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  • « Jean-Michel Basquiat » à la Fondation Louis Vuitton, jusqu’au 14 janvier 2019

     

     

    Ce sont les événements picturaux incontournables de la rentrée : les deux expositions consacrées à Jean-Michel Basquiat et Egon Schiele à la Fondation Louis Vuitton. L’une des figures majeures de l’art contemporain confrontée à l’un des sommets de l’expressionnisme du début du XXème Siècle.

     

    Des artistes ultra-doués, torturés, morts très jeunes… Le premier il y a trente ans, en 1988, à l’âge de 28 ans et le second en 1918, au même âge. Deux destins, deux oeuvres coups de poing…

     

     

     

    Fulgurants et sans concession, l’art et la manière de Jean-Michel Basquiat ont marqué la scène artistique des années 80. Contemporain d’Andy Warhol et de Keith Haring, en dix ans de carrière, le jeune new-yorkais a coloré de sa fougue et de ses idées sombres plus de mille toiles. Trente ans après sa mort, survenue à l’âge de 28 ans, les peintures de cet autodidacte qui a fait ses débuts sur les murs de Manhattan affolent encore les marchands d’art.

    La Fondation Louis Vuitton lui consacre une rétrospective exceptionnelle, l’occasion de déchiffrer son esprit ultra-contemporain à travers le regard du commissaire de l’exposition, Dieter Buchhart, de son ami le créateur de mode Jean-Charles de Castelbajac et de ses soeurs.

     

    « Il était déterminé à laisser une trace et à devenir un grand artiste. Il y travaillait sans relâche. » (Lisane Basquiat, soeur de Jean-Michel Basquiat)

     

    « Jean », comme l’appelaient ses proches, est issu de la petite bourgeoisie de Brooklyn et fréquente les musées depuis son plus jeune âge. Lorsqu’il est hospitalisé à sept ans, suite à un accident de voiture, sa mère lui offre le livre d’anatomie « Gray’s Anatomy » d’Henry Gray, illustré par des dessins de H.V. Carter, et c’est une révélation… En s’inspirant de l’ouvrage, Il fait ses premiers croquis et rêve de devenir dessinateur de cartoon.

     

    « C’est certainement cet événement qui a suscité son intérêt pour le fonctionnement du corps humain, des os, des organes… » (Dieter Buchhart, commissaire de l’exposition)

     

    Mais avant d’exposer ses figures écorchées dans les plus grandes galeries, c’est dans la rue que Jean-Michel Basquiat se fait connaitre. A l’âge de 17 ans, il forme avec son ami Al Diaz le duo « Samo », de l’expression « Same All Shit », en Français « toujours la même merde ». Ensemble, ils recouvrent les murs de Manhattan d’interjections enragées et réussissent à faire parler d’eux.

     

     

     

    « Peu importe à quel événement culturel vous assistiez à New York, le collectif Samo était toujours passé par là juste avant vous. C’est ainsi que les membres de Samo se firent connaître. » (Dieter Buchhart, commissaire de l’exposition)

     

    En 1979, le duo Samo se sépare. Jean-Michel Basquiat se consacre désormais à la peinture et New York l’inspire.

     

    « Dans les années 80, New York n’est pas le New York d’aujourd’hui. La ville est beaucoup plus underground, vibrante, dangereuse. L’essence même de New York à l’époque est rythmique, comme une vibration. » (Jean-Charles de Castelbajac)

     

    Portes, palissades, toiles de fortune, Basquiat recouvre tout ce qu’il peut de sa colère débordante. Car dans ses créations, explique-t-il, « il y a 80 % de rage et 20 % de mystère ». Début 1981, Bruno Bischofberger, grand marchand d’art, décèle son énorme potentiel. A l’époque, Basquiat n’a que 20 ans mais s’apprête à devenir une star.

     

    « Basquiat apparaît comme un ovni aux yeux des amateurs d’art. Comme l’écriture automatique de ces médiums ou de ces sorciers vaudous qui écrivent dans la pénombre et transcrivent la parole de ceux qui sont partis. » (Jean-Charles de Castelbajac)

     

    Basquiat crée à partir de mots, d’images et de pictogrammes. Un univers complètement nouveau pour l’époque. Il initie l’ère du « copier-coller ». Une méthode dont se sert Basquiat pour dénoncer racisme et inégalités, car être noir dans le new York des années 80 reste une condition difficile. Sa mère est portoricaine, son père est haïtien, et dans ses toiles, il invoque aussi le vaudou et la sorcellerie.

     

    « Il y a tellement de gens que l’art néglige… parce que tout dépend finalement de celui qui tient le pinceau. Les noirs ne sont jamais représentés de façon réaliste. Ils ne sont pas suffisamment présents dans l’art moderne. » (extrait de « Jean-Michel Basquiat, la rage créative », documentaire de David Schulman, en diffusion le 19 octobre à 23h30 sur Arte)

     

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    « Quand on y réfléchit, il y a quelque chose de tentaculaire dans l’oeuvre de Jean-Michel Basquiat… Quand on pense qu’il a peint plus de 800 toiles en l’espace de sept ou huit ans. Avec des périodes distinctes et des techniques toutes différentes. Peintures, détournements, tout y passe. A la manière de Picasso, qui crée une tête de  taureau à partir d’un guidon de bicyclette, Basquiat fait sa Chapelle Sixtine à partir d’une palissade. » (Jean-Charles de Castelbajac)

     

    En 1983, Basquiat se lie d’amitié avec son idole, Andy Warhol. De cette rencontre naîtra une collaboration foisonnante. Mélange d’effervescence et de compétition, cette association donne lieu à de nombreuses toiles et photos, ainsi qu’à une exposition.

     

    « Ça n’avait jamais existé auparavant, ce genre de collaboration, entre deux artistes gigantesques et de générations différentes. » (Jeffrey Deitch, conseiller en art)

     

    Après presque deux ans de création commune, ils se séparent en 1985. Rattrapé par ses addictions, Jean-Michel Basquiat voit son génie décliner peu à peu. Il meurt d’une overdose en 1988, à l’âge de 27 ans. Pourtant, trois décennies après sa disparition, ses prophéties résonnent encore…

     

     

     

    « Beaucoup des thèmes qu’il aborde dans ses toiles restent malheureusement aujourd’hui encore d’actualité, partout dans le monde. Nous continuons à faire face au racisme et aux discriminations. C’est pour cette raison que Jean émeut encore les gens aujourd’hui, tant son message résonne encore. » (Jeanine Basquiat, soeur de Jean-Michel Basquiat)

     

     

     

  • Le Musée Eugène Delacroix, intime et atemporel

     

     

    Prenez le temps de vous ressourcer dans un site unique au cœur de Saint-Germain-des-Prés à Paris… Avec son jardin, le musée-atelier d’Eugène Delacroix est un lieu de création à taille humaine, intime et atemporel. Venez y découvrir régulièrement de nouvelles expositions ainsi que de nombreuses manifestations artistiques.

     

    Le Musée National Eugène Delacroix fut fondé à la fin des années 1920 par la Société des Amis d’Eugène Delacroix. Il a ouvert pour la première fois en juin 1932, avec une première exposition dédiée au peintre et à ses proches, « Delacroix et ses amis ».

    Installé dans le dernier appartement occupé par le peintre, ainsi que son dernier atelier, où il vécut de décembre 1857 à sa mort, le 13 août 1863, le musée a été créé, plus de soixante ans après le décès de Delacroix, par des peintres, des collectionneurs, des conservateurs, réunis en association pour sauver les lieux, menacés de destruction. Présidée par Maurice Denis, dont l’implication pour le musée fut sans faille, la Société des Amis d’Eugène Delacroix réunissait aussi Henri MatissePaul SignacÉdouard VuillardGeorge Desvallières, notamment.

    Le Musée Eugène-Delacroix fut donc conçu en hommage à Eugène Delacroix, peintre, dessinateur, graveur et écrivain. Sa collection propre, singulière, est la seule au monde à présenter la diversité des talents de cet immense artiste et à souligner l’influence majeure que son œuvre exerça sur la création artistique.

    Vous aimez la peinture, la littérature et la poésie ? A l’occasion des vacances de la Toussaint, venez profiter d’un choix de cadeaux et de présents pour petits et grands, disponibles à la librairie du musée. Vous y serez accueillis du mercredi au lundi, de 9h30 à 17h30. L’entrée est libre !

    Et n’oubliez pas de vous abonner à la page Facebook du Musée Eugène Delacroix pour suivre son actualité !

    © Musée du Louvre / Antoine Mongodin

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Musée Eugène Delacroix

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  • La dernière provocation de Banksy

     

     

    Une œuvre de Banksy s’autodétruit juste après avoir été vendue pour plus d’un million d’euros.

     

    Quelle audace ! Le street artist le plus connu au monde a encore mystifié son monde d’une façon extraordinaire avec un geste inédit dans l’histoire de l’art. Une de ses toiles adjugée plus d’un million d’euros vendredi soir chez Sotheby’s à Londres s’est ensuite auto-détruite sous le regard médusé des participants.

     

    Adjugée… vendue… et détruite ! Une version sur toile de la célèbre « Girl with Balloon » du street-artist Banksy était en vente, vendredi 5 octobre, chez Sotheby’s, à Londres. Mais à la surprise générale, juste après avoir été adjugée pour 1,04 million de livres sterling (1,18 million d’euros), soit quatre à cinq fois sa valeur estimée, la toile, peinte à la bombe et à l’acrylique, est sortie de son cadre, en passant par une déchiqueteuse dissimulée dans celui-ci. « Sotheby’s s’est fait Banksé », écrit la maison d’enchères dans un communiqué (en anglais) et qualifie l’événement de « totalement inattendu ».

     

    https://www.instagram.com/p/Bokt2sEhlsu/?utm_source=ig_embed

     

     

    Des vidéos publiées sur les réseaux sociaux montrent le public réagir avec stupéfaction et amusement, immortalisant l’instant en mitraillant de photos la toile déchiquetée, tandis que deux employés de la maison d’enchères s’en approchent pour l’emporter.

     

     

     

    Un artiste très critique du marché de l’art

     

    Sur son compte Instagram, Banksy a publié une photo de ce moment qui a pris tout le monde de court, avec pour simple commentaire : « Going, going, gone… ».  En français : « Adjugé, disparu… ». S’agit-il d’une farce ? Y avait-il seulement un acheteur pour ce tableau ? L’œuvre originale est apparue pour la première fois sur un mur de Londres en 2006, et le subversif Banksy a souvent critiqué l’establishment et le marché de l’art. Cette autodestruction porte donc toutes les traces de son sarcasme.

     

     

     

    Une première dans l’histoire de la vente aux enchères

     

    « On dirait qu’on vient de se faire bankser », a réagi Alex Branczik, un responsable de la maison d’enchères, dans un communiqué. « C’est certainement la première fois dans l’histoire de la vente aux enchères qu’une oeuvre d’art se déchiquette automatiquement après être passée sous le marteau », a également dit Sotheby’s.

    « Nous avons discuté avec l’acheteur qui a été surpris par cette histoire. Nous sommes en discussion pour les prochaines étapes », a fait également savoir Sotheby’s auprès du Financial Times en refusant de dévoiler l’identité de l’acheteur. Ce dernier était-il dans le coup ? Si ce n’est pas le cas, la toile est-elle revendable en l’état ? Et s’il avait décroché en réalité l’oeuvre la plus stupéfiante de Banksy ? Certains mauvaises langues prétendent même que la toile a déjà pris de la valeur suite à cet incident…

    Affaire à suivre…

     

     

     

  • La Scala de Paris : un nouveau théâtre ouvre sur les ruines d’un ancien cinéma porno

     

     

    La naissance d’un nouveau lieu culturel à Paris est assez rare pour être signalée. La Scala renaît donc de ses cendres, sur les ruines d’un ancien cinéma porno, après 18 mois de travaux et 19 millions d’euros d’investissements privés.  

     

    Il y a dans Paris des lieux singuliers, aux destinées bien étranges, bien extraordinaires. C’est le cas de la Scala-Paris, sise Boulevard de Strasbourg. Sortie de terre en 1873, dans une capitale en pleine révolution européenne, elle est née d’un caprice, celui d’une riche veuve amoureuse du célèbre opéra milanais. Tentative égotique de rivaliser avec cet édifice de renommée mondiale, la salle, aux dimensions certes plus modestes, devient très vite un café-concert prestigieux, la coqueluche du Tout-Paris.

    De Fréhel à Félix Mayol, en passant par Mistinguett et Yvette Guilbert, tous se pressent à la Scala jusqu’en 1910, en ce lieu où politiques et artistes viennent se divertir jusque tard dans la nuit. L’après-guerre et la crise de 1929 entraînent une baisse de fréquentation et scelle le destin de ce haut lieu du cabaret parisien.

    Entré en léthargie, le lieu se réveille en 1935, flambant neuf, totalement modifié, suite au rachat par un exploitant de cinéma. Transformée en un cinéma « Art Déco » de toute beauté, la Scala-Paris redevient très vite à la mode, réunissant lors de nombreuses avant-premières tout le gratin du 7ème art jusque dans les années 1960. Puis, le quartier subissant de profondes mutations, les ateliers d’antan disparaissant les uns après les autres pour laisser place peu à peu à la prostitution, aux trafics de drogues et aux squats, l’endroit devient de moins en moins fréquentable.

     

     

     

    Abandonnée, vendue une nouvelle fois, la salle devient en 1977 le premier multiplex de cinéma porno. C’est le début d’une longue déchéance. Très vite, comme le dit le nouveau propriétaire, Frédéric Biessy, l’endroit devient de moins en moins recommandable, de plus en plus glauque, « un des plus grands lupanars de la capitale ».

    Véritable lieu de perdition, la Scala-Paris pense avoir tout vu… Suite à une succession de ventes, conséquence d’une spéculation immobilière féroce, l’ancienne salle mythique tombe en 1999 dans l’escarcelle de la secte « l’Église Universelle du Royaume de Dieu », qui compte bien faire du lieu sa succursale parisienne. Vent debout, les édiles parisiens se lèvent pour faire barrage à ce dessein, en imposant aux nouveaux et heureux propriétaires une affectation culturelle.

    La salle, dans un état pitoyable, se rendort à nouveau. En 2006, un détail architectural – un voisin obtient l’autorisation de s’agrandir en rognant sur la sortie de secours limitant ainsi le nombre de places possibles à une future salle de spectacle – va bloquer tout projet à venir. James Thierrée, un temps intéressé, va finir par abandonner l’idée d’en faire son théâtre.

     

    « Au cœur de Paris, une fosse éventre la capitale. Propre, nette, elle marque l’emplacement de la Scala-Paris, lieu légendaire de la fin du XIXème siècle, tombée en désuétude au fil du temps et des aléas de la vie des Grands Boulevards. Cette salle au destin chaotique, chargée d’histoires, devrait renaître de ses cendres à l’automne 2018 grâce au rêve fou des Biessy, un couple, amoureux de théâtre. »

     

    Après ces multiples vies, certaines plus glorieuses que d’autres, La Scala-Paris renaît enfin de ses cendres. Mélanie et Frédéric Biessy, respectivement associée-gérante du fonds d’investissement Antin Infrastructure Partners et producteur-tourneur privé de spectacle via sa société Les Petites Heures, en font l’acquisition, espérant redonner vie à la scène d’antan, la transformer en un lieu atypique, où l’art vivant pourra s’exprimer sans contrainte. La salle, imaginée par Richard Peduzzi, le scénographe de Patrice Chéreau et Luc Bondy, devra être astucieusement modulable.

    Avant d’investir plus de 15 millions d’euros, dont près de 9 millions apportés par le seul couple sur leurs fonds propres, nos deux passionnés de théâtre font une étude approfondie des lieux, sollicitent l’avis de différents corps de métiers pour évaluer la viabilité de leur projet, trouver une autre sortie de secours et améliorer la capacité d’accueil. Un petit tour sur Google Earth, une plongée dans les dédales de passages inter-immeubles, et une possibilité voit le jour en passant par la rue du faubourg Saint-Denis. Le rêve fou d’ouvrir un nouveau théâtre d’envergure en plein cœur de la capitale se concrétise.

     

    « La Scala est bleue des pieds à la tête, les loges, les murs. Le sol est gris-bleu. C’est le bleu, l’histoire de la Scala, le rêve. » (Richard Peduzzi, scénographe)

     

    En 2016, au moment de leur rachat, les lieux étaient improbables : « C’était une friche totalement abandonnée depuis plus de dix ans, en ruine, et habitée par 200 pigeons », se souvient Frédéric Biessy. Avec son épouse Mélanie, ils n’ont cependant pas reculé devant l’ampleur des travaux qui ont duré un an et demi. La scénographie du lieu a été confiée à Richard Peduzzi, qui a signé la plupart des décors de théâtre et d’opéra de Patrice Chéreau.

    Leur problématique est simple : que faire de cet immense bloc de béton de 25 mètres sur 15 ? Comment l’aménager en une salle moderne, attractive et totalement transformable, pour passer de 550 à 700 places ? Pas de souci, les Biessy font appel aux talents, aux réflexions de nombreuses personnalités du monde du spectacle pour avoir leurs avis et donner corps à leur utopie. Alors qu’il ne reste que les murs, les artistes de tous horizons se succèdent pour visiter le chantier – la plupart seront associés au spectacle à venir.

    Ainsi, Isabelle Huppert, Micha Lescot, les sœurs Labèque, Catherine Frot, Aurélien Bory, Jan Fabre, entre autres, viennent s’approprier les lieux, s’en inspirer, réinventer l’espace. En parallèle, le couple propose à Pierre-Yves Lenoir, l’ancien administrateur de l’Odéon-Théâtre de l’Europe, à Olivier Schmitt, écrivain et ancien journaliste, à Rodolphe Bruneau-Boulmier, compositeur et producteur à France Musique et enfin à Aline Vidal, galeriste, de rejoindre l’équipe. L’objectif : créer un lieu de vie singulier, unique, un théâtre transcendé, différent de ce qu’offre déjà la capitale, à l’économie alliant les avantages des modèles américains et français. Un pari audacieux, qui pourrait bien dépasser leurs espérances les plus folles.

     

    « C’est un lieu qui attire parce qu’il est nouveau, parce qu’il est un peu particulier dans l’environnement culturel parisien. » (Mélanie Biessy)

     

    Les travaux commencés, les fondations creusées, l’ouverture prévue pour septembre 2018, il est temps pour Mélanie et Frédéric Biessy de se pencher sur leur première programmation. Ils l’ont présentée en avant-première lors du dernier festival d’Avignon, au cours d’une mini-croisière sur le Rhône. Et elle sera exceptionnelle…

     

    Pour commencer, c’est Yoann Bourgeois, l’artiste circassien jouant des équilibres, qui essuiera les plâtres avec un spectacle inspiré par la magie des lieux, qui s’appellera tout simplement « Scala ».

     

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    Puis, Thomas Jolly reviendra avec l’un de ses premiers spectacles, « l’Arlequin Poli par l’Amour » de Marivaux.

     

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    Le réalisateur Jaco Van Dormael et sa complice Michèle Anne de Mey présenteront plusieurs de leurs spectacles dont « Cold Blood », « Kiss and Cry » et « Amor ».

     

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    Le metteur en scène, sociétaire de la Comédie-Française, Clément Hervieu-Léger montera « La Dame de la Mer » d’Henrik Ibsen courant 2018.

     

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    En parallèle, Alain Platel fera découvrir au public parisien son « Projet Bach », Bertrand Chamayou y jouera des pièces pour piano de John Cage. Enfin, en février-mars 2019, une carte blanche sera offerte à l’artiste plasticien Aurélien Bory pour investir les lieux à sa guise. Loin d’être exhaustive, cette liste d’événements a tout pour nous mettre l’eau à la bouche… Car il y aura aussi du nouveau cirque, du théâtre, des concerts, de la danse, soit une programmation plus proche du théâtre subventionné que du théâtre privé. Et l’objectif de fréquentation est ambitieux. Mélanie Biessy prévoit « une jauge de 80 à 90 % de remplissage ».

    Alors, y a-t-il encore de la place pour de nouvelles salles à Paris et suffisamment de spectateurs ? On peut s’interroger même si ces nouvelles salles font des efforts sur la politique tarifaire. Jean Robert-Charrier, le directeur du théâtre de la Porte-Saint-Martin, voisin de la Scala, se montre plutôt optimiste, même s’il faut tenir compte de l’enjeu financier : « Il est difficile de tenir économiquement une salle, en créer une est encore plus difficile. Mais, ajoute-t-il, il n’y a que le projet artistique qui compte ».

     

    « Plus on propose des spectacles exigeants, plus on a un public jeune. » (Jean Robert-Charrier, à la tête du théâtre de la Porte-Saint-Martin)

     

    Jean Robert-Charrier affirme que le renouvellement du public ne se fait pas avec « les vieux spectacles et les vieilles recettes » du théâtre privé, mais avec des affiches plus qualitatives. « Les jeunes se concentrent sur des spectacles exigeants. Et ça c’est très rassurant », conclut-il.

     

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    Source :  pour L’Oeil d’Olivier

     

     

     

  • Quand Charles Aznavour et le basketteur LeBron James s’appréciaient par vidéo interposée

     

     

    Le basketteur américain admire les chansons de Charles Aznavour et le prouve grâce à une vidéo postée sur Instagram. En retour, le chanteur le remerciait par une autre vidéo.

     

    Charles Aznavour comptait parmi ses fans l’une des figures du sport mondial, la star du basket, le King en personne : LeBron James.

    Tout est parti d’une vidéo postée sur les réseaux sociaux, au mois d’août dernier, un dimanche matin, au réveil… On distingue simplement une enceinte posée sur un bureau d’où s’échappe une chanson :

     

     

    Vous aurez peut-être reconnu « À ma fille », qui n’est pourtant pas l’un des titres les plus connus de Charles Aznavour. Et dans sa vidéo, LeBron James diffuse un autre morceau du chanteur français, extrait du titre « Sa Jeunesse », avec ce commentaire écrit par dessus la vidéo : « Les bonnes ondes du matin…. si paisible et élégant ».

    Cette vidéo fait le buzz et alors que le basketteur était de passage à Paris le mois dernier, dans le cadre d’une tournée mondiale pour son équipementier, il a accordé une interview à nos confrères de Canal Plus… et le journaliste Mouloud Achour revient sur cette vidéo. Il tend alors son téléphone à LeBron James en lui disant que Charles Aznavour a un message pour lui. le chanteur a enregistré une petite vidéo à son tour… pour le basketteur.

     

     

    On entend à la fin de cet extrait LeBron James réagir, très touché. Il n’en revient pas : « C’est incroyable », dit-il. Malheureusement, les deux ne se rencontreront jamais, du moins, pas dans cette vie…

     

    Source : Xavier Monferran @ France Info

     

     

     

  • Serena Williams tombe le haut pour la prévention du cancer du sein

     

     

    A l’occasion du lancement d’Octobre Rose, la championne de tennis Serena Williams s’engage dans le combat pour la prévention du cancer du sein avec un clip.

     

    La « Médaille du Jour » de Radio France est décernée à une joueuse de tennis qui enlève le haut, pour la bonne cause. Et pas n’importe quelle joueuse, en l’occurence, mais « La Joueuse », la star du tennis mondial Serena Williams. L’Américaine a posté une vidéo sur son compte Instagram dimanche 30 septembre, qui a déjà été vue par plus de deux millions de personnes. On y voit le visage de Serena en gros plan. Puis la caméra dézoome et dévoile le buste de la star du tennis nue, la poitrine cachée par ses mains.

    Il ne s’agit pas d’une pub ou d’une quelconque opération commerciale. Si elle l’a fait, c’est en fait pour promouvoir le dépistage du cancer du sein, à l’occasion du lancement d’Octobre Rose 2018. « Un sujet qui concerne toutes les femmes, de toutes les couleurs, partout dans le monde », dit-elle. Rien qu’en France, ce sont plus de 54.000 nouveaux cas chaque année, et près de 12.000 décès. Et Serena Williams ne fait pas que poser sur cette vidéo, elle chante aussi…

     

    https://www.instagram.com/p/BoUJN25na2Y/?utm_source=ig_web_button_share_sheet

     

     

    « Oui, cela m’a demandé un effort, mais je l’ai fait parce que c’est un sujet qui concerne toutes les femmes, de toutes les couleurs, de partout dans le monde. Le dépistage précoce est crucial. Il sauve tant de vies. »

     

    La chanson, « I Touch Myself », « Je me touche » en français, a été écrite par la chanteuse des Divynils, Chrissy Amphlett. Cette Australienne est morte d’un cancer du sein à 53 ans, en 2013. Voilà pourquoi Serena Williams entonne cette chanson en soutien à l’organisation Breast Cancer Network Australia et pour lancer Octobre Rose, le mois du dépistage du cancer du sein.

    Check it out… And let’s kill that fuckin’ beast !

     

     

     

  • Harlem 1970 | Jack Garofalo

     

     

    Eté 1970… Le photographe français Jack Garofalo passait six semaines à Harlem, NYC, et prendra à cette occasion une série de clichés destinée à Paris Match. Ce reportage met en lumière la culture du quartier, s’attachant d’abord à nous présenter la communauté noire, ainsi que la vie quotidienne de ses habitants.

     

    La plupart des sujets de Jack Garofalo sont des gens qui n’avaient pas la possibilité de partir, durant cette période de profonde mutation de Harlem, et plus généralement de la ville de New York. Ou qui firent, pour certains d’entre eux, le choix délibéré de rester…

    Dans les années 60, Harlem, comme d’ailleurs le Bronx, vit une part importante de sa population se déplacer vers des cieux plus cléments, tels que le Queens ou Brooklyn, à la recherche d’un meilleur environnement, tant en termes d’éducation que de logement ou de sécurité. Malgré cet exode massif qui a laissé à Harlem beaucoup de pauvres, sans emploi ni instruction, la vitalité et la créativité du quartier sont finalement restées intactes.

    Comme nous le montrent ces clichés saisissants, Harlem a malgré tout continué à afficher avec fierté cet héritage, assorti d’un fort sentiment d’appartenance à la communauté. Ces photos ont préservé l’esprit haut en couleur d’une époque aujourd’hui révolue.

    Jack Garofalo (1923-2004), entré à Match en 1953, a « tout couvert » : les conflits, le grand reportage à l’étranger, et les stars qu’à l’époque on approchait sans attaché de presse. Il lui arrivait même de devenir copain avec ses modèles les plus inaccessibles : Fellini, Hemingway ou Malraux. Il prétendait qu’il ne connaissait rien à la technique de la photo, que cela le barbait, mais il avait le génie de la lumière… En juin1965, Paris Match consacre deux de ses éditions à l’Espagne, nouvel eldorado de millions de touristes. Pour l’occasion, Jack Garofalo rapporte quelques clichés de choix…

    A découvrir…

     

    © Jack Garofalo / Paris Match (via Getty Images)

     

     

     

     

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    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Harlem

     

     

  • Alphonse Mucha au Musée du Luxembourg

     

     

    Le Musée du Luxembourg, à Paris, rend hommage au représentant de l’Art Nouveau, Alphonse Mucha. Artiste tchèque de renommée internationale, il reste indissociable de l’image du Paris 1900 et s’est fait connaître en signant les affiches des pièces d’une certaine Sarah Bernhardt.

     

    Les affiches de l’artiste tchèque Mucha sont indissociables du Paris des années 1900. Un style emblématique de l’Art Nouveau qui est aujourd’hui mis à l’honneur au Musée du Luxembourg. On y découvre aussi bien les peintures que les sculptures, les décors et les objets nés de l’imagination d’une personnalité foisonnante et toujours restée très attachée à son pays natal. 

    Des façades des immeubles à la sortie des métros parisiens, sur vos boîtes de biscuits à l’ancienne, le saviez-vous, l’Art Nouveau, vous le croisez partout. Dans les années 1880, ce mouvement artistique révolutionnaire casse les codes. Tandis que le monde s’industrialise, l’art s’inspire plus que jamais de la nature, ses couleurs et ses formes. A la tête de ce courant nouveau, un jeune Tchèque, Alphonse Mucha.

     

    « Mucha réussit à incarner l’esprit d’une époque et l’atmosphère de la ville qu’était Paris. » 

     

    Alphonse Mucha est né en 1860 en Moravie. Âgé de 27 ans, l’illustrateur débarque à Paris en 1887 et y vit une existence de bohème jusqu’à ce soir de 1894 où son imprimeur lui commande en urgence une affiche pour « Gis-Monda », la nouvelle pièce de la grande Sarah Bernhardt. 

     

    « Evidemment, quand Mucha présente son projet à l’imprimeur, celui-ci est un peu effrayé car ce qu’il a sous les yeux est totalement nouveau, mais il n’a pas le temps de consulter d’autres artistes et n’a de toute façon personne d’autre sous la main. Il décide donc de montrer le projet d’affiche à Sarah Bernhardt qui, quant à elle, trouve ça formidable. » (Alain Weill, auteur de « L’affiche au temps de l’Art Nouveau » paru aux Editions Hazan)

     

    « Ça reste un mystère de savoir comment, pour un illustrateur qui ne travaillait habituellement que sur des oeuvres de petite dimension, Mucha est parvenu à créer une affiche de deux mètres de haut. Mais toujours est-il qu’il est devenu célèbre en l’espace d’une nuit… » (Tomoko Sato, commissaire de l’exposition)

     

    Sarah et Mucha, c’est donc le duo gagnant. Pendant six ans, Mucha réalisera ainsi toutes ses affiches, mais aussi ses décors et ses costumes. Sarah Bernhardt comprend vite qu’elle tient là une pépite et qu’il n’est pas question de la laisser s’échapper… Quant à Mucha, il est non seulement aux anges, mais de surcroît, le fait de pouvoir travailler pour la superstar du moment est pour lui un aboutissement dont il n’aurait pu raisonnablement rêver quelques années plus tôt.

    Face aux immenses Toulouse-Lautrec ou Jules Chéret, le style Mucha parvient néanmoins à se faire une place dans ce Paris des années 1900 et a tellement la cote que les gens s’arrachent littéralement ses affiches placardées dans les rues de la ville.

     

    « Il est impossible de ne pas reconnaître et identifier immédiatement une affiche de Mucha… C’est presque toujours la même formule. On retrouve un sujet seul, en général une très belle femme entourée d’images symboliques, comme des fleurs, des motifs inspirés de la nature, et cette figure féminine mène le regard du spectateur vers d’autres aspects tout autant symboliques. »

     

    Fidèle à l’esprit de l’Art Nouveau, Alphonse Mucha fait entrer l’art dans les objets du quotidien, au moment où la publicité et le marketing prennent leur essor. On lui commande des oeuvres pour des boîtes de biscuits, du papier à cigarette, du parfum ou même du champagne. 

     

    « Les panneaux décoratifs commandés par l’imprimeur-lithographe Ferdinand Champenois permettaient à des gens qui ne disposaient pas d’un gros budget de pouvoir décorer leurs murs avec des oeuvres d’art de qualité, et ce à moindre coût. Au début, Mucha était ravi de pouvoir réaliser ces panneaux, jusqu’à ce qu’il se trouve rapidement débordé par la demande. » 

     

    En 1900, Mucha se voit confier la décoration du pavillon de Bosnie-Herzégovine pour l’Exposition Universelle de Paris. Cette expérience le ramène à ses premières amours, la peinture historique, dont il rêvait déjà lorsqu’il étudiait en école d’art. De retour à Prague en 1910, il passe plus de quinze ans sur son grand projet, « L’épopée slave », série de vingt toiles monumentales qui retrace les épisodes marquants de l’histoire des peuples slaves.

     

    « Pour lui, la chose la plus importante en tant qu’artiste était la communication. Comment faire passer sa pensée politique ou philosophique à travers ses oeuvres. C’est en cela que son expérience de créateur d’affiches publicitaires lui a été fort utile. »

     

    De retour dans son pays, Mucha passe donc du statut de star internationale à celui de héros national. Il devenait l’artiste officiel et le grand artiste tchèque. Il réalisa ainsi des billets de banque, des timbres, il décora l’hôtel de ville de Prague. Pourtant, il ne parvint jamais à imposer sa peinture ailleurs en Europe. En ce début du 20ème siècle, l’heure est plutôt au Cubisme et aux autres mouvements d’avant-garde. 

    Mais ce n’est qu’à partir de 1960 qu’un nouveau boum « Mucha » retentit. En effet, à cette époque, l’identité visuelle de Mucha s’accorde bien avec la musique pop, le rock, la musique psychédélique ou la culture underground. Certaines affiches de Mucha deviennent des emblèmes et seront beaucoup utilisées dans différents contextes.

    Et c’est ainsi que l’ADN de Mucha continue de vivre aujourd’hui…

     

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    Et à ne surtout pas rater, le samedi 06 octobre 2018, c’est la « Nuit Blanche Mucha » au Musée du Luxembourg ! Les dessinateurs du collectif « Soirées Dessinées » réalisent sous vos yeux de grandes fresques inspirées par les œuvres d’Alphonse Mucha, accompagnés de musique et d’interventions dansées originales composées autour de Mucha.

     

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  • Ennio Morricone, l’inventeur de la musique de film

     

     

    Aborder la carrière d’Ennio Morricone, c’est un peu comme avoir l’outrecuidance d’essayer de décrypter le travail de Dieu sur terre.

     

    Voyez-vous, en gros, l’échelle des valeurs, et où s’y situerait le compositeur et chef d’orchestre italien ? Oui, Ennio Morricone est un génie, un dieu, sans conteste le plus grand des compositeurs de musique de film. Souvent copié mais jamais égalé… Il est toujours vivant, et je me fiche de le savoir, en fait, car ses chefs d’œuvre sont bien installés dans l’imaginaire collectif depuis un demi-siècle déjà. Aujourd’hui, le maestro se contente certes de diriger des concerts pour le prestige poli de soirées de gala dans des salles remplies le plus souvent de messieurs et dames qui s’en tamponnent le coquillard de ce qu’ils écoutent. Certes, il a récemment composé un thème original pour faire plaisir à Quentin Tarantino, qui l’utilise dans pratiquement tous ses films. Il y a bien encore de temps en temps une composition pour tel ou tel film plus ou moins oubliable. Vieillard transformé en institution, bardé de récompenses et de médailles en tous genres, Morricone est l’un de ces derniers monstres vivants, à l’instar de Lalo Schifrin, Quincy Jones ou Herbie Hancock, qui ont dans leurs genres respectifs transformé et bouleversé le son des musiques de film, et plus généralement notre sensibilité musicale ainsi que notre goût pour le cinéma.

    C’est dans les années soixante qu’Ennio Morricone surgit, en même temps que John Barry et Lalo Schifrin, dans le paysage un peu routinier de l’habillage musical de film. De nouveaux noms, qui n’étaient pas prédisposés à emprunter cette voie, vont tous partir du même postulat pour accompagner un film et lui apporter une singularité, une identité, ce petit supplément d’âme qui fait la différence. C’est ce que ces nouveaux compositeurs vont justement mettre en œuvre pour faire avancer le cinéma vers une autre approche du ressenti et de l’implication émotionnelle des spectateurs. La musique ne sera plus là simplement comme accompagnatrice ou illustratrice d’une scène, d’un geste ou d’un sentiment, mais bel et bien un personnage à part entière qui influera sur l’histoire elle-même. La musique pourra devancer l’action, elle pourra exprimer beaucoup d’autres choses qu’on ne voit pas forcément à l’écran, mais qui sont censées faire partie de l’univers décrit par le réalisateur. La musique va devenir intuitive, ludique, interactive et installer un dialogue entre l’oeuvre et le spectateur. C’est bien dans les années 60 et encore davantage dans les 70 que le cinéma deviendra toujours plus immersif.

    Le plus souvent, la musique se composait après que le film ait été réalisé, monté et sonorisé. Le compositeur attitré devait se contenter, tel un peintre, d’accommoder ici et là la touche, la couleur et d’habiller les surfaces demandées. Suite à sa rencontre avec Sergio Leone, et la longue collaboration de toute une vie qui s’en suivit, Ennio Morricone allait prendre le problème à l’envers en composant la musique avant que le film ne soit produit. Le réalisateur du « Colosse de Rhodes » avait donc le score de son futur film déjà prêt sur le tournage et articulait ce qu’il avait écrit en fonction de la puissance émotionnelle de ce que Morricone avait composé, projetant ce que le film serait, une fois abouti… Avec « Pour une Poignée de Dollars » naîtra une collaboration qui allait durer huit films. C’est à la lecture de l’histoire ou du scénario que Morricone imaginait en quelque sorte son propre film et son propre ressenti. A l’arrivée, les films de Sergio Leone gagnaient en force, en puissance décuplée, ultra-iconographique et tout faisait sens.

    Au delà de cette approche qui n’appartient sans doute qu’à Morricone, c’est bien la magie exercée par tous ces grands noms de la bande originale de film qui est parvenue à rendre viscérale et entière leur musique, à l’instar d’un John Williams sur une quantité impressionnante de films et leurs thèmes légendaires (« Jaws », « Star Wars », « Superman », « Indiana Jones », « Harry Potter », « Jurassic Park »…), John Barry et les « James Bond », Lallo Schifrin et « Bullit », « Tango », « Mission Impossible », « Mannix ». Des identités musicales indissociables des films qu’elles représentent. Ainsi, la grande force de tous ces compositeurs de génie, à commencer par celle du plus génial d’entre eux, c’est qu’ils ont su évoluer avec les époques qu’il traversaient et s’y adapter.

     

    Jouer et composer à contre-courant d’une mode, comprendre le film et son auteur pour essayer de faire ressortir l’œuvre par l’emploi inédit d’instruments, de voix et de tout ce qu’il était possible de mettre au service de la création pure.

     

    Edda Dell’Orso, la grande chanteuse soprano, fut avec Sergio Leone et Bruno Nicolaï, une autre des contributions majeures au rayonnement de l’œuvre de Morricone. C’est avec « Le Bon, la Brute et le Truand » que leur collaboration démarre, et elle durera le temps d’une centaine d’autres titres qui suivront jusque dans les années 80, avec une des plus emblématiques B.O., celle de « Once Upon A Time In America ». Edda Dell’Orso, c’est cette voix féminine qui semblait descendre du ciel pour y remonter aussitôt et qui a toujours donné un avant-goût d’impalpable, de doux, de mélancolique et de céleste.

    Replongeons par exemple dans la scène d’ouverture de « Il était une fois dans l’Ouest », juste après l’intro et le massacre par une horde de tueurs de toute une famille qui se préparait à un mariage, cette scène dans laquelle Claudia Cardinale descend du train dans une petite bourgade de l’Ouest, en pleine construction. On est censé venir la chercher mais personne ne viendra. Elle attend. La musique commence, douce, cristalline, et constituera le thème récurrent du film, à chaque fois qu’apparait ce personnage : le thème de Jill. La voix d’Edda Dell’Orso fait son apparition. On comprend, avec juste quelques plans et cette musique, que cette femme devait se marier aujourd’hui. La musique continue et semble la suivre, comme une Louma, lorsqu’elle rentre dans la gare pour demander des indications. On la voit ensuite ressortir et la caméra s’envole avec la musique. C’est à ce moment précis, lorsque nos poils se dressent sur les bras et que nos yeux s’écarquillent, embués, que l’on sait que Sergio Leone et surtout Morricone nous feront aimer le cinéma inconditionnellement. La fameuse magie du cinéma…

    Avec sa formation de trompettiste puis de chef d’orchestre classique, ayant fait ses armes en passant par la radio et la télé où il composa des génériques, des jingles, Ennio Morricone saura donc manier toutes ces connaissances pour les fondre ensemble. Pas étonnant que sa musique soit aujourd’hui parmi les plus utilisées par les arrangeurs et divers Dj, pour être mixée et en faire de nouveaux morceaux. Morricone fut en quelque sorte le premier grand mixeur de l’histoire de la musique, un expérimentateur, un sorcier. Dans les années soixante, on assiste aux déferlantes Atonale, Dissonante et Bossa Nova, ce courant musical apparu dans les années 50 au Brésil. Utilisé partout ailleurs comme ce que l’on qualifierait de nos jours de « Musique Lounge », Morricone va quant à lui s’en servir pour composer ses premières musiques de film,  notamment pour des giallos ou des comédies sentimentales, en y injectant des sonorités plus angoissantes.

    Tandis que François de Roubaix, Michel Magne, Pierre Jansen ou Pierre Henry suivaient les traces de Ligeti ou de Stockhausen en France, sans trop savoir où aller avec cette musique dite répétitive et aux premières sonorités électroniques, outre-atlantique, Jerry Goldsmith avait quant à lui déjà bien compris l’utilité de cet héritage, en mélangeant ces sons atonaux produits par des machines avec un orchestre symphonique (« The Illustraded Man », « La Planète des Singes »). Ennio Morricone, plus radical encore et toujours plus moderne, poussait donc l’idée de mélanger tous ces sons et ces influences pour exprimer l’époque et cette ébullition permanente que l’on trouvait aussi bien dans le cinéma (La Nouvelle Vague) que dans la musique (tous les noms précédemment cités) ou dans la mode (Cardin, Paco Rabanne, Courrèges).

    Aujourd’hui, revoir bon nombre de ces films italiens de qualité toute relative souligne le fait que Morricone ne se moquait jamais du film qu’il devait illustrer, comme d’aucun l’aurait fait d’une commande alimentaire. A chaque fois, on est stupéfait de la richesse thématique, mélodique, de la sophistication des arrangements déployés. « Metti Una Sera A Cena », comédie polissonne italienne avec Jean-Louis Trintignant ou bien encore « Crescete E Moltiplicatevi », film d’exploitation italien du début des 70’s, avec histoire prétexte et jeunes femmes dénudées, sont deux exemples frappants de films passables soutenus par une musique assez dingue.

    Ennio Morricone était en fait à l’aise avec n’importe quel genre que l’on pouvait lui soumettre, alors qu’on a un peu trop tendance à le cantonner strictement au rôle de compositeur de musique de westerns spaghetti, et surtout à oublier qu’à l’époque, Bruno Nicolaï (qui oeuvra au côté de Morricone comme arrangeur et orchestrateur pendant plus de vingt ans), Luis Bacalov, Riz Ortolani, Piero Umiliani étaient eux aussi d’authentiques et talentueux compositeurs de musique de film, et que tous ont créé pour des genres très différents, du Giallo au Polar, en passant par le Western ou les films érotiques bon teint. C’est d’ailleurs ce qui fait la force et la richesse de la musique de film transalpine, si on la compare (mais peut-elle être comparée ?) à celle produite en France, en Angleterre ou aux Etats-Unis.

    L’autre force du cinéma Italien, c’est l’ouverture d’esprit qui a toujours fait tant défaut au cinéma français. Que ce soit pour la musique ou pour les thèmes abordés au cinéma, les compositeurs et réalisateurs n’ont pas de problème avec les étiquettes. Ainsi Morricone a pu passer du film bis d’exploitation à des œuvres à gros moyens et à renommée internationale, avec la même élégance et le même sérieux dans la manière de travailler.

     

    Durant les décennies 60 et 70, le cinéma offrait une totale liberté aux compositeurs. Ce n’est pas pour rien si les meilleurs B.O. de films ont été composées dans ces années-là.

     

    Morricone a tout d’abord collaboré à la production de films italiens dans les années soixante, avant de s’exporter en France dès les années soixante-dix, avec en particulier Henry Verneuil et ses polars louchant justement sur le cinéma italien (« Peur sur la Ville », « Le Clan des Siciliens ») ou américain (« Le Casse », « Le Serpent » ou « I Comme Icare »)… Mais s’il y a des œuvres plus prestigieuses que d’autres, que le public ou Morricone lui-même mettent hélas trop en avant, avec des concerts qui sentent le sapin et le syndrome Charles Aznavour, il y a pourtant d’authentiques chefs d’œuvre un peu passés à la trappe, qui pourtant n’ont jamais perdu de leur puissance, de leur modernité et de leur créativité. Pour faire court, les musiques de « Danger : Diabolik » de Mario Bava, « Le Venin de la Peur » de Lucio Fulci, « Enquête sur un citoyen au dessus de tout soupçon » de Elio Petri, « La Dona Invisibile » de Paolo Spinola, « Photo Interdite d’une Bourgeoise » de Luciano Ercoli… Et je ne cite pas les films de Dario Argento, où Morricone a contribué grandement à l’univers torturé et expressionniste du réalisateur de « Profundo Rosso »…

    Ennio Morricone, l’homme aux cinq-cents musiques de film, et peut-être encore d’avantage, puisque l’on découvre tous les jours des musiques composées pour des films totalement oubliés, le stakhanoviste de la B.O., capable de travailler sur trois, quatre ou cinq films par an, n’a jamais démérité ou exercé son talent par dessus la jambe. Retravaillant, recréant, réinventant ou revenant sur des partitions qu’il avait jugées faibles au moment de leur création, pour mieux les faire aboutir sur un autre film des années plus tard, Ennio Morricone a façonné son œuvre comme un tout, avec cohérence et la satisfaction de laisser derrière lui un héritage digne, beau et intemporel.

     

     

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    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

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  • Bettie Page : La Playmate du mois de janvier 1955

     

     

    1957 : une commission d’enquête s’ouvre devant le Sénat contre la pornographie. Un jeune homme de 17 ans vient de se tuer dans la forêt. Près de son corps, on retrouve la photo d’une pin-up aux longs cheveux noirs et aux yeux bleus. Le mannequin est identifié. Il s’agit de Bettie Page. Le couple Klaw, les employeurs de Bettie, dont le mari est photographe de nus et amateur de bondage, est accusé de pornographie. Ils sont sommés de brûler tous les négatifs des photos de Bettie Page. Celle-ci est citée à comparaître mais disparaît, refusant de témoigner malgré les pressions contre Irving Klaw.

    1975 : Vingt ans plus tard, une femme poignarde sa propriétaire de 27 coups de couteau après une altercation au sujet de sa quittance de loyer. Jugée irresponsable en raison d’une schizophrénie paranoïaque, elle est internée en hôpital où elle restera dix ans. Elle est brune avec de magnifiques yeux bleus. C’est Bettie Page. Elle a 52 ans.

    Célèbre mannequin des années 1950, Bettie Page est une icône. Elle a été sans doute la pin-up la plus célèbre et la plus dessinée. Sa vie ne fut pas un long fleuve tranquille. En 1957, elle décide de disparaître, purement et simplement, après un procès éprouvant pour fuir la célébrité et retrouver l’anonymat. Atteinte de schizophrénie, elle passera 10 ans en hôpital psychiatrique pour avoir poignardé sa propriétaire avant de revenir à Los Angeles à l’âge de 62 ans et de pouvoir bénéficier enfin des royalties de son travail et d’une retraite paisible en Californie.

    D’elle on retient sa taille incroyablement fine (61 cm), ses yeux bleus, son regard mutin et sa frange courte noire. Elle fut l’une des toutes premières « playmates  du mois » en 1955 dans le magazine Playboy.

    A 25 ans, elle quitte un milieu familial compliqué, avec un père sans le sou qui a fait de la prison et abuse d’elle, « Un obsédé de la pire espèce qui était prêt à fourrer son machin dans tout ce qui bouge, les vaches, les moutons, tout ! ». Elle se rend à New-York où elle tente de gagner sa vie comme secrétaire. C’est en marchant sur la plage qu’elle sympathise avec un photographe amateur, Jerry Tibbs. Elle s’arrête pour le regarder s’entraîner. Intéressée par le fitness pour sculpter son corps, elle entame une conversation avec lui. Voyant ses formes, il lui propose de servir de modèle. D’abord effrayée et suspicieuse, elle finit par accepter lorsqu’il lui montre sa plaque de policier. Tibbs vend les photos à des magazines de pin-up et le destin se met en marche. Elle sert de modèle dans les clubs-photo. Elle se fait remarquer par sa gaieté, sa joie de vivre et son naturel décomplexé et devient très vite la chouchoute des photographes.

    En 1954, ses photos sont publiées dans une centaine de magazines. Très vite, elle devient modèle professionnel dans le milieu underground de la photo de nu qui fait l’objet de restrictions très strictes à l’époque. Lorsqu’on lui propose de gagner en quelques heures le salaire d’un mois, elle n’hésite pas une seconde et démarre une carrière d’égérie dans le bondage, des images de mise-en-scène sado-masochistes dans lesquelles le partenaire sexuel est attaché, ligoté, menotté ou suspendu. Le corset fait partie de la panoplie, ainsi que le cuir, les bottes, les combinaisons de latex, les camisoles, minerves et autres carcans. Elle est très vite remarquée pour son caractère jovial, gai et joyeux, qui en fait l’icône de la sexualité décomplexée et de la subversion au look sexy et sensuel. Elle seule combine à la fois le visage angélique et sympathique d’une « girl next door » et le corps ou les atouts d’une déesse de l’amour. En 1957, elle sera le modèle de la photographe Bunny Yeager dont la séance de photos au parc zoologique intitulée « Jungle Bettie » en compagnie de deux guépards et avec la tenue cousue par elle-même reste dans toutes les mémoires. Bettie devient « La reine des pin-up ». Sa carrière est à son sommet. Tous les hommes sont fous d’elle. Et pourtant, elle disparaît totalement.

    L’absence fait naître alors la légende. La Reine du Vintage connaît une seconde vague de succès dans les années 1980. Des clubs de fans se créent et se lancent sur sa trace, tentant de la localiser. Les rumeurs vont bon train. On entend tout et n’importe quoi. En vérité, Bettie s’est tournée vers la religion, puis a essayé le mariage. Elle devient un objet de culte et de collection : on la retrouve en BD (« Rocketeer »), en tatouage, en peinture (Robert Blue), en statuettes et même sur les podiums de Haute Couture où l’on tente de copier son look, comme le fameux soutien-gorge à cônes de Jean-Paul Gauthier pour Madonna. Son influence est immense de Poison Ivy à Dita Von Tiese, en passant par le droïde BD-300 de Star-Wars ou encore Xena la guerrière.

    Il aura fallu attendre 40 ans pour que Bettie, lors de sa toute dernière interview, révèle enfin son histoire… Après le procès de 1957, elle prend peur. Exposée, elle reçoit des lettres de menace. A 36 ans, ne supportant plus la pression, elle décide de disparaître. Elle retourne en Floride, se marie, divorce, se tourne vers l’église et veut se consacrer à Dieu. Retourne de nouveau en Floride, se remarie pour la 3ème fois avec un père de famille de trois enfants divorcé. Puis tombe malade, victime de schizophrénie, entend des voix, menace de tuer son mari et ses enfants, divorce en 1977… et sombre dans la folie avant d’être internée pour avoir poignardé à 27 reprises sa propriétaire en raison d’une affaire de loyer. Pendant 40 ans, elle n’a rien vu de tous ses fans et des nombreux artistes qui l’ont imitée, ni de sa notoriété. Elle qui rêvait d’être une star, en était devenue une, mais l’ignorait. Elle n’en prend conscience qu’en 1992 à 69 ans. C’est Dave Stevens, auteur de la série des Rocketeer (1982 à 1995), fan et ami de Bettie qui l’emmène dans une boutique : tee-shirts, posters, statuettes, calendriers, cartes téléphoniques… Tous ces objets célèbrent son culte et pourtant elle ne touchait aucun droit à l’image depuis 40 ans ! Elle meurt en 2008 à Los Angeles, à l’âge de 85 ans. Elle repose au cimetière de Westwood Village.

     

     

    Documentaire « Bettie Page se dévoile » (2011)

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    Bettie Page : Nashville 1923 ✟ Los Angeles 2008

    Photo à la Une © Tony Tubino