Catégorie : Société

  • Le Freerun : une discipline 100 % française

     

     

    Rappelez-vous… Nous sommes en 1990. Dans une petite ville de la banlieue sud, en Essonne, à Lisses, David Belle crée une nouvelle discipline sportive qui s’inspire de l’entrainement des pompiers et des préceptes de Georges Hébert : l’art du déplacement (ADD). C’est la naissance du groupe Yamakasi.

     

    Sept potes qui bravent tous les dangers, escaladent les immeubles, effectuent des sauts vertigineux, transformant les élements urbains d’Evry en obstacles à franchir. Très vite, c’est l’engouement auprès des jeunes. En 1998, une nouvelle branche de la discipline prend le nom de « Parkour » (PK).  Au cinéma, cela se traduit par deux films : « Yamakasi » en 2001 et « Banlieue 13 » en 2004. Un documentaire de la BBC, « Jump London », va mettre le feu au web. Le Parkour devient un phénomène mondial sur le net. De la Russie à la Colombie, l’engouement est planétaire. Cette discipline française, rappelons-le (hip hip hip hourra !), est maintenant enseignée dans des écoles au Danemark ou en Afghanistan.

    Vingt ans plus tard, en 2009, Yoann Leroux alias Zéphir, champion du monde de Freerun, créé la Team 3F comme : French Freerun Family. Une équipe professionnelle (dites plutôt « un crew français ») d’athlètes internationaux spécialisés dans le Freerun, la version artistique du Parkour. En termes de Street Culture, il s’agit d’un mouvement qui mêle à la fois acrobatie, danse et poésie. A 30 ans, ce Peter Pan urbain parvient à suspendre le temps au-dessus du vide et des toits du monde entier. Lui aussi est originaire de l’Essonne, de Morsang-sur-Orge. Aujourd’hui, ils sont huit traceurs avec des fans partout dans le monde et un  buzz de  20 millions de vues pour la vidéo « Assassin Creed Real Life ». Un succès qui a donné des idées au fabriquant du jeu vidéo éponyme : une seconde vidéo est alors tournée à Londres, pour la promotion du jeu cette fois, sous la direction du réalisateur David Graham. Une passion qui pour Simon Nogueira commence tout juste à se transformer en source de revenus.

    Les héros des temps modernes, têtes d’affiche d’une discipline qui se professionnalise et entre en compétition, s’appellent Yoann Zéphir et Simon Nogueira (France), Pacha  (Lituanie) ou DK (Grèce). Quant à la French Freerun Family, le collectif le plus titré de France, elle a monté une Académie pour enseigner la discipline aux enfants, à la frontière entre pratique sportive et proposition artistique. Le Freerun a donc bien toute sa place dans le monde de l’art.

     

     

    Vidéo « Assassin Creed Real Life » :

     

    Reportage 66 minutes (M6) :

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] French Freerun Family

     

     

     

  • Le Président by Jean Gabin

     

     

    A quelques semaines de la prochaine élection présidentielle, replongeons-nous avec bonheur dans une des scènes les plus mythiques du cinéma français, et cette passe d’armes opposant Émile Beaufort, l’ancien président du Conseil, et Philippe Chalamont, son chef de cabinet indélicat, lié aux puissances de l’argent. Rappelons juste que ce film réalisé par Henri Verneuil, « Le Président », date de 1961 et préfigure les maux qui décrédibilisent tant la fonction politique de nos jours, tout en résonnant de façon si particulière sur la question de l’Europe. Conclusion : jeunesse ne signifie pas forcément renouveau…

     

    Emile Beaufort : Messieurs, Monsieur le Député Chalamont vient d’évoquer en termes émouvants les victimes de la guerre… Je m’associe d’autant plus volontiers à cet hommage qu’il s’adresse à ceux qui furent les meilleurs de mes compagnons… Au moment de Verdun, Monsieur Chalamont avait dix ans… Ce qui lui donne, par conséquent, le droit d’en parler… Étant présent sur le théâtre des opérations, je ne saurais prétendre à la même objectivité… On a une mauvaise vue d’ensemble lorsqu’on voit les choses de trop près… Monsieur Chalamont parle d’un million cinq-cent mille morts, personnellement, je ne pourrais en citer qu’une poignée, tombés tout près de moi… J’ai honte, Messieurs ! Mais je voulais montrer à Monsieur Chalamont que je peux, moi aussi, faire voter les morts… Le procédé est assez méprisable, croyez-moi !…

    Moi aussi, j’ai un dossier complet, trois-cents pages… Trois-cents pages de bilans et de statistiques que j’avais préparés à votre intention… Mais en écoutant Monsieur Chalamont, je viens de m’apercevoir que le langage des chiffres a ceci de commun avec le langage des fleurs : on lui fait dire ce que l’on veut ! Les chiffres parlent mais ne crient jamais… C’est pourquoi ils n’empêchent pas les amis de Monsieur Chalamont de dormir. Permettez-moi, Messieurs, de préférer le langage des hommes. Je le comprends mieux !…

    Pendant toutes ces années de folie collective et d’auto-destruction, je pense avoir vu tout ce qu’un homme peut voir… Des populations jetées sur les routes, des enfants jetés dans la guerre, les vainqueurs et les vaincus finalement réconciliés dans les cimetières, que leur importance a élevés au rang de curiosité touristique. La paix revenue, j’ai visité des mines. J’ai vu la police charger des grévistes, je l’ai vue aussi charger des chômeurs… J’ai vu la richesse de certaines contrées, et l’incroyable pauvreté de certaines autres… Eh bien durant toutes ces années, je n’ai jamais cessé de penser à l’Europe… Monsieur Chalamont, lui, a passé une partie de sa vie dans une banque à y penser aussi… Nous ne parlons forcément pas de la même Europe…

    Philippe Chalamont : Nous pensons d’abord à la France ! Et vous n’avez pas le monopole de l’Europe, nous y pensons aussi !

    Emile Beaufort : Tout le monde parle de l’Europe ! Mais c’est sur la manière de faire cette Europe que l’on ne s’entend plus ! Et c’est sur les principes essentiels que l’on s’oppose ! Pourquoi croyez-vous, Messieurs, que l’on demande au gouvernement de retirer son projet d’union douanière ? Parce qu’il constitue une atteinte à la souveraineté nationale ? Non, pas du tout ! Simplement parce qu’un autre projet est prêt… Un projet qui vous sera présenté par le prochain gouvernement !

    Philippe Chalamont : Monsieur le Président, je vous demande la permission de vous interrompre !

    Emile Beaufort : Ah non ! Et ce projet, je peux en avance vous en énoncer le principe… La constitution de trusts verticaux et horizontaux, de groupes de pression, qui maintiendront sous leur contrôle non seulement les produits du travail, mais les travailleurs eux-mêmes ! On ne vous demandera plus, Messieurs, de soutenir un ministère, mais d’appuyer un gigantesque conseil d’administration ! Si cette assemblée avait conscience de son rôle, elle repousserait cette Europe des maîtres de forges et des compagnies pétrolières… Cette Europe qui a l’étrange particularité de vouloir se situer au-delà des mers, c’est-à-dire partout… sauf en Europe ! Car je les connais, moi, ces Européens à têtes d’explorateurs…

    Jussieu : La France de 89 avait une mission civilisatrice à remplir.

    Emile Beaufort : Et quelques profits à en tirer !

    Jussieu : Il y avait des places à prendre… Le devoir de la France était de les occuper, de trouver de nouveaux débouchés pour son industrie, un champ d’expérience pour ses armes…

    Emile Beaufort : Et une école d’énergie pour ses soldats, je connais la formule… Et bien personnellement, je trouve cette mission sujette à caution, et son profit dérisoire… Sauf évidemment pour quelques affairistes en quête de fortune et quelques missionnaires en mal de conversion… Or je comprends très bien que le passif de ces entreprises n’effraie plus une assemblée où les partis ne sont plus que de vulgaires syndicats d’intérêt !

    Jussieu : Je demande que les insinuations calomnieuses que le Président du Conseil vient de porter contre les Élus du Peuple ne soient pas publiées au Journal Officiel.

    Emile Beaufort : J’attendais cette protestation… Je ne suis pas surpris qu’elle vienne de vous, Monsieur Jussieu… Vous êtes, je crois, conseil juridique des aciéries Krenner ?… Je ne vous le reproche pas…

    Jussieu : Vous êtes trop bon !

    Emile Beaufort : Je vous reproche simplement de vous être fait élire sur une liste de gauche et de ne soutenir à l’Assemblée que des projets d’inspiration patronale !

    Jussieu : Il y a des patrons de gauche, je tiens à vous l’apprendre !

    Emile Beaufort : Il y a aussi des poissons volants, mais ils ne constituent pas la majorité du genre… Lorsqu’il y a quelques mois, les plus qualifiés parmi les maîtres-nageurs de cette assemblée sont venus me trouver pour éviter une crise de régime, j’ai pris un engagement… celui de gouverner… Or, gouverner ne consiste pas à aider les grenouilles à administrer leur mare !

    La politique, Messieurs, devrait être une vocation… Elle l’est pour certain d’entre vous… Mais pour le plus grand nombre, elle est un métier… Un métier qui, hélas, ne rapporte pas aussi vite que beaucoup le souhaiteraient, et qui nécessite d’importantes mises de fonds car une campagne électorale coûte cher ! Mais pour certaines grosses sociétés, c’est un placement amortissable en quatre ans… Et s’il advient que le petit protégé se hisse à la présidence du Conseil, le placement devient inespéré… Les financiers d’autrefois achetaient des mines à Djelitzer ou à Zoa, ceux d’aujourd’hui ont compris qu’il valait mieux régner à Matignon que dans l’Oubangui et que de fabriquer un député coûtait moins cher que de dédommager un Roi Nègre !… Que devient dans tout cela la notion du Bien Public ? Je vous laisse juges…

    Le gouvernement maintient son projet. La majorité lui refusera la confiance et il se retirera… Il y était préparé en rentrant ici… J’ajouterai simplement, pour quelques uns d’entre vous, réjouissez-vous, fêtez votre victoire… Vous n’entendrez plus jamais ma voix et vous n’aurez plus jamais à marcher derrière moi… Jusqu’au jour de mes funérailles nationales, que vous voterez d’ailleurs à l’unanimité… Ce dont je vous remercie par anticipation…

     

     

    [youtube id= »o6pcBGpag2o » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Analyse et critique du film

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Avis sur le film sur SensCritique

     

     

     

  • « PNB ! Personne Ne Bouge » sur Arte : branché

     

     

    Le magazine « PNB ! Personne Ne Bouge » sur Arte est diffusé tous les dimanches à 19h05. Et cela depuis 2012.

     

    Bientôt cinq ans que les voix-off de Philippe Collin, Xavier Mauduit et Frédéric Bonnaud nous régalent de leurs trouvailles et de leur humour. « PNB ! Personne Ne Bouge » est un magazine qualifié de « Pop-Culture ». Pendant 35 trop petites minutes, huit séquences courtes mais denses et à l’élocution rapide nous racontent toutes un même thème. A l’écran, nous voyons des silhouettes animées en ombres chinoises sur des fonds colorés et acidulés. Ce qui marque, ce sont le rythme, les couleurs, les voix, les sujets et l’humour. Chaque magazine est un petit concentré de nos souvenirs auxquels s’ajoutent des informations documentées souvent rares. Des perles, comme l’émission du dimanche 16 octobre 2016 sur Renaud.

     

    [youtube id= »AV7wl3C_8f0″ align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

    Qui sont ces trois petits génies ?

     

    Tous trois se sont rencontrés dans les locaux de France Inter au début des années 2000. Un journaliste breton, un passionné de cinéma, patron de cinémathèque, et un historien agrégé. Le coktail d’une petite pépite de bonne humeur qualifiée « d’émission culturelle potache et décalée, mais pointue » par les Inrocks. Une émission transgenre entre le culturel et le divertissement, qui fusionnent avec légèreté, et dans laquelle la curiosité côtoie les vieux souvenirs de jeunesse. L’attention ne retombe jamais, l’esprit est sans cesse en éveil et s’émerveille des nombreuses trouvailles des co-auteurs.

    Chaque émission est conçue selon un scénario précis, avec un fil rouge, le thème central, détourné en mode rupture de rythme, le tout dans un éclectisme volontaire très intéressant. Car s’il s’agit d’un magazine léger et de divertissement, il n’en demeure pas moins un exercice de style journalistique très rigoureux avec un vrai travail d’investigation et de recherche.

    Déjà plus de 195 émissions à leur compteur et bientôt un anniversaire. Souhaitons longue vie à ce petit bijou télévisuel.

     

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] PNB Arte

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] PNB Facebook

     

     

     

  • Nike Air Mag Power Laces : Retour vers le futur

     

     

    C’est l’un des plus gros buzz de ces deux derniers mois : Les Nike Air Mag Power Laces, comprenez les baskets Nike auto-laçantes révolutionnaires de Retour vers le Futur.

     

    Quatre-vingt-neuf paires de la fameuse basket de Marty McFly ont été commercialisées à travers un système de loterie où le ticket coûtait 10 dollars, un peu comme le « Ticket d’or » dans « Charlie et la Chocolaterie ». Tout le monde a pu tenter sa chance : il suffisait d’acheter un, deux, ou un million de tickets, entre le 4 et le 10 octobre 2016 via l’application Nike+ ou le site Nike.com. La liste des gagnants a été annoncée le 17 octobre 2016. Les fonds ainsi récoltés ont été reversés à la Fondation de Michael J. Fox qui lutte contre la maladie de Parkinson, dont l’acteur de cinquante-cinq ans est lui-même atteint.

    Graal parmi les Graal pour les Sneakers addicts qui attendaient cela depuis plus de vingt ans, les fameuses Nike que Marty découvre en allant dans le futur sont enfin devenues réalité. Certains des heureux gagnants se sont empressés de les remettre en vente aux enchères, atteignant des prix jusqu’à 20 000 dollars !

     

    [youtube id= »xQLb_uwWzj8″ align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

     

     

  • Os & Vanité

     

     

    Notre fin de civilisation n’en est pas à un paradoxe près…

     

    Une société où plus personne n’est censé mourir de faim, où l’abondance et la diversité des aliments se trouvent même jusque dans les containers à ordure des grandes surfaces qui préfèrent jeter que de redistribuer (mais ça c’est un autre débat).

    Pourtant, il existe une religion, avec ses croyances et ses pratiques radicales, qui n’est pas le salafisme ou une de ces doctrines orthodoxes monothéistes connues. Il s’agit de ce royaume étrange de la mode et de ses sortilèges.

    Un monde parallèle fait de luxe, d’exception et de beauté, qui de petits ateliers et de salons cramoisis pour belles bourgeoises d’avant-guerre, se mua décennie après décennie en un concept commercial qui finalement réussit à se fondre dans notre vie de tous les jours.

    Des Saint Laurent, des Courrèges, des Cardin, ont voulu démocratiser les belles étoffes et les finitions savantes pour vendre plus mais surtout faire de la couture un produit de pop culture, accessible… Cette révolution, d’abord noble et candide, engendra des monstres que sont aujourd’hui les H&M et autres Zara. Les petites structures artisanales d’antan qui faisaient travailler des couturières émérites ne sont plus.

    Les grands groupes textiles ont piétiné les valeurs de la confection et du savoir-faire pour embrasser la mondialisation en se nourrissant tel l’ogre de petits enfants, chair à canon, pour gagner sans panache cette guerre globale de l’anéantissement des valeurs morales et humanistes.

    Cyniques ou aveugles, nous acceptons sans broncher, heureux d’acquérir ces vêtements ersatz à moindre frais, en prenant soin de ne pas penser aux petits bras s’attelant à la tâche à l’autre bout du monde en échange d’un salaire de misère… Et c’est sans compter ces artificiers que sont les publicitaires et les départements marketing pour rediriger la foule anonyme vers de nouveaux besoins. Mais là encore, c’est toujours un autre débat.

    Il aura fallu certes du temps mais nous y sommes, en plein dedans. Ce fameux futur Orwelien où tout est devenu slogans, tels des litanies martelées à longueur de journée et reprises en cœur par toutes celles et ceux qui ont le pouvoir de les relayer. Au cinéma, à la télévision, dans la presse et les magazines.

    Ce monde hermétique rempli de falbalas, devenu finalement le dieu suprême à vénérer, avec ses rituels, ses obédiences et ses fidèles. Ce monde devenu triste mais où on nous oblige à être beaux, souriants, légers, en commençant par tous ceux qui deviennent célèbres et riches et qui doivent impérativement être sûrs d’eux, drôles, attrayants et minces, oui minces, toujours plus minces, en rêvant à l’épaisseur d’une feuille de papier comme but ultime à atteindre.

    Cette idée de la minceur comme une victoire sur la vie ou une revanche sur toutes nos frustrations existentielles mutées en obsessions quasi journalières, où l’on préfère désormais porter un pantalon en taille 32 que de se nourrir convenablement. Arborer une silhouette osseuse, famélique, flottant dans une veste XS avec une pomme et un bouillon comme seul repas de la journée.

    Cette fixation sur la maigreur, après avoir supplanté celle de la minceur, est vécue donc comme une normalité, soit une règle absolue, aussi bien pour les femmes que pour les hommes, et maintenant même pour les enfants. Pour vous en convaincre, les mannequins hommes vus dans les derniers défilés Vuitton, Balenciaga ou Rick Owens, arboraient des visages crayeux, les yeux fiévreux, les pommettes du visage comme des lames.

    On se souvient aussi de la silhouette osseuse et blanche de David Bowie dans le film « L’Homme Qui Venait D’ailleurs », période albums « Station To Station », « Low » et « Heroes », quand une abondance de cocaïne le faisait ressembler à un grand cadavre exsangue.

    Regardez-les, tous ces cintres mouvants sur les podiums comme dans la rue, qu’un simple courant d’air peut balayer de la surface de la terre. Voici donc cette image démultipliée qui représente si bien cet univers qui prend tous les jours un peu plus des couleurs de fin du monde, absurde, violent, grotesque et dément.

    … Et ces êtres décharnés si bien habillés, superposant la hype et les tendances, qui se frôlent dans la rue avec d’autres êtres devenus quant à eux obèses et monstrueux, à force d’ingérer toutes les heures de la journées du gras et du sucre. Spectacle de « Freaks » que n’aurait pas renié Tod Browning.

    Cette anorexie collective triomphante s’invite jusque dans les restaurants des grands chefs où il est formidable de dépenser une fortune pour se faire servir des assiettes immenses et vides, où l’aliment lui-même est remplacé par des formulations pompeuses déclamées par des maîtres d’hôtel taillés comme des épingles et qui vous regardent sournoisement si vous avez le malheur de demander si le plat choisi est copieux.

    Quand on sait que le premier à avoir exigé cette maigreur chez les modèles hommes ou femmes s’appelle Hedi Slimane, lui-même physiquement étranger au concept de nourriture. Relançant la mode du « Slim », cette silhouette post Punk-Rock de la fin 70 et du début 80, lorsque beaucoup des figures populaires ou underground de cette époque naviguaient toutes entre Héroïne et Cocaïne, avec à la clé une fin prématurée.

    Cette vision romantique mais morbide d’une époque ou d’un courant musical qui est devenue avec tous ces directeurs artistiques, à commencer par celui de la marque Saint Laurent, une norme standard. Karl Lagerfeld a succombé également à ce chant des sirènes pour se transformer en une poupée effrayante tout droit sortie d’un épisode des « Sentinelles De L’Air ».

    Pas un vêtement acheté dans la grande distribution qui désormais ne sera pas « Slimy », ou soit veste étroite, chemise resserrée à la taille et pantalon tube. Les ventres et les bourrelets sont donc cruellement recalés. Régime et sport sont devenus obligatoires pour chacun d’entre nous, si nous ne tenons pas à encaisser chaque jour de petites phrases assassines, ou même de simples regards accusateurs sur nos parties de corps incriminées.

    On se croirait vivre sur une terre, à l’instar du film « Body Snatchers », où nos différences risquent de se retourner contre nous à tout moment et où il serait tellement plus simple de devenir comme tous les autres, dans une uniformisation confortable et sereine, ces autres qui s’échangent un petit sourire et un mouvement de tête entendu lorsqu’ils se croisent.

    La tyrannie du beau, du mince, du maigre, du lustré, du sans poil, instaurée par tous ces gens qui gravitent dans un univers où on ne vit décidément pas comme le tout un chacun.

    Des moutons de Panurge, des veaux, c’est ce qui définit le reste d’une société anxieuse de pouvoir devenir aussi comme l’un de ces mannequins de 16 ans vu dans une revue, ou même encore pouvoir ressembler à un acteur de cinéma qui pour les besoins d’un film doit perdre 15 kilos en deux semaines et voir son corps devenir hyper musclé à grand coup de stéroïdes, d’injections et d’endoctrinement coachisé 24 heures sur 24.

    Ceci n’est pas la réalité. Ceci n’est pas réel. Pourtant, comme un pied qui ferait du 44 et qui à l’aide d’un chausse-pied voudrait absolument rentrer dans une ballerine en 38, nous sommes obnubilés par ces silhouettes filiformes qui nous entourent, dans un cauchemar qui a déjà commencé.

    Autrefois, les femmes plus girondes portaient des corsets, puis plus tard des gaines pour affiner la taille. Aujourd’hui, pour paraître aussi plates que des limandes, les plus riches se font enlever des côtes, liposucer… On transforme son corps, on le modifie, on le travestit, on le profane à la gloire de cette déité païenne. Des romanciers comme J.G. Ballard avaient vu juste sur le devenir de l’être humain.

    Quant à nos rêves de voyage dans les étoiles, il est peu probable que cela nous soit permis un jour, tant toutes nos pensées sont réduites, recroquevillées sur l’inconséquente et insignifiante petite enveloppe qui nous sert de corps. Cette science fiction qui nous faisait tellement rêver enfant est réduite à bien peu de chose…

    Sous tous ces prétextes fallacieux du « bien vivre », du « saint, équilibré, léger », à grand renfort d’écrans, de caméras et d’objectifs nous scrutant en boucle, de montres au poignet qui contrôlent, surveillent tous nos faits et gestes, le nombre de marches montées et les calories perdues, nous perdons à vitesse grand V tout ce qui restait d’humanité en nous. De trop nous regarder dans ces miroirs magiques pour nous rassurer sans arrêt quant à la perfection de notre dentition blanche et parfaite, nos muscles si bien dessinés, notre coupe de cheveux si réussie, nous devenons aussi lisses que ces surfaces réfléchissantes, aussi transparents qu’une vitre, aussi vides qu’un courant d’air. Oui, nous disparaissons ainsi de la surface de la terre. Nous nous effaçons.

    Et il ne reste que des os et de la vanité…

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Dévoreur Hubertouzot

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

  • Keira Knightley vs Photoshop

     

     

    « J’ai vu mon corps être malmené tant de fois, et pour tant de raisons différentes, que ce soit par des paparazzi ou sur des affiches de films. Je suis d’accord pour faire des shootings topless, tant qu’on ne me retouche pas, moi ou mes seins. Parce qu’il me semble important de dire que ce n’est pas la forme qui compte ».

    C’est en ces termes, parus dans le cadre d’une interview publiée récemment dans le magazine The Times, que l’actrice Keira Knightley a justifié la séance photo qui la montre dénudée, pou le magazine Interview, en réaction aux retouches photoshop dont son corps fait régulièrement l’objet.

    « Je veux bien poser avec les seins nus à condition qu’ils ne soient pas grossis et qu’il n’y ait pas de retouche. Parce qu’il est essentiel de montrer que la forme de notre corps n’a pas d’importance ».

    Keira Knightley s’est lancée dans ce combat il y a dix ans, à la sortie du film « Le Roi Arthur », lorsque que son visage ainsi que sa poitrine avait été modifiés pour les besoins de l’affiche.

    On retrouvera l’actrice au cinéma dans Imitation Game, sortie prévu le 28 janvier 2015.

     

    [youtube id= »QC0prng1jDY » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Liens externes » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Keira Knightley by Patrick Demarchelier

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Keira Knightley Filmographie

     

     

  • Révolutions… Et Marketing

    Révolutions… Et Marketing

     

     

    Qu’est-ce que les révolutions des années 2000 ont en commun ? Et qu’est-ce qui fait qu’elles ont toutes été couronnées de succès ? Elles se vendent à l’International, elles s’exportent. Des roses en Georgie au jasmin en Tunisie, en passant par les tulipes au Kirghizistan ou la couleur orange en Ukraine, ces révolutions populaires du début du 21ème Siècle se sont parées de fleurs et de couleurs.

     

    Ce qui semble aujourd’hui évident, c’est que le succès et la réussite de ces mouvements ont été rendus possibles par l’application de concepts publicitaires et marketing, afin d’assurer tout d’abord leurs promotion auprès des médias internationaux, qui eux-mêmes serviront ensuite de vecteur de viralité auprès du grand public. Il faut ainsi trouver un symbole, un titre, un slogan… Une marque, en fait…

    A présent, peut-on raisonnablement penser que tout ceci est le fruit du hasard ? Que l’on assiste à des mouvements spontanés, qui conduisent un peuple tout entier à s’élever d’une seule voix pour destabiliser, voire renverser le pouvoir en place dans ces pays ?

    Manon Loizeau, dans un documentaire réalisé en 2005, « Les Etats-Unis à la conquête de l’Est », revient sur les prémices de la Révolution Orange en Ukraine. Ou comment un Serbe conseille les futurs révolutionnaires ukrainiens, tel un commercial export en tournée. Et lorsque Manon Loizeau gratte un peu, elle s’aperçoit que derrière notre commercial serbe, il y a la main de l’Oncle Sam… En effet, le point commun entre ces révolutions, c’est qu’elles ont été planifiées, organisées et financées par le gouvernement américain à travers une série de structures : Freedom House, USAID, National Endowment for Democracy (NED), Albert Einstein Institution, ou encore l’Open Society Institute de George Soros.

    Mais c’est aussi grâce à un livre, « De la Dictature à la Démocratie », de Gene Sharp. Publié en 1993 et largement diffusé par la CIA, cet ouvrage est le parfait petit manuel pour mener avec succès une révolution.

    La dernière révolution en date, à Hong Kong, a trouvé son symbole, sa marque, comme toutes les précédentes : le parapluie…

     

    [youtube id= »Jpwjkh6kVco » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Les Révolutions de Couleur

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Albert Einstein Institution