 3 juillet 1978, donc… Il est 16h sur le service public : ce jour-là, Antenne 2 lance une nouvelle émission d’été destinée aux enfants, « Récré A2 ». À sa tête, une jeune animatrice, Dorothée. La jeune femme n’est pas encore connue : elle n’est speakerine sur la chaîne que depuis un an, et c’est la toute première émission qu’elle présente.

     

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    Le programme de ce Récré A2 est marqué par l’arrivée d’une série animée inédite en provenance du Japon : « Goldorak ». Pour la première fois, la télé française propose un produit issu de la culture manga. Jusqu’ici, les programmes pour enfants étaient des productions françaises (« Chapi Chapo », « Bonne Nuit les Petits », « L’Ile aux Enfants »…) ou importés des Etats-Unis (« La Panthère Rose », « Félix le Chat », « Casper »…)

    « Goldorak », le dessin animé devenu culte, est adapté de l’oeuvre du dessinateur japonais Gō Nagai. Il raconte l’histoire du Prince d’Euphor, Actarus, un extra-terrestre qui trouve refuge sur terre.

    « Goldorak » est donc le tout premier manga diffusé à la télévision française. A l’époque, il sera choisi car il coûte moins cher qu’une production nationale. Et très vite, Goldorak et son fulguropoing enregistre des records d’audience. En tout, 74 épisodes seront diffusés en France.

    Car il y a bien un avant et un après Goldorak… Succès immédiat, le dessin animé draine avec lui un merchandising colossal, inhabituel pour un programme télé à l’époque. Disques, figurines, bandes dessinées, mais aussi puzzles, jeux de cartes et même bateaux pneumatiques, garnissent les rayons de jouets. Une mécanique bien huilée qui sera appliquée à l’identique à l’autre série animée japonaise phare lancée par Récré A2, « Candy ».

    « Goldorak » et « Candy » ouvrent ainsi la voie au succès phénoménal de l’animation japonaise en France. « Albator », mis à l’antenne un an plus tard, connaîtra le même succès. À la fin des années 1980, avec le départ de Dorothée pour TF1, la génération suivante se passionne pour de nouvelles séries en provenance de Tokyo : « Dragon Ball », « Juliette je t’aime », « Ranma 1/2 », « Ken le Survivant »

    Véritable phénomène de société, Goldorak a même fait… la couverture de Paris-Match ! Le numéro 1547 du 19 janvier 1979 consacre la « folie Goldorak », avec ce robot « devenu le Messie des enfants français ». 40 ans plus tard, Goldorak continue à passionner. En témoigne sa récente sortie en coffret Blue Ray (AB Vidéo), destinée à conquérir les enfants de la génération 78.

     

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