Catégorie : Films

  • Possession : La grande symphonie du mal

     

     

    Le film « Possession » surgit dans les salles de cinéma en 1981, comme le diable derrière la fenêtre, sans que personne n’ait pu se préparer à un tel choc esthétique et visuel. Avec cette œuvre qui sent le soufre, on navigue entre miracle et hérésie. Et c’est avec sidération que l’on contemple comment tout, jusqu’à l’anecdotique, est utilisé et mis en scène. D’abord les personnages, qui deviennent devant la caméra de celui qui est à l’œuvre des pantins dont les fils ont été coupés, mais qui agissent brusquement et sans logique, dans cette nouvelle liberté acquise. Que se passe-t-il alors, lorsque les marionnettes deviennent maîtresses de leurs gestes et de leurs émotions ?

     

    Et celui qui est à l’oeuvre derrière la caméra, justement, le réalisateur polonais de « Possession », Andrzej Zulawski, n’en est pourtant pas à son coup d’essai. À l’instar d’un Maurice Pialat ou d’un Abdellatif Kechiche, le réalisateur de « L’important c’est d’aimer » n’a jamais eu pour habitude de dorloter ses comédiens. Il en attend beaucoup, énormément, jusqu’à la folie. Il est de cette famille de cinéastes qui essorent leurs comédiens. Il en presse ainsi tout le jus pour les laisser, à la fin, exsangues. C’est amusant d’ailleurs, lorsqu’on pense à Sophie Marceau, malmenée par Pialat durant le tournage du film « Police » en 1985, et qui enchaînera la même année avec « L’Amour Braque » de Zulawski, dont elle deviendra en prime la compagne. Comme quoi, qui aime bien, châtie bien…

    Chacun de ses films, Andrej Zulawski les conçoit comme des catharsis, des réceptacles pour ses propres démons, ses obsessions. « Possession » est pensé en réaction à un projet avorté juste avant, le film « Sur le globe d’argent » qu’il achèvera finalement en 1987. Mais ce que Zulawski va accomplir avec « Possession », c’est une forme de monstruosité impensable, innommable, et jamais, avec une œuvre pour le cinéma, on se sera approché aussi près des enfers et de la folie. L’œuvre du romancier H.P. Lovecraft n’aura d’ailleurs à aucun moment été ressentie avec autant d’écho, tant les motifs du film sont dépeints avec exactitude et similarités. Les pires représentations des fameuses abominations exprimées dans les écrits de l’auteur américain, se manifestent ici grâce à des images jumelles et troublantes.

    Même si ce film date de 1981, il n’a en soi jamais perdu de sa superbe méphitique. On peut le voir également comme une extension de « Rosemary’s Baby », « Le Locataire » ou « Répulsion » de Roman Polanski, voire même « Chromosome 3 » de David Cronenberg ; des œuvres immersives où l’on vous plonge dans la psyché des protagonistes, avec la matérialisation physique des pires horreurs qui rôdent dans leurs esprits tourmentés.

     

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    Plus que malaisant, « Possession » est un viol qui ira chercher très loin dans vos chairs ce que vous redoutez le plus. Isabelle Adjani, qui est le choix d’évidence dès le départ, refuse pourtant catégoriquement le projet, qu’elle juge trop sombre, trop dangereux pour elle. C’est Bruno Nuytten, directeur de la photographie, engagé pour nimber le film de cette lumière tour à tour grise, bleutée et orange, et également à l’époque l’époux d’Isabelle Adjani, qui parvient à convaincre l’actrice.

    Rétrospectivement, l’ancienne pensionnaire de la Comédie-Française regrette ce film amèrement. Il en résultera un grand traumatisme et elle fustigera le réalisateur de lui avoir fait sortir des choses qu’elle ne soupçonnait pas. Des choses qu’elle n’aurait jamais voulu connaître…

    En effet, ce qu’Isabelle Adjani déploie pour son rôle relève de la gageure. C’est dans un maelström d’émotion, de sang et d’injures que gicle, qu’éructe le long-métrage jusqu’à nous. La scène d’anthologie dite de la fausse couche dans les couloir du métro berlinois est à ce titre une expérience sensorielle et traumatique inégalée, à ranger sur la même étagère que celle de Romy Schneider dans « Le Vieux Fusil ». Quant à d’autres séquences du film, elles pourraient évoquer « Requiem pour un Massacre » ou encore « L’Exorciste ».

    On peut interpréter ce film fou comme une œuvre politique, du fait déjà du décor dans lequel est plantée l’action (le Berlin d’avant la chute du Mur), avec ses vastes immeubles abandonnés et sinistres. On peut y voir aussi, à la façon de l’auteur de « La Fidélité », un pamphlet sur le mariage et la rupture, à base de couteau ménager électrique et de matérialisation monstrueuse de choses impies, soupirantes et humides. Le parti pris audacieux de cette histoire est de saisir à bras-le-corps la représentation de l’horreur que constitue l’autre, comme ce que Jean-Paul Sartre avait diagnostiqué, mais en pire, en indicible.

     

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    « Une jeune femme enfermée entre les murs d’un Berlin assiégé par les forces du Mal, physiques et obscures, prend pour amant un hippie ridiculement attardé, produit d’elle-même et aime un monstre difforme qui prendra figure de son mari, embourbé et encanaillé dans une politique d’espionnage. Le Bien contre le Mal. Le Mal gagnera, mais la femme et l’homme retrouveront leur amour, tragique, futile et sans usage. Aux dernières images, la guerre éclatera. Il y a toujours une guerre. » (Andrzej Żuławski cité par Jérôme d’Estais dans son livre « Un testament écrit en français »)

     

    Le personnage joué par Adjani entretient donc une relation amoureuse et sexuelle avec une ignoble créature qui se terre dans un appartement, où suintent la moisissure et la putréfaction, avant que celle-ci ne finisse par se muer en un Doppelgänger qui prendra peu à peu la place de son mari (interprété par Sam Neil). Anna aura elle aussi son double, Helen, afin d’exprimer toute une symbolique qui s’imbrique dans la narration et le cheminent tortueux de l’histoire. Un film donc hautement symbolique, où tout s’exprime agressivement, comme une réaction, celui d’un corps qui réagirait à la maladie. Laquelle ? Probablement l’être humain.

    Pour la petite histoire, le concepteur de la créature à tentacules du film, Carlo Rambaldi, réalisera un an plus tard pour Steven Spielberg l’extra-terrestre le plus connu de toute la galaxie. On peut ainsi dire qu’avec la création de cet être messianique venu des étoiles, au long doigt lumineux, le peintre et sculpteur italien se sera ainsi évité un mauvais karma, en ayant donné jour à cet amant impie qui se répand sur Isabelle Adjani.

     

    Film d’auteur horrifique

    « Possession », malgré son ton halluciné et auteurisant, n’en demeure pas moins un vrai film d’horreur. Avec son manque d’humour revendiqué – l’humour qui n’a d’ailleurs jamais été caractéristique du cinéma de Zulawski – l’oeuvre affiche cependant une tonalité burlesque, grotesque, qui nous tétanise. En réaction à son divorce qui l’affecte profondément, le réalisateur de « La Note Bleue » peut se défouler et surréagir à ce qu’il est en train de vivre. Et on peut gager que la séparation à l’écran ne se passera pas dans la douceur et la diplomatie…

    On peut tout à fait ne pas goûter aux sombres et hystériques visions du réalisateur polonais, tout en reconnaissant la maîtrise de son film et ses fulgurances, telles autant de gifles et de coups. « Possession » vient de ressortir en blue ray, bénéficiant d’une restauration méticuleuse de ses images. N’hésitez pas à redécouvrir cette œuvre remastérisée et apprécier un cinéma extrême et totalement libre. Une œuvre douloureuse, difficile, mais rare.

     

     

     

     

  • The Mandalorian : que reste-t-il de nos… Star Wars ?

     

     

    C’est acté, confirmé, tamponné, on peut le dire aujourd’hui, la reprise de la licence Star Wars par Disney s’est soldée au cinéma par ce gâchis manifeste que nous connaissons. C’est en effet dans la précipitation et le souci de récupérer au plus vite les quatre milliards consentis à George Lucas pour acheter son bébé cosmique, que la firme aux grandes oreilles met en chantier une nouvelle trilogie dès 2013, juste après la coûteuse acquisition, et sans tenir compte pour autant du fameux adage : « il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs ».

     

    En ne prenant absolument aucun risque avec le matériau de base et afin de rallier à sa cause un maximum d’adeptes, on lisse au maximum, on ripoline, on ponce, pour que rien ne dépasse et que ces nouveaux épisodes soient en parfaite cohérence avec l’état d’esprit du moment. Ainsi, tous les choix artistiques et scénaristiques qui sont faits vont certes permettre à l’Episode VII (le premier épisode de cette nouvelle trilogie) de casser la baraque (à frites) lors de sa sortie, mais vont en revanche déboucher sur la gabegie des deux épisodes suivants.

    Car en fait, rien n’a jamais été maîtrisé dans cette histoire. L’Episode VIII contredit tout ce que son prédécesseur a cherché à déployer et l’Episode IX, quant à lui, tente désespérément de rattraper les aberrations de l’épisode précédent. Au final, on secoue tout ça et on obtient une nouvelle trilogie qui ne raconte rien, qui n’aboutit à rien et qui laisse dans son sillage un fumet nébuleux qui peut presque évoquer le pet contrarié. Et « sploutch » fit le bateau qui coule…

    Car le constat est bel et bien sans appel. Entre l’ennui poli de la presse et de quelques aficionados circonspects ou l’hystérie collective de tous les autres fans, se sentant une fois de plus trahis, bafoués, floués, sodom… (non quand même pas…), ces nouveaux Star Wars, loin des étoiles, mangent le bitume.

    Mais c’est mal connaître la souris obèse, gavée aux stéroïdes et divers anabolisants. En réaction à cette Bérézina, cette dernière dégaine en amont une série destinée à sa propre chaîne Disney+. Un programme qui promet de renouer avec l’esprit d’antan, ce fameux côté « Western » que certains aiment évoquer afin de définir la fable de George Lucas… Et c’est exaspérant.

    Tandis qu’au cinéma, les différentes tentatives (ersatz) et divers spin-off qui suivirent dans le sillage des trois épisodes de la nouvelle trilogie furent globalement conchiés, hormis peut-être « Rogue One », qui reste à ce jour le succédané préféré de toute cette nouvelle génération de films sans George Lucas aux manettes, « The Mandalorian », produit pour la chaîne de Mickey, va très rapidement prendre son envol et réussir à empapaouter les plus revêches des idolâtres, et même les plus hardcore. La magie (noire…) Disney a encore fonctionné…

    Toujours dans ce souci d’essorer jusqu’à la corde le moindre élément, personnage ou intrigue parallèle qui se rattacheraient à l’univers spatial, les studios ont dès le départ projeté de faire figurer à l’écran chaque personnage emblématique de la saga originelle. l’Episode VII cartonne, « Rogue One » marche très bien, il n’y a donc aucune raison que cela ne dure pas. Les executives semblent avoir le Mojo… Mais après le tollé contre « Le Dernier Jedi », et ce malgré ses excellents chiffres, c’est « Solo », le deuxième spin-off, qui trinque en se prenant méchamment le caniveau. En même temps, il faut admettre que ce film n’est franchement pas très bon…

    Branle-bas de combat, Disney va devoir sérieusement revoir la stratégie de gavage d’oies qu’elle avait mise en place, s’appuyant en principe sur la sortie d’un film par an. Pour ceux qui ne sont pas au fait de la nomenclature de la saga vieille de plus de quarante ans, il faut savoir que l’univers de George Lucas est si vaste que l’on peut sans problème imaginer pouvoir en exploiter le moindre recoin, afin d’en tirer de nouvelles aventures, et ce pendant encore une bonne centaine d’années.

    Mais la magie de « Star Wars » réside aussi dans l’attente. Avant, il fallait en général patienter trois bonnes années pour découvrir un nouvel opus dans les salles. En voulant désormais balancer du Star Wars à tout bout de champ, quitte à y proposer des histoires aussi peu innovantes, il y a forcément un risque de lassitude, voire même d’effondrement de l’édifice tout entier… Pourtant, « The Mandalorian » va s’évertuer à raviver cette flamme qu’entretenaient tous les déçus des pré et post-logies.

     

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    Premier constat après la fin de la première saison…

    Conçue comme un tube de pommade géant, cette première salve d’épisodes live, en s’élevant sur les ruines de ce que fut une part de notre enfance, va n’avoir de cesse que de nous caresser dans le sens du poil. Un bout de décor, un robot, un nom ou une des nombreuses créatures aperçues quelques secondes auparavant dans l’univers classique de Star Wars et hop, ça fait la blague et ça permet surtout de donner la matière à un épisode entier.

    Racoleuse telle une prostituée de la rue Saint-Denis, avant que tout le quartier ne s’embourgeoise, la série « The Mandalorian » va tenter de nous aguicher en brandissant de belles formes et de nombreuses promesses. Certes… Le public, conditionné sur plusieurs générations, en est arrivé à un tel niveau de fétichisme que c’est avec une facilité déconcertante que les scénaristes n’ont qu’à torcher vite fait bien fait sur un bout de nappe n’importe quelle intrigue digne d’un épisode de « Babylone Five », avec comme simple cahier des charges le principe de bourrer chaque épisode de tout ce qui avait servi dans les vieux « Star Wars » de l’époque. « Ah, je me souviens avant, c’était du latex, des maquettes et des décors en dur… C’était quand même autre chose ! », s’écrit le fan nostalgique et neurasthénique.

    Oui, « The Mandalorian » va vous resservir exactement ce que vous avez commandé à Noël, poussant même la putasserie jusqu’à faire apparaître à un moment un véhicule jamais vu dans aucun des films « Star Wars », et créé uniquement pour être ensuite vendu comme jouet (un transporteur de troupe impériale)… C’est donc ça, « The Mandalorian », un coffre à jouets d’où vous ressortez vos figurines et vos vaisseaux spatiaux, pour faire mumuse ; « pzzzziiichw, pzzzziiichw, tuuuuvzzz, tuuuvzzz ! ».

    Des scripts indigents, des péripéties tout droit sorties du cerveau d’un enfant en train de jouer dans sa chambre… On nous fait certes miroiter un semblant de cohérence dans le premier et les deux derniers épisodes, avec des morceaux de bravoure enthousiasmants, mais qui tombent hélas à plat, après que l’on se soit enquillé un long tunnel d’action et de péripéties forcées, archi-déjà vues et aussi captivantes que des séries des années 80. Tout n’est que remplissage et embouteillage de lieux communs.

     

    Et sinon, « The Mandalorian », ça raconte quoi, au juste ?

    Au départ, si tout se passait bien avec les productions pour le cinéma et si « Solo » se devait d’être en toute logique un carton au box office, il était également prévu que l’on mette en chantier un film consacré au célèbre chasseur de primes, Boba Fett, aperçu la première fois dans « L’Empire Contre-Attaque ». Mais vu l’accueil en salle pour le moins glacial du film « Solo », sur la genèse de notre vaurien préféré, les pontes de la firme, plus rats d’ailleurs que souris, ont finalement vite rétro-pédalé. Il en a d’ailleurs été de même pour un éventuel film sur Obi Wan Kenobi, qui lui aussi verra ses aventures narrées sur le petit écran.

     

    A moins que…

    Jon Favreau, d’abord acteur puis réalisateur et producteur, se revendique fan absolu de « Star Wars », un peu comme J.J. Abrams d’ailleurs, ou comme tous ceux qui s’approchent de cet objet et qui ont, à leur corps défendant, juré (voire craché par terre) avoir la sève « Star Wars » qui coule dans leur veine depuis toujours.  Bref, Jon Favreau tente à son tour de mettre en image cette lointaine galaxie, tout en nous faisant croire qu’il connaît et comprend mieux que quiconque ce qu’est Star Wars.

    Il va ainsi imaginer, cette fois-ci pour la télé, une mini-série, non pas autour de Boba Fett, mais de l’un de ses homologues casqué et résolument badass. Une totale création, puisque ce personnage n’apparaît nulle part ailleurs. Les fans sont sceptiques. Ils ne le seront pas longtemps. On leur promet de revenir aux fondamentaux, au Star Wars des origines, avec plein de sable et de poussière, et un petit plus en prime. Un supplément d’âme, peut-être ?

    C’est bien le mot d’ordre qui semble pourtant s’imposer comme ultime gage de qualité, afin de rassurer à coup sûr les réfractaires, à chaque nouvelle tentative de ressusciter la magie d’antan ; « être fan » et « comprendre ce qu’est Star Wars »…

    En effet, ce qui saute ici rapidement aux yeux, c’est le soin apporté aux détails, à la moindre référence, qui ne sert plus seulement de prétexte mais de vrai élément sociologique. Totalement immersif, avec le souci d’exploiter et de rendre tangible un écosystème, « The Mandalorian » peut parfois donner l’impression d’être tout bonnement un documentaire sur cette lointaine galaxie. En ne s’intéressant plus aux grandes figures de la saga, ces héros légendaires et les enjeux démiurgiques qui s’y rattachent, on se rapproche davantage d’une évocation de protagonistes moins ambitieux et de leurs petites existences insignifiantes. Admettons…

    Il aurait pourtant été plus audacieux de confier la production de ces nouveaux projets, à savoir les films ou les séries produites pour la télé, à des réalisateurs peu ou prou spécialistes de la question. Cela aurait permis d’apporter un regard résolument neuf sur cette vieille franchise, avec de nouvelles  idées, des concepts différents et d’autres directions. Cela aurait évité le sur-place, les redites et cette impression fâcheuse de voir encore et toujours le même film, avec les mêmes enjeux et les mêmes trucs de magicien essoufflé et bouffi… Or ici, la seule excuse exprimée, déguisée en fausse modestie, c’est que l’on ne nous servira pas cette fois de grandes figures au destin shakespearien, mais des protagonistes de « Plus Belle la Vie », mais dans les étoiles… Ok…

    L’idée maîtresse de « The Mandalorian » ne va donc pas être de révolutionner Star Wars. Oh La La, non, surtout pas… Car encore une fois, il ne va falloir surtout prendre aucun risque et rester bien sage dans son coin.

     

    Être Mandalorien ou ne pas être…

    Le concept de ce programme se résume donc à évoquer un personnage totalement inédit, mais affichant un look fort reconnaissable, et qui évoluerait dans des décors au premier abord évidents, pour tous les orphelins en manque de Starwarzeries, tels des junkies en manque de crack.

    Il va ainsi suffire aux scénaristes de tout bonnement recycler tout ce que l’on a vu auparavant, surtout dans la première trilogie et notamment sur la planète Tatouine. A savoir, des paysages désertiques, des Jawas, des hommes des sables et autres bars remplis de dangereuses créatures, le tout dans cette ambiance très « Western » qui n’est plus simplement appuyée, mais assénée au marteau-piqueur.

    Affublé également d’un baby Yoda, une mignonnerie que tous rêvent de posséder en porte-clé, le héros, sorte de rônin tout droit sorti du manga « Baby Cart », dont il reprend également tous les codes, poursuit une quête dont on ne connaît toujours pas les tenants et les aboutissants, arrivé au terme de la première saison. Avec ce mini Yoda (idée cadeau imparable pour les prochains Noël), on rajoute artificiellement un enjeu aux protagonistes, qui sans but véritable, se traînent d’épisode en épisode. Enfin, « se traînent », zigzaguent plutôt, puisqu’entre une énième planète-forêt puis une planète de glace, nos héros reviennent sans arrêt sur Tatouine. L’imagination débordante des scénaristes atteint vite ses limites…

    Quant aux premiers épisodes de la saisons 2, on nous en met plein les yeux, à grands coups de visuels et d’effets spéciaux. Tout est tellement léché qu’il ne manque pas une bandelette de cuir sur les masques des Tuskens (hommes des sables). Pourtant, une fois encore, malgré les somptueuses ballades dans ce monde familier et les scènes d’action qui vont à 200 à l’heure, tant au niveau du scénario que de l’intrigue principale, paradoxalement, on fait encore du sur-place.

     

    Retour sur la genèse du projet

    A l’origine, le chasseur de primes Boba Fett n’était pas censé devenir un personnage essentiel. Apparu dans « L’Empire Contre-Attaque », il devait juste servir de relais, malgré son look intrigant, pour finir par disparaître purement et simplement dans « Le Retour du Jedi ». Mais il est pourtant très vite devenu culte… Au point d’ailleurs qu’il revient successivement dans « L’Attaque des Clones » et « La Revanche des Sith », la prélogie de Lucas, dans laquelle sont évoquées ses origines comme le rôle prépondérant de son père, qui initiera la constitution d’une armée de clones, afin de servir les desseins du futur empereur Palpatine.

    Bref, tout cela est tiré par les cheveux, certes, mais Lucas veut avant tout faire plaisir aux fans, en faisant de nouveau appel à ce personnage, dont l’aura et le mystère grandissent d’année en année…

    Pour « The Mandalorian », on va donc découvrir un nouveau personnage, qui revêt le même accoutrement que son illustre homologue. Et on va en savoir un peu plus sur ce peuple et ses motivations, voué à l’art de la guerre et obéissant à une philosophie spartiate, où tout n’est qu’honneur et sacrifice. Fort bien…

    L’histoire qui nous intéresse se situe dans le temps juste après la bataille d’Andor et la chute de l’Empire, soit entre « Le Retour du Jedi » (Episode VI) et « Le Réveil de la Force » (Episode VII), avec l’avènement de la nouvelle république. On peut tout de même regarder sans trop de déplaisir ce programme, où on nous plonge dans un bain amniotique. Tout ici est conçu pour nous plaire, nous autres, vieux nostalgiques de ces films que l’on a plus imaginés que réellement vus.

    Mais reste que « The Mandalorian » est un objet mort, une dent dévitalisée. Au mieux, on a l’impression d’être dans un jeu vidéo, mais sans pouvoir pour autant y jouer, dans lequel le protagoniste avance de mission en mission, jusqu’au tableau suivant, avec toujours un « boss » à dégommer pour franchir le niveau. Chacun des épisodes est conçu de cette manière. Ça semble pourtant fonctionner, tant on entend partout que cette série est une pure réussite et s’avère finalement être exactement le Star Wars que l’on était en droit d’attendre. Soit…

    Avec les bouleversements économiques liés à la Covid 19 et le marasme qui s’est abattu (entre autres) sur l’industrie du cinéma, là encore, Disney l’a joué fine, personnel et  surtout en mode « après moi le déluge ». Disney a d’une part rapatrié sur sa chaîne, voire rendu disponibles en VOD, toutes ces productions initialement conçues pour le cinéma. Fort du succès de « The Mandalorian », le studio est en train de mettre un coup d’accélérateur à tous les futurs projets liés au concept « Star Wars », et ce uniquement pour le petit écran. Adieu, donc, les salles de cinéma. Quand on sait que Disney au cinéma, c’est 30 % du chiffre annuel global. Ouch, ça pique un peu…

    Il est même question de démultiplier désormais le format feuilletonesque, ce qui ne devrait d’ailleurs pas choquer les puristes, puisqu’à l’origine, en créant « Star Wars », George Lucas souhaitait rendre hommage aux serials de son enfance (« Flash Gordon », entre autres), des programmes diffusés à la télévision, justement.

    Oui, Star Wars va devenir un produit comme un autre, pas meilleur, pas pire que n’importe quelle série disponible sur une plateforme quelconque, que le spectateur va consommer placidement, sans trop se poser de questions. Finis, donc, l’événement, les recherches technologiques, les effets spéciaux inédits, l’exception, le sentiment d’assister à quelque chose de rare ou d’exclusif.

    La science-fiction n’a pourtant pas complètement été sabordée, puisque les espoirs sont désormais placés ailleurs. On a d’abord eu, début octobre, sous la houlette de celui que l’on croyait fini, sénile même, Ridley Scott, « Raised by Wolves », sa série en dix épisodes, parfois inégaux mais pleins de promesses, de visuels, d’images hallucinantes et d’idées tant folles que stimulantes. Et puis, en 2021, on attend avec impatience « Fondation », une série adaptée des livres d’Isaac Azimov, que l’on peut voir comme le nouveau « Dune ». Ces séries cossues  et spectaculaires viendront, on peut imaginer, rebattre les cartes, de par leur ambition et les enjeux qu’elles traitent.

    En ce qui concerne notre amour immodéré, voire irrationnel, pour ce que George Lucas a créé et mis au monde depuis « La Guerre des Etoiles » en 1977, ce qui est sûr, c’est que face à autant de contradictions de la part des fans en général, il ne sert à rien d’espérer davantage désormais de cette franchise. Il faut juste se contenter de fantasmer Star Wars, tel un mirage, une malédiction dont on est tous devenu fous. Car oui, Star Wars, c’est le tonneau des Danaïdes…

     

     

     

  • Happy 45, Monty Python Sacré Graal !

     

     

    Pour tous ceux qui seraient trop jeunes pour s’en souvenir, Monty Python, c’est une troupe britannique composée de six humoristes qui se sont rencontrés à la fac et se produisent dans des spectacles composés de sketchs, jusqu’à ce que la BBC leur propose de créer une série TV échappant à toute censure.

     

    Ainsi, durant 45 épisodes, de 1969 à 1974, les Monty Python travaillent leur style, comme les collages surréalistes dans les images d’animation. Chaque émission est une succession de sketchs unis par un fil conducteur qui lui donne son identité propre. En 1971, ils font leur première incartade au cinéma avec leur long-métrage « La Première Folie des Monty Python », une anthologie des meilleurs sketchs du show TV « Monty Python’s Flying Circus ». En France, la série a été diffusée pour la première fois dans l’émission « Continentales d’été » à partir du 1er août 1991 sur FR3, à l’époque où l’idée d’Europe faisait encore sens…

     

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    En 1975, avec la sortie de leur second long métrage,  « Monty Python : Sacré Graal ! », le succès est tel qu’il dépasse largement les frontières du Royaume-Uni. Suivront « La Vie de Brian » en 1979 et « Le Sens de la Vie » en 1983. Ils seront même invités à se produire dans un show à New-York qu’on peut voir en version filmée dans « Monty Python à Hollywood » (« Monty Python Live at the Hollywood Bowl ») en 1980.

     

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    Un temps séparés, ils suivront chacun leur chemin sur des projets différents avant de se retrouver en 2013, alors que l’un des membres de la bande de joyeux drilles, Terry Jones, annonce lors d’une conférence de presse à Londres la reformation de la troupe, en même temps qu’un nouvel et ultime spectacle. Les dix représentations données en juillet 2014 afficheront complet ; 20.000 tickets partis en 45 secondes pour la première. La troupe désormais à cinq (Graham Chapman est décédé en 1989) joue ses meilleurs sketchs pour son spectacle d’adieu. La dernière représentation sera rediffusée dans le monde entier (sur Arte pour la France).

    La seule parenthèse à leurs carrières solo respectives fut leurs retrouvailles en 2009, pour un reportage tourné à l’occasion des 40 ans de leur première apparition à l’antenne de la BBC. Pour fêter cet anniversaire, Bill Jones tourna un documentaire racontant en six épisodes l’histoire des Monty Python par eux-mêmes : « Monty Python, toute la vérité ou presque ».

     

     

     

    En 2015, c’est un autre anniversaire que fêtaient le distributeur Park Circus et Sony Pictures : les 40 ans de la sortie du film « Monty Python and the Holy Grail ». Pour un soir seulement, une version nouvelle, complètement musicale, était diffusée le 14 octobre 2015. Plus de 500 cinémas britanniques participaient à cette soirée unique avant la sortie par la suite d’une version DVD / Blue Ray dans les pays anglophones.

     

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    Une seconde vie pour ce film tourné avec des bouts de ficelle (et quelques noix de coco) et financé par des groupes de rock fans comme Led Zeppelin ou Pink Floyd (deux millions d’entrées pour seulement 250.000 dollars de budget de tournage). Terry Gilliam a souvent raconté que le National Trust leur avait refusé de tourner dans les châteaux, les accusant de ne pas respecter la dignité des lieux, ce qui avait obligé la troupe à découper de faux décors en carton peint et à tourner plusieurs scènes simplement dans un parc en plein centre de Londres. L’occasion de voir et revoir ces scènes tordantes, de se remémorer toutes ces anecdotes de tournage et de vérifier si Arthur et ses chevaliers ne trouvent finalement pas le Graal chez Harrod’s…

     

     

    Et en cadeau, « Monty Python and the Holy Grail » en Lego…

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    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Monthy Python Official

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Live at Aspen » (1998)

     

     

     

  • « Tout Simplement Noir », une sacrée bonne nouvelle

     

     

    Avec le vrai-faux documentaire « Tout Simplement Noir » sorti en salle le 08 juillet, les mauvaises langues n’auront probablement pas manqué de relever qu’on n’aurait pas pu rêver meilleur timing pour ce genre de pochades malpolies.

     

    Et pourtant… « Tout Simplement Noir » aurait dû sortir en avril, donc bien avant l’affaire George Floyd ou le retour sur le devant de la scène médiatique du feuilleton Traoré. Jean-Pascal Zadi, l’acteur principal, concède que juste avant la date de sortie en salle initiale, on a certes assisté au plaidoyer (peu convaincant) de l’actrice Aïssa Maïga lors de la cérémonie des Césars 2020, censé mettre en avant la représentation, selon elle encore insuffisante, des noirs dans le cinéma français ; preuve s’il en est que ce sujet ne date décidément pas d’hier, et qu’il risque de faire encore longtemps partie de ces thèmes sociétaux qui divisent.

    Le pitch de « Tout Simplement Noir », en deux mots : JP, un acteur antillais de 38 ans, quelque peu ringard, vivote grâce à de petites vidéos publiées sur YouTube, où il se met en scène dans des sketchs le plus souvent limites et rarement du meilleur goût… Affublé de chaînes ridicules autour du cou, il interpelle les passants dans la rue. Dans une de ces vidéos, on le voit d’ailleurs se faire rabrouer par Maboula Soumahoro, signe rassurant que la militante de toutes les causes finissant par « iste » peut faire preuve d’un soupçon d’autodérision, probablement à son corps défendant…

    Las de ses pitreries, JP opte finalement pour le premier degré, en tentant d’organiser une marche de la fierté noire dans Paris. On imagine que derrière ce semblant de conscience qui le rattrape, il essaie simplement de faire parler de lui, en s’emparant tant bien que mal de l’alibi communautariste. On assiste alors à ses pérégrinations et rencontres fortuites, avec aussi bien des inconnus que des personnalités plus connues, comme Fabrice Eboué, Joey Starr, Lilian Thuram, Claudia Tagbo, Vikash Dhorasoo, Lucien Jean-Baptiste, Eric Judor, pour ne citer qu’eux.

     

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    Le concept de « Tout Simplement Noir » pourrait participer de la parfaite petite bricole opportuniste, de celles qui caressent dans le sens du poil tant la communauté noire, remontée, que la blanche, en mal de genoux à terre. Mais que nenni… Jean-Pascal Zadi, l’instigateur de cette farce caustique, ne compte justement pas rester sur des chemins balisés par l’outrance de la société actuelle et s’en tenir à une quelconque caution politiquement correcte.

    Plus on avance dans le film et plus le projet de JP se délite, au fil des interventions successives des personnalités qui jouent leur propre rôle, en défilant devant lui et sa caméra. Le personnage placide et maladroit campé par Jean-Pascal Zadi nous fait en même temps la démonstration que tout n’est pas si simple et que la question « noire » ne se résume pas à une couleur de peau, ni même à une histoire commune, mais bien aux individus eux-mêmes.

    Avec son physique débonnaire, un peu gauche – on croirait même parfois entendre Homer Simpson – le Martiniquais va bousculer « dans son shaker » tant les préjugés que les clichés qui ont la vie dure. Et cette (fausse) comédie ne va jamais précisément là où on pourrait l’attendre. Renvoyant sans cesse dos à dos les notions de communauté, de religion, de couleur ou de politique, on assiste, non sans une certaine jubilation, à un flot d’autocritique et de petites piques, dans ce qui pourrait constituer une séance d’acupuncture collective et salvatrice.

    « Tout Simplement Noir » est brinquebalant, parfois mal fichu, car ce film ne se pense pas en terme de rythme ou de punchlines, mais plutôt comme une succession linéaire de morceaux d’anthologie, où chacun va rire et souvent jaune. Oui, on rit jaune, orange, rouge, voire noir ou blanc, et on est souvent confronté à nos propres petites lâchetés et hypocrisies.

    Nombre de guests connus acceptent finalement de se prêter à ce jeu de chamboule-tout faussement naïf et premier degré, et nous révèlent leur nature profonde, en grossissant simplement le trait qui les définit néanmoins intrinsèquement, avec une mention spéciale à l’humoriste Fary, dans un contre-emploi assez jouissif.

    À l’heure où tout débat de société est immanquablement séquestré par des minorités bruyantes et toxiques, et où tout se doit d’être binaire, avec d’un côté les éternelles victimes et de l’autre les horribles colonialistes, il faut saluer ce petit film sans prétention qui insuffle une bonne bouffée d’oxygène dans une atmosphère actuelle tellement viciée.

    « Tout Simplement Noir » est une sacrée bonne nouvelle. Et on sort de la projection tout simplement moins con…

     

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  • « Pull My Daisy », le film culte de la Beat Generation

     

     

    « Pull My Daisy » est le premier film réalisé en 1959 par le photographe et cinéaste Robert Frank, en collaboration avec le peintre Alfred Leslie. Le scénario, inspiré d’une soirée chez les Cassady, est un fragment d’une pièce inachevée de Jack Kerouac.

     

    Tourné en 1959, « Pull My Daisy », le film culte de la Beat Generation, réunit la fine fleur littéraire, photographique, picturale et musicale de la contre-culture américaine : les poètes Allen Ginsberg, Gregory Corso et Peter Orlovsky ; les peintres Alfred Leslie, Larry Rivers, Alice Neal ; la comédienne française, alors débutante, Delphine Seyrig ; le marchand d’art David Bellamy, jouant le rôle d’un évêque ; la danseuse Sally Gross ; le musicien David Amram et le photographe Robert Frank… Puis Jack Kerouac, auteur de la trame du film et du commentaire qu’il improvise sur des images déjà montées ; voix-off intense et poétique, que le « Jazz Poet », comme il se définit lui-même, scande de sa voix si profonde et mélodieuse.

    En dépit de sa réputation de totale improvisation, on sait que dans les faits, « Pull My Daisy » fut conçu et orchestré assez précisément par ses deux réalisateurs, Alfred Leslie et Robert Frank. On peut néanmoins se demander comment ils sont parvenus à diriger cette bande de joyeux drilles… David Amram se souviendra d’ailleurs que Robert Frank et Alfred Leslie tentaient tant bien que mal d’aborder le projet avec sérieux, tandis que les autres protagonistes n’avaient de cesse que de les perturber ou de couvrir les indications de jeu par leurs rires… Mais c’est peut-être en cela que réside la spontanéité évidente du film.

    Evocation d’une soirée passée chez l’icône de la Beat Generation Neal Cassady, qui inspira à Kerouac le personnage de Dean Moriarty dans son livre « Sur la Route », et sa femme, la peintre Carolyn Robinson, le film raconte l’histoire d’un « serre-frein » dont l’épouse invite un évêque respecté à dîner. Cependant, les amis bohémiens du cheminot, également présents à la soirée, font joyeusement capoter la fête. Il en résulte quelques effets comiques aussi improvisés qu’inattendus. A noter aussi la présence au générique du propre fils de Robert Frank, Pablo Frank.

    Le photographe John Cohen fut le témoin privilégié de ces journées entières passées à « cueillir la marguerite », et ses clichés pris sur le vif rayonnent d’une incontestable joie communicative.

    Pour retrouver la traduction inédite du génial commentaire improvisé par Kerouac pour les besoins du film, vous pourrez vous référer à l’ouvrage éponyme « Pull My Daisy » publié aux Editions Macula, complétée par une introduction de Patrice Rollet, professeur à l’Ecole Nationale Supérieure d’Arts de Paris-Cergy, ainsi que par un texte de présentation de « Pull My Daisy », suivi de deux entretiens avec les réalisateurs Alfred Leslie et Robert Frank, menés par Jack Sargeant, auteur d’études de référence sur l’histoire des contre-cultures américaines.

     

    [arve url= »https://vimeo.com/92403607″ align= »center » title= »Robert Frank : « Pull My Daisy » (1959) » description= »Robert Frank » maxwidth= »900″ /]

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Pull My Daisy » (Editions Macula) 

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Pull My Daisy » (Article publié sur monoquini.net)

     

     

     

  • Les 40 ans d’Elephant Man

     

     

    « Elephant Man », le chef d’oeuvre de David Lynch, fête ses quarante ans. Pour célébrer cet anniversaire comme il se doit, le film ressort au cinéma ces jours-ci dans une version restaurée 4K, ainsi qu’en Blue Ray.

     

    Découvrir ce film à sa sortie en salle en 1980, quand on a onze ans, c’est un choc, une déflagration. Jusqu’alors, l’enfant n’a pas été en mesure d’observer autour de lui une pareille vision du monde et de ceux qui le peuplent. C’est un peu plus tard, en grandissant, qu’il peut mieux analyser l’œuvre de David Lynch et comprendre ses singularités, son approche et l’incroyable force dont il se pare.

    « Elephant Man » est un classique, un très grand film. Et au-delà de l’émotion qu’il nous procure, il reste encore, quarante ans plus tard, une vision humaniste, sincère et frontale. Mais c’est aussi une piqure de rappel, avec son message universel qui nous dit que peu importe l’apparence ou la couleur de peau, ses origines et son histoire, l’être humain est libre de ses choix et de son destin. Être bon ou mauvais ne dépend que de lui, et certainement pas d’un tiers, de son passé ou de son environnement.

    Produit par Mel Brooks, celui-ci propose à David Lynch, un jeune réalisateur qui vient de se faire remarquer avec son premier film « Eraserhead », de mettre en scène et apporter sa vision personnelle sur cette adaptation au cinéma de la biographie du docteur Frederick Treves, consacrée à la courte et tragique vie du phénomène de foire John Merrick, atteint d’une maladie orpheline et incurable, la neurofibromatose, et exploité pour l’extrême difformité de son corps.

    Avec son noir et blanc intense et mélancolique, David Lynch choisit de jouer sur les apparences et bousculer les conventions. D’un côté, le réalisateur met en exergue l’hypocrisie ambiante et le lissage de ces conventions dans la société victorienne, au coeur même de cette Angleterre de la fin du 19ème. De l’autre, il nous dépeint le côté obscur de l’époque, avec son peuple et ses gens ordinaires, et nous confronte à ce que l’on peut ressentir viscéralement face au spectacle de la monstruosité, sans protocole ni politesse outrancière ; cette monstruosité dont Lynch se sert à dessein, pour émouvoir sans sensiblerie, en nous rappelant tout de même que derrière chaque aspect se cache avant tout un homme.

    « Elephant Man » fait directement référence au film « Freaks » de Tod Browning sorti en 1932, avec l’univers du cirque et de ses êtres « différents » qui vont aider John Merrick à s’échapper de la cage dans laquelle il est enfermé. Des monstres finalement plus humains que les humains, emprunts de solidarité et de bienveillance.

    Anne Bancroft et Anthony Hopkins, les deux interprètes principaux, composent chacun dans leur rôle respectif d’infinies variations, entre contradictions, paradoxes et hésitations, face à ce qui les dépasse et les questionne. Quant à John Hurt qui campe un John Merrick plus vrai que nature, noyé sous d’innombrables couches de latex pour les besoins du maquillage créé par Christopher Tucker, il est saisissant de justesse.

    Et malgré l’aspect général de ce corps qui n’a plus rien d’humain, l’acteur impose son jeu bouleversant, où tout se passe dans le regard et cette façon maladroite qu’il a de se mouvoir, pour parvenir à nous émouvoir aux larmes. Car si on pleure tout au long du film, ça n’est pas tant du fait de l’apparence ou de la démarche du personnage que John Hurt incarne avec une telle vérité, mais plutôt qu’il parvient de façon imparable à nous forcer à affronter notre propre honte.

    La musique du compositeur John Morris participe aussi pleinement à la réussite du film. Il empreinte ainsi l’Adagio pour cordes de Samuel Barber pour les besoins du final, lorsque John Merrick s’endort pour la dernière fois dans son lit, où il veut s’allonger comme l’enfant du petit tableau accroché au-dessus de lui. Il sait qu’en s’endormant de la sorte, il mourra par asphyxie…

    Avant de mettre fin à cette existence de souffrance et d’enfermement, il contemple une dernière fois les objets qu’on lui a offerts, la maquette de l’église qu’il a construite, qu’il a signée de son nom comme s’il s’agissait d’une œuvre accomplie, puis se couche. Le film se termine sur la voix de sa mère ainsi que sur l’image du petit portrait de celle-ci en médaillon qui apparaît : « rien, rien ne meurt jamais ».

    Il s’endort paisiblement, non pas comme un animal ni même un éléphant, mais simplement comme un homme…

     

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  • Une Palme d’or et des films en bois

     

     

    Faute au Covid-19 et par mesure de sécurité, respect des gestes barrières et tout le toutim, pas de Festival de Cannes cette année. Sans cet imprévu inédit qui aura sacrément bousculé l’actualité du monde ces derniers mois, la grande fête du cinéma aurait dû s’achever le 23 mai, avec un palmarès qui aurait sans doute une fois de plus divisé.

     

    Spike Lee devait être le président du jury de cette édition 2020 et on espérait de sa part des partis pris résolument éclectiques et pertinents. Autre ironie du sort, puisqu’avec le réalisateur noir américain toujours très engagé, il aurait flotté dans l’air comme un parfum prémonitoire, compte tenu des événements survenus par la suite dans le courant du mois de juin, notamment aux Etats-Unis, bousculant certitude, émotion et revendications diverses.

    Il y avait bien-sûr une liste de films sélectionnés, dévoilée par Thierry Frémaux et Pierre Lescure le 03 juin dernier, mais ceux-ci seront finalement présentés dans d’autres festivals dès la rentrée, ou bien sortiront directement en salle, en étant néanmoins labellisés « Festival de Cannes 2020 ». Toujours est-il que la plupart de ces films n’auront pas pu bénéficier de l’aura du prestigieux rendez-vous de mai et de sa célèbre magie, celle qui embellit, qui customise et qui légitime.

     

     

     

    Tel un vulgaire éternuement dans son coude, cette 73ème édition du Festival va par conséquent vaporiser dans l’air ces 56 films, qui auraient dû normalement être projetés à Cannes cette année, soit dans le cadre de la sélection officielle soit dans l’une des autres catégories (La Quinzaine, Un Autre Regard, …).

    Entre les productions les plus attendues, comme « The French Dispatch » de Wes Anderson, « Été 85 » de François Ozon, « Lovers Rock » de Steve McQueen, « ADN » de Maïwenn, « The Real Thing » de Kōji Fukada et tous les autres, les habitués de la Croisette, les sempiternels chouchous, les éternels outsiders, les inoxydables revenants, le tout saupoudré de nouveaux concepts dans l’air du temps, entre parité, minorités et sujets devant coller le plus possible à l’actualité ou à la société, Cannes est devenu ce gigantesque chaudron, où le cinéma n’aurait finalement plus trop son mot à dire, laissant la place aux maux et tumultes du monde.

     

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    N’ayant pu voir à ce jour aucun de ces films, nous reviendrons plutôt sur ces Palmes d’or qui n’ont pas toujours été du goût de tout le monde, ou encore sur ces films célébrés comme s’il s’agissait de chefs d’œuvre absolus, alors que rétrospectivement, il n’en reste pourtant plus grand-chose aujourd’hui…

    Plus qu’un festival international où robes de couturiers hors de prix, smokings, champagne et autres promesses de distributeurs ou de producteurs voltigent, passent et trépassent, Cannes représente depuis sa création en 1946 tout ce qui se doit d’être le plus prestigieux, le plus Français, en quelque sorte, malgré la valse incessante des films (ou devrions-nous dire produits ?) venus de tous les horizons et sélectionnés pour cette grande kermesse, cette foire aux vanités.

    Parenthèse enchantée d’une dizaine de jours durant laquelle on célèbre pelle-mêle le luxe, les sourires éclatants, le chic bon teint et paradoxalement, depuis une vingtaine d’années, des films sociaux qui dépeignent une réalité crue. Époque oblige, les derniers jurys qui se sont succédés se sont sentis investis d’une mission souveraine, divine, remarquable, fondamentale : faire rentrer au forceps cette dure réalité de la vie dans ce sanctuaire du « trendy ».

     

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    Dès 1999, avec le premier film des frères Dardenne, « Rosetta », David Cronenberg (président du jury cette année-là) décide de casser la chaine en or, en récompensant un film qui dépeint la misère sociale près de chez nous, la souffrance d’un pan d’une population malmenée par le grand capital.

    Ce film tout droit sorti d’un épisode de l’émission belge « Strip Tease » nous fait subir ce qu’endurent les gens pauvres au quotidien, entre licenciement, recherche d’emploi, environnement sinistre, avec comme point d’orgue le morceau de bravoure, une Emilie Dequenne traînant pendant un quart d’heure une bonbonne de gaz trop lourde pour elle jusqu’à la caravane où elle habite. Cut. Noir, générique de fin… Les lumières se rallument. Applaudissements. Ferveur. A l’aube de ce 21ème siècle, qui contrairement à celui qui s’achève, saura forcément protéger l’humanité des guerres et des pandémies, un public trié sur le volet, vêtu de pied en cap de Givenchy et Balenciaga, redécouvre que la pauvreté existe encore, et ça lui semble tellement sexy…

    À l’époque, toute la presse dite de gauche crie au génie, salut l’audace du jury et les deux frères réalisateurs deviennent instantanément les chouchous du festival. Car il faut bien admettre que c’est tellement exotique, toute cette misère que l’on vient déverser sur la Croisette, pour le simple divertissement des festivaliers…

    Les frères Dardenne remporteront une deuxième Palme six ans plus tard avec « L’Enfant » et encore une histoire collant à une certaine réalité sociale, sans que ne soit livrée une quelconque signification du pourquoi on fait des films pour le cinéma. Depuis, les deux cinéastes belges sont présents chaque année sur la Croisette avec un nouveau film, traitant avec morgue et générique sans musique de notre monde dysfonctionnel, avec à l’affiche des acteurs connus, venus « se mettre en danger ».

     

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    En 2000, c’est au tour de Lars von Trier, encore bien vu par la profession à l’époque, de repartir avec la suprême récompense, même si la comédie musicale « Dancer in the Dark » n’est certainement pas le film le plus réussi du réalisateur de « Breaking The Wave ». Là encore, cette histoire de travailleuse humiliée, bafouée, jugée puis condamnée à mort, remporte l’adhésion. Avec Luc Besson comme président du jury cette année-là, on aurait pu raisonnablement attendre que son choix se porte sur un autre film que cette longue agonie de Björk pendant 02h20… L’artiste islandaise y déroule ses chansons tout en travaillant d’arrache-pied à la chaîne d’une usine métallurgique dans l’Amérique profonde, décor principal du troisième opus de la « Trilogie Coeur d’Or ».

    On connait le goût prononcé du cinéaste danois pour torturer et humilier les actrices dans ses films. Ici, c’est donc Björk qui s’y colle, telle la fashion addict devant une paire de chaussure Jimmy Choo, probablement attirée avant tout par cette hype entretenue autour du réalisateur, avant que celui-ci ne soit conspué quelques années plus tard et ne finisse par tomber en désuétude, pour avoir joué dangereusement avec les limites du point Godwin… Catherine Deneuve fera aussi partie du voyage. Au final, rétrospectivement, avec « Dancer in the Dark », on reste sur un gros malentendu…

     

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    Dans la liste des autres chouchous qui sont présents chaque année dans la sélection cannoise, que leurs films soient bons ou torchés, d’ailleurs, on trouve forcément l’indéboulonnable Michael Haneke ; l’imperturbable réalisateur autrichien qui, quoiqu’il arrive, ne manquerait pour rien au monde une édition du festival, toujours avec son dernier film sous le bras, dans son holster, prompt à nous dégainer sa morale. Lui aussi remporte deux Palmes, d’abord avec « Le Ruban Blanc » en 2009, une histoire sur la naissance du mal et l’éternel traumatisme allemand de ces années d’avant-guerre, où les germes du nazisme apparaissaient sans que personne ne s’en offusque pour autant. Un film boursouflé et vain, enrubanné d’une somptueuse photographie en noir et blanc, afin de tenter de camoufler la vacuité et la prétention du propos.

    Trois ans plus tard, c’est le film « Amour » qui est récompensé  en grande pompe. « La vieillesse, c’est pas bien » aurait pu être le slogan collé sur l’affiche du film ou accompagnant le dossier de presse. Ici, on nous gratifie pendant plus de deux heures de la lente décrépitude d’un couple de vieillards au crépuscule de leurs vies (troubles intestinaux compris…), mais avec néanmoins un casting 4 Etoiles (Jean-Louis Trintignant, Emmanuelle Riva et Isabelle Huppert).

    Ce ne sont ni le manque de point de vue ni les faibles qualités de mise en scène qui nous laissent sceptiques devant ce spectacle d’entomologiste zélé et un brin psychopathe, mais plutôt qu’il y ait autant d’actrices et d’acteurs si talentueux qui se pressent systématiquement pour en être, à chaque nouveau projet dans lequel se lance le réalisateur de « Funny Games ».

     

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    « Dheepan », Palme d’or en 2015, n’est pas le meilleur film de son auteur, Jacques Audiard, loin s’en faut. Bon, estimons-nous heureux, nous l’avons échappé belle, car un autre film, son principal rival, « La Loi du Marché » de Stéphane Brizé, était pressenti pour remporter la plus haute distinction cette année-là. Il devra se contenter du prix d’interprétation masculine pour Vincent Lindon.

    Avec ces deux films, en tout cas, on nage la brasse coulée dans le social avec Palme (plaquée or), masque et tuba, pour aller contempler de plus près chômage, banlieues, petites gens et un nouveau parangon devenu incontournable, l’immigration. Et il faut reconnaître qu’en 2015, le Festival de Cannes a bien coché toutes les cases. Résultat des courses, tout le monde tombe en pâmoison devant toutes ces vieilles lubies post soixante-huitardes enfin remises au goût du jour. « Fini, le cinéma bourgeois ! », clame-t-on du haut des marches. C’est le retour de l’Internationale…

     

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    En 2016, c’est au tour de Ken Loach d’être de nouveau récompensé pour « Moi, Daniel Blake », dix ans après sa précédente Palme d’or pour « Le Vent se Lève ». Lui aussi est sélectionné pratiquement chaque année… Mais s’il y a bien un réalisateur au monde capable d’être vraiment formaliste tout en traitant le sujet social comme personne, c’est bien lui. Ses films sont le plus souvent des réquisitoires contre le monde de l’argent, mais Ken Loach n’oublie jamais l’essentiel : faire avant tout du cinéma, faire exister ses personnages et passionner le spectateur pour ses histoires, sans l’assommer où le regarder de haut.

    Car l’Anglais n’occulte jamais la notion de plaisir, même si chacune de ses œuvres donne à réfléchir, force à se questionner ou à tout remettre en cause. Ken Loach ne se cache pas, soit derrière un misérabilisme antipathique comme les frères Dardenne, soit le naturalisme ennuyeux et sentencieux de Stéphane Brizé ou encore la pose prétentieuse et arrogante du cinéma de Michael Haneke. Loin de toutes ces afféteries, le réalisateur britannique de « Sorry We Missed You » serait finalement le seul à mériter son rond de serviette sur la Croisette, même pour parler de politique et d’engagement.

     

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    Mais Pedro Almodóvar, dans tout ça ? Sauf erreur ou oubli, le réalisateur espagnol, que l’on convoque pourtant chaque année à Cannes, repart systématiquement bredouille. Et ce n’est pas faute de nous y avoir offert des films magnifiques, toujours à la gloire de ce cinéma que l’on adore, comme son dernier opus, « Douleur et Gloire » en 2019, une véritable merveille.

     

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    En 2017, c’est justement sous la présidence d’Almodóvar que le choix de la Palme d’or s’est étrangement porté sur « The Square » du Suédois Ruben Östlund ; un pensum prévisible, parfait exemple du film qui court les festivals et dans lequel on traite laborieusement de tous nos maux actuels, en une série de vignettes vernies à l’épate. Face à lui, le film de Robin Campillo, « 120 Battements par Minute », fait quant à lui l’unanimité. Avec son sujet pourtant exactement dans la ligne de mire des débats de société de l’époque et un bouche à oreille sans fausse note, le film du réalisateur du formidable « Eastern Boys », repartira malgré tout avec le Grand Prix du Jury.

     

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    Francis Ford Coppola appartient au cercle très fermé des réalisateurs récompensés à deux reprises, pour « Conversation Secrète » en 1974 et « Apocalypse Now » en 1979), avec le Danois Bille AugustPelle le Conquérant » et « Les Meilleurs Intentions »).

    Mais au-delà de la subjectivité, des goûts et des couleurs, des intérêts ou de ce vernis crypto-politico-bien-pensant passé à soi-même, Cannes regorge bien évidemment, et surtout (heureusement…) de films passés à la postérité, depuis « Quand Passent les Cigognes » (1958) à « Paris, Texas » (1984), en passant par « La Dolce Vita » (1962), « Le Guépard » (1963), « Blow Up » (1966), « L’Epouvantail » (1973) ou « Le Tambour » (1979).

     

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    Et pour finir, revenons sur le dernier sacre de la cuvée 2019, « Parasite ». Succès surprise en salle, critique de surcroît, le film est naturellement gratifié de la récompense suprême. Bong-Joon-Ho, le réalisateur sud-coréen auteur de films remarquables tels que « Mother », « The Host » ou « Memories of Murder », est arrivé à Cannes sur la pointe des pieds, sans se douter un seul instant que « Parasite » allait finalement devenir son chef d’œuvre absolu, aux yeux d’un jury assez sûr de lui sur ce point… Mais en l’occurrence, ça n’est pas le cas, maintenant que l’hystérie est retombée et que les superlatifs sont retournés dans leur boîte jusqu’à la sortie d’un prochain film que le public plébiscitera de manière tout aussi irrationnelle.

    Si « Parasite » n’en est pas pour autant une purge, il a néanmoins bénéficié du parfait timing. Car tous ces jurys qui se sont enchaînés (dans les deux sens du terme…) depuis vingt ans, sans s’être donné le mot, ont un peu trop abusé de la caution « film sociétal », en y rajoutant trop souvent une bonne pincée d’austérité ; quand, dans le même temps, nous avons également eu droit à une vague de films dits d’auteur, pourtant magnifiques mais auxquels le grand public est resté complètement hermétique : « Winter Sleep » (2014), « The Tree of Life » (2011), « Oncle Boonmee » (2010), « Elephant » (2003), et encore bien d’autres œuvres plébiscitées par les critiques exigeants.

     

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    Alors, c’est dans ce contexte que « Parasite » a réussi l’exploit d’être le mix presque parfait, voire miraculeux, entre film sociétal (une famille pauvre qui s’oppose à une riche) et comédie, avec ce ton empreint d’acerbe et de burlesque (on pense évidemment à Claude Chabrol ou à Luis Buñuel).

    Et le réalisateur de « Okja » n’aurait plus eu qu’à saupoudrer son histoire de ces prestigieuses références pour que le mélange devienne parfait, mais hélas il semblerait que quelqu’un ait dévissé le capuchon et que tout le sel, le poivre et le sucre se soient déversés dans la préparation… En substance, un discours assez appuyé, trop ironique et cinglant, venu brouiller l’idée initiale de renvoyer dos à dos deux castes opposées dans cette lutte des classes qui va virer au cauchemar.

    Car « Parasite » est dans toute sa première partie magnifiquement mis en scène. Tout s’y imbrique parfaitement en une redoutable symbiose entre le décor – la maison moderne, presque intimidante, habitée par les riches et filmée comme un protagoniste à part entière – et tous ces personnages qui sont un à un détaillés.

    Mais le film ne va hélas pas tenir la distance et s’écroule de tout son poids dans la deuxième partie, avec l’apport au chausse-pied d’improbables coups de théâtre, plus grotesques qu’inspirés, pour ne pas savoir se terminer et s’étirer jusqu’à ce final pataud et raté…

     

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    Face à « Parasite », on nous proposait pourtant « Le Traître » du réalisateur italien Marco Bellocchio (81 ans), un chef d’œuvre absolu, impressionnant de maîtrise et de force, qui est hélas passé totalement sous les radars. Car ce film était définitivement le vrai choc de cette sélection cannoise 2019. Au final, pratiquement personne ne l’a vu en salle, la presse n’ayant pas jugé utile ou politiquement correct de mettre en avant cette histoire de Cosa Nostra. Sans doute pas assez de social, de pauvres, de chômeurs, de migrants, de femmes maltraités ou de bébés koalas violés…

    Malheureux et de surcroît tellement révélateur du constat terrible que le Festival s’est perdu au fil de ces vingt dernières années, tant « Le Traître » est un film majeur, une oeuvre jubilatoire, une pépite et une énorme baffe dans la tronche des cinéphiles et des amoureux de cinéma. Et c’est ce que l’on aime, non ? Mais les voix de la hype et du clientélisme en ont décidé autrement et « Parasite » est devenu l’archétype du film qu’il faut absolument avoir vu pour ne pas mourir idiot ; une oeuvre drôle, cruelle et futée à la fois, qui fait du bien à notre intelligence et qui nous flatte juste ce qu’il faut pour nous laisser y croire…

    Et si finalement le Festival de Cannes avait définitivement perdu son âme et qu’il ait été, comme toutes les autres institutions, rattrapé par Google et ses algorithmes, qui déterminent en temps réel ce que l’époque, le marché ou les masses attendent d’un film… Ce qu’ils veulent voir… ou plutôt consommer.

     

     

     

  • La Nuit Body Snatchers à la Cinémathèque

     

     

    Ce qui, à l’origine constituait le postulat d’une nouvelle de science-fiction, (« Graines d’épouvante » de Jack Finney publiée en 1955), soit l’invasion d’entités extraterrestres prenant forme humaine et « remplaçant » ainsi, à terme, l’humanité, individu par individu, est devenu plus qu’un thème cinématographique. C’est un motif, un principe abstrait et théorique qui allait dépasser les déterminations des genres.

     

    En 1955, sous la férule du producteur indépendant Walter Wanger, Don Siegel réalise ce qui s’appellera en français, à la suite d’une erreur de traduction, « L’Invasion des profanateurs de sépultures ». La peur et le malaise y sont principalement liés à la question de la déshumanisation qui devient une véritable interrogation esthétique et morale (qu’est-ce qu’une figure humaine dans un film ?).

    Le remake que signe Philip Kaufman en 1978 est représentatif d’un changement radical de la société et du spectateur. Les temps, devenus incrédules, exigent que le processus de transformation de l’homme en un double « différent » soit l’explication d’une logique psychologique particulière. Dans sa version, réalisée en 1992, Abel Ferrara, enfin, révèle, grâce à un dispositif très particulier situant le récit au cœur d’une base militaire, qu’il y a pire que le cauchemar du devenir-autre, il y a l’enfer du même.

    Ce thème de la transmutation de l’unique en son « autre » connaitra encore de nombreuses variations cinématographiques, dont « Invasion » d’Oliver Hirschbiegel réalisé en 2007 constitue un exemple.

     

    Jean-François Rauger

     

    C’est à la Cinémathèque et c’est le samedi 07 mars à 22h00 ! Au Programme :

     

    « L’Invasion des Profanateurs » (Invasion of the Body Snatchers)
    Philip Kaufman (Etats-Unis / 1978 / 115 min / DCP / VOSTF)
    D’après le roman « L’Invasion des profanateurs de sépultures » de Jack Finney.
    Avec Donald Sutherland, Brooke Adams, Leonard Nimoy, Jeff Goldblum.

     

    « L’Invasion des profanateurs de sépultures » (Invasion of the Body Snatchers)
    Don Siegel (Etats-Unis / 1955 / 80 min / DCP / VOSTF)
    D’après le roman « The Body Snatchers » de Jack Finney.
    Avec Kevin McCarthy, Dana Wynter, King Donovan, Carolyn Jones.

     

    « Body Snatchers »
    Abel Ferrara (Etats-Unis / 1992 / 87 min / 35mm / VOSTF)
    Avec Terry Kinney, Meg Tilly, Gabrielle Anwar.

     

    « The Invasion »
    Oliver Hirschbiegel (Etats-Unis / 2005 / 98 min / 35mm / VOSTF)
    D’après le roman « L’Invasion des profanateurs » de Jack Finney.
    Avec Nicole Kidman, Daniel Craig, Jeremy Northam.

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] La Nuit Body Snatchers

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] The Body Snatchers à Instant City

     

     

     

  • « Starouarz », ou comment Disney a transformé l’héritage de Lucas en un gros sac de Chamallows

     

     

    Si l’on osait la comparaison, l’empire de Mickey serait un gros globule blanc. Disney qui, depuis le rachat de Pixar en 2006, n’a de cesse que de phagocyter tout ce qu’il acquiert, nivelle tout ce qui devient sa propriété, pour proposer ensuite des produits de contrefaçon juste bons à servir eux-mêmes d’outils de communication, avec comme objectif ultime d’écouler du produit dérivé à la tonne.

     

    C’est d’ailleurs la même bonne vieille recette qui est utilisée depuis toujours par Disney pour ses parcs d’attractions, où pour cinq minutes de fun (je ne compte pas l’heure de queue avant…), vous êtes obligés de passer deux heures dans un supermarché de jouets et goodies, posé là, sur votre chemin vers la sortie, dans le seul but de vous faire les poches un maximum et d’engraisser toujours un peu plus toute cette cynique entreprise.

    Walt Disney n’a plus rien à dire, si tant est qu’il eut par le passé déjà quelque chose d’intéressant à raconter. Ou alors il y a bien longtemps… Car il est vrai que ce parangon de l’animation de long métrage, dite de prestige, s’est finalement fait rattraper par des concurrents bien plus pertinents, au début des années 80, comme Don Bluth, dissident et ancien collaborateur émérite de la souris gloutonne, très vite disparu après juste une poignée de films d’animation qui ne rapportèrent pas assez d’argent.

    Mais c’est surtout au Japon, avec le Studio Ghibli, le pendant asiatique de Disney, d’une richesse thématique inouïe, chez qui poésie, lyrisme et messages emplissent le moindre celluloïd, que les limites du géant américain se révèleront au grand jour. Miyasaki va élargir la brèche et oser rivaliser avec malice avec Disney, en nous proposant des films inoubliables.

     

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    C’est pourtant bien avant cela qu’il faut pour le muridé vorace (terme encyclopédique pour désigner une souris, bande d’incultes…) trouver d’autres paysages à envahir pour redéfinir son image. Bref, se repositionner pour ne plus jamais perdre la main. Des cerveaux se sont mis à réfléchir…

    Dès les années 50, Mickey se lance dans le long métrage live, avec des propositions toujours aussi niaiseuses, qui rencontrent cependant un relatif succès, surtout sur son continent d’origine. Mais il faudra attendre 1964, avec le triomphe de « Mary Poppins », pour prétendre au succès mondial, en jonglant sur les deux médiums. Rester roi de l’animation tout en devenant le roi du cinéma de divertissement familial, avec des œuvres techniquement ébouriffantes et jamais vues.

    En essayant de sortir un peu de son carcan guimauve et familial, la firme de l’oncle Picsou va ainsi traverser une période assez longue et douloureuse, s’essayant à ses propres films d’animation originaux, comme « Taram et Le Chaudron Magique » et surtout en live avec « The Black Hole » en 1979, qui tente de surfer sur le succès mondial d’un fameux « Star Wars » (tiens tiens…). Le film est un énorme bide et ébranle même sérieusement tout l’édifice de fromage entassé depuis la création de Disney en 1923.

    Car le Trou Noir arrive trop tard et même si sa direction artistique semble intéressante, toute l’entreprise pèse trois tonnes. C’est un gros truc balourd et statique venu d’un autre temps. Et Disney est complètement à côté de la plaque… « Star Wars » a révolutionné le genre, en proposant, en plus des vaisseaux spatiaux et des robots, la vitesse et en introduisant dans ces récits technologiques de l’aventure et du serial. Quant à George Lucas, il a su mélanger avec brio différents thèmes et histoires pour retranscrire à un moment charnière ce que les gens rêvaient de voir sans l’espérer.

     

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    Inutile de préciser que Mickey l’a mauvaise… Mickey est revanchard. Et Mickey est tout rouge… Soit, si l’empire aux grande oreilles, coloré, sucré et souriant en apparence, ne peut prétendre à surprendre et cartonner avec ses propres créations, alors il rachètera un après l’autre tous ceux qui pourraient devenir des concurrents et surtout constituer des mannes en devenir ; des créateurs de légendes, en somme. Là où pour l’instant la souris cupide n’avait su que dépoussiérer les contes d’Andersen, des frères Grimm ou d’autres écrivains européens oubliés, il lui faut désormais s’approprier de vraies mythologies Yankee, celles dans lesquelles le peuple américain se reconnaîtra sûrement. Mickey, totalement mégalomane, veut devenir le maître du monde…

    Robert (dit Bob) Iger, le nouveau PDG de The Walt Disney Company depuis 2005, lance alors une implacable offensive. Et Disney va désormais dévorer tous ceux qui pourraient faire de l’ombre à la petite souris… A commencer par Pixar en 2006, puis Marvel Studios en 2009 ; toute son écurie de super-héros (ou presque) en fait d’ailleurs les frais. Mais il faudra attendre 2019 pour que la souris obèse croque également l’indéboulonnable Twenty Century Fox, et puisse user jusqu’à la corde la franchise des X-Men, préservée jusqu’à ce funeste jour dans le giron des célèbres studios. Ne reste finalement plus que Spiderman, toujours chez Sony-Colombia, que les Japonais ne veulent pas offrir en pâture au rongeur ogre (tiens tiens (bis)…).

     

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    Mais c’est sans doute avec la vente de LucasFilm que le choc sera le plus retentissant. Abandonnant son bébé, George Lucas, homme d’affaire avisé avant d’être le visionnaire que l’on veut naïvement croire, devait bien savoir que sa lointaine galaxie allait échoir dans des mains peu scrupuleuses. Mais Lucas traîne son enfant depuis 1977, connaissant un inégal succès, certes, mais surtout beaucoup de déconvenues, de cris et de larmes chez l’entité monstrueuse qu’il a créée sans le faire exprès et dont il a totalement perdu le contrôle, à la merci d’un public fanatisé qui voit en « Star Wars » sa nouvelle religion. Ainsi, pour échapper à diverses fatwas et reprendre une vie normale, loin du tumulte de la foule haineuse qui a élevé la saga au rang de finalité de vie, Lucas accepte de vendre le package et ses emmerdes avec.

    Pourtant, en signant le contrat en 2012 pour la modique somme de 4,05 milliards de dollars, notre George préféré reçoit encore de la part de ses acheteurs toutes les scrupuleuses attentions relatives à la ligne éditoriale des prochains opus, des séries pour la télé et autres histoires issues de la célèbre saga. Même les ébauches de scénarios pour d’éventuelles suites, soit les futurs épisodes VII, VIII et IX, déjà plus ou moins couchées sur le papier par Lucas, sont fournies dans le cadre du rachat, ainsi que Kathleen Kennedy, déjà présidente de LucasFilm. Tous les cadres de la souris enragée et revancharde jurent sur leurs mères et leurs enfants réunis, ainsi que sur la tête de Tata Rachel, que « Star Wars » sera respecté, aimé et qu’il ne lui sera jamais fait aucun mal.

    Huit années plus tard… Dans une galaxie pas très lointaine, en Californie précisément, « Star Wars » est aujourd’hui dans le bien piètre état qu’on lui connaît. Non seulement les pontes de Disney n’en ont eu strictement rien à fou… faire de ce que Lucas souhaitait pour la suite de ces aventures spatiales et intersidérales, mais de surcroît, ils ont fait exactement ce que l’on pouvait redouter. A savoir « Marveliser », ripoliner notre saga préférée, la rendre tiédasse à souhait. Bref, « Star Wars » est devenu « Les Cochons Dans L’Espaaaaaaaace »…

    Inutile de revenir sur le piteux épisode VII et son manque flagrant d’audace et de nouveauté, tout ce contre quoi Lucas s’était toujours battu. En produisant des « Star Wars », le réalisateur du mythique « American Graffiti » voulait, à chaque nouvel opus, repousser les limites techniques et offrir des spectacles toujours plus novateurs. Même si George Lucas n’a jamais été un génial réalisateur ou même un éminent scénariste, reste qu’il faut tout de même lui concéder un indéniable talent de conteur, de mixeur brillant, pour faire se télescoper des concepts et des images inédites. Mais là, c’est la douche froide… Non seulement « L’Eveil de la Force » ne propose rien de nouveau mais cet épisode VII se paye en plus le luxe de réchauffer au micro-ondes des pans entiers de l’épisode IV, « Un Nouvel Espoir ».

    On sait ensuite comment la gestion de cette nouvelle histoire et de ses personnages va être malmenée dans l’épisode VIII, où le nouveau réalisateur ne semble pas s’être spécialement intéressé aux fondations de cette nouvelle trilogie. Cependant, même si « Les Derniers Jedi » divise (et c’est un euphémisme), il faut quand même reconnaître à Rian Johnson son sens de l’ampleur et une certaine ambition de cinéma, qui font depuis toujours cruellement défaut chez J.J. Abrams. « Les Derniers Jedi », à défaut d’être cohérent avec la mythologie « Star Wars », propose, essaye, tente des pistes. Le film et son réalisateur deviennent pourtant, après Eric Zemmour, ce qu’il y a de pire au monde…

     

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    Et force est de constater que tout cela fleure bon l’amateurisme général et cette façon désinvolte de traiter par dessus la jambe un tel monstre de l’inconscient collectif. Les histoires paraissent écrites au fur et à mesure, sans qu’il n’y ait de réelle vue d’ensemble. Le réalisateur Colin Trevorrow, censé boucler l’ultime épisode, est remercié et remplacé au pied levé par ce cher J.J. Abrams (encore…), qui réécrit finalement toute l’histoire. On est bien là en train de parler de « Star Wars », hein !! Pas de « Plus Belle La Vie », entre l’épisode 450, 451 et 452. Ok ??

    Alors en attendant cet ultime épisode IX qui va sortir dans quelques jours, on nous promet depuis plusieurs mois, à grand renfort de bandes-annonces, de teasers, spots TV en pagaille, de théories de geeks, d’images et d’interviews de tel ou tel intervenant, tous plus rassurants les uns que les autres, que cette fois-ci, ça y est, ça va être fou et que l’on va tous faire « sploutch » dans nos slips ou « sprooch » dans celui des filles…

    Mais le petit souci, en fait, c’est que depuis l’épisode VII, ni l’histoire, ni ses enjeux, ni ses méchants, ni rien d’ailleurs, n’offre un quelconque intérêt, une éventuelle surprise. « Bon les gars, notre méchant a été tué dans l’épisode VIII… Il nous reste quand même encore un épisode à torcher. Il nous faut un autre méchant… Bon, des idées ? Plait-il, J.J. ? faire revenir l’empereur ? Mais il n’était pas mort ? Quoi ? tu t’occupes de tout ? N’oublie pas que tu n’as que deux mois pour ficeler un scénario… Ca ira quand même ? Ok, cool, yeap ! »

     

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    Alors oui, c’est par réflexe Pavlovien que l’on va courir comme des sots encore cette fois-ci, parce qu’on se dit : « Eh, Starouarz quand même ! ». Effectivement, il y eut bien un petit miracle avec « Rogue One », le premier crossover, soit un épisode qui ne rentre pas dans la série officielle, mais qui s’y raccroche quand même pour combler certains trous laissés ça et là… Le film, tout en étant plaisant, offrait un autre aspect de l’univers, moins édulcoré et plus sombre, plus mélancolique. Quant à « Solo », le film conçu justement autour du personnage de Han Solo… Ce fut non seulement une purge mais de surcroît un énorme bide au box office mondial (ouf). On pensait que cela allait faire réfléchir un peu tous les zombies aux commandes et à la manœuvre ? Que nenni…

    La mini-série appelée « The Mandalorian » est également un infâme brouet fan-service, avec en prime toutes les peluches kro-kro mignonnes vues dans les films de la série. Avec cette impression qu’à chaque nouvel épisode (beeen oui, parce que le gros fan de Starouarz, même s’il critique, ne manque pas un seul épisode, tellement hypnotisé qu’il est…), le producteur de ce programme a en fait placé des caméras dans la chambre de son fils, qui joue à la « Guerre des Etoiles » avec toutes ses figurines et ses vaisseaux. Et on grossit à peine le trait, tant le scénario s’avère être à peu près de ce niveau-là…

    Alors, pour ce qui est de « L’Ascension de Skywalker », que souhaiter ? Comme le dirait Georges Abitbol dans « La Classe Américaine » : « Ce flim n’est pas un flim sur le cyclisme… ». Car ces nouveaux Star Wars ne sont pas des films, comme ils n’ont finalement rien à voir avec le cinéma. Ils ne tentent rien, ne proposent rien, n’essayent rien. C’est le degré zéro de l’invention. Ce que Disney veut avant toute chose, tel un nouvel empire qui souhaite transformer le monde à son image, c’est que personne ne bronche. Il veut juste servir au public ce qu’il attend. Ne surtout pas le brusquer, ni l’étonner. Oh non, surtout pas l’étonner !

    Starouarz, ce sont ces Chipsters chimiques qui proposent encore et encore de nouveaux goûts, de nouvelles saveurs, oignon, barbecue, fromage, etc… mais qui restent de vulgaires Chipsters, car c’est tout ce qu’on leur demande, après tout, dans ce monde Disneyien…

     

     

     

  • Le film « Les Bronzés font du ski » fête ses quarante ans

     

     

    Vendredi 22 novembre 2019, le film culte « Les Bronzés font du Ski » de Patrice Leconte fêtait ses quarante ans. Un coffret vient de sortir afin de célébrer comme il se doit cet anniversaire. L’occasion de replonger avec délectation dans l’ambiance de ces bonnes vieilles vacances de ski à l’ancienne…

     

    Le 21 novembre 1979, le film « Les Bronzés font du Ski » de Patrice Leconte débarquait donc sur grand écran. Des bronzés au style caractéristique et à l’esprit moqueur qui imposaient des dialogues rentrés depuis quarante ans dans l’inconscient collectif. Inoubliable aussi : la musique signée Pierre Bachelet, qui nous transporte instantanément sur les pentes de Val d’Isère, là précisément où a été tourné le film. Une station pas loin d’être devenue un lieu de pèlerinage…

    Après « Les Bronzés », sorti exactement un an plus tôt, le 22 novembre 1978, qui avait fait 2,3 millions d’entrées, un bon résultat mais pas un record pour l’époque, c’est le producteur Yves Rousset-Rouard, oncle de Christian Clavier, qui persuade la troupe du Splendid et le réalisateur Patrice Leconte d’ajouter un deuxième volet à la série, qu’un troisième épisode viendra compléter en 2006.

     

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    A sa sortie, « Les Bronzés font du Ski » marche, mais sans déchaîner les foules, faisant moins d’entrées que le premier volet (1,6 million). Le film s’impose cependant au fil du temps et de ses nombreuses rediffusions à la télévision, « 17 à ce jour », précise Patrice Leconte, comme l’un des incontournables de la comédie française, « propulsant avec un petit turbo », ajoute-t-il, sa carrière ainsi que celle de ses acteurs.

     

    « C’est aussi un film qui ne vieillit pas », souligne Patrice Leconte, estimant que « des films du Splendid, c’est sans doute le plus familial ».

     

     

    Le réalisateur se souvient aussi d’un tournage parfois un peu compliqué. Notamment la fameuse scène de la dégustation de la liqueur de crapaud. « Ça nous faisait rire, c’est aussi bête que ça. Cette espèce d’étincelle dans l’oeil me plaît énormément. Et c’est vrai que lorsqu’on regarde la scène chez les Savoyards qui les recueillent, on sent qu’ils ne sont pas loin d’éclater de rire ». Et voilà comment « Les Bronzés » ont révolutionné la comédie à la Française.

     

    « La troupe du Splendid vient du café-théâtre ; le café-théâtre a rebattu les cartes et vraiment modifié la donne du spectacle vivant en France. C’était une nouvelle génération qui était beaucoup plus libre, mais surtout plus proche du public et des thématiques propres à la jeunesse de ces années 70. » (Alexandre Raveleau, Auteur de « Les Bronzés, la véritable histoire » paru aux Ed. Hors Collection)

     

    Et dire que la troupe du Splendid ne voulait pas à l’origine tourner cette suite au premier volet, « Les Bronzés », sorti un an plus tôt. Mais quarante ans plus tard, chaque passage télé des « Les Bronzés font du Ski » continue à faire tomber les records d’audience les uns après les autres.

     

     

    « Sur un malentendu »

    « Ecoute Bernard, je crois que toi et moi on a un peu le même problème, c’est-à-dire qu’on ne peut pas vraiment tout miser sur notre physique, surtout toi. Alors si je peux me permettre de te donner un conseil, c’est : oublie que tu n’as aucune chance, vas-y, fonce ! On sait jamais, sur un malentendu, ça peut marcher. » (Michel Blanc, dans le rôle de Jean-Claude Dusse, à Gérard Jugnot, dans celui de Bernard)

     

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    « Vous avez de la pâte ? Vous avez du suc ? » 

    « Vous avez de la pâte ? Vous avez du suc’ ? Alors, avec la pâte vous faites une crêpe, et puis vous mettez du suc’ dessus ! » (Bruno Moynot dans le rôle de Gilbert Seldman, à Marie-Anne Chazel alias Gigi, qui travaille dans une crêperie)

     

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    « Quand te reverrais-je… »

    « Quand te reverrai-je, pays merveilleux, où ceux qui s’aiment, vivent à deux… » (Jean-Claude Dusse chantant sur un télésiège où il est bloqué pour la nuit)

     

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    « Excusez-moi, mais vous êtes en train d’uriner sur ma voiture. » 

    (Bruno Moynot, jouant Gilbert Seldman, à Gérard Jugnot, dans le rôle de Bernard)

     

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    « L’année prochaine, je skie au mois de juillet » 

    « Moi j’ai acheté cet appartement du 15 au 30, si tout le monde dépasse d’une demi-journée, qu’est-ce qu’il se passe ? L’année prochaine, je skie au mois de juillet. » (Bernard au locataire précédent de son appartement)

     

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    « Copain comme cochon » 

    « Copain, c’est son nom. On l’a appelé comme ça, Copain comme cochon... »  « Mais bouffez-le, votre cochon ! » (Jérôme, médecin généraliste joué par Christian Clavier, et un couple qui lui amène un cochon à soigner)

     

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    « Le planter de bâton » 

    « Monsieur Dusse, ce qui ne va pas, c’est le planter du bâton. »  « Je vais te le planter, le bâton, moi ! » (Le moniteur de ski et Jean-Claude Dusse)

     

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    « Je sais pas ce qui me retient de te casser la gueule ! La trouille, non ? Ouais, ça doit être ça… » 

    (Michel Blanc et Thierry Lhermitte, alias Popeye)

     

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    « Conclure » 

    « Ça veut dire qu’éventuellement, si vous étiez au bout du rouleau, on pourrait envisager de conclure ? » (Jean-Claude Dusse à Nathalie – Josiane Balasko – et Gigi, quand ils attendent les secours dans la montagne)

     

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    « Je suis végétarien ! » 

    « C’est quoi les petits trucs blancs dedans ? »  « Ça, c’est les vers. Ben oui, comme ça, il y a de la viande aussi. »  « Je suis végétarien ! » (Jean-Claude Dusse et les montagnards qui leur font goûter une spécialité locale, la fougne)

     

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