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  • Michael Jackson, Retour à Neverland

     

     

    Nous avons lu beaucoup de papiers, vu d’innombrables images, entendu de terribles confessions, semblant vouloir étayer toujours un peu plus les théories sur la pédophilie présumée de Michael Jackson. D’abord en 1993 puis en 2005…

     

    Et puis ce documentaire sorti cette année, « Leaving Neverland », diffusé dans un premier temps sur HBO aux Etats-Unis et plus récemment chez nous sur M6, devait être un électrochoc pour enfin nous faire comprendre et admettre qui était vraiment Michael Jackson et ce qui se cachait de si abject derrière ce masque doux et souriant…

    Nul besoin, donc, de revenir en détail sur les agissements supposés du Roi de la Pop et sur ce qu’il aurait fait endurer à ses victimes. Rien ne nous est d’ailleurs épargné dans le film de Dan Reed, pour appuyer là où ça fait mal et ne laisser aucun doute sur sa culpabilité, mais il faut tout de même quatre heures au réalisateur pour marteler « cette vérité » et pour qu’elle finisse par rentrer de force dans les esprits. Lavage de cerveaux ?

    Ce film entièrement à charge a cependant pleinement rempli sa fonction et dans l’attente d’un éventuel nouveau procès, en tout cas déjà gagné son pari. A savoir dégoûter, révulser et choquer. A tel point que des stations de radio, voire même des pays entiers, ont préféré boycotter l’œuvre du chanteur.

     

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    Hystérie collective ? Ça y ressemble, en tout cas… Nous sommes habitués maintenant à ce genre de réactions de la part de foules à la versatilité terrifiante, dont le choix s’arrête sur un individu jadis encore sanctifié, pour le voir du jour au lendemain dégringoler de son piédestal, être inculpé puis condamné et finir sacrifié sur l’autel de la bonne conscience, afin d’espérer peut-être en échange une meilleure récolte, des pommiers en fleurs ou juste… quelques dollars. Mais dormez tranquilles, braves gens…

    Car ce qui se joue ici, c’est tenter ainsi, d’un simple claquement de doigt, d’effacer des cerveaux et de la surface de la terre quarante ans de chansons et de tubes ; c’est faire en sorte de gommer de la mémoire collective celui qui nous fit dresser les poils le fameux soir des Grammys Awards en 1984, lorsqu’il fit pour la première fois une démonstration du fameux Moonwalk sur son hit planétaire « Billie Jean »… La ficelle est un peu grosse, non ?

     

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    Mais il semblerait bien que cette fois, l’entreprise générale de démolition des icônes, en l’espèce du chanteur originaire de la petite ville de Gary dans l’Indiana, fasse piteusement « Sploutch »… Et ce révisionnisme n’a d’ailleurs pas l’air de vouloir vraiment prendre en France.

    A peine quelques semaines après la diffusion de « Leaving Neverland » que déjà l’édifice se fissure. Dan Reed admet finalement que l’un des deux intervenants aurait menti dans ses allégations. Dates, lieux et événements ne coïncideraient pas. La malveillance et l’appât du gain sont hélas bien meilleurs conseillers que la vérité et l’honnêteté.

    Michael Jackson, quant à lui, est sans doute mort deux fois. Il avait déjà un genou à terre en 1993, lorsque les parents de l’un de ses protégés l’avait accusé. Le procès en 2005, dont il sortira pourtant « blanchi », aura malgré tout achevé de le détruire de l’intérieur. Et plus rien ne sera jamais comme avant… Planera ensuite continuellement une brise de suspicion au-dessus de sa tête et les regards ne seront plus les mêmes.

    Mais alors, où sont donc les films, les dvd, les documents, les photos, toutes ces preuves qui attesteraient que l’ancien chanteur de la Motown avait bel et bien le visage de l’ogre qu’on lui prête ? Michael Jackson, ce Peter Pan, cet E.T parvenu à s’extraire de la fange et de la crasse originelle, aura fini par être rattrapé, englouti et digéré. Décidément, les gens hors norme, qui ne rentrent pas dans les cases, ont la vie dure ici bas.

    Sa place n’était pas faite pour vivre parmi nous. Reste à lui souhaiter un bon retour à Neverland…

     

     

     

  • Silence Plateau | Belles Familles

     

     

    Si l’on fait abstraction de ce titre un peu tarte digne d’un téléfilm diffusé sur TF1 et de l’affiche qui va avec, « Belles Familles », le dernier film de Jean-Paul Rappeneau, nous renvoie pourtant au bon souvenir d’un cinéma français de belle facture et délicieusement populaire, dans le sens le plus noble du terme.

     

    Enfant légitime de Lubitsch, la musicalité dans les films de l’auteur de « La Vie De Château » ne se borne pas seulement à faire danser les acteurs comme des marionnettes sans vie tout en récitant du papier à musique. Non, cette marque de fabrique chez le cinéaste désormais octogénaire n’en finit pas de tracer des ronds et des spirales entre les comédiens embarqués, qui valsent, qui tourbillonnent entre légèreté, hésitation, gravité, coup de sang et bienveillance.

    Avec « Belles Familles », Jean-Paul Rappeneau nous offre donc un ballet où acteurs de l’ancienne et de la nouvelle génération viennent chacun leur tour nous proposer des pas de deux, en couple, en binôme, des retrouvailles, des mensonges, des secrets… Ce Feydeau en relief nous rejoue l’éternelle histoire des coeurs et des bras qui s’enlacent et se défont, mais avec de la gourmandise comme devant un buffet, où ici Viard, Dussolier, Garcia, Amalric… nous régalent. On y retrouve également des accents Sautériens lorsque, au détour d’une scène, on identifie Gilles Lelouch enfin devenu bon et touchant, et qui ne serait-ce que l’espace de quelques secondes nous rappelle le Montand de « César et Rosalie », brusquant une Marine Vacth, qui se révélera peut-être bientôt comme la nouvelle Romy Schneider.

    Un film hommage, donc, pétri de nostalgie et de mélancolie, et un Rappeneau qui réussit avec cette belle famille à justement réunir toutes ces familles éparses du cinéma français.

     

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    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Dévoreur Hubertouzot

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

     

  • Alien ou la Saga tuée dans l’œuf…

     

     

    C’est en 1979 que surgit dans les salles sombres des cinémas du monde entier « Alien, le Huitième Passager ». L’affiche du film montre un gros œuf qui se fendille par le dessous et d’où émerge une lumière verdâtre. On se souviendra aussi d’une phrase laconique qui accompagnait l’événement : « dans l’espace, personne ne vous entend crier ».

     

    Par son approche inédite du film d’horreur, qui mélange thriller et science fiction, « Home Invasion » et Lovecraft, « Alien, le Huitième Passager » de Ridley Scott va surprendre puis terroriser des millions de spectateurs. Ce public fraîchement habitué à l’univers de « Star Wars » pensait naïvement que dans l’espace, c’était forcément plus cool… Sur la terre ferme, on avait certes déjà eu droit à « Massacre à la Tronçonneuse » puis à « L’Exorciste » qui campaient sacrément le décor ; dans l’eau, aux « Dents De La Mer » et dans la forêt, à « Délivrance ». Des films qui avaient imposé leurs initiales au genre et qui restent gravés à tout jamais dans l’inconscient collectif… En revanche, dans l’espace, on avait plutôt affaire aux bases et aux vaisseaux spatiaux, aux pistolasers ou aux bons sentiments.

    Mais ça, c’était avant…

    La lumière s’éteint. Le film commence. La musique de Jerry Goldsmith propose, sur la base de quelques notes de cuivres, un thème aussi doux qu’inquiétant pour accompagner les premières images de l’espace infini, des étoiles, des planètes, puis des bâtonnets se regroupent au centre de l’écran pour finir par former le mot « Alien »…

     

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    Le vaisseau cargo Nostromo rentre sur terre. A son bord, l’équipage se trouve en cryo-sommeil. Alors qu’il passe non loin d’une planète inconnue, les ordinateurs captent un signal de détresse. Tout le monde est alors réveillé et décide d’organiser une mission de sauvetage. Ceux qui se rendent sur le lieu découvrent l’épave d’un gigantesque vaisseau spatial à la forme étrange. Après une petite visite à l’intérieur, l’un des protagonistes, plus curieux que les autres, tombe sur de gros œufs de Pâques.

    Pourtant, ce qui en sortira ensuite ne ressemble pas vraiment à un lapin en chocolat mais plutôt à une grosse bestiole repoussante, croisement improbable entre une araignée et une paire de testicules. Le gloumoute qui surgit telle une mauvaise blague va se ficher sur le visage du malheureux membre d’équipage qui en prenait soin, après avoir préalablement brûlé la visière du casque de sa combinaison spatiale. Dans la salle de cinéma, tout le monde est calmé…

    Le public va par la suite assister, médusé, à une autre scène qui restera probablement dans les annales comme l’une des visions les plus traumatiques du cinéma. Le truc en forme de main posé sur le visage de sa victime a visiblement eu le temps de pondre quelque chose dans son corps, mais personne ne s’en doute encore. Alors que l’homme placé en quarantaine, après avoir sombré dans le coma, reprend conscience sans la chose sur son visage, qui est retrouvé morte et toute desséchée, on est rassuré et déjà prêt à replonger dans un sommeil profond afin de continuer son voyage.

    Lors d’un dernier déjeuner où tout l’équipage est présent, avant de retourner dormir, tout avait pourtant bien commencé mais la digestion de la salade de pomme de terre va s’avérer plus difficile que prévue… La salle, cette fois-ci sidérée, va assister à l’éclatement de l’intérieur du ventre du pauvre type, qui aurait mieux fait ce jour-là de rester chez lui. Une nouvelle créature, à l’apparence cette fois d’un cornichon à mâchoires, lui sort du bide, salut tout le monde puis part à toute vitesse se cacher dans les recoins sombres du vaisseau spatial.

     

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    Avec ces deux scènes électrochocs, « Alien, le Huitième Passager » rentre instantanément dans le registre des standards de l’horreur, comme ses glorieux aînés cités précédemment. On avait peur sur terre, dans les campagnes, dans les villes, dans les océans et on aura désormais peur aussi dans l’espace. La suite de ce film est une course poursuite dans les méandres du vaisseau, au cours de laquelle on assiste, impuissant, à l’élimination méthodique de tout l’équipage par le fameux cornichon à mâchoires qui entre-temps sera devenu assez balèze…

    Pour la petite histoire cinéphilique, au risque de paraître tatillon, il faut savoir que les deux scénaristes du film, Dan O’Bannon et Ronald Shusett, avaient quelque peu repompé l’intrigue d’un film de Mario Bava datant de 1965, « La Planète Des Vampires », dans lequel il était également question d’un vaisseau spatial qui recevait un S.O.S. provenant d’une planète inconnue. L’équipage qui s’était rendu sur les lieux s’apercevait trop tard qu’il ne s’agissait pas d’un appel au secours mais plutôt d’une mise en garde. Voilà pour la petite séquence sodomie de mouche…

    Mais reprenons…

     

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    « Alien » premier du nom va donc propulser le jeune réalisateur britannique Ridley Scott en orbite. Avec ce seul succès à son actif, ce réalisateur venu de la publicité, qui n’avait produit auparavant qu’un seul film, « Les Duellistes », va désormais avoir toute la latitude requise à entreprendre ce qu’il souhaite. Il se lance ainsi dans son projet suivant, tiré d’une nouvelle de Philip K.Dick intitulée « Les Androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? », et rebaptisé pour l’occasion « Blade Runner ».

    Aujourd’hui encore, « Alien, le Huitième Passager » est l’exemple parfait de ce que la conjonction entre plusieurs talents peut engendrer de plus créatif, depuis la direction artistique jusqu’à la réalisation, en passant par la musique, les visuels et bien-sûr le casting. La jeune actrice Sigourney Weaver qui campe le personnage du lieutenant Ripley va d’ailleurs devenir une marque de fabrique du film hollywoodien. La femme forte et intelligente, celle qui aura toujours le dernier mot…

    Mais la véritable vedette du premier volet de la saga « Alien » est bien évidemment le monstre lui-même. Dans un film qui se voulait hyper-réaliste, il était inenvisageable d’y exposer une créature issue d’un bestiaire déjà vu mille fois. Il fallait donc trouver un nouveau concept de xénomorphe qui aurait sa propre logique, un passif, une mythologie et qui soit plausible dans la réalité.

    C’est en Suisse que fût finalement déniché celui qui donnera naissance à la créature légendaire et pas très sympa : L.G. Giguer, un artiste peintre et sculpteur, aux visions cauchemardesques à base d’hommes et de femmes bio-mécaniques, dans lesquelles s’entrelacent et se fondent organismes, phallus, vagins, totems et diverses ornementations ; de parfaites illustrations pour agrémenter un univers Lovecraftien à souhait… Il crée ainsi pour les besoins du film le monstre insectoïde et bio-mécanique parfait. Une créature aussi élégante que répugnante…

    Malgré l’énorme profit que génère le premier opus de la future saga « Alien », La Fox ne va malheureusement pas pouvoir prévoir une suite de sitôt, d’abord parce que Ridley Scott ne souhaite pas revenir dessus. Il a son autre projet qui lui tient à cœur. Même si le potentiel est pourtant énorme, Il faudra attendre sept ans pour que sorte au cinéma une suite intitulée sobrement « Aliens ».

    C’est donc en 1986, sous l’impulsion de James Cameron qui vient de casser la baraque avec son « Terminator » que cette suite voit enfin le jour. Le futur réalisateur du succès hors norme « Avatar » ne prend pas les choses à la légère. Après le thriller spatial claustrophobe qu’avait réalisé son prédécesseur, Cameron voit les choses en bien plus grand. Car quitte à revenir sur cette histoire de monstre dans l’espace, autant y aller à fond…

    Le « S » rajouté au titre donne d’ailleurs le ton. Il n’y a plus un mais désormais plusieurs centaines de xénomorphes à combattre, et quoi de mieux pour tenter d’anéantir ces cancrelats géants que de leur envoyer les Marines. Mais James Cameron n’est pas non plus un bourrin à la Michael BayTransformers », « Armageddon »), il saura jouer sur différents tableaux et différentes échelles.

    Ripley (Sigourney Weaver) reprend du service et c’est évidemment elle qui aura le dernier mot à la fin. Non mais ! D’une femme forte et courageuse dans le premier opus, elle devient, sous la houlette du nouveau réalisateur, une combattante aussi dangereuse que tout un régiment de militaires endurcis. Cameron va pousser les curseurs très loin et offre un film furieusement guerrier. Il enchaîne les scènes d’anthologie, avec un duel final mano a mano entre Ripley et la reine des Aliens absolument homérique.

    Si la version de James Cameron perd certes en mystère, nuance et stylisation, elle y gagne en revanche nettement sur l’aspect spectacle à grande échelle et générosité en scènes d’action en tous genres. « Aliens » sera de nouveau un beau succès, même si les critiques ne goûtent pas totalement sa tonalité jugée trop belliqueuse. Et beaucoup lui préféreront finalement les atours méta de son illustre prédécesseur.

    Orgasmique…

     

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    Il faudra encore attendre six ans pour que la Fox trouve le nouveau réalisateur capable de continuer à entretenir le mythe « Alien ». C’est au tour du jeune David Fincher, issu du clip et de la publicité, de s’essayer à renouveler la franchise. L’idée est maintenant évidente… Il s’agit de changer de ton à chaque nouvel opus, avec comme seul fil rouge, le ou les xénomorphes et le personnage de Ripley.

    Pour ce troisième épisode tout aussi sobrement intitulé « Alien 3 », l’expérience va virer au cauchemar pour le réalisateur. En effet, Fincher, malgré son peu d’expérience en matière de réalisation, montre une appétence pour les idées originales et visionnaires. Ce qui n’est pas du goût du studio qui l’a engagé et qui voyait en lui seulement un bon faiseur surnommé à Hollywood « Yesman ». David Fincher, quant à lui, a une idée bien précise de la façon dont il compte aborder ce troisième chapitre.

    Après la furie martiale et XXL de James Cameron, le futur réalisateur de « Seven » souhaite aller dans une toute autre direction. Plusieurs versions du scénario vont être d’abord proposées, avec des concepts assez fous tels que cette option dans laquelle l’histoire se déroule sur une planète forestière habitée par des moines dépourvus d’armes et qui devraient combattre les monstres par d’autres moyens. David Fincher verrait en effet assez une rencontre entre Alien et une ambiance moyenâgeuse. Difficile à faire avaler aux executives de la Fox, en tout cas…

    Finalement, alors que le tournage commence sans que le scénario ne soit achevé, Fincher convainc en partie le studio de le laisser tourner ce qu’il a en tête. L’histoire va se situer dans un pénitencier à l’autre bout de la galaxie, dans lequel les anciens prisonniers vivent tels des moines et se servent du lieu comme d’un purgatoire, là même où ils ont trouvé la foi en créant une religion nouvelle issue du christianisme. C’est avec l’arrivée de Ripley dans sa navette, qui se crashe non loin de la communauté, que les ennuis vont commencer. Ayant fait vœu de chasteté, tous ces hommes ne sont pas forcément enclins à accueillir une femme, et encore moins lorsque celle-ci amène avec elle un de ces fameux œufs.

    Le film est aux antipodes tant du premier que du second chapitre de la Saga « Alien ». David Fincher propose une œuvre gothique et austère, mâtinée de références bibliques. En affichant le parti pris de pas faire figurer la moindre arme à feu dans le film, il crée un univers complètement inédit et offre au monstre une nouvelle lecture à la série. Ultime provocation, il tue Ripley qui portait elle aussi un Alien en elle et qui se sacrifie en se jetant dans une cuve de plomb en fusion, dans un final christique du plus bel effet, le tout illustré par le magnifique score d’Elliot Goldenthal.

    Cependant, à sa sortie, « Alien 3 » divise aussi bien le public que la critique. Les plus enthousiastes y voit un superbe objet sombre et fascinant, quand les plus fervents adeptes du premier volet le trouve trop éloigné du concept originel. Ce sera aussi le film de la saga qui marchera le moins bien en salle, car trop particulier, mais qui au fil des années deviendra culte. « Alien 3 » est censé clôre la saga en une trilogie aussi hétérogène que captivante…

     

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    Pourtant, en 1997 sort en salle un nouvel épisode de la Saga, « Alien, La Résurrection »…

    Depuis « Alien, le Huitième Passager », l’actrice Sigourney Weaver a pris beaucoup de poids à Hollywood. Non pas qu’elle ait considérablement grossi en se gavant de pizza et de banana split, mais plutôt qu’elle est devenue absolument incontournable. C’est aujourd’hui elle qui a le pouvoir de choisir les projets dans lesquels elle souhaite s’investir. Et ce sera le cas pour la mise en chantier d’un nouvel « Alien ». N’ayant pas été très convaincue par son sort à la fin d’« Alien 3 », elle décide de remettre le couvert et de faire revenir d’une manière ou d’une autre l’increvable Ripley.

    Co-productrice cette fois-ci, la Danna Barrett de « Ghostbusters » va s’enquérir elle-même du prochain réalisateur. Et son choix se portera sur un Français, Jean-Pierre Jeunet, le co-auteur de « Delicatessen » et de « La Cité des Enfants Perdus ». L’actrice-productrice aime son univers particulier et décalé et pense que cela collera parfaitement à cette renaissance.

    « Alien, La Résurrection », malgré une indéniable bonne volonté et des idées intéressantes, se soldera par un semi-échec au box office. Paradoxalement, le film n’a ni l’ampleur d’« Aliens », ni le côté mystérieux d’« Alien 3 » et comparé à « Alien, le Huitième Passager », ne fait plus peur du tout…

    En tentant d’injecter dans ce 4ème opus de l’humour et de la distanciation, le futur architecte du « Fabuleux Destin d’Amélie Poulain » a réduit à néant toute forme d’intensité et de rythme. Le film relève parfois presque plus du pastiche que d’un simple premier degré. Et si « Alien, La Résurrection » peut toutefois séduire grâce à des trouvailles stylistiques et des idées intéressantes en exploitant la mythologie d’origine, jamais il n’offre le spectacle fort et intense que l’on était en droit d’attendre.

    C’est d’ailleurs l’un des films de la saga qui vieillira le plus mal et le revoir le ferait paraître assez anecdotique comparé à ses ainés.

    Cette tétralogie se clôt donc cette fois-ci bel et bien, sur un film bancal et embarrassant.

     

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    Nous n’allons pas nous étendre sur les deux tentatives avortées que furent « Alien vs Predator » (2004) et « Alien vs Predator: Requiem » (2007) pour des raisons d’éthique personnelle. En effet, ces deux « œuvres palimpsestes » qui, comme leurs titres l’indiquent, voient des Xénomorphes affronter des Predators, n’avaient comme unique but que de faire plaisir à une nouvelle génération plus sevrée aux jeux vidéo qu’au cinéma.

    On a longtemps cru que cette fois-ci le sort en était jeté et que la Fox laisserait tranquille une bonne fois pour toutes le xénomorphe le plus mignon de la galaxie. Pourtant, c’est bien le papa d’Alien en personne qui revient à la charge. Ridley Scott décide de réactiver la franchise, lui qui ne voulait plus en entendre parler, pour des raisons qui auraient curieusement un lien avec le décès de son frère réalisateur, Tony Scott.

    En 2012 sort donc en salle « Prometheus ». Le réalisateur de « Gladiator » va proposer cette fois-ci un prequel à son propre film sorti en 1979.

    A noter qu’à la même époque, le réalisateur sud-africain Neil BlomkampDistrict 9 ») travaille aussi sur un projet « Alien » qui aurait été, s’il avait vu le jour, une suite directe au « Aliens » de James Cameron, avec encore et toujours Sigourney Weaver dans le rôle de Ripley. Un reboot, en quelque sorte, qui aurait ainsi passé à la trappe tant la version de David Ficher que celle de Pierre Jeunet. Le projet était sur le point d’être lancé par la Fox. Des visuels comme le scénario était prêts et le film allait rentrer en pré-production…

    Sauf que ce vieux briscard de Scott coiffe tout le monde au poteau, en faisant valoir son ascendant sur l’œuvre complète, dont il devait toujours avoir les droits, balaie d’un revers de la main tout le travail déjà effectué par Blompkamp et son équipe pour imposer sa propre version. Tout est réuni pour qu’il pose alors sur la table avec autorité cette nouvelle histoire révisionniste-créationniste sur la genèse des xénomorphes et par la même occasion la nôtre aussi.

    Si l’on ne tient pas compte de l’énorme attente générée par ce nouveau volet de la Saga, entretenue de part et d’autre par une pluie de vidéos virales sur internet, de sites en tous genres, de forums et autres bandes annonces plus tapageuses les unes que les autres, il faut aujourd’hui considérer ce volet supplémentaire réalisé par Ridley Scott simplement comme ce qu’il est, au fond, à savoir un film peu cohérent dans l’ensemble de la série et au rendu bien inférieur à la somme de fantasmes et de croyances créés en amont de sa sortie.

    D’ailleurs, cette méthode de communication, cette forme de stratégie publicitaire employée afin de provoquer une attente et susciter une envie, n’est pas dénuée de risque et peut fortement desservir une oeuvre, car elle embarque tous ceux et celles qui attendent le film à l’aune de leur propre psyché. Chacun se construit son propre film, sa propre histoire, avec les fragments et les quelques éléments mis à sa disposition… Forcément, les attentes seront immenses et impossibles à combler.

    Pour « Prometheus », les images ou visuels lâchés au compte-gouttes dans l’année qui précéda sa sortie étaient à chaque fois alléchants. Les infos suggéraient beaucoup de mystère, de trouvailles démentes, le tout assorti d’une intrigue révolutionnaire.

    Ridley Scott est avant tout un créateur de l’image et de la forme. Ce n’est pas le scénario qui chez lui est le plus important, c’est le support qui prédomine. Ses films totems que sont « Alien », « Blade Runner » ou encore « Legend » sont devenus des oeuvres références, surtout pour ce qu’ils véhiculent comme force picturale. L’histoire en soi part d’une idée forte et l’intrigue est à chaque fois simple et directe. C’est pour cela que ces films étaient réussis : ils étaient évidents. Le sens du détail, par lequel chaque objet avait une histoire. Jusqu’aux costumes et décors, pour signifier que le monde qui nous était dépeint était tangible.

    « Prometheus », qui devait d’abord s’intituler « Paradise », se revendiquait comme une sorte de nouveau « 2001, l’Odyssée de l’Espace » ; une nouvelle référence ultime qui viendrait remettre les pendules à l’heure en matière de SF pure et dure. Cette énorme production de 150 millions de dollars, opulente et fière, nous fut livrée sur un char de Ben-Hur, au son des trompettes et hautbois… Pour qu’il n’en sorte finalement qu’un ridicule petit « pouet », tant l’intrigue est indigente…

     

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    Le film tente d’occuper plusieurs registres à la fois, dont celui qui renoue avec le premier « Alien » ; l’horreur viscérale, la peur, l’angoisse. « Prometheus », tel un mille-feuilles indigeste, superpose plusieurs couches de lignes directrices. On essaye de suivre tout cela jusqu’à la fin, sans jamais avoir réellement tout compris et surtout sans pouvoir appréhender où cela va nous mener. Au final, le film s’avère totalement nébuleux. Quant aux nombreux protagonistes, ils sont traités comme des personnages de sitcom, avec un petit détail simpliste pour définir tel ou tel caractère.

    Le scénario est à ce titre l’un des plus mauvais scripts agencés et structurés pour ce genre de productions, qui ait pu être proposé depuis bien longtemps. On a finalement l’impression de voir en « Prometheus » la somme des longs-métrages de SF parmi les plus médiocres de ces dernières années, entre « Supernova », « Event Horizon » ou encore « Sunshine ». Chacun de ces films présentait pourtant des pitchs intéressants empruntés à la littérature SF, avec des auteurs comme Isaac Asimov, Arthur C. Clarke ou Philip K.Dick, mais du fait de nombreux problèmes de production et de respect des délais, ils avaient dû se débarrasser en route de pas mal d’éléments pour en arriver finalement à une seule et unique intrigue convenue, à savoir des courses-poursuites entre héros et méchants dans des couloirs exigus, ou encore cet intenable compte à rebours avant que tout ne nous pète à la gueule…

    « Prometheus » nous promettait des merveilles et nous n’avons eu en retour qu’un début beaucoup trop long et ennuyeux ; « Prometheus » laissait augurer des révélations à nous en laisser bouche bée et nous avons trop vite sombré dans de banales scènes d’horreurs et d’effets spectaculaires obligés. Nous finissons par perdre pied en oubliant les tenants de l’histoire, ses enjeux. Quant au scénario, il est tellement mal fichu dans ses ressorts et l’interaction entre les protagonistes, que l’on a du mal à comprendre le ton réel du film. Le score de Marc Streitenfeld est à ce titre à la hauteur de ce qu’est le film ; une musique fade, sans profondeur, sans caractère ni identité.

    Au final, ce pénultième volet en date de la Saga « Alien » réalisé par Ridley Scott n’est ni viscéral, ni effrayant, ni sujet à réflexion, ni même étonnant. Il recèle néanmoins des images sublimes et des tableaux somptueux, à la manière d’un luxueux artbook à l’éloge de tous ceux qui ont contribué à son élaboration. Mais en tant que film, en tant qu’oeuvre, « Prometheus » est un produit sans âme et sans conviction. Un oeuf sans jaune…

     

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    Et Ridley Scott va encore enfoncer le clou et tenter de boucler la boucle, puisqu’il souhaitait réaliser une trilogie en 1979, avant de ne plus vouloir finalement réaliser une trilogie… Vous me suivez ? Avec « Alien: Covenant » sorti en 2017, il emploie de nouveau les mêmes méthodes de communication que pour « Prometheus », avec fausses publicités sur Youtube, teasers, etc… pour faire exister son film comme un univers plein et cohérent et surtout générer la même attente chez le public.

    Avec cet ultime opus, on ne touche même plus le fond, mais on creuse… En l’espace de deux films, Scott aura réussi à saborder complètement son œuvre matricielle, comme un dernier bras d’honneur à tous les fans de cette mythologie. En voulant apporter des réponses à ce qui faisait justement le mystère et l’étrangeté des épisodes originels, le réalisateur enterre la saga « Alien » une bonne fois pour toutes, pour l’éternité…

    Comme le chante Dominique A : « on ne souhaite pas la mort des gens, ce n’est jamais assez méchant ». Espèrons juste qu’après la disparition de Ridley Scott, un réalisateur plus inspiré et passionné pourra surgir de l’éternité et saura ressusciter notre monstre préféré et son si beau sourire de cornichon géant à double mâchoire…

     

     

     

  • Le Brunch by Hubert

     

     

    Dans ma série de billets d’humeur devenue culte, « Hubert a des p*bip*ains de problèmes dans la vie », je souhaitais aborder aujourd’hui le cas épineux du Brunch.

     

    « – Donc on s’voit dimanche ? 13 h ?

       – Oui génial, on vient avec Garance, Gaspard et leurs enfants Clothaire et Cléophée.

       – Gé-nial, toute la tribu ! »

     

    Voici un bout de dialogue saisi au vol, comme ça, au hasard, dans le 9ème, 10ème ou 11ème arrondissement. Mais de quoi parlaient donc ces gens, au juste ?

    De ce sacré, de cet absolu et incontournable brunch, évidemment ! Bien plus qu’un rendez-vous, une messe, voire une échappatoire, le brunch est devenu pour beaucoup de citadins une bouée salutaire, lancée le septième jour de la semaine dans un océan de néant, face au vide et à l’ennui du week-end, contrastant avec l’activité intense du reste de leur vie.

    Cette invention anglo-saxonne, contraction de « breakfast » et de « lunch » (petit déjeuner et déjeuner), atterrit en France, notamment à Paris, à la fin des années 80, puis explose littéralement courant 2000. Bon, attention, rien à voir non plus avec Crunch, le chocolat qui croustille…

    D’abord organisé clandestinement à la maison par des expatriés américains en mal du pays, le brunch devient rapidement le rite dominical que tous ceux qui, sans cesse à la recherche de nouveauté, se doivent de pratiquer pour être dans le coup. Et naturellement, ce sont ensuite les restaurants, hôtels ou bars qui récupérèrent l’idée, flairant la bonne affaire et décelant les perspectives hautement lucratives de ce nouveau concept.

    En effet, pour une somme modique entre 20 et 50 euros par personne, selon le quartier et le prestige de l’établissement, il sera proposé à tout citadin qui se respecte une formule « all inclusive » à base de « Vas-y comme j’te pousse », en clair de tout ce qui tombe sous la main et que l’on n’aurait pas vendu dans la semaine. Aubaine… Le brunch, c’est donc une sorte de petit déjeuner amélioré, mais bien plus cher car labélisé « brunch », en fait…

    Sur une base d’œufs brouillés, un jus d’orange parfois pressé, ou pas… du café ou du thé, une corbeille de tartines de pain avec beurre, confiture, suivis d’une salade de fruit ou d’un fromage blanc pour tapisser le tout. Clic clac, l’affaire est dans le sac, on a là les éléments de base du fameux brunch.

    Au-delà de l’escroquerie souriante et du consentement tacite des clients, ce rendez-vous est un alibi pratique pour oublier ce non-jour qu’est le dimanche. 24 heures de vide cosmique… Ce funeste jour où Dieu et ses plus proches collaborateurs se sont dit : « c’est bon là, stop, on souffle un peu… plus d’idée ».

    Alors, plutôt que de rester chez soi à contempler son reflet dans le miroir de la salle de bain et se faire un débriefing introspectif pour savoir où on en est dans sa vie, avec les autres, en particulier, on préfère aller s’étouffer avec du pain sans gluten, du miel bio et du café cueilli par Pedro dans des endroits saturés de monde, de poussettes géantes avec des étudiants-serveurs proches du black-out, qui ne travaillent que le dimanche parce que les autres employés officiels refusent de cocher ce jour sur leur planning.

    Car, oui, le brunch est un non-sens, une hérésie aussi utile qu’un presse-ananas ou un médicament pour la connerie. Le brunch et toutes ses extensions, d’ailleurs… En effet, on a même vu à un moment une tentative de « Drunch », si si… Soit cette plage horaire encore disponible entre le « Dinner » et le « Lunch », donc plutôt vers 17h-18h. J’espère que vous me suivez…

    Et puis depuis cinq ou six ans, des esprits tant malades que diaboliques ont quant à eux relancé la mode du « Goûter ». C’est ainsi qu’on peut désormais lire ici et là, juste à côté de la pancarte « Brunch » et « Drunch », le panneau « Ici, Goûter à toutes heures » avec l’avantage de ne pas en restreindre la consommation uniquement aux seuls dimanches.

     

    « – Donc on s’voit mardi ?

       – Oui génial, on vient avec Melissa, son deuxième mari Eugenio et les enfants qu’elle a eus avec Horts, Dakota, Sombrero et Guacamole.

       – Gé-nial, toute la smala ! »

     

    Autour d’un chocolat chaud ou d’un thé vert tibétain au beurre de chamelle, on pourra vous proposer une banane ou une pomme avec des Choco BN, le tout servi sur une bonne vieille feuille de papier d’aluminium. Reste à savoir maintenant si bientôt, on ne va pas nous proposer, dans le cadre de la refonte perpétuelle de nos us et coutumes, des « DGoûners » ou encore des « Glunchs ».

    Mais vous n’êtes pas obligés de me croire…

     

     

     

  • Silence Plateau | Fargo (Policier, 1996)

     

     

    Au premier abord, Fargo, des frères Coen, est un film de série B complètement idiot, et ennuyeux au possible. Un vendeur de voiture financièrement aux abois fait appel à deux malfrats de seconde zone pour kidnapper sa femme, et demander une rançon à son riche beau-père. Ça, c’est le premier degré…

     

    Et puis on se dit que si « Fargo » fait probablement partie des cent meilleurs films de tous les temps, c’est sans doute qu’il y a une raison. Alors on se force à persévérer. Et en effet, on prend conscience que ce film est un petit bijou :  un vrai « exercice de style ». Le style Coen… Des personnages on ne peut plus ordinaires, plutôt loosers, sortis du fin fond du Minnesota, un déclencheur (ici, le kidnapping) qui tourne au fiasco, des psychopathes décérébrés, et un paysage d’horizons enneigés qui s’étendent à l’infini.

    Les frères Coen partent d’un fait divers, à la fois horrible et très banal. Grâce à un comique de situation fait de décalage, à la fois dans les personnages (une enquêtrice enceinte jusqu’au cou), comme dans les situations qui dégénèrent (la scène de kidnapping), ou dans les dialogues (dont on se demande « mais qu’est-ce que ça vient faire là ? », au beau milieu d’une scène dramatique), ils arrivent à transformer le pitoyable en jouissif.

    En fin de parcours, on comprend le génie des frères Coen : génie de création, pour l’imagination de chacune des scènes construites comme des sketchs humoristiques, génie des dialogues, dont l’absurdité et le décalage face à la situation nous coupe le souffle, génie du jeu d’acteurs, qui parlent et agissent avec placidité dans une situation pourtant stressante, génie de direction photo avec des plans images époustouflants, génie de la BO enfin, avec une musique efficace de Carter Burwell, fidèle parmi les fidèles.

    Face à tant de bêtise, « aurez-vous le courage d’en rire » ? C’est le message de l’affiche du film, et toute la philosophie du cinéma des frères Coen.

     

    Instant-City-Fargo-02

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Liens externes » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Ciné Cinéma Facebook

     

     

     

  • « The Hole » : Dernier rempart face au néant

     

     

    A l’instar d’un réalisateur comme John Carpenter, Joe Dante, c’est une sorte de papa gâteau pour des générations entières qui, sans trop en avoir conscience, ont fait leurs premiers pas dans la cinéphilie dans les années 80. Et ce premier pied posé en salle le fut pour des films tels que « Gremlins », « Explorers », « L’aventure Intérieure », « Hurlements », ou avec Carpenter, pour « The Thing », « Fog », « New York 1997 », « Jack Burton », etc…

     

    Voir aujourd’hui « The Hole », c’est redécouvrir ainsi un petit film sorti comme ça, au débotté, sans faire de bruit… On se dit tant pis, ou tant mieux, ou encore c’est la vie, c’est comme ça. On argumente alors, avec notre petit snobisme mi-nostalgique mi-mélancolique sous le bras, et on crie à la face du monde que c’était mieux avant, que c’était ceci, que c’était cela… Car le film en question, sorti pourtant en 2009, possède en effet encore de ce lustre-là. Il paraît lui aussi un peu désuet, forcément, tant les effets ne sont pas plus appuyés que ça. Mais il n’y a en tout cas aucun cynisme dans la démarche.

    Avec son petit budget, Joe Dante remplit son sac à malice à rabord de toutes les thématiques qui lui sont chères. Il parvient avec trois bouts de ficelle à capter la magie d’une époque, un beau geste pour la forme, une élégance, là, droit au coeur, exactement ce qu’avait manqué Abrams avec son film « Super8 » et de gros moyens déployés ; Abrams qui lui aussi se croyait obligé de rendre hommage à ce cinéma-là.

    « The Hole » ne pourra donc que plaire à un certain public qui croira reconnaître un vieil ami parmi une foule d’anonymes.

     

     

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Dévoreur Hubertouzot

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

     

  • Paul Verhoeven : Black Book

     

     

    En 2006, avec « Black Book », Paul Verhoeven va là où on ne l’attend pas et part explorer les recoins sombres de l’histoire.

     

    Avec « Black Book », un film plein d’action, d’intrigue et de suspense, Paul Verhoeven ouvre le « Livre Noir » de la résistance à l’occupation allemande pendant la seconde guerre mondiale. Il déconstruit le mythe du héros de la résistance et impose une vision relativiste de l’Histoire. Finalement, la loyauté, l’honneur, la noblesse du sentiment amoureux, ne sont pas toujours où l’on pense les trouver : « les méchants sont parfois gentils… ».

    Le film prend place dans la Hollande occupée. On découvre une actrice très prometteuse, Carice Van Houten, qui interprète une résistante d’origine juive. On suit son parcours initiatique, au milieu de rebondissements incessants. « Black Book » est l’un des derniers films de Verhoeven et sans doute l’un de ses plus aboutis. D’un sujet sérieux et délicat, il en fait un vrai film d’action et de suspense débarrassé de tout pathos.

    Un des meilleurs films du maître hollandais. À découvrir ou redécouvrir…

     

    [arve url= »https://vimeo.com/109231061″ align= »center » title= »Paul Verhoeven : « Black Book » (2006) » description= »Paul Verhoeven » maxwidth= »900″ /]

     

     

     

     

     

     

     

  • Paul Verhoeven : Retour sur « Showgirls » et son expérience Hollywoodienne

     

     

    Paul Verhoeven affiche une filmographie impressionnante et il y a embrassé tous les styles, tous les thèmes, mais derrière chacune de ses oeuvres se cache une critique virulente de nos sociétés et de ses contemporains.

     

    Que les sujets qu’il développe soient actuels, historiques, fantastiques ou de science fiction, le réalisateur hollandais parle à chaque fois de la noirceur humaine sur un ton presque détaché, sarcastique, cynique et enjoué. C’est sans doute pour cela qu’il a bien souvent été incompris de la presse ou du public.

    De prime abord, Paul Verhoeven propose toujours une intrigue qui peut tenir des clichés en vigueur dans le cinéma en général, mais il va placer au fur et à mesure que son histoire avance des mines à fragmentation qui auront très vite le dernier mot en faisant éclater de l’intérieur ses œuvres. Film après film, le Batave semble imposer l’image  de misanthrope patenté qui s’amuse de ses congénères, en jouant ainsi à la poupée avec toutes les figures possibles, et qui nous renvoie, à chaque nouveau long-métrage, soit à nos pires travers, soit à notre humanité profonde.

    Paul Verhoeven tourne ses premiers films en Hollande (« Le 4ème Homme », « La Chair et Le Sang », « Turkich Délices »,…) de 1971 à 1985, avant de de finir par céder aux sirènes hollywoodiennes lorsqu’on lui propose le scénario de « Robocop » en 1987.

    Tout est une question de timing et de rencontres dans la vie… A cette époque, il faut dire que les grosses majors américaines savaient prendre des risques. Chacune d’entre elles se devait de dénicher le réalisateur inconnu, mais bourré d’idées et capable de mettre en œuvre la production de films inédits, susceptibles d’attirer un nouveau public dans les salles de cinéma. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que le premier film américain de Verhoeven fut un énorme succès mondial…

     

    [youtube id= »6tC_5mp3udE » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

    Trop occupé à compter leurs dividendes, personne chez les executives des majors ne lit entre les lignes et ne semble comprendre, tant le vrai fond du film que la démarche de leur nouveau poulain. Tant mieux ! En un film seulement aux Etats-Unis, Verhoeven a le champ libre et peut désormais entreprendre ce qu’il veut. Cette liberté totale permet ainsi de mettre en chantier « Total Recall », avec la vedette de l’époque, Arnold Schwarzenegger. Et c’est à nouveau un énorme succès…

    Son troisième film sur le territoire américain est « Basic Instinct ». Nouveau triomphe mondial et accessoirement découverte de la pépite américaine Sharon Stone, rien que ça… Ce néo-polar, avec également Michael Douglas au générique, va non seulement asseoir la réputation de Verhoeven, comme le réalisateur sulfureux du moment, mais va également lancer la mode des films-intrigues à tiroirs, à grand renfort de coups de théâtre et de scènes érotiques très marquées. S’engouffreront ensuite dans la brèche une ribambelle de pâles copies qui tenteront en vain de surfer sur ce succès, parmi lesquels les plus connues : « Sang Chaud Pour Meurtre De Sang Froid », « The Last Seduction » ou encore « Sliver »…

    Ce qui trompe tout le monde avec Verhoeven, c’est le sens inné du réalisateur pour la technique et sa compréhension immédiate de tous les outils dont il dispose pour faire un film (effets spéciaux et gros moyens mis en œuvre). Il semble à l’aise avec tous les formats et tous les budgets. On se souvient en particulier de « Star Ship Troopers » en 1997, qui nous avait estomaqués, avec ses scènes de batailles spatiales bien plus spectaculaires que celles que l’on avait pu voir dans les premiers épisodes de « Star Wars ».

    Car ce que Paul Verhoeven offre avant tout aux spectateurs qui ont payé leur place de cinéma, c’est un vrai spectacle généreux…

     

    [youtube id= »rdu0Nxh0ov8″ align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

    … Mais si Hollywood vous accueille à bras ouverts, surtout quand vous lui rapportez beaucoup d’argent en contrepartie, l’industrie peut aussi vous refermer la porte au nez dès que le vent tourne en votre défaveur. Fort de l’image de réalisateur hyper-sexué acquise grâce à « Basic Instinct », Paul Verhoeven va vouloir récidiver avec un film ayant pour thème, cette fois-ci, le « Show-Bizness » et ses travers. Autant dire qu’il risque fort de mordre la main de ceux qui l’ont nourri…

    Ses détracteurs lui ont souvent collé une image de « bourrin », tel un taureau ou un bélier qui défonce tant les portes fermées que des orifices étroits et mal lubrifiés… « Showgirls » sera le film du début de la fin de sa carrière aux Etats-Unis. Car on ne badine pas avec le séant des Américains…

    Sous couvert d’une fausse comédie musicale niaiseuse où l’on plébiscite quelques bonnes vieilles valeurs « Yankee », comme le goût de l’effort et du travail, la réussite sociale par soi-même et sans l’aide des autres, le talent récompensé… Verhoeven, aux commandes de son B52 S, bombarde sans distinction le système capitaliste américain, en prenant bien soin de détruire toute la pyramide hiérarchique, de sa base à son sommet. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il ne va épargner personne…

    Il s’amuse comme un petit fou à dépeindre des personnages, hommes ou femmes, tout simplement comme des prostituées de la pire espèce, dans le sens le plus pourri et le plus perverti du terme. Pas un seul protagoniste ne réchappe à la qualification d’ordure et de salope.

     

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    Le réalisateur à la chevelure poivre et sel confine tout ce petit monde du spectacle entre les murs de Las Vegas, comme lieu central de l’intrigue et ville de tous les péchés. Une sorte de Babylone, de Sodome et Gomorrhe américaine à la sauce white trash, où il vaut mieux venir vacciné contre la gale. « Showgirls » tourne au jeu de massacre, dans lequel vont s’entredéchirer vils chacals et atroces scolopendres. Le film est une ode au mauvais goût, à la superficialité et à la fin d’un monde (ou du monde, selon…). Oui, Paul Verhoeven parle bien des Etats-Unis…

    « Showgirls » fait finalement un four monumental, ce qui vaut au réalisateur comme à son actrice principale, que l’on ne reverra plus ailleurs, un déchaînement de critiques acerbes d’une presse vent debout contre le film. Plus qu’un échec, cette œuvre caustique devient une sorte d’objet épouvantail que l’on brandit pour illustrer ce que serait un mauvais film. Mais il est clair que monsieur Verhoeven avait surtout vu juste en dépeignant ainsi les pires travers de l’être humain…

     

    « Les critiques n’étaient pas seulement négatives. C’était une flambée d’agressivité et de haine. On en parlait comme du plus mauvais film jamais montré. » (Paul Verhoeven à propos de « Showgirls » en 1995)

     

    Certains défendent tout de même le film, comme Quentin Tarantino ou encore Jacques Rivette, qui déclare à l’époque de sa sortie : « Showgirls est l’un des plus grands films américains de ces dernières années. Comme tout Verhoeven, c’est très déplaisant : il s’agit de survivre dans un monde peuplé d’ordures, voilà sa philosophie. »

     

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    Deux ans plus tard, on va pourtant confier les rênes de « Starship Troopers » à Verhoeven. Un autre de ses chefs d’œuvre, qui comme « Showgirls », ne sera qu’un semi-succès et suscitera une nouvelle fois l’incompréhension de la presse et du public. Cette histoire de guerre spatiale entre la planète Terre et une race extra-terrestre insectoïde va cependant encore servir les desseins du malicieux Paul, consistant en une charge anti-militariste virulente, raillant les américains et leur prompt réflexe à faire la guerre dès qu’ils en ont la moindre occasion. Le film, aussi brillant que spectaculaire, ne sera réhabilité que bien des années plus tard.

    Dernière chance avant la sortie de piste avec « Hollow Man »… Sur le thème de l’homme invisible, le réalisateur de « Soldier Of Orange » pervertit une fois de plus un des grands thèmes du cinéma fantastique américain, avec ce héros qui devenu invisible va se servir de ce pouvoir à des fins purement égoïstes puis criminelles. Acerbe et jouissif… Mais la roue a bel et bien tourné… Le film ne marche pas vraiment et Paul Verhoeven est remercié. Il sait que cette fois-ci, il en a fini avec Hollywood. Il se sera quand même bien amusé.

    Il décide donc de rentrer au bercail, où avec des capitaux européens, il va pouvoir continuer à explorer les tréfonds de l’âme humaine et nous offrir deux nouveaux chefs d’œuvre que sont « The Black Book » en 2006 et « Elle » dix ans plus tard. En attendant « Benedetta » en 2020, l’histoire d’une bonne sœur sainte et lesbienne…

    Oui définitivement, Paul ne boit pas de la Tourtel…

     

     

     

  • Gentille, un film à redécouvrir à l’heure du goûter

     

     

    Découvrir ou redécouvrir aujourd’hui ce petit film charmant sorti en 2005, à l’heure où un cinéma français corseté, à de rares exceptions près, ne propose plus dans ce registre de la comédie amoureuse décalée que des stéréotypes voulant coller coûte que coûte à une actualité avec pertinence et acuité, « Gentille » est un baume pour la peau à la pêche, une lotion précieuse, une huile essentielle.

     

    Sophie Fillières, sœur de l’actrice Hélène Fillières, a un univers particulier et totalement libre. Une façon bien à elle d’appréhender les situations de tous les jours et les rapports humains. Que ce soit « Aïe », « Un Chat, Un Chat » ou encore « Arrête ou Je Continue », l’ex-épouse du scénariste et réalisateur Pascal Bonitzer propose toujours des histoires axées sur le couple hétérosexuel contemporain, urbain, cultivé, bourgeois, complètement perdu et au bord de la rupture. Attendez, ne partez pas ! Il ne s’agit pas là d’une mauvaise blague mais bel et bien de films qui tendent à dirent justement que c’est nous qui sommes une blague.

    « Gentille » est sans doute son film le plus réussi à ce titre et le plus précis sur ce que racontent nos vies et nos destins. Emmanuelle Devos, Lambert Wilson, Bruno Todeschini, Michael Lonsdale et Bulle Ogier composent des personnages qui semblent tous sortis trop tôt d’une thérapie de groupe qui aurait dégénéré. Une tournure inédite, joyeuse et rassurante.

    L’histoire tient en deux lignes. Un couple et une demande en mariage variablement retardée entre hésitations ou éléments annexes. Les institutions, l’adultère, les convenances, le caca, l’embarras, tout ici est brassé, traité en une ronde de petites saynètes hilarantes. Des situations absurdes, des quiproquos qui peuvent déboucher sur des résolutions, des personnages qui se cherchent avec chacun son propre langage, l’amour comme une proposition, le monde comme un vaste champ d’expérimentation. Rien ne peut être hasard et tout s’explique.

    « Gentille » est un film dont on se délecte et qui se savoure comme un petit macaron de chez Hermé, au parfum indéfinissable mais exquis. On navigue entre Lewis Caroll, André Breton et Wes Anderson. C’est grave et léger, mais la gravité finalement n’a sur ces personnages du lest suffisant que jusqu’à la fin du film. Parce qu’à la fin, tout le monde s’envole…

     

     

     

     

     

  • « The Black Hole » : un ratage total mais avec un vaisseau spatial en forme de Tour Eiffel…

     

     

    A l’aune du gigantesque succès surprise et mondial de « Star Wars » en 1977, chaque grosse major se devait forcément d’avoir « son » film de science fiction spectaculaire, qui répondrait aux attentes d’un public conquis par cette thématique dans le vent. L’espace faisait rêver et on souhaitait voir autre chose que juste des vaisseaux avançant mollement dans l’infini…

     

    Tout devenait dès lors possible avec les effets spéciaux et on pouvait imaginer ainsi toutes sortes d’histoires avec comme décor un fond étoilé. « Alien, Le 8ème Passager » et « Star Treck, Le Film » furent donc les suivants sur cette liste opportuniste et propulsèrent par leur succès le genre comme nouvelle tendance lourde du Blockbuster.

    1979… En voulant surfer également sur la vague Space Opera et espérer ainsi une part du gâteau, Disney s’engouffre à son tour dans la brèche pour monter « The Black Hole ». La firme de Mickey dépense alors sans compter et s’embarque dans une histoire pseudo-religieuse à grand renfort d’effets spéciaux, de décors immenses et d’acteurs chevronnés, mais sur le déclin et utilisés à contre-emploi.

    Malgré tout ce qui aurait pu laisser espérer le meilleur, des éléments connotés SF à la superbe musique de John Barry, en passant par la direction artistique assez originale, le Sygnus, ce vaisseau spatial géant, croisement entre Eiffel et le Nostromo d’Alien, le look général du film, sombre à souhait, Elisabéthain, rétro-futuriste et des idées assez folles et marquantes, « The Black Hole » est un désastre artistique sur toute la ligne, suivi d’un bide retentissant au box office mondial.

    Tout y est mou, mal dirigé, filmé comme un épisode de Derrick, avec des acteurs peu motivés par ce qu’ils doivent produire à l’écran. Revoir aujourd’hui ce film relève du coup de l’ascendant de sympathie…

    « The Black Hole » reste désespérément ennuyeux, avec ses dialogues lénifiants et un manque cruel de rythme, de ressort dramatique, cumulant tout ce qu’il ne faut surtout pas faire pour un film de ce genre, mais s’en dégage tout de même un doux parfum de bizarrerie, sans doute lié à la qualité apportée à ses décors inspirés de cathédrales, au grand robot rouge lévitant avec ses bras qui se transforment en hélices meurtrières, aux robots zombies ou aux pupitres d’ordinateurs qu’on croirait dessinés par Bernard Buffet…

    Ce film est comme le grand vaisseau de l’intrigue, un corps massif à la dérive, fantomatique, avec des reflets luisants laissant deviner quelque chose de beaucoup plus beau et d’infini…

     

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    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

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    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images