Catégorie : Films

  • Alien ou la Saga tuée dans l’œuf…

     

     

    C’est en 1979 que surgit dans les salles sombres des cinémas du monde entier « Alien, le Huitième Passager ». L’affiche du film montre un gros œuf qui se fendille par le dessous et d’où émerge une lumière verdâtre. On se souviendra aussi d’une phrase laconique qui accompagnait l’événement : « dans l’espace, personne ne vous entend crier ».

     

    Par son approche inédite du film d’horreur, qui mélange thriller et science fiction, « Home Invasion » et Lovecraft, « Alien, le Huitième Passager » de Ridley Scott va surprendre puis terroriser des millions de spectateurs. Ce public fraîchement habitué à l’univers de « Star Wars » pensait naïvement que dans l’espace, c’était forcément plus cool… Sur la terre ferme, on avait certes déjà eu droit à « Massacre à la Tronçonneuse » puis à « L’Exorciste » qui campaient sacrément le décor ; dans l’eau, aux « Dents De La Mer » et dans la forêt, à « Délivrance ». Des films qui avaient imposé leurs initiales au genre et qui restent gravés à tout jamais dans l’inconscient collectif… En revanche, dans l’espace, on avait plutôt affaire aux bases et aux vaisseaux spatiaux, aux pistolasers ou aux bons sentiments.

    Mais ça, c’était avant…

    La lumière s’éteint. Le film commence. La musique de Jerry Goldsmith propose, sur la base de quelques notes de cuivres, un thème aussi doux qu’inquiétant pour accompagner les premières images de l’espace infini, des étoiles, des planètes, puis des bâtonnets se regroupent au centre de l’écran pour finir par former le mot « Alien »…

     

    [arve url= »https://www.dailymotion.com/video/xgiud1″ align= »center » description= »« Alien, le Huitième Passager » de Ridley Scott (1979) » maxwidth= »900″ /]

     

     

    Le vaisseau cargo Nostromo rentre sur terre. A son bord, l’équipage se trouve en cryo-sommeil. Alors qu’il passe non loin d’une planète inconnue, les ordinateurs captent un signal de détresse. Tout le monde est alors réveillé et décide d’organiser une mission de sauvetage. Ceux qui se rendent sur le lieu découvrent l’épave d’un gigantesque vaisseau spatial à la forme étrange. Après une petite visite à l’intérieur, l’un des protagonistes, plus curieux que les autres, tombe sur de gros œufs de Pâques.

    Pourtant, ce qui en sortira ensuite ne ressemble pas vraiment à un lapin en chocolat mais plutôt à une grosse bestiole repoussante, croisement improbable entre une araignée et une paire de testicules. Le gloumoute qui surgit telle une mauvaise blague va se ficher sur le visage du malheureux membre d’équipage qui en prenait soin, après avoir préalablement brûlé la visière du casque de sa combinaison spatiale. Dans la salle de cinéma, tout le monde est calmé…

    Le public va par la suite assister, médusé, à une autre scène qui restera probablement dans les annales comme l’une des visions les plus traumatiques du cinéma. Le truc en forme de main posé sur le visage de sa victime a visiblement eu le temps de pondre quelque chose dans son corps, mais personne ne s’en doute encore. Alors que l’homme placé en quarantaine, après avoir sombré dans le coma, reprend conscience sans la chose sur son visage, qui est retrouvé morte et toute desséchée, on est rassuré et déjà prêt à replonger dans un sommeil profond afin de continuer son voyage.

    Lors d’un dernier déjeuner où tout l’équipage est présent, avant de retourner dormir, tout avait pourtant bien commencé mais la digestion de la salade de pomme de terre va s’avérer plus difficile que prévue… La salle, cette fois-ci sidérée, va assister à l’éclatement de l’intérieur du ventre du pauvre type, qui aurait mieux fait ce jour-là de rester chez lui. Une nouvelle créature, à l’apparence cette fois d’un cornichon à mâchoires, lui sort du bide, salut tout le monde puis part à toute vitesse se cacher dans les recoins sombres du vaisseau spatial.

     

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    Avec ces deux scènes électrochocs, « Alien, le Huitième Passager » rentre instantanément dans le registre des standards de l’horreur, comme ses glorieux aînés cités précédemment. On avait peur sur terre, dans les campagnes, dans les villes, dans les océans et on aura désormais peur aussi dans l’espace. La suite de ce film est une course poursuite dans les méandres du vaisseau, au cours de laquelle on assiste, impuissant, à l’élimination méthodique de tout l’équipage par le fameux cornichon à mâchoires qui entre-temps sera devenu assez balèze…

    Pour la petite histoire cinéphilique, au risque de paraître tatillon, il faut savoir que les deux scénaristes du film, Dan O’Bannon et Ronald Shusett, avaient quelque peu repompé l’intrigue d’un film de Mario Bava datant de 1965, « La Planète Des Vampires », dans lequel il était également question d’un vaisseau spatial qui recevait un S.O.S. provenant d’une planète inconnue. L’équipage qui s’était rendu sur les lieux s’apercevait trop tard qu’il ne s’agissait pas d’un appel au secours mais plutôt d’une mise en garde. Voilà pour la petite séquence sodomie de mouche…

    Mais reprenons…

     

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    « Alien » premier du nom va donc propulser le jeune réalisateur britannique Ridley Scott en orbite. Avec ce seul succès à son actif, ce réalisateur venu de la publicité, qui n’avait produit auparavant qu’un seul film, « Les Duellistes », va désormais avoir toute la latitude requise à entreprendre ce qu’il souhaite. Il se lance ainsi dans son projet suivant, tiré d’une nouvelle de Philip K.Dick intitulée « Les Androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? », et rebaptisé pour l’occasion « Blade Runner ».

    Aujourd’hui encore, « Alien, le Huitième Passager » est l’exemple parfait de ce que la conjonction entre plusieurs talents peut engendrer de plus créatif, depuis la direction artistique jusqu’à la réalisation, en passant par la musique, les visuels et bien-sûr le casting. La jeune actrice Sigourney Weaver qui campe le personnage du lieutenant Ripley va d’ailleurs devenir une marque de fabrique du film hollywoodien. La femme forte et intelligente, celle qui aura toujours le dernier mot…

    Mais la véritable vedette du premier volet de la saga « Alien » est bien évidemment le monstre lui-même. Dans un film qui se voulait hyper-réaliste, il était inenvisageable d’y exposer une créature issue d’un bestiaire déjà vu mille fois. Il fallait donc trouver un nouveau concept de xénomorphe qui aurait sa propre logique, un passif, une mythologie et qui soit plausible dans la réalité.

    C’est en Suisse que fût finalement déniché celui qui donnera naissance à la créature légendaire et pas très sympa : L.G. Giguer, un artiste peintre et sculpteur, aux visions cauchemardesques à base d’hommes et de femmes bio-mécaniques, dans lesquelles s’entrelacent et se fondent organismes, phallus, vagins, totems et diverses ornementations ; de parfaites illustrations pour agrémenter un univers Lovecraftien à souhait… Il crée ainsi pour les besoins du film le monstre insectoïde et bio-mécanique parfait. Une créature aussi élégante que répugnante…

    Malgré l’énorme profit que génère le premier opus de la future saga « Alien », La Fox ne va malheureusement pas pouvoir prévoir une suite de sitôt, d’abord parce que Ridley Scott ne souhaite pas revenir dessus. Il a son autre projet qui lui tient à cœur. Même si le potentiel est pourtant énorme, Il faudra attendre sept ans pour que sorte au cinéma une suite intitulée sobrement « Aliens ».

    C’est donc en 1986, sous l’impulsion de James Cameron qui vient de casser la baraque avec son « Terminator » que cette suite voit enfin le jour. Le futur réalisateur du succès hors norme « Avatar » ne prend pas les choses à la légère. Après le thriller spatial claustrophobe qu’avait réalisé son prédécesseur, Cameron voit les choses en bien plus grand. Car quitte à revenir sur cette histoire de monstre dans l’espace, autant y aller à fond…

    Le « S » rajouté au titre donne d’ailleurs le ton. Il n’y a plus un mais désormais plusieurs centaines de xénomorphes à combattre, et quoi de mieux pour tenter d’anéantir ces cancrelats géants que de leur envoyer les Marines. Mais James Cameron n’est pas non plus un bourrin à la Michael BayTransformers », « Armageddon »), il saura jouer sur différents tableaux et différentes échelles.

    Ripley (Sigourney Weaver) reprend du service et c’est évidemment elle qui aura le dernier mot à la fin. Non mais ! D’une femme forte et courageuse dans le premier opus, elle devient, sous la houlette du nouveau réalisateur, une combattante aussi dangereuse que tout un régiment de militaires endurcis. Cameron va pousser les curseurs très loin et offre un film furieusement guerrier. Il enchaîne les scènes d’anthologie, avec un duel final mano a mano entre Ripley et la reine des Aliens absolument homérique.

    Si la version de James Cameron perd certes en mystère, nuance et stylisation, elle y gagne en revanche nettement sur l’aspect spectacle à grande échelle et générosité en scènes d’action en tous genres. « Aliens » sera de nouveau un beau succès, même si les critiques ne goûtent pas totalement sa tonalité jugée trop belliqueuse. Et beaucoup lui préféreront finalement les atours méta de son illustre prédécesseur.

    Orgasmique…

     

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    Il faudra encore attendre six ans pour que la Fox trouve le nouveau réalisateur capable de continuer à entretenir le mythe « Alien ». C’est au tour du jeune David Fincher, issu du clip et de la publicité, de s’essayer à renouveler la franchise. L’idée est maintenant évidente… Il s’agit de changer de ton à chaque nouvel opus, avec comme seul fil rouge, le ou les xénomorphes et le personnage de Ripley.

    Pour ce troisième épisode tout aussi sobrement intitulé « Alien 3 », l’expérience va virer au cauchemar pour le réalisateur. En effet, Fincher, malgré son peu d’expérience en matière de réalisation, montre une appétence pour les idées originales et visionnaires. Ce qui n’est pas du goût du studio qui l’a engagé et qui voyait en lui seulement un bon faiseur surnommé à Hollywood « Yesman ». David Fincher, quant à lui, a une idée bien précise de la façon dont il compte aborder ce troisième chapitre.

    Après la furie martiale et XXL de James Cameron, le futur réalisateur de « Seven » souhaite aller dans une toute autre direction. Plusieurs versions du scénario vont être d’abord proposées, avec des concepts assez fous tels que cette option dans laquelle l’histoire se déroule sur une planète forestière habitée par des moines dépourvus d’armes et qui devraient combattre les monstres par d’autres moyens. David Fincher verrait en effet assez une rencontre entre Alien et une ambiance moyenâgeuse. Difficile à faire avaler aux executives de la Fox, en tout cas…

    Finalement, alors que le tournage commence sans que le scénario ne soit achevé, Fincher convainc en partie le studio de le laisser tourner ce qu’il a en tête. L’histoire va se situer dans un pénitencier à l’autre bout de la galaxie, dans lequel les anciens prisonniers vivent tels des moines et se servent du lieu comme d’un purgatoire, là même où ils ont trouvé la foi en créant une religion nouvelle issue du christianisme. C’est avec l’arrivée de Ripley dans sa navette, qui se crashe non loin de la communauté, que les ennuis vont commencer. Ayant fait vœu de chasteté, tous ces hommes ne sont pas forcément enclins à accueillir une femme, et encore moins lorsque celle-ci amène avec elle un de ces fameux œufs.

    Le film est aux antipodes tant du premier que du second chapitre de la Saga « Alien ». David Fincher propose une œuvre gothique et austère, mâtinée de références bibliques. En affichant le parti pris de pas faire figurer la moindre arme à feu dans le film, il crée un univers complètement inédit et offre au monstre une nouvelle lecture à la série. Ultime provocation, il tue Ripley qui portait elle aussi un Alien en elle et qui se sacrifie en se jetant dans une cuve de plomb en fusion, dans un final christique du plus bel effet, le tout illustré par le magnifique score d’Elliot Goldenthal.

    Cependant, à sa sortie, « Alien 3 » divise aussi bien le public que la critique. Les plus enthousiastes y voit un superbe objet sombre et fascinant, quand les plus fervents adeptes du premier volet le trouve trop éloigné du concept originel. Ce sera aussi le film de la saga qui marchera le moins bien en salle, car trop particulier, mais qui au fil des années deviendra culte. « Alien 3 » est censé clôre la saga en une trilogie aussi hétérogène que captivante…

     

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    Pourtant, en 1997 sort en salle un nouvel épisode de la Saga, « Alien, La Résurrection »…

    Depuis « Alien, le Huitième Passager », l’actrice Sigourney Weaver a pris beaucoup de poids à Hollywood. Non pas qu’elle ait considérablement grossi en se gavant de pizza et de banana split, mais plutôt qu’elle est devenue absolument incontournable. C’est aujourd’hui elle qui a le pouvoir de choisir les projets dans lesquels elle souhaite s’investir. Et ce sera le cas pour la mise en chantier d’un nouvel « Alien ». N’ayant pas été très convaincue par son sort à la fin d’« Alien 3 », elle décide de remettre le couvert et de faire revenir d’une manière ou d’une autre l’increvable Ripley.

    Co-productrice cette fois-ci, la Danna Barrett de « Ghostbusters » va s’enquérir elle-même du prochain réalisateur. Et son choix se portera sur un Français, Jean-Pierre Jeunet, le co-auteur de « Delicatessen » et de « La Cité des Enfants Perdus ». L’actrice-productrice aime son univers particulier et décalé et pense que cela collera parfaitement à cette renaissance.

    « Alien, La Résurrection », malgré une indéniable bonne volonté et des idées intéressantes, se soldera par un semi-échec au box office. Paradoxalement, le film n’a ni l’ampleur d’« Aliens », ni le côté mystérieux d’« Alien 3 » et comparé à « Alien, le Huitième Passager », ne fait plus peur du tout…

    En tentant d’injecter dans ce 4ème opus de l’humour et de la distanciation, le futur architecte du « Fabuleux Destin d’Amélie Poulain » a réduit à néant toute forme d’intensité et de rythme. Le film relève parfois presque plus du pastiche que d’un simple premier degré. Et si « Alien, La Résurrection » peut toutefois séduire grâce à des trouvailles stylistiques et des idées intéressantes en exploitant la mythologie d’origine, jamais il n’offre le spectacle fort et intense que l’on était en droit d’attendre.

    C’est d’ailleurs l’un des films de la saga qui vieillira le plus mal et le revoir le ferait paraître assez anecdotique comparé à ses ainés.

    Cette tétralogie se clôt donc cette fois-ci bel et bien, sur un film bancal et embarrassant.

     

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    Nous n’allons pas nous étendre sur les deux tentatives avortées que furent « Alien vs Predator » (2004) et « Alien vs Predator: Requiem » (2007) pour des raisons d’éthique personnelle. En effet, ces deux « œuvres palimpsestes » qui, comme leurs titres l’indiquent, voient des Xénomorphes affronter des Predators, n’avaient comme unique but que de faire plaisir à une nouvelle génération plus sevrée aux jeux vidéo qu’au cinéma.

    On a longtemps cru que cette fois-ci le sort en était jeté et que la Fox laisserait tranquille une bonne fois pour toutes le xénomorphe le plus mignon de la galaxie. Pourtant, c’est bien le papa d’Alien en personne qui revient à la charge. Ridley Scott décide de réactiver la franchise, lui qui ne voulait plus en entendre parler, pour des raisons qui auraient curieusement un lien avec le décès de son frère réalisateur, Tony Scott.

    En 2012 sort donc en salle « Prometheus ». Le réalisateur de « Gladiator » va proposer cette fois-ci un prequel à son propre film sorti en 1979.

    A noter qu’à la même époque, le réalisateur sud-africain Neil BlomkampDistrict 9 ») travaille aussi sur un projet « Alien » qui aurait été, s’il avait vu le jour, une suite directe au « Aliens » de James Cameron, avec encore et toujours Sigourney Weaver dans le rôle de Ripley. Un reboot, en quelque sorte, qui aurait ainsi passé à la trappe tant la version de David Ficher que celle de Pierre Jeunet. Le projet était sur le point d’être lancé par la Fox. Des visuels comme le scénario était prêts et le film allait rentrer en pré-production…

    Sauf que ce vieux briscard de Scott coiffe tout le monde au poteau, en faisant valoir son ascendant sur l’œuvre complète, dont il devait toujours avoir les droits, balaie d’un revers de la main tout le travail déjà effectué par Blompkamp et son équipe pour imposer sa propre version. Tout est réuni pour qu’il pose alors sur la table avec autorité cette nouvelle histoire révisionniste-créationniste sur la genèse des xénomorphes et par la même occasion la nôtre aussi.

    Si l’on ne tient pas compte de l’énorme attente générée par ce nouveau volet de la Saga, entretenue de part et d’autre par une pluie de vidéos virales sur internet, de sites en tous genres, de forums et autres bandes annonces plus tapageuses les unes que les autres, il faut aujourd’hui considérer ce volet supplémentaire réalisé par Ridley Scott simplement comme ce qu’il est, au fond, à savoir un film peu cohérent dans l’ensemble de la série et au rendu bien inférieur à la somme de fantasmes et de croyances créés en amont de sa sortie.

    D’ailleurs, cette méthode de communication, cette forme de stratégie publicitaire employée afin de provoquer une attente et susciter une envie, n’est pas dénuée de risque et peut fortement desservir une oeuvre, car elle embarque tous ceux et celles qui attendent le film à l’aune de leur propre psyché. Chacun se construit son propre film, sa propre histoire, avec les fragments et les quelques éléments mis à sa disposition… Forcément, les attentes seront immenses et impossibles à combler.

    Pour « Prometheus », les images ou visuels lâchés au compte-gouttes dans l’année qui précéda sa sortie étaient à chaque fois alléchants. Les infos suggéraient beaucoup de mystère, de trouvailles démentes, le tout assorti d’une intrigue révolutionnaire.

    Ridley Scott est avant tout un créateur de l’image et de la forme. Ce n’est pas le scénario qui chez lui est le plus important, c’est le support qui prédomine. Ses films totems que sont « Alien », « Blade Runner » ou encore « Legend » sont devenus des oeuvres références, surtout pour ce qu’ils véhiculent comme force picturale. L’histoire en soi part d’une idée forte et l’intrigue est à chaque fois simple et directe. C’est pour cela que ces films étaient réussis : ils étaient évidents. Le sens du détail, par lequel chaque objet avait une histoire. Jusqu’aux costumes et décors, pour signifier que le monde qui nous était dépeint était tangible.

    « Prometheus », qui devait d’abord s’intituler « Paradise », se revendiquait comme une sorte de nouveau « 2001, l’Odyssée de l’Espace » ; une nouvelle référence ultime qui viendrait remettre les pendules à l’heure en matière de SF pure et dure. Cette énorme production de 150 millions de dollars, opulente et fière, nous fut livrée sur un char de Ben-Hur, au son des trompettes et hautbois… Pour qu’il n’en sorte finalement qu’un ridicule petit « pouet », tant l’intrigue est indigente…

     

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    Le film tente d’occuper plusieurs registres à la fois, dont celui qui renoue avec le premier « Alien » ; l’horreur viscérale, la peur, l’angoisse. « Prometheus », tel un mille-feuilles indigeste, superpose plusieurs couches de lignes directrices. On essaye de suivre tout cela jusqu’à la fin, sans jamais avoir réellement tout compris et surtout sans pouvoir appréhender où cela va nous mener. Au final, le film s’avère totalement nébuleux. Quant aux nombreux protagonistes, ils sont traités comme des personnages de sitcom, avec un petit détail simpliste pour définir tel ou tel caractère.

    Le scénario est à ce titre l’un des plus mauvais scripts agencés et structurés pour ce genre de productions, qui ait pu être proposé depuis bien longtemps. On a finalement l’impression de voir en « Prometheus » la somme des longs-métrages de SF parmi les plus médiocres de ces dernières années, entre « Supernova », « Event Horizon » ou encore « Sunshine ». Chacun de ces films présentait pourtant des pitchs intéressants empruntés à la littérature SF, avec des auteurs comme Isaac Asimov, Arthur C. Clarke ou Philip K.Dick, mais du fait de nombreux problèmes de production et de respect des délais, ils avaient dû se débarrasser en route de pas mal d’éléments pour en arriver finalement à une seule et unique intrigue convenue, à savoir des courses-poursuites entre héros et méchants dans des couloirs exigus, ou encore cet intenable compte à rebours avant que tout ne nous pète à la gueule…

    « Prometheus » nous promettait des merveilles et nous n’avons eu en retour qu’un début beaucoup trop long et ennuyeux ; « Prometheus » laissait augurer des révélations à nous en laisser bouche bée et nous avons trop vite sombré dans de banales scènes d’horreurs et d’effets spectaculaires obligés. Nous finissons par perdre pied en oubliant les tenants de l’histoire, ses enjeux. Quant au scénario, il est tellement mal fichu dans ses ressorts et l’interaction entre les protagonistes, que l’on a du mal à comprendre le ton réel du film. Le score de Marc Streitenfeld est à ce titre à la hauteur de ce qu’est le film ; une musique fade, sans profondeur, sans caractère ni identité.

    Au final, ce pénultième volet en date de la Saga « Alien » réalisé par Ridley Scott n’est ni viscéral, ni effrayant, ni sujet à réflexion, ni même étonnant. Il recèle néanmoins des images sublimes et des tableaux somptueux, à la manière d’un luxueux artbook à l’éloge de tous ceux qui ont contribué à son élaboration. Mais en tant que film, en tant qu’oeuvre, « Prometheus » est un produit sans âme et sans conviction. Un oeuf sans jaune…

     

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    Et Ridley Scott va encore enfoncer le clou et tenter de boucler la boucle, puisqu’il souhaitait réaliser une trilogie en 1979, avant de ne plus vouloir finalement réaliser une trilogie… Vous me suivez ? Avec « Alien: Covenant » sorti en 2017, il emploie de nouveau les mêmes méthodes de communication que pour « Prometheus », avec fausses publicités sur Youtube, teasers, etc… pour faire exister son film comme un univers plein et cohérent et surtout générer la même attente chez le public.

    Avec cet ultime opus, on ne touche même plus le fond, mais on creuse… En l’espace de deux films, Scott aura réussi à saborder complètement son œuvre matricielle, comme un dernier bras d’honneur à tous les fans de cette mythologie. En voulant apporter des réponses à ce qui faisait justement le mystère et l’étrangeté des épisodes originels, le réalisateur enterre la saga « Alien » une bonne fois pour toutes, pour l’éternité…

    Comme le chante Dominique A : « on ne souhaite pas la mort des gens, ce n’est jamais assez méchant ». Espèrons juste qu’après la disparition de Ridley Scott, un réalisateur plus inspiré et passionné pourra surgir de l’éternité et saura ressusciter notre monstre préféré et son si beau sourire de cornichon géant à double mâchoire…

     

     

     

  • Silence Plateau | Fargo (Policier, 1996)

     

     

    Au premier abord, Fargo, des frères Coen, est un film de série B complètement idiot, et ennuyeux au possible. Un vendeur de voiture financièrement aux abois fait appel à deux malfrats de seconde zone pour kidnapper sa femme, et demander une rançon à son riche beau-père. Ça, c’est le premier degré…

     

    Et puis on se dit que si « Fargo » fait probablement partie des cent meilleurs films de tous les temps, c’est sans doute qu’il y a une raison. Alors on se force à persévérer. Et en effet, on prend conscience que ce film est un petit bijou :  un vrai « exercice de style ». Le style Coen… Des personnages on ne peut plus ordinaires, plutôt loosers, sortis du fin fond du Minnesota, un déclencheur (ici, le kidnapping) qui tourne au fiasco, des psychopathes décérébrés, et un paysage d’horizons enneigés qui s’étendent à l’infini.

    Les frères Coen partent d’un fait divers, à la fois horrible et très banal. Grâce à un comique de situation fait de décalage, à la fois dans les personnages (une enquêtrice enceinte jusqu’au cou), comme dans les situations qui dégénèrent (la scène de kidnapping), ou dans les dialogues (dont on se demande « mais qu’est-ce que ça vient faire là ? », au beau milieu d’une scène dramatique), ils arrivent à transformer le pitoyable en jouissif.

    En fin de parcours, on comprend le génie des frères Coen : génie de création, pour l’imagination de chacune des scènes construites comme des sketchs humoristiques, génie des dialogues, dont l’absurdité et le décalage face à la situation nous coupe le souffle, génie du jeu d’acteurs, qui parlent et agissent avec placidité dans une situation pourtant stressante, génie de direction photo avec des plans images époustouflants, génie de la BO enfin, avec une musique efficace de Carter Burwell, fidèle parmi les fidèles.

    Face à tant de bêtise, « aurez-vous le courage d’en rire » ? C’est le message de l’affiche du film, et toute la philosophie du cinéma des frères Coen.

     

    Instant-City-Fargo-02

     

     

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  • Silence Plateau | The Thing

     

     

    Il y a des films comme ça, parfaits, voire géniaux, mais qui souffrent d’un mauvais timing. « The Thing » en fait partie. Sorti entre « Rencontre du 3ème Type » et « E.T. », il n’a hélas pas tenu la contradiction, à une époque, en 1980, où la mode était aux extra-terrestres super sympas, les messages de paix intergalactiques et les enfants rêveurs.

     

    John Carpenter n’est pas le genre de réalisateur à surfer sur de quelconques vagues commerciales ou des opportunités du même acabit. Ce qu’il voulait à l’origine, c’est surtout faire le remake d’un film de 1951 de Howard Hawks, avec une de ses rares incursions dans le fantastique et l’horreur, « La Chose D’un Autre Monde ». Dans ce film d’exploitation, le réalisateur de « Fog » y voyait l’opportunité de pouvoir pousser beaucoup plus loin l’idée du péril et de l’invasion extra-terrestre, en mettant en image l’esprit de l’un de ses romanciers favoris, à savoir H.P. Lovecraft.

    Avec cette histoire simple et linéaire, son unique décor et sa poignée de personnages bien trempés, son maquilleur de grand talent, Rob Bottin, « The Thing » a tout d’un film à ranger sur la même étagère que « L’Exorciste », « Massacre à la Tronçonneuse » ou « Evil Dead ». Une maîtrise totale de son sujet, un traitement au premier degré, où l’on croit totalement à ce que l’on nous montre.

    A la grande différence de ses illustres modèles comparatifs, qui dans des mises en scène inspirées, illustraient cependant l’horreur en ne faisant que suggérer au lieu de nous montrer, laissant alors au spectateur le soin d’imaginer et de croire avoir vu, John Carpenter opte quant à lui pour la démonstration frontale. C’était là la grande idée folle qui enfin pouvait dire d’une certaine façon ce que l’inventeur de Cthulu et ses hordes de visions cauchemardesques exprimait à longueur d’écrits soixante-dix ans plus tôt.

    « The Thing » devait donc être un film avec un « méchant » extra-terrestre. Un méchant comme on ne l’avait encore jamais vu sur un écran de cinéma. Ce que les spectateurs à l’époque ne souhaitaient donc plus voir… Encore une fois, le film sort en salle trop tard puisqu’avec cette nouvelle décennie, voici l’avènement d’un cinéma plus mainstream, plus familial et où il faut des films qui se terminent bien, avec des héros positifs et des messages à visée universelle.

    Ce que raconte « The Thing », c’est tout bonnement la fin du monde, avec ce final nihiliste où l’on comprend donc que tout le monde va y passer. Tous les ingrédients étaient pourtant là pour aboutir à une réussite absolue. Ce qu’est de toute façon le film… Son acteur fétiche, Kurt Russell, un score atmosphérique et angoissant signé par Ennio Morricone, des effets spéciaux (en latex et animatronique) spectaculaires réalisés par Rob Bottin, et un scénario sans faille…

    Un bide…

    C’est au cours des décennies suivantes que « The Thing » va gagner ses galons. D’abord découvert en VHS par les ados de l’époque, puis de ressortie en ressortie, il est devenu le film le plus plébiscité de la filmographie de Carpenter. Il était réédité de nouveau en 2016 en version restaurée et force est de constater qu’il faisait toujours aussi peur. Cette peur viscérale aussi bien qu’irrationnelle. La peur du noir, de l’inconnu, mais aussi de toute sorte de psychose, de paranoïa, de l’autre, en fait.

    Hommage donc évident à Lovecraft, de par son ambiance gothique et malgré une histoire qui se déroule en Antarctique, des visions de cauchemars avec leurs diverses transformations physiques, son climat étouffant, paranoïaque et psychologique, « The Thing » crée aussi bien le malaise que la stupeur, en particulier lors des scènes d’attaque du monstre. Parce que oui, c’est là un superbe film de monstre, que l’on nous montre sous toutes les coutures, sous ses différents aspects, et Dieu sait s’il y en a beaucoup et que pas une scène où il intervient n’est identique aux autres.

    Il est amusant de voir de nos jours toute une palanquée de réalisateurs se revendiquant d’un cinéma 80 ; les plus illustres, tels J.J Abrams ou le dernier en date, Jeff Nichols avec son insipide « Midnight Special », nébuleux hommage à Spielberg. Tous hélas ne gardent que ce goût pour un merveilleux bleuté et évanescent, mais sans message ni empathie. Ou même encore une boursouflure comme « The Revenant » dans lequel Inarritu tente la pièce montée ultime en remplissant de force son gâteau avec trop d’ingrédients finalement inutiles.

    Plus attiré par les beaux plans et leurs cinégénies que par un fond et ce qui restera plus tard dans les tripes du spectateur, le réalisateur de « Birdman » ne s’intéresse qu’à l’œil et à l’instant, au lieu de penser à après et à ce que cela produira dans l’inconscient collectif. Comparer Inarritu et son film bourré d’infographie qui tente de singer Terrence Malick avec celui de Carpenter, pourquoi pas, puisque l’on y parle de la même chose finalement, soit la survie en milieu hostile et la loi du plus fort.

    Mais l’un est allé à l’essentiel, en privilégiant des scènes fortes parfaitement connectées avec le sujet. Quant à l’autre, il s’embourbe dans l’afféterie et des tas de références ou d’emprunts. Inarritu ne conçoit pas l’histoire mais seulement sa mise en scène, où tout est pensé sur le principe du dispositif et de la surenchère stylistique. Un comble puisque « The Revenant » est aussi gore que « The Thing » mais paradoxalement jamais viscéral.

    John Carpenter, réalisateur souvent mal aimé puis récupéré in extremis par une certaine intelligentsia, a toujours maîtrisé ce qu’il faisait et su ce qu’il avait envie de faire. Ses films, et surtout « The Thing », sont toujours d’une parfaite cohérence doublée d’une beauté tranchante et froide, comme la mort.

     

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    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

     

  • « The Hole » : Dernier rempart face au néant

     

     

    A l’instar d’un réalisateur comme John Carpenter, Joe Dante, c’est une sorte de papa gâteau pour des générations entières qui, sans trop en avoir conscience, ont fait leurs premiers pas dans la cinéphilie dans les années 80. Et ce premier pied posé en salle le fut pour des films tels que « Gremlins », « Explorers », « L’aventure Intérieure », « Hurlements », ou avec Carpenter, pour « The Thing », « Fog », « New York 1997 », « Jack Burton », etc…

     

    Voir aujourd’hui « The Hole », c’est redécouvrir ainsi un petit film sorti comme ça, au débotté, sans faire de bruit… On se dit tant pis, ou tant mieux, ou encore c’est la vie, c’est comme ça. On argumente alors, avec notre petit snobisme mi-nostalgique mi-mélancolique sous le bras, et on crie à la face du monde que c’était mieux avant, que c’était ceci, que c’était cela… Car le film en question, sorti pourtant en 2009, possède en effet encore de ce lustre-là. Il paraît lui aussi un peu désuet, forcément, tant les effets ne sont pas plus appuyés que ça. Mais il n’y a en tout cas aucun cynisme dans la démarche.

    Avec son petit budget, Joe Dante remplit son sac à malice à rabord de toutes les thématiques qui lui sont chères. Il parvient avec trois bouts de ficelle à capter la magie d’une époque, un beau geste pour la forme, une élégance, là, droit au coeur, exactement ce qu’avait manqué Abrams avec son film « Super8 » et de gros moyens déployés ; Abrams qui lui aussi se croyait obligé de rendre hommage à ce cinéma-là.

    « The Hole » ne pourra donc que plaire à un certain public qui croira reconnaître un vieil ami parmi une foule d’anonymes.

     

     

     

     

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    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

     

  • Gentille, un film à redécouvrir à l’heure du goûter

     

     

    Découvrir ou redécouvrir aujourd’hui ce petit film charmant sorti en 2005, à l’heure où un cinéma français corseté, à de rares exceptions près, ne propose plus dans ce registre de la comédie amoureuse décalée que des stéréotypes voulant coller coûte que coûte à une actualité avec pertinence et acuité, « Gentille » est un baume pour la peau à la pêche, une lotion précieuse, une huile essentielle.

     

    Sophie Fillières, sœur de l’actrice Hélène Fillières, a un univers particulier et totalement libre. Une façon bien à elle d’appréhender les situations de tous les jours et les rapports humains. Que ce soit « Aïe », « Un Chat, Un Chat » ou encore « Arrête ou Je Continue », l’ex-épouse du scénariste et réalisateur Pascal Bonitzer propose toujours des histoires axées sur le couple hétérosexuel contemporain, urbain, cultivé, bourgeois, complètement perdu et au bord de la rupture. Attendez, ne partez pas ! Il ne s’agit pas là d’une mauvaise blague mais bel et bien de films qui tendent à dirent justement que c’est nous qui sommes une blague.

    « Gentille » est sans doute son film le plus réussi à ce titre et le plus précis sur ce que racontent nos vies et nos destins. Emmanuelle Devos, Lambert Wilson, Bruno Todeschini, Michael Lonsdale et Bulle Ogier composent des personnages qui semblent tous sortis trop tôt d’une thérapie de groupe qui aurait dégénéré. Une tournure inédite, joyeuse et rassurante.

    L’histoire tient en deux lignes. Un couple et une demande en mariage variablement retardée entre hésitations ou éléments annexes. Les institutions, l’adultère, les convenances, le caca, l’embarras, tout ici est brassé, traité en une ronde de petites saynètes hilarantes. Des situations absurdes, des quiproquos qui peuvent déboucher sur des résolutions, des personnages qui se cherchent avec chacun son propre langage, l’amour comme une proposition, le monde comme un vaste champ d’expérimentation. Rien ne peut être hasard et tout s’explique.

    « Gentille » est un film dont on se délecte et qui se savoure comme un petit macaron de chez Hermé, au parfum indéfinissable mais exquis. On navigue entre Lewis Caroll, André Breton et Wes Anderson. C’est grave et léger, mais la gravité finalement n’a sur ces personnages du lest suffisant que jusqu’à la fin du film. Parce qu’à la fin, tout le monde s’envole…

     

     

     

     

     

  • « The Black Hole » : un ratage total mais avec un vaisseau spatial en forme de Tour Eiffel…

     

     

    A l’aune du gigantesque succès surprise et mondial de « Star Wars » en 1977, chaque grosse major se devait forcément d’avoir « son » film de science fiction spectaculaire, qui répondrait aux attentes d’un public conquis par cette thématique dans le vent. L’espace faisait rêver et on souhaitait voir autre chose que juste des vaisseaux avançant mollement dans l’infini…

     

    Tout devenait dès lors possible avec les effets spéciaux et on pouvait imaginer ainsi toutes sortes d’histoires avec comme décor un fond étoilé. « Alien, Le 8ème Passager » et « Star Treck, Le Film » furent donc les suivants sur cette liste opportuniste et propulsèrent par leur succès le genre comme nouvelle tendance lourde du Blockbuster.

    1979… En voulant surfer également sur la vague Space Opera et espérer ainsi une part du gâteau, Disney s’engouffre à son tour dans la brèche pour monter « The Black Hole ». La firme de Mickey dépense alors sans compter et s’embarque dans une histoire pseudo-religieuse à grand renfort d’effets spéciaux, de décors immenses et d’acteurs chevronnés, mais sur le déclin et utilisés à contre-emploi.

    Malgré tout ce qui aurait pu laisser espérer le meilleur, des éléments connotés SF à la superbe musique de John Barry, en passant par la direction artistique assez originale, le Sygnus, ce vaisseau spatial géant, croisement entre Eiffel et le Nostromo d’Alien, le look général du film, sombre à souhait, Elisabéthain, rétro-futuriste et des idées assez folles et marquantes, « The Black Hole » est un désastre artistique sur toute la ligne, suivi d’un bide retentissant au box office mondial.

    Tout y est mou, mal dirigé, filmé comme un épisode de Derrick, avec des acteurs peu motivés par ce qu’ils doivent produire à l’écran. Revoir aujourd’hui ce film relève du coup de l’ascendant de sympathie…

    « The Black Hole » reste désespérément ennuyeux, avec ses dialogues lénifiants et un manque cruel de rythme, de ressort dramatique, cumulant tout ce qu’il ne faut surtout pas faire pour un film de ce genre, mais s’en dégage tout de même un doux parfum de bizarrerie, sans doute lié à la qualité apportée à ses décors inspirés de cathédrales, au grand robot rouge lévitant avec ses bras qui se transforment en hélices meurtrières, aux robots zombies ou aux pupitres d’ordinateurs qu’on croirait dessinés par Bernard Buffet…

    Ce film est comme le grand vaisseau de l’intrigue, un corps massif à la dérive, fantomatique, avec des reflets luisants laissant deviner quelque chose de beaucoup plus beau et d’infini…

     

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    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot Facebook

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

     

  • Green Book, l’éternelle culpabilité

     

    L’Amérique a toujours eu une police avec la gâchette quelque peu facile lorsqu’elle voit un homme noir dans sa ligne de mire… Et elle pratique également assidument cette autre religion qui se nomme « Hollywood ». Quel est donc le dénominateur commun entre ces deux institutions ?

     

    Hollywood peut vous confectionner sur mesure, en prévision de la prochaine cérémonie des Oscars, des films dans lesquels on dénonce le racisme culturel ambiant, qui remonte déjà à l’époque de la sécession et des champs de coton, mais qui semble toujours autant d’actualité en 2019.

    Car cette aversion qu’ont beaucoup d’Américains pour leurs compatriotes dits « de couleur » est toujours aussi prégnante et a encore de beaux jours devant elle…

    Alors, tous les deux ans, un film traitant de ce sujet va désormais recevoir la statuette la plus convoitée du cinéma international, sous les applaudissements humides d’un public d’happy few qui ont probablement tous voté pour Barak Obama et Hillary Clinton aux dernières élections présidentielles américaines…

    A l’aune de cette réalité, le film « Green Book : Sur les routes du Sud  » n’est pas un mauvais film. Il coche d’ailleurs toutes les cases des situations qu’il faut imposer à un public en plein sevrage, entre une Marvellerie et une comédie romantique faussement irrévérencieuse. Tout est une question de timing…

    Avec « Green Book », on a donc affaire au film parfait, puisqu’il manie à la perfection plusieurs genres, du film dossier à la comédie, en passant par le body movie. Nous aurions pu citer aussi le road movie, autre grand thème cher au cinéma américain. On saupoudre enfin l’histoire (attention spoiler…) d’un peu d’homosexualité et clac, L’affaire est dans le sac !

    Le scénario est bien ficelé, les acteurs sont parfaits. La réalisation est léchée et le tout baigne dans une lumière qui fera très années 60 (jaune, nostalgie, jolie campagne du sud).

    Sans oublier évidemment la caution indispensable, « tiré d’une histoire vraie », deux personnages principaux antagonistes qui finiront copains comme cochons et un final digne d’un film de Frank Capra.

    Rien ne nous sera épargné… Balisé de bout en bout, « Green Book » de Peter Farelly, qui dans d’autres temps nous avait régalé avec des comédies géniales (« Dumb and Dumber », « Mary à Tout Prix »…), propose le film corporate ultime, propre et lisse.

    On ne peut qu’être d’accord avec tout ce qui y est raconté, bien-sûr, mais à quoi bon… Car est-ce cela, le cinéma en 2019 ? Un cours de civisme…

    Traiter du racisme ou de l’homosexualité aurait peut-être davantage sa place à l’école, pour commencer. Inculquer à tous ces godets d’adolescents les fondamentaux, qui ne sont d’évidence pas relayés par des parents américains en panne d’éducation.

    « Green Book », à part brosser les spectateurs dans le sens du poil, n’offre malheureusement pas grand chose d’autre. C’est un film inoffensif, poli mais creux.

    Ah, chère Amérique, pays des libertés, des paradoxes et de l’éternelle culpabilité…

     

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    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Dévoreur Hubertouzot

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

  • L’Echelle de Jacob : La douceur de la mort aussi

     

     

    « L’Echelle de Jacob » est sans doute le meilleur film d’Adrian Lyne, que l’on croyait n’être qu’un faiseur efficace d’un genre dédié aux 80’s. « Flash Dance », « 9 Semaine ½ », « Liaison Fatale »… 

     

    Sorti en 1989 et passé assez inaperçu à l’époque, ce film a pourtant, au fil des ans, tricoté ses mailles d’oeuvre culte en devenant un modèle du (des) genre(s), voire même une base matricielle, puisque tout un pan des cinémas japonais, espagnol et français a entièrement repris son alphabet, son esthétique et son atmosphère.

    Premier du genre donc, le film lance un nouveau style visuel emprunté au photographe Joël Windkin et ses univers putréfiés, clairs-obscurs et fétides. C’est jusque dans le monde des jeux vidéo que « L’Echelle de Jacob » impose un style visuel, sorte de synthèse entre Goya, Rembrambt, Bosh, Bruegel et le photographe cité plus haut. David Fincher viendra d’ailleurs aussi s’y servir pour décorer son deuxième film, « Seven », le thriller qui l’aidera à se propulser en orbite. Avec ce thème musical récurant au piano, doux et mélancolique, de Maurice Jarre, le film d’Adrian Lyne nous parle de la condition humaine sous l’épaisseur de différents filtres.

    Oui, c’est un film qui impressionne, qui horrifie, qui terrorise même, mais avec de la lenteur et de la tristesse. Ce mélange de douceur et d’horreur qui nous étreint jusqu’au final est une marque que reprendront tous les réalisateurs dans les 90’s. C’est aussi le premier film qui va relancer la mode du « Twist » final, sorte de coup de théâtre qui remet tout le récit en question ainsi que nos interrogations. Sauf qu’ici, même si c’est le premier du genre, il n’y a pas que le principe en soi : c’est un style. Ce final se raccroche à tout ce que l’on a vu. Cette mise en abyme vaut également comme point de départ à nos propres questionnements.

    Film très ambitieux qui fonctionne un peu comme avec « L’Enfer » de Dante, il nous étrangle petit à petit jusqu’à ce que l’on cède. On peut sourire pour ce que le film soulève comme interrogation sur notre foi, nos religions ou nos aspirations. Ce n’est pas très grave car il possède suffisamment de niveaux de lectures et d’interprétations pour que l’on puisse aussi l’apprécier juste comme une oeuvre cinématographique belle, sombre et poétique.

     

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    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Dévoreur Hubertouzot

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

     

  • Un Netflix gratuit entièrement dédié aux vieux films

     

     

    La petite pépite du jour s’appelle Datejade et va sauver ton week-end…

     

    Servi sur un plateau d’argent, voici une toute nouvelle plateforme qui, à l’instar de Netflix, propose un service de streaming de films. À une seule différence : Datejade est entièrement gratuite, et la sélection est hyper pointue.

    Si le design ressemble étrangement à Netflix, la ressemblance s’arrête ici puisque le contenu, lui, n’a rien à voir. Le catalogue de Datejade ne propose qu’une sélection de vieux films, des grands classiques tous tombés dans la liste des œuvres libres de droit. De « Je dois tuer » (« Suddenly » en VO) avec Frank Sinatra à « La Nuit des Morts-Vivants » de George A. Romero, en passant par « Le Livre de la Jungle » (celui de 1942 réalisé par Zoltan Korda), il y a de quoi se faire une belle soirée ciné.

     

     

     

    La plateforme étant toute récente, ne vous attendez pas à trouver un catalogue aussi riche que chez son célèbre concurrent. La liste des films est peut-être encore maigre, mais nul doute qu’elle ne cessera de s’allonger dans les temps à venir. Stay tuned !

     

    Article : Sarah pour Le Bonbon

     

     

  • Heat de Michael Mann : retour sur un face-à-face mythique

     

     

    Heat de Michael Mann, sorti en 1996, permit aux deux monstres absolus du cinéma, Robert de Niro et Al Pacino, de se donner pour la première fois la réplique. Sobriété du jeu, scènes d’anthologie, retour sur un film mythique…

     

    On dit qu’il n’y a que les montagnes qui ne rencontrent pas… C’était vrai jusqu’en 1995, quand Michael Mann dirige deux sommets ensemble dans son chef d’oeuvre, « Heat ». Al Pacino et Robert de Niro, ou Robert de Niro et Al Pacino, le flic et le voyou, ou le voyou et le flic…

    C’est qu’il s’agit de ne pas les froisser, ces deux-là… 21 ans avant, ils ont joué dans le « Parrain 2 », mais ils n’avaient aucune scène ensemble. Depuis, ils sont devenus des monstres, des superstars, et c’est peut-être parce que leur accorder le même temps à l’écran était un véritable casse-tête qu’il a fallu attendre aussi longtemps avant que quelqu’un ne s’y colle.

    Parce que selon une petite info rien que pour vous, il n’était pas question contractuellement que l’un n’ait plus la vedette que l’autre, Michael Mann les a donc filmés en parallèle, pour ne pas dire en reflet, l’un étant le négatif de l’autre.

    Mais bon, Mann n’a évidemment pas pu résister au face-à-face… Il dure précisément 6 minutes et 18 secondes, et rien n’a été laissé au hasard. Un plan sur l’un égal un plan sur l’autre, une amorce-épaule ici égal une amorce-épaule là… Au total, 53 plans pour cette scène d’anthologie. Mais attendez, ça veut dire que l’un a un plan de plus que l’autre ! Affirmatif, et c’est Pacino qui gagne… Il ouvre la séquence et la clôt. Mais de Niro obtient une contrepartie, il apparaît 36 secondes de plus… Notez qu’il n’existe pas un seul plan où les deux apparaissent nettement côte à côte, peut-être parce que même en scope, l’écran est trop petit pour deux montagnes pareilles.

    A redécouvrir de toute urgence…

     

    Source : Christophe Carrière

     

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