Catégorie : Films

  • Oscars 2016 : Episode 2

     

     

    OSCARS 2016 – Episode 2 : Chris Rock is back, dix ans plus tard

     

    La cérémonie des Oscars sera diffusée sur Canal+ dans la nuit du 28 au 29 février 2016, année bisextile. C’est Chris Rock qui sera le maître de cérémonie. Chris Rock, 50 ans, possède plusieurs cordes à son arc : il est à la fois acteur et humoriste, mais aussi réalisateur et producteur. Découvert par Eddy Murphy, il était le gendre de Mel Gibson dans «  L’Arme Fatale 4 ». Habitué des One Man Show, notamment dans l’émission télé « Saturday Night Live », l’un des programmes comiques de la chaîne NBC les plus célèbres aux Etats-Unis, on l’a aussi remarqué grâce à ses stand-up au New-York Comedy Strip où son talent de comique a séduit. « Niggas vs Black People » (spectacle « Bring the Pain » en 1996) est son sketch le plus célèbre mais aussi le plus controversé. Il le révèle comme l’un des comiques les plus en vue dans le métier.

     

     

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    Il est qualifié d’homme « le plus drôle des Etats-Unis » par le Times et est élu l’une des 50 personnalités les plus influentes aux Etats-Unis par le New-York Times. Il a remporté trois Emmy Awards, quinze nominations pour son écriture et ses interprétations, et a été classé en 2004 par la chaîne Comedy Central 5ème sur les 100 meilleurs sketchs comiques de tous les temps.

    Chris Rock avait déjà présenté la 77ème cérémonie des Oscars au Théâtre Kodak de Hollywood en 2005 (Meilleur film « Million Dollar Baby »). Très attendu, on avait alors compté sur ce grand fan des Red Hot Chili Peppers dont il est un proche pour redonner un peu de peps à une cérémonie un tantinet morne et pompeuse. Le voilà donc de retour dix ans plus tard. La pression doit être grande et on imagine aisément le travail d’écriture titanesque face au défi à relever devant toute la profession et des millions de téléspectateurs. De 2005, les médias n’ont retenu que la petite phrase qui fit grincer des dents. Chris Rock égratigne Jude Law : « Qui est cet homme ? Pourquoi est-il dans tous les films que j’ai vus ces quatre dernières années ? Même dans les films où il ne joue pas, si vous regardez le générique de fin, c’est lui qui a fait les gâteaux ». Sean Penn, qui se trouve dans la salle, tourne à ce moment-là un film avec Jude Law comme partenaire. Il s’agit du film de Steven Zaillian, « Les Fous du Roi » (2006), sur l’ascension et la chute d’un politicien idéaliste dans les années 1950. Deux heures plus tard, Sean Penn monte sur scène à son tour pour présenter l’oscar de la meilleure actrice et en profite pour remettre le maître de cérémonie à sa place :

     

    « Pardonnez mon sens de l’humour défaillant, mais je veux répondre à la question de notre présentateur : Jude Law est l’un de nos plus brillants jeunes acteurs. »

     

    Pourtant, il ne s’agit là que d’une anecdote très en marge de l’avis général. Son monologue d’ouverture de la cérémonie a été fortement applaudi et apprécié, et sa prestation avait enregistré l’une des meilleures audiences depuis des années avec 42 millions de téléspectateurs. Seule Ellen DeGenres réussira à faire mieux en 2014 avec son fameux selfie à 44 millions de téléspectateurs. En 2015, la Production compte sur sa puissance comique pour apporter de l’énergie à l’événement. Il faut dire qu’on a souvent polémiqué sur le manque de diversité des palmarès. En 2015, des associations menaçaient même de manifester en marge de la cérémonie devant le Dolby Theatre pour dénoncer l’absence d’acteurs noirs dans la sélection. Chris Rock serait-il une carte jocker pour faire taire la polémique ? Le manque de représentativité de l’Académie est un secret de Polichinelle : sur 6 000 membres, 93 % sont blancs, 70 % sont des hommes et l’âge moyen est de 63 ans. Autant dire que si vous êtes, comme dirait Coluche, une femme noire et réalisatrice, vous n’avez que très peu de chance, statistiquement parlant, d’obtenir la statuette.

    Chris Rock est donc attendu au tournant autour de sujets brûlants qui ont secoué l’Amérique en 2015 comme le terrorisme, les violences policières à l’égard des noirs ou le contrôle des armes à feu. Le meilleur VRP de l’industrie US de l’humour va-t-il être aussi phénoménal qu’attendu ? La réponse dans un mois avec à la clef, un record à battre.

    Chris Rock succède à Neil Patrick Harris en 2015, acteur et chanteur américain de 42 ans (jeune médecin surdoué dans « Docteur Doogie », et coureur de jupons dans « How I met your mother ») et à Ellen DeGeneres en 2014.

     

     

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  • Ben Frost compose la musique du docu Bombing Isis

     

     

    Ben Frost, le photographe et réalisateur Richard Mosse et le directeur de photographie Trevor Tweeten ont collaboré au documentaire « Bombing Isis » (bombarder Isis) diffusé sur la chaîne anglaise Channel 4 en octobre 2015.

    Appréciant beaucoup le travail d’au moins deux des trois artistes évoqués plus haut, à commencer par le premier, Ben Frost, musicien électronique expérimental islandais, et le second, Richard Mosse, photographe, qui avaient déjà collaboré notamment pour un photo-reportage composé de clichés pris en infrarouge, dans cette République Démocratique du Congo en guerre, j’ai découvert avec intérêt ce mini-docu sur la guerre menée par l’armée américaine contre le groupe terroriste Isis dans le Golf Persique.

     

     

    Richard Mosse - Infra
    Richard Mosse – Infra

     

    « C’est le triomphe de la guerre moderne. Elle jette le voile sur la culpabilité morale individuelle, dissimulant ses mains ensanglantées sous des gants de lys blanc »

     

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    Les trois compères se sont donc retrouvés sur le porte-avion nucléaire USS Theodore Roosevelt, en charge du commandement des missions de bombardement sur la Syrie et l’Irak.

    Ils déclarent : « Une grande activité règne à bord, et tout est bien entendu digne d’intérêt. Mais en tant qu’artistes, nous avons été notamment très impressionnés par ces sublimes forces physiques en action sur le pont, le bruit assourdissant de ces machines de métal, l’intense chaleur (jusqu’à 65°C), ces vibrations qui font trembler tout le corps de la tête aux pieds, le fracas du pont, les catapultages incessants de ces avions d’une valeur de plusieurs millions de dollars chargés de bombes mortelles. »

    « Pourtant, l’équipage qui travaille au quotidien dans cet environnement hostile, reste parfaitement calme, communique par gestes et codes précis, comme les acteurs d’une pièce de théâtre absurde. Nous avons même noté des gestes de tendresse envers ces machines tueuses, lorsque ces hommes inspectaient les missiles ou nettoyaient le pont d’éventuels débris. »

    Et ils concluent : « C’est le triomphe de la guerre moderne. Elle jette le voile sur la culpabilité morale individuelle, dissimulant ses mains ensanglantées sous des gants de lys blanc. »

    A vous de vous faire votre propre opinion…

     

    Qu’en pensez-vous ? Dites le nous en commentaire…

     

     

  • Les Huit Salopards | Quentin Tarantino (2015)

     

     

    Les fans de Quentin Tarantino ne seront pas déçus, bien au contraire ! Heureux les ignorants, le Royaume de Tarantino est à eux ! Comme ils sont chanceux ceux qui n’ont encore jamais vu un Tarantino et les ont donc encore tous à découvrir ! On attend chacun de ses films avec impatience comme autant de petites pépites, des joyaux de l’art cinématographique. Et on n’est, cette fois-là encore, avec « Les Huit Salopards » pas du tout déçus, bien au contraire.

    Un huis-clos à la Cluedo. Un enjeu : une femme, personnage central, à enfermer, pendre ou libérer. Et autour d’elle, un décor, et huit salopards. Que va-t-il se passer ? Lequel s’en sortira vainqueur ? Le suspens est total, jusqu’à la fin. Les retournements de situation sont permanents. Tout est toujours possible, jusqu’au dernier instant, jusqu’à la toute dernière seconde. La tension monte de plus en plus, en même temps que la brutalité, la violence et l’absurde. Le tout enrobé d’humour et de dérision. On adore !

    Les personnages sont laids et sales, leurs dents sont noires, on peut sentir jusqu’à leur odeur nauséabonde mêlée à celle du sang, du feu de cheminée, des peaux de bêtes moisies. Le démarrage n’est pas sans rappeler celui de « Django Unchained » : un paysage grandiose, des conditions météorologiques difficiles, la nécessité de trouver un moyen de transport, un prisonnier, des chasseurs de tête, et petit à petit le huis clos d’une pièce fermée : un chalet pour l’un, le château du propriétaire terrien pour l’autre. C’est entre quatre murs que se joue à chaque fois dans les deux films le destin des personnages, au bluff, au poker ou à l’arme à feu.

    L’humour sert de liant au scénario marquant un décalage entre le sérieux de l’intrigue et le loufoque des situations, comme cette porte d’entrée qui doit être cloutée à chaque passage. La scène finale n’est pas sans rappeler l’apothéose des règlements de compte de « Kill Bill » ou le mariage sanglant à l’église. On trouve dans « Les Huit Salopards » cette même violence crue filmée sans détour de manière hyper réaliste et froide. Une affiche géniale, du grand Tarantino, tristement absent des Oscars 2016.

     

     

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  • The Hateful Height

     

     

    Quentin Tarantino… En une poignée de films, ce réalisateur cinéphage est devenu une marque de fabrique, une griffe. On ne va pas voir « Kill Bill », « Django Unchained », « Jacky Brown » ou « Pulp Fiction », non, on va voir le dernier Tarantino. 

     

    Quentin Tarantino est désormais dans le carré très fermé de ces réalisateurs qui arrivent à s’adresser aussi bien à un très large public qu’à une audience plus cinéphile, pointue, à qui on ne la fait pas. Il est de bon ton d’apprécier ses films, presque un devoir, un acte politique. C’est la force et le talent, ou peut-être la roublardise, de ce réalisateur que de caresser dans le sens du poil un lecteur de Télérama comme des Inrocks, flatté lorsqu’il reconnaît au détour d’une scène tel ou tel emprunt musical, ou encore une référence à un vieux classique italien, français ou japonais, tout en séduisant dans le même temps un spectateur lambda moins scrupuleux quant à la diégèse du film qu’il est en train de regarder, mais qui apprécie à sa juste valeur l’efficacité, le style « cool » et les morceaux d’anthologie.

    Quentin Tarantino aura été dans toutes les directions et poussé au maximum les possibilités narratives, avec toujours comme principe le cinéma, l’image au service de l’histoire. Etant une encyclopédie du cinéma sur jambes, Tarantino est le seul à manier comme il le fait un cinéma à la base populaire, voire même souvent bis, pour transformer, magnifier une idée et la pousser jusqu’à la rupture. Ses plus grandes influences ont été à l’origine le cinéma italien et plus précisément le western. De Sergio Leone à Sergio Corbucci, cette façon d’iconiser les personnages et les situations, avec ce sens du découpage proche de la bande dessinée, est un des fondements de la « Patte Tarantino ». Avec sa deuxième grande passion pour le cinéma français, là où se télescopent Godard, Melville et Audiard, Tarantino en garde donc l’amour des dialogues et de ce fameux existentialisme qu’on retrouve dans ce cinéma hexagonal. Le mélange est improbable, imparable.

    Aujourd’hui, avec cette tentative de mélanger Corbucci et Bergman, Carpenter, Raimi, cette passion du vertige sans filet où anecdotes et bons mots servent à contrebalancer le rythme, Tarantino nous propose « Les Huit Salopards ». Son 9ème film serait une sorte de pied de nez, une contradiction, un paradoxe. A priori plus un film pour critiques de cinéma que pour spectateurs normaux, « The Hateful Eight » repose évidemment sur ces principes normatifs « tarantinesques » que l’on connaît par cœur et ces dispositifs alternant langueur et déchaînement orgasmique. Mais il n’en reste pas moins que ces presque trois heures de métrage n’aboutissent qu’à un pur sentiment d’ennui mortifère.

    Le thème original composé cette fois-ci exprès par Ennio Morricone ou les références explicites à The Thing, le chef d’œuvre de John Carpenter, le décor aussi bien extérieur qu’en studio, la pellicule 70 mn, la photographie et le talent combiné d’acteurs chevronnés, ne peuvent malheureusement rien face à la mélasse tiède qui s’insinue petit à petit tout au long de ce long et pénible déroulé filmique. Et même si Quentin Tarantino justifie son œuvre nihiliste comme miroir d’une Amérique actuelle à la Donald Trump, il n’en demeure pas moins que le brouet reste indigeste de bout en bout, en montrant les limites de ce réalisateur talentueux mais rattrapé ici par un égo troqué contre une mongolfière.

     

     

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    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Dévoreur Hubertouzot

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

     

  • Star Wars | Madeleine industrielle…

     

     

    Un peu de numérologie et d’histoire…

     

    Ce sont pratiquement quarante années qui séparent l’épisode Star Wars (« A New Hope ») de celui qui vient tout juste de sortir, « The Force Awakens ». Quarante années qui embrassent aussi quatre générations, quatre réalisateurs et quatre scénaristes différents. Si vous aimez la numérologie à ce point, « La Guerre Des Étoiles » sortie en 1977 est devenue, dans la chronologie de la fresque globale, l’épisode 4. Bon, c’est George Lucas qui est le grand ordonnateur de tout cela. Le fondateur, le grand manitou, le gros bonnet, le boss quoi…

    Ce barbu grisonnant à l’allure dégingandé et timide, arborant une sorte de banane à la Dick Rivers et adepte des chemises à carreaux imagina un jour un mix improbable du « Seigneur des Anneaux » dont il n’avait pas pu acheter les droits à l’époque et de « Flash Gordon », un sérial comme on appelait ce genre de productions dans les années 50. Il crée en superposant toutes ces références, qu’elles soient littéraires (« LOTR », les Récits Arthuriens, ainsi qu’Asimov et Franck Herbert), télévisées (« Flash Gordon ») ou cinématographiques (Les films d’aventure et de cape et d’épée de l’âge d’or d’hollywood ou bien encore Kurosawa et ses films de sabres), le tout lié à la farine Joseph Campbell (un romancier historien spécialisé dans la mythologie) et obtient au final ce qui allait devenir l’ultime représentation de la pop culture mondiale, soit une vulgarisation des grands mythes fondateurs de notre histoire fondue avec de la religion Bouddhiste.

    L’identité Star Wars était née, modelée par les mains de l’alchimiste Lucas, et allait perdurer à travers les décennies suivantes, avec ou sans films nouveaux d’ailleurs, mais grossir, s’étendre et faire toujours plus de nouveaux adeptes. Le titre initial avec ce logo en grosses lettres jaunes sur fond de nuit galactique était devenu une formule magique, pas seulement pour tous ceux qui avaient compris assez tôt, comme Lucas lui-même, qu’il y avait beaucoup d’argent à se faire avec ces deux mots-là, mais aussi pour des enfants à l’époque qui grandiraient avec Ce et bientôt Ces différents films dans les yeux et dans le cœur.

    La force de cette saga, si je puis dire, c’est qu’à la différence du « Seigneur des Anneaux » ou de « Harry Potter » qui sont d’abord des œuvres littéraires à succès, pour devenir par la suite aussi des films acclamés, la première trilogie de Lucas vient quant à elle de nulle part. Rien qui ne précède ce phénomène de société devenu instantanément mondial… Dans l’histoire de la littérature et du cinéma, ou de tout autre support artistique d’ailleurs, c’était sans précédent. Star Wars, au delà de ces représentations cinématographiques que l’on connaît, peut aujourd’hui évoluer et continuer à grandir toujours dans l’imaginaire des fans, des concepteurs de jeux vidéo, des illustrateurs, des fabricants de jouets, de textile, de mugs ou des romanciers en mal de lecteurs.

     

    C’est un monde sans limite, sans contour, sans début et sans fin.

     

    C’est pour cela qu’il génère autant de passions, de débats, de haine et d’amour. Georges Lucas a enfanté un monstre qu’il a fini par ne plus pouvoir maîtriser du tout. Lui, reconnu justement comme un obsédé du contrôle absolu, de la fabrication de ses films de A à Z jusqu’au suivi des produits dérivés et du merchandising, finit par comprendre que cet enfant allait un beau jour se retourner contre son père.

    Lorsqu’il proposa sa nouvelle trilogie en 1999, « La Prélogie », qui situait l’univers de la saga antérieure à celle que l’on avait découvert en 77, il ne s’attendait sûrement pas à tout ce déchainement de gentils fans dociles devenus incontrôlables et acrimonieux. Pourtant Il avait déjà du faire face à la vindicte de ses « fans » lorsque bien mal lui en prit de vouloir « retoucher » sa première trilogie, en remaniant et boostant des plans ou des scènes entières qu’il jugeait avoir en partie ratés à l’époque de leur fabrication. Avec l’évolution des effets spéciaux, l’avènement du numérique et des images de synthèse, il pouvait enfin obtenir ce qu’il avait en tête depuis que Star Wars émergea de son cerveau… Mais profaner le temple, c’était comme insulter dieu lui-même ou ce que cela représentait de sacré pour des adeptes devenus entre temps fanatiques et donc radicaux.

    Il mit donc de côté cette première incitation à la révolte et ferma les yeux sur ces rebelles. Fort de tout ce que désormais proposaient les avancées en terme de modélisation gérée par ordinateur, c’est donc avec une ambition renouvelée et assez folle que Lucas souhaita enfin raconter l’histoire d’Anakin Skywalker, qui deviendrait Darth Vader. C’est avec les moyens technologiques dont il avait toujours rêvé qu’il allait enfin pouvoir faire tout ce qu’il désirait, tout montrer, tout concrétiser : sa fameuse guerre des clones.

    George Lucas, en créant Star Wars en 1977, ne voulait pas seulement raconter une épopée surannée, avec l’éternel combat des forces du bien contre celles du mal, mais se servir de tous ces thèmes forts et fédérateurs pour pourvoir surtout innover, surprendre et être à chaque fois le pionnier en termes d’effets spéciaux, de son et d’avancée technologique. Toujours plus audacieux, George Lucas tenta le pari de sublimer Le Star Wars tel qu’on l’aimait, mais cette fois en traitant aussi de politique, des arcanes du pouvoir et de ce qui amène une république à choisir un tyran plutôt que des solutions démocratiques. Bref, un pari à haut risque et surtout naïf que de croire en l’intelligence des masses endormies qui se réveillaient elles juste dès la moindre évocation du titre « Star Wars » sur un emballage de céréales.

    En essayant également de renouveler l’image que l’on connaissait de cette saga, d’avancer, d’innover, aussi passionnante qu’était la démarche intrinsèque de Lucas, il se heurta fatalement, violemment, au prosaïsme de tous ces gardiens du temple. Les épisodes I, II et III paradoxalement situés avant « Un Nouvel Espoir » faisaient trois bons en avant en explosant toutes les limites qui avaient jusqu’à présent frustré l’inventeur du son THX. Jamais une série de films ne fut autant décriée, conspuée, détestée par des fans qui, trois autres films plus tôt, ne juraient que par cet homme à l’allure débonnaire. Ces mêmes fans à qui il fallait désormais rendre des comptes et qui criaient à la trahison et au sacrilège en oubliant d’abord que celui qui leur proposait ces nouveaux films était pourtant George Lucas lui-même, le propriétaire intellectuel de toute cette histoire.

     

    Ce que l’on comprend et que l’on retient donc est sans appel.

     

    Star Wars ne peut pas évoluer, se transformer, devenir autre chose que ce qu’il a toujours été. Il doit se contenter d’être Star Wars, soit une certaine esthétique avec des canons biens définis et des personnages qui rentrent également dans un moule établi, un monde, un univers qui ne peut en aucun cas se modifier ou changer d’aspect. Immuable, un monde sous cloche et Lucas, passé de réalisateur à inventeur visionnaire, devait à présent endosser selon les ordres donnés par les « fans », la défroque d’un taxidermiste.

    Cependant, si on enlève Jar-Jar Binks, quelques mauvais dialogues de ci de là, des scènes de batifolage à la Sissi Impératrice entre Anakin tout niaiseux et sa dulcinée, il reste trois films aux idées sublimes, une certaine démesure, des batailles épiques et grandioses, des duels titanesques et une vision de cinéma assez euphorisante comme il était peu commun de voir cela même en ces fin du 20ème et début du 21ème. Et c’était bien du Star Wars que Lucas nous proposait, avec une esthétique autre, certes, des moyens qui avaient évolué, un aspect plus sérieux, mais c’était bel et bien le même homme qui était derrière cette entreprise. Un homme qui ne voulait en tout cas certainement pas faire du surplace et resservir les mêmes plats indéfiniment. Une nostalgie réchauffée au micro-ondes, très peu pour lui. C’est pourtant ce que ses fans semblaient vouloir malgré tout. Du lyophilisé…

    Walt Disney, en rachetant à George Lucas son bébé pour la modique somme de 4 milliards de dollars (ah tiens, encore ce chiffre 4…), n’allait pas se contenter de faire de Star Wars juste un objet pour quelque happy few ou d’anciens fans nostalgiques. Marvel ou bien encore Pixar, la compagnie tel un ogre jamais rassasié engloutit tout ce qui suscite le rêve et veut faire main basse sur ce qui représente la pop culture aujourd’hui. Et que nos rêves deviennent, se transforment, en billets verts. Amen !… En tout cas, la grosse firme à oreilles de Mickey a bien reçu et étudié le message des adorateurs de Star Wars, et le compte-rendu des financiers aux sorties des réunions était fort clair : donner à ce public ce qu’il attendait depuis 1983.

    Star Wars, la vieille chimère de George Lucas, qui conçut cette saga sur un malentendu et qui crut longtemps que sa création était et serait le refuge pour tous ceux dont l’imaginaire n’avait pas de limite. Ce fût une erreur amère et Lucas dut ravaler ses ambitions quand il comprit en fait que ce public passé présent et futur ne voulait voir juste que toujours la même chose et qu’on leur resserve en boucle le même plat « à la façon de ». Les films, les dessins animés, les livres et les jeux vidéos, créés par des fans zélés ont rendu Star Wars universel. George Lucas finit par être chassé de sa propre création tant des esprits plus jeunes et plus alertes se sont vite emparés de l’œuvre pour y mettre à leur tour leurs propres névroses, leurs propres fantasmes. Aujourd’hui, après moult rebondissements et trahisons, L’œuvre perdure en échouant entre les mains d’une multinationale que l’on sait ne pas vraiment s’embarrasser d’état d’âme.

    Cet épisode 7 sera donc décortiqué pièce par pièce et ce sont ses fans d’avant ou de maintenant qui combleront tout ce qui nous a échappé ou laissé dans l’expectative. Chaque film est devenu la petite pointe isolée d’un iceberg. Dessous se trouvent des quantités d’autres éléments qui rendent le tout cohérent.

     

    Et ce nouveau film, alors ?

     

    On a déjà tout entendu à son sujet. Un décalque de l’épisode 4, une refonte du mythe, un copié-collé de la première trilogie, etc… Ce qui est avant tout surtout une grossière erreur, c’est d’avoir fait abstraction de la Prélogie en se concentrant uniquement sur ce qui avait fait Star Wars entre 1977 et 1983. Oui mais c’est ce que les fans désiraient. Alors… Alors oui, tous ces fameux nostalgiques sont comblés en effet, tant on leur ressert la soupe qu’il avait adorée à grand renfort d’objets, de visuels et d’atmosphère proche des films originaux. Mais ce n’est pourtant pas à un bain de jouvence auquel on nous convie, mais plus à un musée poussiéreux ou un gardien nous ferait la visite en radotant. Il y a bien-sûr ce même plaisir de revoir des vieilles photos qu’on aurait scannées et qui se retrouvent non plus dans un album en dur mais dans un dossier archivé sur son ordinateur.

    J.J. Abrams n’est pas un manchot pour autant et n’a rien à envier à George Lucas en terme de réalisation. Sauf que Lucas prônait un grand classicisme qui collait plutôt bien à la Saga, lui apportant élégance et majesté, abandonné ici au détriment de cadrages plus serrés et plus télévisuels. A un montage académique et des plans où l’on prend le temps de montrer ce qui s’y passe, une succession de plans rapides avec la peur d’ennuyer les nouvelles générations de spectateurs. Le film s’autorise également un peu trop facilement les citations et les hommages appuyés à d’autres films de guerre, au lieu de renouveler et continuer à créer de la pure mythologie Star Warienne comme Lucas le faisait. Ici on nous sert du « Il Faut Sauver Le Soldat Ryan » ou plus tard un plan tiré d’« Apocalypse Now »… Le film souffre donc de ce manque d’ampleur et on ne retrouve plus tout l’aspect iconographique qui faisait la marque de fabrique des précédents opus plus ou moins bons. Dans tous les épisodes de Star Wars passés, vous pouvez empiler le nombre de plans somptueux qui jalonnent les films. Ce 7ème épisode n’en possède que très peu. Les plus beaux plans se situent au début du film, lors de l’exposition du personnage de Rey, pilleuse d’épaves, lorsque s’enchainent avec une certaine grâce une succession de jolis plans qui apportent enfin le fameux frisson attendu, mais qui ne sera plus ressenti jusqu’à la fin du film.

    Je n’avais pas encore parlé de musique… Pour toutes ces scènes introduisant cette future nouvelle héroïne, le thème composé par un John Williams essoufflé donne ici tout le crédit que l’on accorde à ce vieux compositeur qui n’a plus rien à nous prouver. Le thème s’inscrit immédiatement dans l’univers. C’est une gageure. Ce sera le seul. On cherche après désespérément une mélodie qui accroche, emblématique et qui puisse nous emporter. Mais ce ne sont que les airs que l’on reconnaît des thèmes de Leia, puis Han et Leia, ou encore celui de Luke et La Force, qui nous rappellent au bon souvenir que nous sommes bien en train d’assister à un nouvel épisode de Star Wars. Si la musique est à l’image de ce à quoi nous assistons, alors oui, John Williams n’est pas si vieux que ça et sait donc faire la différence entre du lard et du cochon. Où sont les envolées de cuivre d’« Un Nouvel Espoir », les Violons saccadés de la Marche Impériale de « L’Empire Contre Attaque », les chœurs sombres et puissants du combat entre Obiwan, Qui Gon Jinn et Darth Maul, le thème d’Anakin et Padmé, le thème de Yoda, Le duel entre Obiwan et Anakin sur la planète de lave, etc, etc, etc… Pour Star Wars VII, c’est une partition anémiée que nous propose là le compositeur d’E.T. et d’Indiana Jones.

    Mais on apprécie aussi cet épisode VII pour ces nouveaux personnages joués par des acteurs convaincus et convaincants qui heureusement finissent par supplanter les anciens venus transmettre le témoin et qu’on espère voir disparaître dans le prochain épisode. De bons dialogues et une bonne énergie d’ensemble permettent de ne jamais se sentir mal à l’aise durant les scènes en général, même si elles s’avèrent tièdes ou téléphonées. On se souvient des moments douloureux entre Anakin et Padmé dans « L’Attaque Des Clones », lorsque les deux acteurs devaient réciter des phrases absolument ineptes (Anakin à Padmé : « Je n’aime pas le sable. Il pique et s’insinue partout », ou encore Mace Windu dans « La Revanche des Sith », lors du combat contre Palpatine : « C’est lui le traitre » puis réponse de Palpatine « Non, c’est lui »… Embarras.

     

    Mais ne nous méprenons pas…

     

    Si beaucoup considèrent La Prélogie comme un ratage ou une insulte de George Lucas proférée à son public chéri, sa première trilogie tellement acclamée est loin d’être une réussite non plus. Elle a juste l’avantage de contenir le meilleur film de toute la Saga, « L’Empire Contre Attaque », et n’ayons pas peur de le dire, meilleur film tout court de tous les temps. En revanche, « Un Nouvel Espoir » souffre d’un manque de rythme assez carabiné, avec toute sa première partie et cette succession de plans avec C3PO et R2D2 dans le désert qui n’en finissent pas de marcher. Quant à « Le Retour Du Jedi », c’est l’exemple éclatant du renoncement et du manque d’ambition pour clore avec panache cette trilogie, avec déjà ce goût du recyclage tous azimuts (retour de l’Etoile Noire comme innovation scénaristique majeure). Sans doute le pire épisode des sept films, où l’Empire se fait renverser grâce et à l’aide d’oursons pelucheux qui, contre des blasters, des armes puissantes, proposent des frondes, des lance pierres et des rondins de bois. Le film en tout cas est le moins audacieux des sept, avec des héros tous encore vivants à la fin, qui se congratulent autour d’un feu de camp, les doigts dans le nez, en dansant sur de la musique d’Ewoks. Là oui, peut-être, on pouvait parler de la part de Lucas d’un sacré super foutage de gueule. Alors qu’est-ce qu’un Jar Jar Binks à côté ? Juste un idiot du village, un simplet apportant la dose de légèreté pour un premier film qui affiche très vite des intentions scénaristiques moins fun que précédemment.

    Chacun aime Star Wars, son Star Wars, avec à chaque fois des raisons différentes. « The Force Awakens » tente donc le pari de réconcilier tout le monde. Mais le pouvait-il vraiment ? Le film cartonne. C’est un immense succès à travers le monde. Oui car il correspond exactement aux attentes suscitées par le plus grand nombre. Resservir du Star Wars sans aucune prise de risque, attraper un public désireux de se replonger dans ce douillet lit où les rêves sont déjà définis pour vous, incrustés dans l’oreiller. Il faudra donc attendre 2017 pour se faire une opinion véritablement tranchée. Savoir si Walt Disney peut respecter malgré tout toutes les ambitions premières de George Lucas, ou bien juste s’en tenir à un rôle de sinistre industriel cynique et sans vergogne.

    L’ironie de tout cela, que d’avoir comparé longtemps George Lucas à ce jeune réalisateur sans avenir devenu avec un pari fou un nabab se servant de Star Wars comme poule aux œufs d’or. Lucas qui ne voyait avec cette entreprise qu’un moyen d’inventer de nouvelles choses (T.H.X, Skylwalker Ranch, I.L.M, …) et d’être tourné vers l’avenir. Sa déconvenue de constater que Sa création ne servira plus désormais qu’à produire toujours et encore le même plat sans saveur, sans âme. Mais après tout on s’en fiche. Star Wars est en partie en nous. Qu’il soit réussi avec des histoires nouvelles ou jetables, avec les mêmes moules à madeleine, Star Wars c’est nous et cette petite lueur tout au loin que l’on voudrait toucher du doigt mais qui s’éloigne dès que l’on s’en approche. Un amour impossible…

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Dévoreur Hubertouzot

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

  • Oscars 2016 : Episode 1

     

     

    La France sera représentée aux Oscars 2016 dans la catégorie « Meilleur film en langue étrangère » par « Mustang » (2015), réalisé Deniz Gamze Ergüven en turc. L’histoire de cinq sœurs assignées à résidence par leur famille dans l’attente d’un mariage forcé pour avoir joué avec des garçons sur le chemin de l’école. Encensé par la critique et le public, avec 440.000 entrées depuis sa sortie, prix du meilleur scénario à Stockholm, nommé aux Golden Globes, ce film présenté à Cannes a été choisi par la France pour la représenter après que la Turquie ait opté pour « Sivas » de Kaan Müdjeci, Prix Spécial du Jury au Festival de Venise. L’histoire d’un jeune garçon et de son chien, Sivas, accidentellement blessé.

    Cinq films seulement seront nommés et à ce jour (21 décembre) encore neuf sont en compétition sur un total de 80 en début de parcours. Une belle réussite pour la réalisatrice franco-turque dont c’est là le tout premier film. Mais il faudra attendre le 14 janvier 2016 pour connaître la sélection officielle. Pour rappel, 70 films ou personnalités françaises ont été distingués en 87 éditions. Depuis 1957, chaque pays envoie un film qui le représente. Il y eut « Jeux interdits » de René Clément en 1953, « Mon Oncle » de Jacques Tati en 1959, puis Truffaut, Demy, Clouzot, Lelouch, Rohmer, Leconte, Jeunet et plus proche de nous Haneke, Audiard, Bouchareb.

    De 1949 à 2015, la France a été nommée 54 fois, avec certaines années deux films nommés sur les cinq sélectionnés. 15 films parmi les 54 nommés ont reçu l’Oscar tant convoité. Le seul réalisateur à avoir été deux fois lauréat de cette catégorie fut René Clément, le seul à avoir réussi un doublé avec « Au-delà des grilles » en 1951 et « Jeux interdits » en 1953. La très convoitée shortlist des cinq nommés n’a été accessible dernièrement à la France qu’en 2010 avec « Un Prophète » de Jacques Audiard et la statuette gagnée pour la dernière fois en 1993 avec « Indochine » de Régis Wargnier. Catherine Deneuve n’y est sans doute pas étrangère.

    « Mustang » fera face  au très beau « Fils de Saul » du Hongrois  Lazlo Nemes, également présenté à Cannes et au magnifique « Labyrinthe du Silence », tous deux sur l’holocauste, le premier vu de l’intérieur d’un camp de concentration, le second vu du regard d’un jeune procureur dans les années 1965, vingt ans après les faits. Quant à « Sivas », le choix turc, il n’a pas été retenu parmi les neuf derniers en lice.

     

     

    Bande Annonce Mustang :

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    Trailer  Sivas :

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    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Ciné Cinéma Facebook

     

     

  • « Il est de retour » : le film sur Adolf Hitler crée la polémique en Allemagne

     

    La comédie grinçante de David Wnendt avec Oliver Masucci imagine le réveil du Führer, 70 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale dans le Berlin d’aujourd’hui. Une adaptation qui divise la critique.

     

    Et si «il» revenait ? C’est avec cette idée que le romancier allemand Timur Vermes a écrit « Il est de retour ». Il ? C’est Adolf Hitler qui se réveille soixante-dix ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale dans un parc de Berlin, à quelques pas du mémorial de l’Holocauste. Très rapidement, il décide de reprendre du service pour remettre ce pays dans le droit chemin…

    L’histoire de « Il est de retour » n’est pas à prendre au sérieux. Le monde a évidemment bien changé depuis 1945 et l’ex-führer, en décalage complet avec l’époque, devient un personnage absurde et grotesque. À moins que…

    Paru en 2013, cette satire a connu un succès phénoménal : deux millions d’exemplaires. Le livre a été traduit en 41 langues. L’adaptation de David Wnendt, avec Oliver Masucci dans le rôle principal, est sortie en octobre en Allemagne. Le film promet de battre des records d’audience mais aussi de susciter quelques questions, au moment où le pays s’interroge sur l’accueil à réserver aux centaines de milliers d’étrangers qui demandent l’asile.

     

    La critique divisée

    La question n’est plus de savoir si l’on peut rire d’Adolf Hitler. Le débat a été tranché, tant que le regard demeure critique. « Le cinéma allemand peut aussi plaisanter sur lui », écrit Die Welt. « Attention, plaisanterie à moustache », avertit Der Spiegel. Si « Er ist wieder da » (« Il est de retour » en allemand) dérange par moment, c’est parce qu’il mélange fiction et réalité, à l’image de Borat, de l’humoriste Sacha Baron Cohen.

    Adolf Hitler est filmé dans les rues de Berlin avec de vrais passants ou de vrais touristes qui, amusés et n’imaginant évidemment pas être en présence du « vrai Hitler », prennent des photos avec lui. Quel est le sens d’un « selfie avec Hitler ? », s’interroge Die Deutsche Welle.

    L’acteur Oliver Masucci a raconté, dans une interview à Bild, son expérience d’apparaître en tant qu’Hitler dans la rue : « C’était incroyable, j’étais l’attraction ». D’autres scènes, comme celle filmée devant l’entrée du local du parti néo-nazi NPD, sont en revanche totalement mises en scène. Ce mélange déstabilise, selon les critiques allemands.

    La mise en abyme se poursuit avec l’apparition d’une équipe de télévision qui voit dans cet Adolf Hitler un bon client médiatique. Elle lui offre une tribune télévisuelle. Comme si le danger, encore aujourd’hui, résidait dans le fait de ne pas prendre les idées d’extrême droite au sérieux.

     

    Auteur : Nicolas Barotte @ Twitter

     

     

  • « Papy Fait De La Résistance », dernière grande comédie française

     

    A l’heure sonnante où trébuchent dans la médiocrité du rire facile moult comédies françaises, fussent-elles concoctées pour les « jeunes », la cible idéale (« Profs », « Profs 2 », « Robin des Bois », « Aladin » et bientôt sa suite avec son parangon Kev Adams), ou sociales (« Qu’est ce qu’on a fait au bon dieu ? »), sans oublier le dégoulinant « Intouchables », toutes se vautrent dans une certaine facilité où l’histoire et le scénario ont été remplacés par une enfilade de punchlines et de gros gags sexistes, communautaires ou homophobes, le tout pétri de références télévisuelles. Aucune ambition autre que l’immédiateté du moment, du présent, de là, maintenant, à l’instant. Mais ces films sont souvent aussi de très gros succès. On a donc les comédies que l’on mérite avec son temps.

    Essayons malgré tout de remettre tout cela en perspective et remontons donc au début des années 80. « L’ère Pierre Richard » finissait… Yves Robert, après Gérard Oury, n’avait plus le monopole du rire en France. On découvrait la troupe du Splendid et ce nouveau genre d’humour plus acide, percutant et vachard. « Papy Fait De La Résistance », c’est un peu l’apogée de leur style d’humour, avec cette manière de décortiquer et railler la mentalité française, sa veulerie, sa mesquinerie, et de cristalliser le tout dans un sujet parfait pour cela : L’occupation ! Rien ne se prêtait mieux en effet que cette époque trouble de l’occupation allemande pour exprimer tous les travers de ce bon vieux peuple gaulois.

    Le film qui sort en 1983 est un énorme succès, équivalent à celui des « Visiteurs » une dizaine d’années plus tard. Ce qui est intéressant de noter, c’est l’évolution ou la recherche de l’élément prédominant de ce que sera un succès, une recette, la martingale. Une comédie n’est pas conçue pour être appréciée trente ans plus tard dans des Ciné Clubs. Tout est mis en oeuvre pour cartonner dans le présent. Les navets actuels (« Profs », « Aladin », etc) ont accéléré le processus et se désagrègent de votre cerveau dès que vous avez quitté la salle.

    Si vous re-re-voyez et comparez les deux films (« Papy » et « Les Visiteurs »), tous deux réalisés par Jean-Marie Poiré à dix années d’intervalle, alors vous obtiendrez le résultat suivant : « Les Visiteurs » se revoit assez difficilement, malgré le talent de Valérie Lemercier qui surnage dans cette tambouille faite d’anachronismes lourdingues et de situations surlignées dus à un scénario prétexte et surtout grossier, le tout emballé dans une réalisation pour téléfilm. En revanche, « Papy Fait De La Résistance », concocté et conçu comme un film à gros budget, reposait quant à lui sur un scénario complètement délirant, entre esprit BD et farce à la Blake Edwards. En exploitant la période de l’occupation puis en passant tous ses clichés dans le laminoir du Splendid, on accouchait d’un film qui aujourd’hui encore étonne par son audace et sa folie.

    C’est un des rares films aussi où l’accumulation de têtes d’affiche, aux apparitions même très brèves, fonctionne parfaitement. Le télescopage entre ancienne et nouvelle génération nourrit le film et lui apporte une ampleur supplémentaire. Mais c’est surtout Jacqueline Maillan et Gérard Jugnot qui y sont en état de grâce. Jugnot est dans le même registre qu’avec le « Père Noël », soit celui d’une ordure absolue. Il compose un collabo, petit chef hystérique de la Gestapo, totalement orgasmique. Jacqueline Maillan, impériale, en cantatrice dingue et digne. Le film collectionne ainsi des répliques devenues cultissimes. Clavier, Lamotte, Giraud derrière, sont très inspirés aussi.

    Une sorte d’alchimie, de mayonnaise, qui prend tout de suite et entraîne le spectateur dans ce grand défouloir, une vraie récréation.  Jean Marie Poiré inspiré ou habité retrouvera ce niveau de talent avec « Mes Meilleurs Copains » au début des années 90, mais plus jamais ensuite. « Papy Fait De La Résistance » clôt ainsi un âge d’or de la comédie à la Française. Quand il y avait d’abord un vrai et bon scénario pour pouvoir ensuite rajouter tout ce que chacun des acteurs pouvait insuffler comme proposition de folie.

    On a toujours un certain plaisir à revoir les De Funès, Bourvil et autres grandes comédies françaises qui ont jalonné notre enfance. Notre paysage télévisuel devient à chaque fois comme un pèlerinage, une politesse. Avec Papy… C’est autre chose, c’est différent. Le rire est presque vertical. Le plaisir que l’on prend n’est plus fédérateur mais juste un bonheur pour soi. Cet humour que l’on a retrouvé plus tard chez les frères Farrelly ou Judd Apatow, une euphorie totale, enveloppante.

    Le genre de film qui est habité, hors norme… Et devenu de toute façon aussi un classique.

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Dévoreur Hubertouzot

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Hubert Touzot : Photographe dévoreur d’images

     

     

  • Mythique | La Haine (1995)

     

     

    La Haine : Chronique d’une bavure ordinaire

    Réalisé en 1995 par Mathieu Kassovitz, son 2ème film après « Métisse » en 1993.

    Avec Vincent Cassel, Saïd Taghmaoui, Hubert Koundé.

     

     

    LA VRAIE FAUSSE INTERVIEW

     

     

    Cité des Muguets à Chanteloup-les-vignes dans le 78 un lendemain d’émeutes. Un jeune de 16 ans, Abdel Ichaha, se retrouve entre la vie et la mort suite à une garde à vue un peu trop musclée. La bavure policière d’un inspecteur du commissariat va pousser les jeunes du quartiers, aveuglés par la haine, à crier vengeance. Parmi eux, Hubert, Saïd et Vinz traînent leur ennui de cave en cave. Le film est inspiré d’une histoire vraie, celle de Makomé M’Bowolé, zaïrois de 17 ans tué d’une balle dans la tête par un policier lors de sa garde-à-vue dans le 18ème arrondissement de Paris en 1993.

    Mathieu Kassovitz : « Je me suis demandé comment le flic a pu en arriver à une telle haine pour lui tirer une balle dans la tête alors qu’il ne pouvait rien faire, c’est évident. Le policier n’a certainement pas voulu tirer mais il lui a fait peur, il a mis le flingue, il a armé le chien et je me suis demandé comment le môme a pu le mettre dans une telle situation de haine. Il y a une telle haine dans les deux camps qu’il faut au moins poser la question. Des armes, les flics en ont, et dans les cités, ils en ont aussi, mais pour l’instant, les plus sages, ce sont les mecs des cités parce qu’ils ne s’en servent pas encore ».

    Tourné en noir et blanc, le film se déroule sur une seule journée, une journée particulière, effroyable, qui va inexorablement mener au drame, comme dans le film de Ryan Coogler « Fruitvale Station » en 2013. L’objectif du réalisateur est de comprendre « comment en est-on arrivé là ? » et quel est le mécanisme qui amène les personnages à commettre de tels actes extrêmes et irréversibles ?

    Mathieu Kassovitz : « Le but était de raconter de manière générale quelle était l’ambiance des quartiers à l’époque et qui étaient ces jeunes-là. Je voulais comprendre ce qui, dans leur haine, était juste, quelle était leur revendication et comment ils vivaient le truc de l’intérieur. Quand j’ai vu l’histoire avec Makomé, qui a fait que j’ai eu envie d’écrire parce que la question était : qu’est-ce qui s’est passé dans la journée, dans les 24 heures qui ont précédé. Il se réveille le matin et il meurt le soir ; qu’est-ce qui s’est passé, qu’est-ce qui justifie ça ? C’est ça la question. J’ai voulu montrer le processus qui fait qu’il y a des jeunes qui se font tirer une balle dans la tête en entrant le soir dans un commissariat ».

    En 1995, le film sort dans un contexte de stigmatisation de la banlieue après les émeutes de Vaulx-en-Velin en 1991. Le découpage du film en scènes qui affichent l’heure démontre l’intensité dramatique d’une situation où la tension monte au fur et à mesure des contrôles de police et des provocations de tous ordres, comme la rencontre avec les skinheads ou l’irruption dans une galerie d’art. Les jeunes de cité se retrouvent dans une spirale de mépris ressenti, tout au long de la journée, au fil des heures qui défilent jusqu’au dénouement tragique. Une caractéristique qui n’est pas sans rappeler le journal télévisé et la structure du reportage d’actualité lors d’un drame filmé en direct et suivi d’heure en heure par les journalistes.

    Le film eut un important succès commercial, porté par l’énorme controverse qu’il suscita concernant son point de vue sur la banlieue et les violences urbaines, en raison du rôle provocateur de la police dénoncé par le scénario. Alain Juppé, alors premier ministre, condamne fortement l’image renvoyée par le film, présentant les agents de l’Etat comme des auteurs de violences policières.

    Mathieu Kassovitz : « Il y avait un sujet spécifique qui était mondial à l’époque : c’était les violences policières entre la police et une certaine catégorie de gens du ghetto, que ce soit partout dans le monde. Le film a été reconnu dans le monde entier parce qu’il y avait le même problème partout au même moment. Les gens pouvaient s’identifier. Pourquoi ces jeunes qu’on traite de sauvages ne prennent pas un flingue pour tirer sur un flic le soir quand ils sentent l’injustice au point où ils la sentent ? J’ai vu le frère de Makomé partir en courant en disant « je vais tous vous shooter » et revenir : il n’avait shooté personne. J’ai voulu essayer d’analyser ça, cette sagesse. De même, pourquoi un flic qui arrive à la police en souhaitant rétablir la justice parce qu’il est pour la République et qu’il veut défendre les pauvres et l’opprimé se retrouve à faire l’inverse ? Est-ce que c’est lui qui est quelqu’un de mauvais ou est-ce que c’est le système qui le transforme ? »

    A Cannes, tous les policiers du service d’ordre tourneront le dos à l’équipe du film lors de la montée des marches.

    Le ministre de l’intérieur de l’époque, Jean-Louis Debré, renchérit en allant déposer plainte contre la chanson « Sacrifice de poulet » du groupe Ministère A.M.E.R., dont les paroles sont directement inspirées du film. Dix ans plus tard, en 2005, le film sera diffusé sur la chaîne parlementaire à titre de documentaire !

    Mathieu Kassovitz : « Le rap est la musique qui m’a amené à m’intéresser aux quartiers et aux violences policières. Je suis arrivé à ce film à cause du Hip-Hop, pas parce que je suis un mec de banlieue. Il n’y a pas de musique dans le film à part celle qu’on entend dans les postes. Il y a Bob Marley au début puis c’est tout, et DJ Cut à la fenêtre. On a voulu représenter le film « La Haine » à travers un album de compilation de morceaux écrits par des groupes. On a découpé le scénario en thèmes qu’on a distribués à des groupes. »

    Sous la direction de Solo du groupe « Assassin » dont Mathias Crochon, le frère de Vincent Cassel (Vincent Crochon à la ville), plus connu sous le pseudo « Rockin’ Squat », a été le fondateur, onze morceaux sont édités dont celui de Ministère A.M.E.R., « Sacrifice de poulet ». Le groupe de Sarcelles composé entre autres de Passi, Stomi Bugsy ou Doc Gyneco est connu pour son ton hardcore. Il est blacklisté par les médias et ostracisé par les autres groupes de Rap qui en 1995 vivent énormément dans la rivalité.

    Mathieu Kassovitz : « J’ai insisté pour que le groupe Expression Direkt fasse partie de l’aventure. C’est le seul morceau de West Coast. Pour le reste (les paroles), la seule contrainte était un thème du film. Après, ils venaient avec ce qu’ils voulaient ; c’était pas à nous de les censurer. »

    Si le Rap est à l’origine de l’idée du film, on y trouve également de nombreuses références cinématographiques : sur son site, le réalisateur annonce clairement s’être inspiré du film de Costa Gavras « Z » (1969). Autre exemple, dans une scène située à Paris, les trois jeunes passent devant une affiche publicitaire filmée en gros plan durant quelques secondes sur laquelle on peut lire « Le monde est à vous » et qui n’est pas sans rappeler la devise de Tony Montana (Al Pacino) dans le film de Brian de Palma « Scarface » :  The world is yours ». Le fil rouge, c’est Vinz, fasciné par le personnage de Travis dans le film de martin Scorsese « Taxi Driver » (1976) et qui donne lieu à une scène d’anthologie dans la salle de bain face au miroir.

     

     

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    Mathieu Kassovitz : « J’ai voulu réinventer le truc que faisait Scorsese qui présente ses personnages avec une image arrêtée, le nom en-dessous, procédé qu’a repris aussi Tarantino. Par exemple dans la scène où Saïd taggue « Saïd », ou celle avec le nom de Hubert dans la salle de boxe. »

    Outre son sujet brûlant, une BO polémique, le film est aussi à l’origine de plusieurs phrases cultes telles que « jusqu’ici tout va bien », « arrête de faire ton caca nerveux » ou l’expression « moika » qui désigne une personne antillaise. Mathieu Kassovitz reprend également tel un clin d’oeil, le dialogue écrit par les Inconnus dans un de leur sketch « La Zup » : « Manu tu descends ? » « Pour quoi faire ? ».

    Le film fut donc couronné de succès. Il obtint le Prix de la mise en scène à Cannes en 1995 et trois Césars en 1996, dont celui du meilleur film. Pour l’anecdote, le prix fut décerné et la statuette dorée remise par les Inconnus, mais pas à Kassovitz, absent ce jour-là. Vingt ans après, le film est devenu culte alors qu’au départ, aucun producteur ne voulait avancer un centime. Personne ne voulait du noir et blanc, du titre (transformé en « Droit de cité », ou d’acteurs jusque là inconnus. Aujourd’hui, sa portée sociale a été décuplée. Il cumule pas moins de deux millions d’entrées rien qu’en France et fit une carrière internationale. La Haine a commencé comme une histoire de potes qui avaient envie de secouer le cinéma français, allant à l’époque jusqu’à louer un appartement pour y vivre ensemble le temps du tournage à l’intérieur même de la cité.

    Mathieu Kassovitz : « Le plus dur, ce n’est pas d’avoir les autorisations des mecs de la mairie, c’est d’avoir l’autorisation des mecs qui vivent dans la cité »

    Il finit en symbole d’un certain cinéma, avec peut-être, une suite : à quand une Haine 2 ?

    Mathieu Kassovitz : « Je ne sais pas, on verra. Peut-être ou peut-être pas, ça dépend de tellement de choses. Je ne sais plus ce qu’est le sujet de la banlieue aujourd’hui. Pour que je me remette dans le bain il faudrait que je retourne là-bas et je ne suis pas sûr que j’aie envie de faire ce chemin-là parce que c’est à des gens de l’intérieur de le faire. A l’époque, on ne connaissait pas la banlieue. J’ai fait le film pour des gens qui ne connaissaient pas la banlieue afin qu’ils puissent changer leur avis, regarder les infos d’une autre manière et éventuellement voter d’une autre façon. Les films de banlieue, c’est « Raï » et « Ma cité va craquer ». Je n’ai pas voulu faire ça. Je n’ai pas voulu faire un film de banlieue pour les mecs de banlieue et encore moins un documentaire. Je déteste ça. Je ne suis pas fan de « Boyz’N the Hood » (1991). Je ne voulais pas caricaturer la banlieue, mais au contraire l’ouvrir à des gens qui ne la connaissent pas. Pour faire un film, il faut un message, et je ne sais pas quel pourrait être le message aujourd’hui. A l’époque on n’avait pas de problème de crise économique, de frigo vide ou de communautarisme. »

     

     

    Bande annonce :

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    Bande originale :

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    Source : « On refait le Rap » (5 juin 2015)

    [youtube id= »PNTIppNPHiI » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

    Et pour finir, vous pouvez toujours vous procurer « Les dix ans de la Haine » (Edition Collector 3 DVD)…

     

     

     

  • The September Issue | Names, Names, Names !!!

     

    Très rares sont les films ou documentaires qui réussissent à parler du milieu de la mode, de ses affres, de ses coutumes, sans que cela ne devienne pour autant une vitrine « pipol » et chic de quelque chose qui paraîtrait en fait pour le profane comme un milieu seulement vain et décérébré. « The September Issue » de R.J. Cutler est de ceux-ci…

     

    « Lagerfeld Confidentiel », le documentaire sorti en 2006, et consacré à ce personnage illustre, avait déjà eu le mérite de donner un éclairage assez intéressant sur ce monde très codifié. Loic Prigent, son réalisateur, est celui qui en France a su le mieux parler de la mode et de son microcosme avec désinvolture, mais aussi avec respect et pédagogie, apportant un éclairage ultra pointu, sans en avoir l’air, sur ce qu’est vraiment la mode.

    Ici, avec « The September Issue », le film de R.J. Cutler, on nous parle surtout de la création de A à Z d’un numéro du Vogue Américain. Celui qui sort en septembre, en fait, soit le plus important, le plus attendu des numéros de l’année du magazine le plus emblématique de la mode internationale. Anna Wintour, sa rédactrice en chef, qui depuis des lustres fait exister et surtout vendre ce magazine, sorte de baromètre des tendances mondiales, check-up froid du grand corps de la mode, s’y montre telle qu’elle est.

    Ce qui frappe surtout, c’est que ce film ne cherche nullement à rendre encore plus glamour ce milieu. Non, on dirait plutôt qu’il est conçu avant tout pour ceux qui aiment la mode et qui la font. Incroyablement technique et bourré de détails sur la mise en boite de ce fameux numéro de Vogue, « The September Issue » nous en montre réellement les coulisses, et nous dévoile tout le process de création et de conception du magazine.

    On pense bien sûr à « Le Diable s’habille en Prada ». Mais ici, on décortique uniquement le fonctionnement de cette machinerie. Cette petite femme austère, qui parfois tente d’arrondir son image avec un trait d’humour qui glace encore plus son auditoire, reste une professionnelle absolue qui connaît tout sur tout à la mode, aux tissus, aux motifs, aux couleurs, mais aussi aux mannequins, photographes, stylistes et créateurs… Saisissant de la voir intimider à ce point tous les grands noms de la profession, voire d’influencer jusqu’aux collections en cours ou même futures. On apprend ainsi son aversion pour le noir, et lui préférer la couleur et les motifs. Ironique quand on sait un tant soit peu que dans ce milieu de la mode et de la branchitude, le noir a toujours été le passeport absolu. Mais forte de ses propres goûts et d’un flair presque extralucide, la femme aux grosses lunettes noires et à la coupe de cheveux au carré sait toujours ce qu’il faut voir. Et l’enjeu est de taille tant ce magazine brasse des chiffres mirobolants.

    Pour tout cela, ce film peut laisser pas mal de spectateurs même un peu « modeux » sur le côté, car il se veut à l’image de son personnage central : précis, pointu et exigeant.

     

     

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