Étiquette : Hubert Touzot

  • Le serre-tête à pompons by Hubert

     

     

    Dans ma série de billets d’humeur devenue culte, « Hubert a des p*bip*ains de problèmes dans la vie », je souhaitais aborder aujourd’hui le cas du port de casque audio dans la rue. Vous savez, cet imposant serre-tête à pompons que n’importe qui se doit désormais d’arborer, comme si c’était super cool, et qui au mieux donne à celui qui le porte une vague ressemblance avec un gars des pistes de porte avions ou alors au pire, une sorte de protège-oreilles pour personne hyper frileuse des conduits auditifs.

     

    C’est à dire que si vous n’êtes pas un DJ qui était juste sorti entre deux sets pour remettre des pièces dans l’horodateur, l’utilité intrinsèque de cet objet dans la rue ou dans les champs n’a objectivement pas lieu d’être.

     

    … Et là on me rétorque immédiatement, entre un « rétrograde », un « réac » ou encore un « facho de la coolitude », que nous traversons une époque où le ridicule ne tue plus personne et que, par conséquent, à l’instar des modes et de leurs conséquences sur les effets de masse, avec comme principe « si je saute par la fenêtre, etc… », on peut ainsi sans questionnement aucun imiter une allure empruntée à un look 80’s de ces premiers rappeurs qui s’étaient créé une attitude « street, musicos, pointue et amateur de bons sons ». Pourquoi pas… Il y a quelques semaines, j’évoquais d’ailleurs ici un cas similaire de mimétisme avec le port de la barbe à outrance.

    C’est donc de manière virale, incontrôlable, mais dictée par un inconscient apathique et spongieux que le phénomène s’est installé durablement, ou juste le temps nécessaire pour que des communicants zélés puissent parvenir à essayer de nous faire croire que l’objet en question, en plus d’être parfaitement encombrant, fragile et doué d’une durée de vie toute relative, est tout bonnement indispensable pour écouter La Musique que l’on aime, qui le plus souvent pourtant nous est proposée en format compressé Mp3. Avec ou sans fil, en couleur, parrainé par tel DJ ou rappeur du moment, une majorité silencieuse défile ainsi, écoutant ses playlists favorites.

    Vous vous arrêtez donc deux minutes et vous interrogez sur la tournure que prend ce micro-événement, ce phénomène insignifiant face à tant de problématiques autrement plus préoccupantes… Mais pourtant, comme un effet papillon, tout fait sens et finit par se rejoindre. Que dit en substance ce que nous constatons à chaque vision de ces gens que nous croisons si curieusement couronnés ? « Moi, dans la rue, on ne Me parle pas, on ne M’aborde pas, on Me fout la paix parce que j’écoute Ma Musique, Mon Son ». Ou encore une variante à cette sentence : « Même si Je suis dans la rue, ailleurs, Je fais comme si J’étais chez Moi et je ne change pas Mes habitudes et Mes plaisirs ».

     

    Il y aurait d’ailleurs aussi beaucoup à dire sur la façon de se mouvoir au milieu des autres, d’évoluer dans le décor anonyme, où l’on se rend compte que tout va de concert avec la manière de se comporter vis à vis d’un autre, comme nous.

     

    Muré, entouré par cette barrière auditive et hostile, l’Homo-Erectus, qu’il soit mâle ou femelle, dans l’avant-dernière étape de son évolution ou plutôt de son isolation, souhaite pourtant communiquer avec la terre entière, les oreilles saturées et les yeux plongés dans le bain luminescent de l’écran de sa tablette ou de son téléphone devenu, semblerait-il, la seule source fiable du pourquoi du comment. Ecouter et voir le monde, certes, mais surtout pas si c’est à moins d’un mètre. Quand à l’ultime étape, le stade final, un devenir plausible pour le bipède, ce sont ses pouces qui semblent avoir remplacé ce que l’on appelait jadis le cerveau…

    Ainsi, pour revenir et finir sur le sujet premier de ce billet, lorsque les communicants et autres refourgueurs de choses inutiles auront tari leurs stocks de cache-oreilles, ils proposeront le mieux du mieux, la solution ultime : La Boite En Carton sur la tête avec laquelle vous pourrez choisir vos ambiances, reproduire votre chambre à coucher, votre salon ou pourquoi pas, le confort absolu d’une forme recroquevillée dans l’utérus de votre maman.

    Mais vous n’êtes pas obligés de me croire…

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Dévoreur Hubertouzot

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Beats, Marshall… Le succès du casque audio décrypté

     

     

     

  • La Trottinette by Hubert

     

     

    Dans la série désormais célèbre « Hubert a des P*bip*ains de problèmes dans la vie », aujourd’hui : La Trottinette.

     

    Je trottine, tu trottines… Nous trottinons… Ils trottinette(nt)…

    C’est en 1916 qu’un brevet est déposé par un inventeur américain du nom d’Arthur Hugo Cecil Gibson, que le constructeur allemand Krupp reprendra à son compte pour produire cet engin en version motorisée de 1919 à 1922. En 1967, Roland Puisset réalise les premières esquisses de ce qui deviendra quarante ans plus tard la trottinette électrique.

    Voilà pour l’histoire…

     

     

     

    Ce petit bidule à roulettes, donc, jusqu’à un présent aléatoire, a toujours été l’apanage des enfants (de 3 à 11 ans… 12… Allez, 13, mais n’y revenez pas…). Avec cette technique consistant à déambuler en se servant du pied pour s’élancer et se propulser sur quelques mètres, l’enfant avait son propre moyen de locomotion, sa manière à lui de signifier à ses parents une certaine autonomie.

    La trottinette ou un bon compromis, avant de passer à la bicyclette, puis au Solex et un jour à la voiture, ultime symbole de liberté mais aussi de fierté masculine… Un phallus à moteur, en quelque sorte.

     

    Mais alors, qu’est-il arrivé, au juste ? Comment est-on parti de la voiture, de la moto ou du vélo, pour se rabougrir à ce point et finir par s’enticher de ce moyen de locomotion aussi désuet que tartignole ?

     

    Sans l’ombre d’un doute, sans un quelconque questionnement philosophique (être ou ne pas être naze…), l’homo Erectus de nos grandes cités, débarrassé de toute dignité et de toutes valeurs intrinsèques, a opté pour le ridicule qui ne tue pas… mais qui ridiculise, en fait.

    Il est cependant vrai que cette atrophie subite du bulbe rachidien se remarque surtout dans les grandes villes. A la campagne, par exemple, on ne verra jamais un cultivateur se rendre à son champ ou à sa grange le matin au chant du coq avec cette, ce… truc… non, non.

    L’émergence (voire le tsunami…) de cette planche à roulettes munie d’un guidon tient aussi sûrement de la boboïsation manifeste (autre grand fléau de nos société occidentales) de nos us et coutumes, avec comme maître-mot de toujours paraître « coooool », « sympaaaaaa » et hyper, super, hyper… Super… Sup… Tout ça, quoi…

    C’est avec les prises de conscience actuelles, de l’écologie au pain au chocolat plutôt que la Chocolatine, en passant par Netflix ou le smoothie, tout cela mélangé au blender chauffant dans les cerveaux de tous ces métro-sexuels barbus en veste trop courte Zadig et Voltaire ou Sandro, et spécialistes en professions liées au digital, que la décision fût prise.

    Voyez-les passer sous votre nez partout dans la rue, sur les pistes cyclables ou autres trottoirs, droits comme des I, fiers comme Artaban, le regard hiératique chaussé de lunettes Tom Ford… Contemplez-les ainsi dans leurs vies, vaquer à leurs activités quotidiennes, toujours entre deux rendez-vous.

    C’est là qu’une petite voix intérieure me chuchote : « napalm, cocktail Molotov, grenade à fragmentation ou juste quelques petites billes… ? ». Non, je dois prendre sur moi et remballer mes pulsions homicides fatwaïesques…

    Aujourd’hui, donc, la trottinette est devenue électrique. Elle se loue, même. Une démocratisation de l’ineptie, comme un besoin collectif de se sentir moins con, puisque tout le monde le fait.

    Vivement l’évolution ultime de ce moyen de transport, avec comme prochaine étape la trottinette collective… Euh… En fait, la brouette… mais électrique.

    Et vous n’êtes pas obligés de me croire…

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Dévoreur Hubertouzot

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

     

  • Le Grand Bain, quand les bonnes intentions ne font pas forcément un bon film

     

     

    On dirait que le syndrome du « film qui fait du bien » a encore frappé avec « Le Grand Bain » et que quatre millions de spectateurs ont pris ce sophisme pour une recommandation médicale, un mantra…

     

    A l’instar du film « Intouchables » sorti il y a quelques années et estampillé lui aussi dans cette catégorie désormais approuvée par un inconscient collectif de la même famille que celle des ovins, cette catégorie elle-même intouchable des « Feel Good Movies », « Le Grand Bain », autant plébiscité par le public que la critique, finit même nominé aux Césars… Et y fait finalement chou blanc, ne récoltant qu’un prix pour Philippe Katerine, comme une sorte de pied de nez goguenard à cette cérémonie sinistre.

    Toujours est-il que l’on ne sait pas par quel miracle ou quelles fées penchées sur son berceau, Gilles Lellouche a pu décrocher ne serait-ce que la queue du Mickey avec ce premier (gros) film… Tant ce « Full Monty » à la Française tisse laborieusement une histoire chorale maintes fois racontée, et sur une durée incompréhensible de 2h15 !

    2h15… Euh…

    Avoir sous la main Poelvoorde, Bekhti, Anglade, Efira, Katerine, Amalric et son copain Canet pour faire un premier film, évidemment, cela donne des ailes. Mais dans le cas du Grand Bain, trop d’acteurs connus finissent par tuer les acteurs connus. Gilles Lellouche se sent alors obligé de nous gratifier du parcours de chacun de ses protagonistes, sans se demander s’il y a pertinence ou non et un intérêt strict pour le récit principal en cours.

     

    [youtube id= »DcegGcMRD5o » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

    Le film en l’état se conçoit d’avantage comme une suite de sketches, à la manière de l’émission belge « Strip-Tease », avec comme fil rouge la natation synchronisée, qui semble être plus un prétexte qu’autre chose, et qui est finalement plutôt mis de côté…

    Alors, les gentils défenseurs cinéphiles du film vous expliqueront que c’est le propre des premiers films que d’être trop long… Certes. Leurs auteurs veulent tout mettre, tout placer, sans souci de trop-plein. A croire donc que dès le début de la post-production, le monteur officiel aurait été banni pour ne plus être remplacé, et pour laisser Lellouche se faire plaisir.

    Bon, pour être tout à fait honnête, « Le Grand Bain » n’est pas non plus un naufrage et quelques séquences sont même plutôt réussies. Certains plans, des dialogues, des situations ou certaines audaces formelles font mouche et de belles choses parfois surgissent par surprise. On pense également à ce cinéma italien des années 60-70, avec ces personnages de losers magnifiques esquintés par le monde qui les entoure. Oui, il y a tout de même de cela dans « Le Grand Bain » et la mélancolie sonne souvent juste. Car Gilles Lellouche a des envies de cinéma, c’est évident.

    Mais alors pourquoi faire si long ? Le film, au bout d’une heure trente, paraît déjà interminable. L’histoire semble se répéter, s’étaler, tout en faisant paradoxalement du surplace. On arrive à la grande scène de fin, un climax complètement téléphoné et qui ne fonctionne absolument pas.

    Car le problème de ce film est qu’il ne raconte finalement pas grand chose.

    « Le Grand Bain » boit la tasse et nous avec…

     

    [youtube id= »Je3C1hvUCA8″ align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

     

  • Jim et Hubert Touzot, exposition croisée à la galerie Octopus

     

     

    Quoi de mieux qu’une exposition croisée pour célébrer la belle amitié entre deux grands talents ? L’auteur de BD Jim et le photographe Hubert Touzot, alias « Dévoreur », se donnent magnifiquement la réplique en investissant les murs de la Galerie Octopus à Paris.

     

    La Galerie Octopus est heureuse de vous présenter l’exposition croisée de l’auteur et dessinateur de BD Jim et du photographe Hubert Touzot, dans son local du 3ème arrondissement, 80 rue des Gravilliers à Paris.

    Thierry Terrasson, alias Jim ou encore Tehy, est un auteur et dessinateur de BD prolifique, avec plus d’une centaine d’albums à son actif. Consacré, entre autres, pour son œuvre en trois tomes, « Une Nuit à Rome », sa ligne parfaitement juste et élégante esquisse régulièrement les affres de l’amour, du désir, du corps et du cœur. Il exposera ses dessins à la galerie en regard des photos de Hubert Touzot, dont il reprend certains travaux dans ses albums, en hommage à son ami de toujours.

    Hubert Touzot, Photographe Dévoreur, est un artiste qui se dédie aujourd’hui avant tout à la photographie. Quand il revêt l’habit du photographe, Hubert devient Dévoreur et mange les images avec avidité : couleurs tranchantes, lignes puissantes, superpositions de corps et de figures qui se découpent ou se perdent dans le cadre. Il présente pour la première fois son travail dans le cadre intimiste de la Galerie Octopus, en vis-à-vis des planches de Jim, mettant en avant leurs liens intimes et artistiques.

    En 2016, Jim nous déclarait à propos de son ami : « Hubert Touzot est un photographe qui a un vrai talent et mérite que l’on découvre son travail. Je lui rends d’ailleurs hommage dans l’un de mes derniers albums « De beaux moments ». C’est aussi un super ami, la personne la plus drôle que je connaisse. Il a un cerveau connecté je ne sais où, ce qui lui permet de constamment partir en vrille sur n’importe quel sujet. Il a fait un peu de scène à une époque… Il me conseille, je le conseille. Nous avons même fait un livre ensemble : « T’chat ». Nous nous faisions passer pour une fille et faisions tourner en bourrique des hommes avides de sexe sur les premiers réseaux sociaux. On en pleurait de rire ! L’éditeur un peu moins quand il a vu les chiffres de vente désastreux (rires). C’était il y a cinq ans environ. Hubert l’avait signé U’br. Il écrit toujours, le bougre. Mais son vrai virage est la photographie. »

    Les deux comparses, dont nous suivons ainsi le parcours depuis quelques années et à qui nous avons déjà consacré un certain nombre d’articles, de portraits ou d’interviews, nous touchent par leur gentillesse et leur bienveillance, alliées à une culture impressionnante. Alors, courez à la Galerie Octopus, avec le secret espoir qu’ils s’y trouvent, et vous aurez peut-être la chance de pouvoir papoter avec eux, de tout et de rien, mais surtout de BD, de photo ou encore de cinéma…

    L’exposition croisée Jim et Hubert Touzot, à ne rater sous aucun prétexte…

     

     

     

     

  • 120 Battements par Minute

     

     

    On se sent toujours un peu ennuyé, voire même coupable, lorsqu’on a le sentiment d’être passé à côté d’un film qui croule sous une avalanche de dithyrambes… Mais c’est pourtant ce que j’ai ressenti avec « 120 Battements par Minute ».

     

    Même si je fus un protagoniste de cette période, ou plutôt un figurant, je ne me suis pas retrouvé dans cette description qui se veut factuelle d’une époque, avec les événements qui s’y rattachent. Je n’ai jamais été ni activiste ni séropo, ou quoi que ce soit qui pourrait s’assimiler à l’histoire des personnages du film « 120 Battements Par Minute » de Robin Campillo. J’y retrouve cependant tel ou tel trait de caractère que j’avais noté dans le comportement de ceux que j’ai pu croiser à l’époque, pris dans leurs combats.

    Je vivais pourtant à Paris et je jouissais d’une vie de jeune gay tout ce qu’il y a de plus lambda, sans avoir été confronté une seule fois à une situation vraiment douloureuse. Je me protégeais, et même si je cotoyais ou couchais avec des séropositifs, ces derniers n’évoquaient jamais leur drame intime. On savait la période dure pour ceux qui avaient contracté le HIV, mais néanmoins floue car tout était encore bien nébuleux au sujet de ce virus.

    C’était l’avènement de la House et du Garage, et les boites de nuit gay étaient à cette époque paradoxalement d’incroyables temples païens où la danse constituait un exutoire, une communion, et où l’on allait d’abord pour danser avant de draguer. En ce sens, les scènes de clubbing dans le film sont extrêmement belles et comptent parmi les plus réussies.

    Alors, même si le film de Robin Campillo décrit avec force détails le fonctionnement d’Act Up, les enjeux de l’époque, et tous ces personnages inspirés de la réalité, il nous manque pourtant quelque chose. Sans doute une hauteur, une ampleur… Les trois histoires présentées dans le film s’imbriquent mal. Elles se mélangent, se superposent mais interagissent difficilement entre elles. Du fait d’un budget restreint, d’un cadrage trop serré et d’un nombre limité de décors, le film finit par être étouffant, suffoquant. Peut-être était-ce une volonté artistique du réalisateur, mais les scènes d’intervention, les coups d’éclat, les manifestations manquent de force et de hargne. Elles sont trop « cheap » et sonnent faux.

    En voulant sans doute coller aussi à une stricte réalité et ne pas tomber dans un misérabilisme flamboyant façon « Les Nuits Fauves » ou certains des films de Patrice ChereauL’homme Blessé », « Ceux Qui M’aime Prendront Le Train »…), 120 Battements prend le parti-pris d’un naturalisme « Pialesque » sans savoir où couper. On se retrouve ainsi avec des scènes étirées qui éclipsent certaines autres, plus courtes mais pourtant plus réussies. On ne s’attache que difficilement aux personnages, mis à part Nathan, une sorte d’être lumineux et bienveillant. Quant aux autres, ils sont surtout des stéréotypes que l’on a tous déjà côtoyés dans les milieux gay que l’on pouvait fréquenter à l’époque. Personnellement, ces individus m’agaçaient de par leur hargne, leurs rapports conflictuels et l’arrogance affichée comme seul moyen de communication.

    Avec si peu d’empathie et cette morgue comme seule alternative pour expliquer les enjeux, on se demande où réside l’intérêt du film aujourd’hui et surtout à qui il s’adresse, finalement… Aux gays ayant vécu cette période, comme une piqure de rappel ? A un jeune public qui ne connaîtrait pas cette époque symboliquement forte du militantisme en France ? A un public qui voudrait en savoir plus sur la communauté LGBT ? D’autant que cela retrace l’histoire d’Act Up, quand tout restait encore à faire. Depuis, heureusement, et sans doute en grande partie grâce à eux, des progrès considérables ont été mis en oeuvre pour le traitement des malades.

    Au-delà de la dimension historique, didactique, je m’attendais malgré tout à être secoué, galvanisé, en regardant un film puissant et électrique. Je pensais aller voir un morceau brut d’énergie pure, une ode à la vie. Une expérience sensitive et bouleversante… On me dira que le combat est donc toujours d’actualité, certes, mais je me penche ici uniquement sur l’expérience cinématographique et non pas sur les idées qu’elle défend. Et en tant qu’oeuvre qui voudrait s’adresser à un large public, je crains que beaucoup restent sur le bas côté et n’entendent rien à ce 120 Battements qui exprime plus le sentiment de mort que l’espoir ou la lumière.

    La fin est pesante, interminable et inutilement arrache-larme, et tout ce qu’avait tenté d’éviter le réalisateur durant le métrage, à savoir ce pathos omniprésent, nous explose ici à la figure de manière maladroite et crispante. Le générique final enfonce le dernier clou de ce cercueil qu’est « 120 Battements Par Minute » et notre coeur, quant à lui, s’est arrêté de battre…

     

    [youtube id= »q4Jgg4uUVqI » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

     

  • L’Opéra selon Jean-Stéphane Bron

     

     

    Au-delà de ces spectacles d’exception que sont les opéras ou les ballets, on trouve une armée de soldats derrière ces moments rares (techniciens, danseurs, musiciens, metteurs en scène, chanteurs, chefs d’orchestre, directeurs, décorateurs, costumières… et la liste est longue), prêts à donner le meilleur d’eux-mêmes pour livrer en temps et en heure le fruit de leur travail et de leur sueur.

     

    Malgré tout le prestige et le snobisme qui peuvent trop souvent illustrer ces lieux mythiques, Jean-Stéphane Bron offre un documentaire passionnant et émouvant sur l’Opéra de Paris. Garnier et Bastille, sous la houlette de leur directeur Stéphane Lissner, nous ouvrent leurs portes, leurs coeurs, leurs tiroirs et nous font découvrir dans le moindre détail le fonctionnement de ces énormes entreprises.

    Le documentaire ne se contente pas de saupoudrer un peu de sucre glace sur cette institution, mais se permet d’être aussi politique, rigoureux dans son approche et précieux dans le regard novice qu’il porte sur ce monde parfois violent, dur, discipliné et néanmoins infiniment magique.

     

    [youtube id= »XFVY1YN5qvo » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour Aller Plus Loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Opéra de Paris

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Eleanor Susan

     

     

     

  • Rize, noir comme la lumière…

     

     

    Rize vient de ressortir en salle. C’est l’occasion de redécouvrir, si vous étiez passé à côté à l’époque en 2005, ce film ou plutôt cette expérience proposée par le photographe David LaChapelle.

     

    Noir comme la lumière… Aimer les corps et la fusion créée entre leurs mouvements, et toute la puissance qui s’en dégage…

    David LaChapelle a dû être complètement tétanisé lorsqu’il découvrit pour la première fois tous ces jeunes de South Central, un ghetto noir et portoricain en plein cœur de Los Angeles, trouver un exutoire à leur condition, sous forme de danses complètement nouvelles appelées « Stripping’ », « Clowning » ou « Krumping », mélange de Tribal, de Hip Hop ou de Voguing.

    Cette frénésie collective, comme taillée dans la pierre, surgissant de peaux noires et luisantes, et faisant saillir les muscles, offre un spectacle inouï. Toutes ces chorégraphies évolutives et furieuses, par lesquelles chacun vient transcender son être, c’est ce qui ressort des images de Rize.

    Durant tout le film, un saisissement nous étreint, nous émeut, nous prend à la gorge, nous bouleverse. Sans doute de l’amour… En tout cas, il se passe quelque chose. Jamais la danse et les corps en mouvement n’avaient exprimé autant de sentiments et d’émotions.

    Déjà douze ans de passés… Le contenu de ce reportage n’est peut-être plus d’actualité, et ses protagonistes ont sans doute bien changé. Pourtant, ces images que l’on revoit aujourd’hui, ont gardé toute leur majesté. Douze ans après, et rien ne semble avoir été affecté. Rize est un bloc. David LaChapelle, dont on connaît le travail, souvent si enclin à un style formaliste, outrancier, que ce soit dans ses photos ou dans ses clips, s’est ici complètement effacé, pour mieux recueillir ce jus, cette intensité de vie et de puissance, sans jamais forcer le trait ni tomber dans le misérabilisme ou la complaisance, pour nous offrir ce témoignage incroyable sur la beauté, la fierté et la foi.

    A redécouvrir d’urgence…

     

    [arve url= »https://vimeo.com/8680670″ mode= »normal » align= »center » thumbnail= »6817″ maxwidth= »900″/]

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Dévoreur Hubertouzot

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

     

  • Jim : Interview Exclusive | Les coulisses de la création

     

     

    Jim (de son vrai nom Thierry Terrasson) est un auteur de BD qu’on n’a plus besoin de présenter : 120 albums, 1,5 million d’exemplaires vendus, du théâtre, des courts-métrages, et un rêve, le cinéma. Parce que Jim nous fait rêver, nous avons voulu à notre tour nous intéresser à ses rêves.

     

    IC : Vous avez déclaré « rêver de cinéma depuis vos 18 ans » (interview « My little discoveries » – Mars 2013). Qu’est-ce qui vous attire dans le 7ème Art que vous ne retrouvez pas dans le 9ème ?

    Thierry Terrasson : Le monde de la BD et celui du cinéma sont différents : faire de la BD reste un travail solitaire. Parfois on est deux, trois, mais on jouit d’une liberté totale de création. Je peux imaginer un personnage, dire une phrase d’une certaine façon, le dessiner comme j’en ai envie, découper le texte comme il me semble et raconter ce qui me chante. Je peux jouer avec tous les éléments mis à ma disposition pour évoquer des choses, les faire ressentir ou créer un mouvement, et cela juste d’un coup de crayon. Ce sont les possibilités infinies que nous offre la BD.

    L’une des qualités du cinéma qui m’attire, c’est le travail en équipe. On se retrouve soudain plusieurs à projeter notre ressenti, nos idées sur le film. Chacun, selon sa compétence (réalisateur, metteur en scène, scénariste, responsable photo, acteurs…). Un acteur apportera au texte de la finesse, une certaine intensité, un sous-texte, autant de choses qui vont agrémenter la simple idée de départ. De la même façon, le lieu influe sur les idées qu’on avait, c’est pour cette raison que j’essaie de ne pas trop dessiner de story-boards. Ce sont souvent les plans les moins intéressants car les plus calculés. Je préfère les surprises, les accidents qui  donnent la sensation d’attraper la vie au vol.

     

    IC : Vous avez participé aux scénarios de sept courts-métrages : Comment se sont créées à chaque fois les rencontres et les opportunités ?

    Thierry Terrasson : Parfois, des gens sonnent à ma porte, mais la plupart du temps, c’est une envie très instinctive au démarrage, et je cherche alors qui le projet peut intéresser. Souvent en allant chercher dans mes connaissances, parfois en découvrant de nouvelles personnes. On parle là d’une majorité de courts métrages joyeusement amateurs. Seuls les tout derniers prennent un tournant plus professionnel. Je ne fais plus tout, tout seul, ou avec quelques copains. Mon dernier court-métrage, « Vous êtes très jolie, mademoiselle » a été réalisé en faisant appel à des professionnels. Ce n’est plus moi qui tiens la caméra, ce qui est une étape décisive : il s’agit de passer le relais à quelqu’un de calé en photo, en cadrage, qui saura faire bien mieux que ce qu’on ferait, et lui faire confiance ! Chacun son métier.

     

    IC : En 1986, vous réalisiez votre premier court métrage «Chipie St Jill». Quel était le pitch ? Quels étaient vos moyens ? 

    Thierry Terrasson : Les moyens ? Illimités ! (rires) En fait, «  Chipie St Jill » est mon tout premier court métrage, co-réalisé avec mon frère Philippe : il avait 17 ans et moi 19, on parle donc ici d’une histoire de gamins ! Le Crédit Agricole nous avait soutenus dans notre projet en nous faisant un don de 13 000 francs (2 000 euros). Le court parlait d’admiration, de la manière qu’a chacun d’admirer quelqu’un d’autre. On y sentait à plein nez les influences de « 37°2 le matin » et de « La lune dans le caniveau », deux film de Jean-Jacques Beineix. Nos moyens étaient très limités. Comme nous étions inscrits à un club photo et vidéo, un professionnel rencontré là-bas nous avait gracieusement prêté sa caméra et nous avons tourné en 16mm pendant les six mois qu’a duré le tournage. On a très vite réalisé qu’on pouvait faire des miracles à notre petit niveau. Je me souviens d’une anecdote : la scène se déroule sur un quai où sont amarrés des paquebots, dans le port de La Rochelle. Une DS devait être déchargée d’un des paquebots. Facile à écrire, ça prend deux minutes sur un coin de table, mais à tourner ? En discutant avec des hommes sur le chantier naval, contre un petit billet, ils ont accepté de monter et descendre le véhicule pendant une demie- heure, de quoi tourner nos plans. Ça parait tout bête, mais à l’âge qu’on avait, c’était un vrai moment magique pour nous. Pour finir, le court-métrage a fait le tour de quelques festivals et a eu le premier prix au festival du Futuroscope. C’était notre première projection publique, autant dire un régal !

     

    « Si je devais donner un conseil à tous ceux qui veulent démarrer, ce serait celui-là : ne restez pas dans votre coin. Il existe de nombreux clubs vidéos qui permettent de projeter sur écran ce que vous faites. C’est plus intéressant que de poster une vidéo sur YouTube, en tout cas, c’est complémentaire. La réaction du public dans une salle permet de voir très vite si ce que l’on a tourné fonctionne ou pas… et de se remettre en question. »

     

    IC : Votre frère en était co-réalisateur et acteur. La passion du cinéma, une histoire de famille ?

    Thierry Terrasson : Philippe a bifurqué vers l’architecture de son côté. Mais oui, c’était une vraie passion commune de gosse, comme beaucoup, d’ailleurs. On a grandi côte à côte à discuter des mêmes films. On venait d’une petite ville de province, c’était sans doute ça ou mourir d’ennui (rires)…

    Pour ma part, j’ai toujours adoré raconter des histoires, que ce soit à travers l’écriture, la bande dessinée ou la prise de vue réelle. Ce qui me passionne, c’est de prendre un bout d’histoire et de la faire évoluer en y ajoutant un drame, une rencontre, une situation un peu dingue… Ce qui m’intéresse, c’est de trouver des ponts entre tout ça. Prendre ce que la vie nous offre de plus piquant et de meilleur pour essayer d’en faire quelque chose. J’aime faire vivre des tas de choses à mes personnages, les surprendre, les secouer… Je suppose que c’est ma drogue !

     

    IC : Hubert Touzot est un acteur récurrent de vos courts-métrages. Pouvez-vous nous parler un peu de lui ?

    Thierry Terrasson : Hubert Touzot est un photographe qui a un vrai talent et mérite que l’on découvre son travail. Je lui rends d’ailleurs hommage dans l’un de mes derniers albums « De beaux moments ». C’est aussi un super ami, la personne la plus drôle que je connaisse. Il a un cerveau connecté je ne sais où, ce qui lui permet de constamment partir en vrille sur n’importe quel sujet. Il a fait un peu de scène à une époque… Il me conseille, je le conseille. Nous avons même fait un livre ensemble : « T’chat ». Nous nous faisions passer pour une fille et faisions tourner en bourrique des hommes avides de sexe sur les premiers réseaux sociaux. On en pleurait de rire ! L’éditeur un peu moins quand il a vu les chiffres de vente désastreux (rires). C’était il y a cinq ans environ. Hubert l’avait signé U’br. Il écrit toujours, le bougre. Mais son vrai virage est la photographie.

     

    IC : En 2001, vous recevez un 1er prix avec « Le Jeune » et en 2005 votre court-métrage « George » reçoit trois prix, puis se vend à trois chaînes de télévision. Les choses se sont accélérées durant ces quatre années ?

    Thierry Terrasson : Disons que ça a marqué une petite étape : je me suis dit qu’il était peut-être temps, maintenant, de tenter l’aventure du long. Ecrire, trouver le bon sujet, convaincre des producteurs, tout cela est indispensable pour franchir cette étape. C’est aussi pour ça que mes projets BD ont évolué, et ressemblent de plus en plus à des films sur le papier, car ce sont les mêmes périodes. Je suis de plus en plus régulièrement à Paris et j’apprends pas mal de la relation avec les producteurs. C’est d’ailleurs un paradoxe magnifique : si j’avais écouté les conseils des producteurs, je n’aurais pas écrit les scénarios de BD qu’ils souhaitent à présent adapter en film. Il y a quelque chose de très frais dans la création d’une BD.

     

     

    Instant-City-Jim-006

     

     

    « Les projets BD et ciné se mêlent donc de plus en plus. Maintenant quand j’écris, je ne sais pas toujours si je l’imagine d’abord en film ou en livre. »

     

    IC : De quoi ont été faites ces onze dernières années depuis 2005 ?

    Thierry Terrasson : J’ai écrit, imaginé des personnages, des situations. J’ai fait des lectures avec des acteurs, j’ai rencontré des réalisateurs et des producteurs. J’ai beaucoup travaillé à essayer de comprendre le fonctionnement du milieu du cinéma grâce aux rencontres : il s’agit là d’un travail sous-terrain pour parvenir à cerner le métier de scénariste de cinéma, ce qui n’est pas du tout la même approche que scénariste de BD. D’un côté c’est une industrie, de l’autre encore un artisanat.

     

    IC : Quel est votre technique pour écrire ?

    Thierry Terrasson : Au départ, je notais toutes mes idées dans des carnets, des feuilles volantes… Aujourd’hui je les intègre directement dans mon smartphone. Je prends ensuite du fil et une aiguille et j’essaie de coudre les idées ensemble. C’est, de l’avis de spécialistes bien informés, une très mauvaise méthode, car j’essaie d’intégrer la structure après coup. Ils ont sans doute raison mais c’est la méthode que je préfère, elle a le mérite d’être porteuse de vraies idées de scènes fortes. Après, c’est plus long, forcément… J’écris le weekend, la semaine, chez moi vers Montpellier, ou dans le train, ou chez belle-maman, un peu n’importe où. Chez moi, je suis infichu d’écrire dans mon atelier (consacré au dessin), j’ai donc une pièce dans laquelle j’aime écrire. Avoir un lieu ainsi dédié à l’écriture nous met en condition et donne un cadre, un cérémonial qui met le cerveau en position « écriture ». Même si, en vérité, j’écris vraiment n’importe où. Et je dois bien avouer que la plupart des nouveaux projets naissent en vacances, ou en trajet. Comme quoi, il n’y a pas de secret : il faut agiter son cerveau pour en sortir quelque chose ! C’est un processus physique, finalement.

     

    IC : De l’écriture à la réalisation, quelles sont les étapes à franchir ?

    Thierry Terrasson : Vous voyez ces militaires en camp d’entraînement, qui avancent à plat ventre dans la boue sous des barbelés ? Ecrire un film, ça m’évoque un peu ça (rires).

    Je n’ai aucun réseau et je sors de nulle part. Depuis des années, je commence à établir des ponts, à mieux connaître le fonctionnement interne.

     

    « Ma notoriété entre peu en ligne de compte : parfois, quelqu’un me connaît par la BD et accepte donc de lire mon travail plus facilement. Mais j’ai forcément tout à prouver chaque fois, ce qui est le jeu. »

     

    Ecrire un scénario de BD a au final si peu à voir avec écrire un scénario de long métrage. Il suffit de trouver un éditeur pour qu’une bande dessinée existe. Au cinéma, le producteur n’investit plus d’argent, il va démarcher des investisseurs : les chaînes de télévision, les distributeurs, les aides diverses… Pour les convaincre, le producteur essaie d’avoir un maximum d’atouts en main : des acteurs, un scénario, son passif… Il est bien loin le temps où les producteurs investissaient sur leurs fonds propres, sur leur seule foi en un projet…

     

    IC : Entre 2012 et 2015, vous avez connu plusieurs très grands succès d’édition avec « Une nuit à Rome » Tomes 1 & 2, avec « Héléna » Tomes 1 & 2, avec « Un petit livre oublié sur un banc » Tomes 1 & 2.

    Thierry Terrasson : Même si je m’essaie au cinéma, je resterai toujours attaché à la liberté que m’offre la BD. C’est un vrai bonheur de passer de l’un à l’autre. En ce moment, dès que j’ai un peu de temps, je me régale en BD de cette extrême liberté. Je dois bien avouer que je savoure ce bonheur-là tous les jours !

     

    IC : Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?

    Thierry Terrasson : En BD, j’ai attaqué « Une nuit à Rome 3 », puis je ferai le 4… Il est très difficile de quitter certains personnages qui nous sont très proches… Au ciné, je travaille sur plusieurs projets en écriture, dont un en co-réalisation avec Stéphan Kot, un vieux complice talentueux. Et je peaufine des scénarios de comédie dont deux que je souhaite réaliser. Je ne m’étends pas encore trop sur le sujet car il reste encore beaucoup de travail dessus, mais j’ai bon espoir que 2017 soit l’année des tournages…

    En septembre 2015 a démarré le tournage de l’adaptation à l’écran de ma BD « L’invitation », réalisée par Michael Cohen, avec Nicolas Bedos. J’ai eu le sentiment que quelque chose se mettait en route. Je suis allé à plusieurs reprises sur le tournage, et j’ai pu découvrir un premier montage non définitif, qui m’a semblé être la meilleure adaptation possible de la BD. Je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre, et j’ai été vraiment séduit par l’aspect humain du film de Michael. On sort du film avec l’envie d’appeler un de ses meilleurs amis pour lui dire d’aller voir le film, pour partager ça. Il y a quelque chose qui dépasse le récit pour nous toucher dans notre propre vie, j’ai l’impression.

    Pour revenir à la BD, nous avons achevé, Lounis Chabane (« Héléna ») et moi-même, le tome 1 d’une BD qui s’appelle « l’Erection ». Tout un programme ! Et je dois dire que ça a été un vrai bonheur à travailler. Pour preuve, nous sommes déjà sur le tome 2. En parallèle, avec le réalisateur Bernard Jeanjean (« J’me sens pas belle »), nous avons écrit l’adaptation cinématographique du film qu’il va réaliser, et nous en sommes à la phase du casting. Je crois qu’il est clair que tout se mélange effectivement entre ciné et BD…

     

    IC : Merci Thierry d’avoir accepté de répondre à nos questions.

    Thierry Terrasson : Mais c’est moi. Merci à vous !

     

     

    Instant-City-Jim-012

     

     

    Et en cadeau, le court-métrage de Thierry Terrasson : « Vous êtes très jolie Mademoiselle » :

     

    [vimeo id= »83614567″ align= »center » mode= »normal » autoplay= »no » maxwidth= »900″]

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Liens externes » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Son Blog

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Sa Page Facebook

     

     

     

  • Interview Exclusive | Jim, de la bande dessinée au cinéma

    Interview Exclusive | Jim, de la bande dessinée au cinéma

     

    Jim (de son vrai nom Thierry Terrasson) est un auteur de BD qu’on n’a plus besoin de présenter : 110 albums, 1,3 million d’exemplaires vendus, du théâtre, des courts-métrages, et un rêve : le cinéma. Parce que Jim nous fait rêver, nous avons voulu à notre tour nous intéresser à ses rêves.

     

    IC : Vous avez déclaré « rêver de cinéma depuis vos 18 ans » (interview « My little discoveries » – Mars 2013). Qu’est-ce qui vous attire dans le 7ème Art que vous ne retrouvez pas dans le 9ème ?

    Thierry Terrasson : Le monde de la BD et celui du cinéma sont différents : faire de la BD reste un travail solitaire. Parfois on est deux, trois, mais on jouit d’une liberté totale de création. Je peux imaginer un personnage, dire une phrase d’une certaine façon, le dessiner comme j’en ai envie, découper le texte comme il me semble et raconter ce qui me chante. Je peux jouer avec tous les éléments mis à ma disposition pour évoquer des choses, les faire ressentir ou créer un mouvement, et cela juste d’un coup de crayon. Ce sont les possibilités infinies que nous offre la BD.

    L’une des qualités du cinéma qui m’attire, c’est le travail en équipe. On se retrouve soudain plusieurs à projeter notre ressenti, nos idées sur le film. Chacun, selon sa compétence (réalisateur, metteur en scène, scénariste, responsable photo, acteurs…). Un acteur apportera au texte de la finesse, une certaine intensité, un sous-texte, autant de choses qui vont agrémenter la simple idée de départ. De la même façon, le lieu influe sur les idées qu’on avait, c’est pour cette raison que j’essaie de ne pas trop dessiner de story-boards. Ce sont souvent les plans les moins intéressants car les plus calculés. Je préfère les surprises, les accidents qui  donnent la sensation d’attraper la vie au vol.

     

    IC : Vous avez participé aux scénarios de sept courts-métrages : Comment se sont créées à chaque fois les rencontres et les opportunités ?

    Thierry Terrasson : Parfois, des gens sonnent à ma porte, mais la plupart du temps, c’est une envie très instinctive au démarrage, et je cherche alors qui le projet peut intéresser. Souvent en allant chercher dans mes connaissances, parfois en découvrant de nouvelles personnes. On parle là d’une majorité de courts métrages joyeusement amateurs. Seuls les tout derniers prennent un tournant plus professionnel. Je ne fais plus tout, tout seul, ou avec quelques copains. Mon dernier court-métrage, « Vous êtes très jolie, mademoiselle » a été réalisé en faisant appel à des professionnels. Ce n’est plus moi qui tiens la caméra, ce qui est une étape décisive : il s’agit de passer le relais à quelqu’un de calé en photo, en cadrage, qui saura faire bien mieux que ce qu’on ferait, et lui faire confiance ! Chacun son métier.

     

    IC : En 1986, vous réalisiez votre premier court métrage «Chipie St Jill». Quel était le pitch ? Quels étaient vos moyens ? 

    Thierry Terrasson : Les moyens ? Illimités ! (rires) En fait, «  Chipie St Jill » est mon tout premier court métrage, co-réalisé avec mon frère Philippe : il avait 17 ans et moi 19, on parle donc ici d’une histoire de gamins ! Le Crédit Agricole nous avait soutenus dans notre projet en nous faisant un don de 13 000 francs (2 000 euros). Le court parlait d’admiration, de la manière qu’a chacun d’admirer quelqu’un d’autre. On y sentait à plein nez les influences de « 37°2 le matin » et de « La lune dans le caniveau », deux film de Jean-Jacques Beineix. Nos moyens étaient très limités. Comme nous étions inscrits à un club photo et vidéo, un professionnel rencontré là-bas nous avait gracieusement prêté sa caméra et nous avons tourné en 16mm pendant les six mois qu’a duré le tournage. On a très vite réalisé qu’on pouvait faire des miracles à notre petit niveau. Je me souviens d’une anecdote : la scène se déroule sur un quai où sont amarrés des paquebots, dans le port de La Rochelle. Une DS devait être déchargée d’un des paquebots. Facile à écrire, ça prend deux minutes sur un coin de table, mais à tourner ? En discutant avec des hommes sur le chantier naval, contre un petit billet, ils ont accepté de monter et descendre le véhicule pendant une demie- heure, de quoi tourner nos plans. Ça parait tout bête, mais à l’âge qu’on avait, c’était un vrai moment magique pour nous. Pour finir, le court-métrage a fait le tour de quelques festivals et a eu le premier prix au festival du Futuroscope. C’était notre première projection publique, autant dire un régal !

     

    « Si je devais donner un conseil à tous ceux qui veulent démarrer, ce serait celui-là : ne restez pas dans votre coin. Il existe de nombreux clubs vidéos qui permettent de projeter sur écran ce que vous faites. C’est plus intéressant que de poster une vidéo sur U Tube, en tout cas, c’est complémentaire. La réaction du public dans une salle permet de voir très vite si ce que l’on a tourné fonctionne ou pas… et de se remettre en question. »

     

    IC : Votre frère en était co-réalisateur et acteur. La passion du cinéma, une histoire de famille ?

    Thierry Terrasson : Philippe a bifurqué vers l’architecture de son côté. Mais oui, au départ, c’était une vraie passion commune. On a grandi côte à côte à discuter des mêmes films. On venait d’une petite ville de province, c’était sans doute ça ou mourir d’ennui…

    Pour ma part, j’ai toujours adoré raconter des histoires, que ce soit à travers l’écriture, la bande dessinée ou la prise de vue réelle. Ce qui me passionne, c’est de prendre un bout d’histoire et de la faire évoluer en y ajoutant un drame, une rencontre, une situation un peu dingue… Ce qui m’intéresse, c’est de trouver des ponts entre tout ça. Prendre ce que la vie nous offre de plus piquant et de meilleur pour essayer d’en faire quelque chose. J’aime faire vivre des tas de choses à mes personnages, les surprendre, les secouer… Je suppose que c’est ma drogue !

     

    IC : Hubert Touzot est un acteur récurrent de vos courts-métrages. Pouvez-vous nous parler un peu de lui ?

    Thierry Terrasson : Hubert Touzot est un photographe qui a un vrai talent et mérite que l’on découvre son travail. Je lui rends hommage dans l’un de mes prochains albums « De beaux moments ». C’est aussi un super ami, la personne la plus drôle que je connaisse. Il a un cerveau connecté je ne sais où, ce qui lui permet de constamment partir en vrille sur n’importe quel sujet. Il a fait un peu de scène à une époque… Il me conseille, je le conseille. Nous avons même fait un livre ensemble : « T’chat ». Nous nous faisions passer pour une fille et faisions tourner en bourrique des hommes avides de sexe sur les premiers réseaux sociaux. On en pleurait de rire ! L’éditeur un peu moins quand il a vu les chiffres de vente désastreux (rires). C’était il y a cinq ans environ. Hubert l’avait signé U’br. Il écrit toujours, le bougre. Mais son vrai virage est la photographie.

     

    IC : En 2001, vous recevez un 1er prix avec « Le Jeune » et en 2005 votre court-métrage « George » reçoit trois prix, se vend à trois chaînes de télévision. Les choses se sont accélérées  durant ces quatre années ?

    Thierry Terrasson : Disons que ça a marqué une petite étape : je me suis dit qu’il était peut-être temps, maintenant, de tenter l’aventure du long. Ecrire, trouver le bon sujet, convaincre des producteurs, tout cela est indispensable pour franchir cette étape. C’est aussi pour ça que mes projets BD ont évolué, et ressemblent de plus en plus à des films sur le papier. Je suis de plus en plus régulièrement à Paris et j’apprends pas mal de la relation avec les producteurs.

     

     

    Jim 003

     

     

    « Les projets BD et ciné se mêlent donc de plus en plus. Maintenant quand j’écris, je ne sais pas toujours si je l’imagine d’abord en film ou en livre. »

     

    IC : De quoi ont été faites ces  dix dernières années depuis 2005 ?

    Thierry Terrasson : J’ai écrit, imaginé des personnages, des situations. J’ai fait des lectures avec des acteurs, j’ai rencontré des réalisateurs et des producteurs. J’ai beaucoup travaillé à comprendre le fonctionnement du milieu grâce aux rencontres : il s’agit là d’un travail sous-terrain pour parvenir à cerner le métier de scénariste de cinéma, ce qui n’est pas du tout la même approche que scénariste de BD. D’un côté c’est une industrie, de l’autre encore un artisanat.

     

    IC : Quel est votre technique pour écrire ?

    Thierry Terrasson : Au départ, je notais toutes mes idées dans des carnets, des feuilles volantes… Aujourd’hui je les intègre directement dans mon smartphone. Je prends ensuite du fil et une aiguille et j’essaie de coudre les idées ensemble. C’est, de l’avis de spécialistes bien informés, une très mauvaise méthode, car j’essaie d’intégrer la structure après coup. Ils ont sans doute raison mais c’est la méthode que je préfère. J’écris le weekend, la semaine, chez moi vers Montpellier, ou dans le train, ou chez belle-maman, un peu n’importe où. Chez moi, je suis infichu d’écrire dans mon atelier (consacré au dessin), j’ai une pièce dans laquelle j’aime écrire. Avoir un lieu ainsi dédié à l’écriture nous met en condition et donne un cadre, un cérémonial qui met le cerveau en position « écriture ». Même si, en vérité, j’écris vraiment n’importe où. Et je dois bien avouer que la plupart des nouveaux projets naissent en vacances, ou en trajet. Comme quoi, il n’y a pas de secret : il faut agiter son cerveau pour en sortir quelque chose !

     

    IC : de l’écriture à la réalisation, quelles sont les étapes à franchir ?

    Thierry Terrasson : Vous voyez ces militaires en camp d’entraînement, qui avancent à plat ventre dans la boue sous des barbelés ? Ecrire un film, ça m’évoque un peu ça (rires).

    Je n’ai aucun réseau et je sors de nulle part.

     

    « Ma notoriété entre peu en ligne de compte : parfois, quelqu’un me connaît et accepte donc de lire mon travail plus facilement. Mais j’ai forcément tout à prouver chaque fois, ce qui est le jeu. »

     

    Ecrire un scénario de BD a au final si peu à voir avec écrire un scénario de long métrage. Je travaille de plus en plus avec des producteurs, mais les décisions ultimes appartiennent aux distributeurs et aux chaînes de télévision. Il suffit de trouver un éditeur pour qu’une bande dessinée existe. Au cinéma, le producteur n’investit plus d’argent, il va démarcher des investisseurs : les chaînes de télévision, les distributeurs, les aides diverses… Pour les convaincre, le producteur essaie d’avoir un maximum d’atouts en main : des acteurs, un scénario, son passif… Il est bien loin le temps où les producteurs investissaient sur leurs fonds propres, sur leur seule foi en un projet…

     

    IC : Entre 2012 et 2015, vous avez connu plusieurs très grands succès d’édition avec « Une nuit à Rome » Tomes 1 & 2, avec « Héléna » Tomes 1 & 2, avec « Un petit livre oublié sur un banc » Tomes 1 & 2.

    Thierry Terrasson : Même si je m’essaie au cinéma, je resterai toujours attaché à la liberté que m’offre la BD. C’est un vrai bonheur de passer de l’un à l’autre. En ce moment, je me régale en BD de cette extrême liberté. Je dois bien avouer que je savoure ce bonheur là tous les jours !

     

    IC : Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?

    Thierry Terrasson : Je travaille sur plusieurs projets en écriture, dont un en co-réalisation avec Stéphan Kot, un vieux complice talentueux. Et je peaufine des scénarios de comédie.

    En septembre 2015 démarre le tournage de l’adaptation de ma BD «L’invitation», par Michel Cohen avec Nicolas Bedos. Le sentiment que quelque chose se met en route.

    Et en BD, j’achève un album dans la lignée de « Une Nuit à Rome », qui s’appelle : « De beaux moments », aux éditions Grand Angle, et va sortir fin août « Où sont passés les grands jours, Tome 2 » avec Alex Tefengki au dessin.

    Et avec Lounis Chabane (Héléna), nous sommes sur deux tomes d’une BD qui va s’appeler « l’Erection ». Tout un programme !

     

    IC : Merci Thierry d’avoir accepté de répondre à nos questions.

    Thierry Terrasson : Mais c’est moi. Merci à vous !

     

     

    Thierry Terrasson 004

     

     

    Et en cadeau, le court-métrage de Thierry Terrasson : « Vous êtes très jolie Mademoiselle » :

     

    [vimeo id= »83614567″ align= »center » mode= »normal » autoplay= »no » maxwidth= »900″]

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Liens externes » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Son Blog

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Sa Page Facebook

     

     

  • Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

    Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

    Hubert Touzot aime raconter des histoires. A 46 ans, il a déjà un parcours bien rempli : il y a eu la bande dessinée, l’écriture de scénarii, de poésies et même la scène. Aujourd’hui, c’est avec la lumière qu’il souhaite écrire la suite de l’aventure en se consacrant à la photographie.

     

    Instant City a souhaité lui poser quelques questions afin de mieux connaître l’artiste et son travail.

    Sur sa page facebook, Hubert Touzot se présente comme un « Photographe dévoreur ». 

     

    IC : Pourquoi « Dévoreur » ?

    C’était à la base le nom que j’avais trouvé pour une série de photos à la thématique évoquant l’Afrique mystérieuse, ses esprits ancestraux et la magie des corps. « Dévoreur » m’était venu un peu comme ça. Plus tard, c’est en songeant à la manière dont j’allais signer mes photos que j’ai pensé à mettre un pseudo à l’évocation intrigante plutôt que de mettre mon vrai nom dont personne ne se souviendrait. Il m’a semblé que ce pseudo étrange serait plus efficace pour s’en rappeler. J’aime bien aussi l’analogie entre l’univers de mes photos assez « corsetées » et ce qu’inspire le mot « Dévoreur » où l’on pense à un monstre, un croque-mitaine, quelque chose qui vient vous faire peur la nuit.

    La photographie est vite devenue pour Hubert Touzot, alias « Dévoreur », une passion. « C’était devenu pour moi une évidence ». Mais ce qui l’intéresse, c’est davantage les possibilités qu’elle offre en tant qu’art qu’en tant que technique. Elle est un moyen d’expression et de partage d’idées. « Ce qui m’intéresse, c’est de mettre en forme ce qui me trotte dans la tête ».

     

    IC : Qu’est-ce pour vous, « une excellente photo » ?  

    Comme une chanson, une pièce musicale, un film, un poème, une peinture, c’est l’émotion qui s’en dégage. Quelque chose en vous qui remonte du passé ou d’ailleurs, quelque chose qui va vous envelopper, vous étreindre et ne plus vous lâcher, vous obséder, quelque chose que vous avez l’impression au fond de connaître.

    Trois photographes ont marqué son parcours : Joël-Peter Witkin, Robert Mapplethorpe et Sebastião Salgado « Parce qu’ils essaient de rendre sacré ce qu’ils photographient » : la mort ou la guerre, la souffrance, la douleur, la jouissance, la beauté sombre du monde.

     

    IC : Quelle est votre quête en tant que photographe ? 

    Je recherche la beauté en n’ayant jamais peur de pousser parfois les choses jusqu’au seuil du ridicule ou du pompeux. Essayer de toucher la pureté dans un geste, un regard, cela peut parfois prêter à sourire, surtout aujourd’hui.

     

    IC : Quelle est votre photographie fétiche ? (parmi les vôtres)

    C’est peut être celle de la série « Baobab ». Ce n’est d’ailleurs presque plus une photo tellement je l’ai saturée. L’ensemble est pratiquement noir avec un baobab au centre qui se découpe sur ce qui semble être un incendie tout autour et un éclair rougeoyant à droite comme sorti du sol.

     

    IC : Donnez-vous des noms à vos albums (vos séries), des titres à vos photos ?

    Pour les séries oui, toujours des noms comme les histoires, les films, les chansons… Parce que lorsque je me lance dans une nouvelle direction, il y a une thématique. C’est toujours un projet. Les choses se font naturellement sans se forcer. Une histoire va surgir d’après une idée. Il va y avoir un fil conducteur. Je ne fais jamais une photo isolée. D’autres suivront toujours.

    Plusieurs séries sont à découvrir sur sa page facebook. Parfois il s’agit de commandes comme l’album « Haute Couture », réalisé pour un ami couturier Benois Pons ou  les séries « Bassirou’s Tricks »  et « Sa Majesté », qui sont des books pour des mannequins. Parfois il s’agit d’une balade champêtre : « Je pars de la ville monochrome pour m’abandonner dans une nature élégiaque. Cette nature où lorsque l’on prend le temps de bien regarder, on peut peut-être croiser un faune ou une licorne ». Certains albums sont plus politiques, comme « Tourisme » et « Tourisme 2 », qui évoquent l’immigration et les pays du sud, ou la série « Noé Noé » qui délivre un message écologique à travers des animaux figés, non pas par le photographe, mais par le taxidermiste. Il y est également question d’usines chimiques et autres ensembles industriels.

    Dans l’album « Giallo », qui signifie « jaune » en italien, Hubert Touzot fait référence au style littéraire devenu également un courant cinématographique transalpin (Dario Argento) très à la mode dans les années 60 et 70, aussi surnommé « L’horreur à l’italienne ». Il s’agissait de mettre en scène l’assassinat tout à la fois sadique et sophistiqué de magnifiques jeunes femmes dans des appartements luxueux. « J’ai composé une sorte de roman-photo hommage. Cette série peut d’ailleurs être vue en clip sur Youtube ».

     

    IC : Présentez-nous l’album « Belial » :

    J’ai souhaité utiliser des vitraux d’église en occultant leur dimension première et pourquoi ils ont été réalisés. J’ai souhaité les assimiler à de pures représentations esthétiques, graphiques, grâce à l’association de photos de portraits qui n’ont strictement rien a voir avec le sacré. Désacraliser les idoles et sacraliser le commun.

    Le thème prédominant parmi tous ces albums reste ce qu’Hubert Touzot nomme « la négritude ». Celle-ci tient une place prédominante dans sa vie affective et artistique.

     

    IC : Présentez-nous l’album « Noir de Lumière » :

    Noir de Lumière… Tout est dit dans le titre. La négritude à travers des siècles d’histoire avec tous les clichés ainsi véhiculés. La confrontation entre l’homme blanc dit occidental, sa culture, sa civilisation et le plus vieux continent du monde, le berceau de l’humanité. Toujours avec cette passerelle très mince entre la poésie et l’image. Comme avec des vers ou des métaphores, je suis adepte des ruptures, des cassures, des changements de tons brusques et bien-sûr des oxymores. photos, poésie, même combat. L’homme noir est pour moi un sujet inépuisable. C’est un peu une obsession, une sorte de malédiction qui revient sans cesse car il y a quelque chose en moi que je trimballe depuis des années, comme une sorte de résonance qui viendrait de vies antérieures si l’on se raccrochait aux lois karmiques.

     

    IC : Est-ce vous qui choisissez la mise en scène de vos photos (costumes, maquillage) ?

    En effet, j’aime tout contrôler, du maquillage à la coiffure, les décors, les costumes, tout. Pour certaines séries qui sont des commandes, je me fais aider par un maquilleur professionnel et j’ai la chance d’avoir un ami couturier-styliste, Benois Pons, qui peut m’aider le cas échéant pour l’habillage, me fournir des vêtements et aussi me donner des idées lors du shooting. C’est assez difficile d’arriver à se concentrer sur le sujet, la photo, la lumière et en même temps sur le maquillage, la coiffure, le décor, les accessoires. C’est pour cela qu’une séance photo réussie, c’est avant tout en amont de la préparation. Tout doit être noté, pensé afin que le jour J, la séance ne soit plus que pur amusement et joie.

     

    IC : Plutôt couleur que Noir et Blanc, semble-t-il. La couleur apporte un élément visuel supplémentaire ? (série : un soleil jaune, une veste jaune)

    Cela dépend à quel temps vous souhaitez conjuguer votre photo. Pour ma part le N&B renvoie au passé et à la nostalgie. Le N&B est comme un filtre qui va d’abord flatter ce que vous avez photographié, le figer dans une petite solennité. Ensuite la démarche artistique, le processus créatif, seraient complètement différents qu’avec la couleur.

    Je préfère de toute façon la couleur pour son aspect graphique et frontal. Je fonctionne beaucoup plus comme un peintre qu’un réel photographe, avec le principe des aplats de couleur et en me moquant de la profondeur de champ, du relief, des ombres, etc, tout ce dont on doit tenir compte en principe dans la photo et qui plus est pour le N&B. J’aime beaucoup le principe de l’iconographie.

    Etant autodidacte, j’apprends au fur et à mesure. Ce sont souvent des peintres, d’ailleurs, qui m’ont influencé, plus que des photographes, de par la façon dont je compose mes cadres et les zones de couleurs. Klimt et Bacon pour ne pas les citer sont toujours là quelque part.

     

    IC : J’ai remarqué que vous aimiez bien mettre deux images en parallèle.

    Oui, les diptyques côte à côte ou haut et bas à la verticale et plus récemment depuis un an avec deux images superposées. J’utilise tout ce qu’il m’est possible de faire pour arriver à ce que j’ai dans la tête. Le fait également de travailler à l’intuition, sans argent ni moyens confortables, m’aide sans doute à toujours pousser plus loin les expériences. Parfois c’est loupé, parfois c’est encourageant pour la suite.

     

    Pour la rentrée, Hubert Touzot planchera sur une nouvelle série de photographies sur le thème « Le revival esthétique des années 80 ». A suivre donc…

     

     

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Page Facebook

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Chaîne Youtube