Auteur/autrice : Instant-Chris

  • Luis Sepúlveda : « Raconter, c’est résister »

     

     

    « Raconter, c’est résister »… La vie de Luis Sepúlveda oscille entre ces deux actes, qu’il voulait aussi engagés l’un que l’autre. L’écrivain chilien, auteur du best-seller mondial « Le Vieux qui lisait des romans d’amour », est mort jeudi 16 avril du Covid-19, à l’âge de 70 ans.

     

    Il avait trouvé refuge à Gijon, paisible ville côtière des Asturies : vingt-trois ans que l’écrivain chilien y résidait avec son épouse, la poétesse Carmen Yanez, savourant ici plus qu’ailleurs, cette « tradition de lutte politique instaurée par les mineurs » et cet « esprit de fraternité » qui le rassérénait. Il rentrait d’un festival littéraire qui s’était tenu non loin de là, au Portugal, lorsqu’atteint d’une féroce pneumonie, le diagnostic est tombé, le 29 février dernier. A l’hôpital d’Oviedo, il a lutté pendant un mois et demi contre le coronavirus, avant de succomber à la maladie, jeudi 16 avril. Ce sera le dernier combat du révolutionnaire, qui avait arpenté d’autres terrains, autrement plus périlleux, minés ceux-là par les dictatures.

    De l’Espagne au Chili, on pleure « Le Vieux qui lisait des romans d’amour », titre de son premier succès planétaire, publié en 1992. Il n’était pas si « vieux », Luis Sepúlveda : il avait 70 ans. Et comme son héros, il avait vécu de bouleversantes découvertes : celle, dans sa jeunesse, de la forêt amazonienne et celle à ses vieux jours, de la lecture, puissant « antidote contre le venin de la vieillesse », assurait-il. Parce que « raconter, c’est résister », mantra emprunté au Brésilien Joao Guimaraes Rosa, des romans, il en écrira une vingtaine, traduits dans 50 langues et couronnés de prix, du Pégase d’or italien au prix chilien de la critique. En France, on l’avait nommé chevalier des Arts et des Lettres.

     

    La voix des oubliés

    Ses « romans d’amour », il les dédie d’abord à son pays, le Chili. Il a beau l’avoir quitté en 1977, contraint à l’exil, il ne perdra rien de son militantisme : menant des actions au sein de la Fédération internationale des droits de l’homme et portant dans ses romans la voix des oubliés. Toujours ces mêmes héros fragiles et vacillants, brisés par l’histoire et l’exil, des perdants ou des vaincus qui, épris de rêves collectifs, refusent la défaite. Leur destin, leurs combats et désillusions n’ont rien de romanesque : c’est son vécu qu’il nous conte, lui qui sera, comme tant d’autres, condamné et torturé par le régime de Pinochet.

    Sa peine ? Vingt-huit ans de prison en 1973, pour « trahison » et « conspiration ». Son crime ? S’être rangé du côté du président Allende, dont il appartenait à la garde rapprochée. On critique, dans ses romans, son sensationnalisme ? Il l’assume. Chez lui, ça fait partie du processus créatif : « Je suis entièrement ému par l’histoire que je raconte, j’aime être très fidèle à mes personnages, tomber amoureux d’eux, car je sais que le lecteur, en lisant, ressentira une émotion très similaire à ce que je ressens en écrivant. Pouvoir partager ses émotions et ses sensations, c’est ce qu’il y a de plus beau dans la littérature », confiait-il.

     

    Le sentiment de l’exil

    Le sentiment de l’exil, ce natif d’Ovalle, qui se disait « profondément rouge » et qui avait rejoint à 12 ans les Jeunesses communistes, l’a hérité d’un grand-père anarchiste qui avait fui avant lui l’Andalousie. Dans ses veines coulait aussi le sang d’un chef indien, auquel il dédiera un roman, « Histoire d’un chien Mapuche », pénétré par son esprit de rébellion. En 1977, Amnesty International le sort au bout de deux ans et demi des sordides geôles de Temuco. Pas question d’accepter en échange cet exil de huit ans en Suède ; il gagne les territoires reculés de l’Amérique du Sud : l’Equateur, d’abord, où il monte sa compagnie théâtrale, avant de s’immerger en 1978 dans la vie des Indiens Shuars, sur lesquels il scrute pendant un an pour l’Unesco l’impact de la colonisation.

    De ses recherches sur les ethnies, il découvre les idiosyncrasies régionales, « le plus grand trésor de l’esprit humain », dira-t-il. Et puis, le Nicaragua où en 1979, il passe à la lutte armée aux côtés des Sandinistes de la brigade Simon Bolivar. Depuis l’Allemagne où il devient grand reporter, il embrasse une autre cause : l’écologie. Et c’est à bord d’un bateau de Greenpeace, sur lequel il embarque dans les années 80, qu’il alerte sur les désastres qui menacent notre planète. Son Moby Dick à lui, ce sera cette « Histoire d’une baleine blanche » qu’il publie en 2019.

    Reste qu’au Chili, il n’y retournera qu’après la chute de la dictature. Dans son recueil « Histoires d’ici et d’ailleurs », il dévoile ce cliché, dont il ne s’est jamais séparé : celui d’une bande de gamins de La Victoria, banlieue pauvre de Santiago, qu’il s’était promis un jour de réunir. Avec l’avènement fragile de la démocratie, c’est un autre pays qu’il retrouve, ravagé par les macs qui charcutent les jeunes filles au scalpel et par ces parvenus de millionnaires, escroqués par des Madoff en série.

     

    La lutte contre le fléau de l’oubli

    Tout a changé, sauf les visages de ses camarades qui portent à jamais les stigmates de l’horreur. Le pire fléau ? L’oubli, pour ce révolutionnaire, habité par la nostalgie des combats d’autrefois, consacrés à la défense des idéaux et de ce temps qui ne sera plus. Dans « L’ombre de ce que nous avons été », il faut les voir, ces anciens militants de gauche, sexagénaires, prêts à renouer, 35 ans après le coup d’Etat de Pinochet, avec l’action révolutionnaire.

    Le secret des lendemains qui chantent ? Pour ce poète et conteur hors pair, il est dans notre capacité à croire aux rêves. Relisez donc son « Histoire d’une mouette et du chat qui lui apprit à voler », fable enchanteresse, vendue à 5 millions d’exemplaires et adaptée au cinéma. Il l’a écrite avec le cœur et les tripes, pour toucher, amuser et faire réfléchir.

     

    Article © Audrey Lévy pour Marianne

     

     

     

  • Histoire d’un Hit | Minnie Riperton : « Inside My Love »

     

     

    Minnie Riperton était une chanteuse de soul et une compositrice incroyable, qui nous quittait malheureusement beaucoup trop tôt, le 12 juillet 1979, à l’âge de 31 ans. Vous la connaissez évidemment pour son immense hit « Lovin’ You » sorti en 1975, mais ça n’est pas le morceau que nous avons choisi aujourd’hui.

     

    Notre choix s’est donc plutôt porté sur « Inside My Love », extrait de l’album « Adventures in Paradise » datant lui aussi de 1975 ; un morceau soulful à souhait qui traite… de sexe et d’amour charnel. Cette chanson nous raconte l’histoire de deux inconnus qui viennent tout juste de se rencontrer, et qui vont éprouver le besoin irrépressible de se connaître aussi intimement et intérieurement que deux êtres normalement constitués peuvent l’envisager.

    You can see inside me.
    Will you come inside me?
    Do you want to ride inside my love?

    Composée par Minnie Riperton, Leon Ware et Richard Rudolph, « Inside My Love » oppose clairement un texte plus qu’explicite et suggestif à l’innocence de la voix de son interprète. Minnie Riperton s’y fait pourtant chatte, langoureuse, tandis qu’elle vous susurre cet appel à l’amour au creux de l’oreille…

    Cette chanson est devenue un tel standard, qu’on ne compte plus les reprises ou les samples extraits du morceau, à commencer par Quentin Tarantino qui l’utilisait en 1997 dans sa B.O. de « Jackie Brown ». Mais aussi A Tribe Called Quest, 2Pac, Donell Jones, Aaliyah, pour ne citer qu’eux…

    En clair, si cette chanson ne vous donne pas envie d’allumer des bougies, d’ouvrir une bouteille de champagne et de vous glisser dans quelque chose de plus confortable et moelleux qu’un canapé Ikea… alors soit vous êtes sapiosexuel, soit vous devriez peut-être vérifier la qualité de vos enceintes.

     

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  • Le Street Art au temps du Coronavirus

     

     

    Face à l’avancée du coronavirus, les street-artists donnent à voir tout leur talent sur les murs de la planète. D’Europe au Brésil, en passant par les Etats-Unis, l’Inde, l’Afrique et l’Amérique latine, ils ont souvent réalisé leurs oeuvres juste avant les injonctions de confinement, à l’image du Parisien C215. Et parce que les rues sont depuis désertées, toutes ces merveilles auront peu l’occasion d’être admirées de près. Voici donc un tour du monde des plus belles fresques que nous avons dénichées pour vous.

     

    C215 (Paris)

    Premier street artist à nous livrer sa vision de l’épidémie, l’artiste parisien C215 a lancé une édition d’art de son « Amour au Temps du Coronavirus » au profit de la Fondation des Hôpitaux de France, « Pour soutenir le personnel hospitalier en première ligne dans la lutte contre le COVID-19 ».

    Portraitiste de rue temporaire, armé de sa bombe et de son spray, C215 redonne aux murs gris et sales un nouveau souffle esthétique. Il les habille de portraits colorés, réalisés au pochoir ou à main levée. Ses modèles ? Sa fille, Nina, bien souvent, mais aussi de nombreux anonymes qui peuplent les quartiers qu’il arpente inlassablement, à la recherche du spot parfait.

     

    https://www.instagram.com/p/B97GedgllG5/?utm_source=ig_embed

     

     

    Fake (Amsterdam, Pays-Bas)

    « Super infirmière, c’est son titre. J’ai peint cette « ode » aux professionnels de santé autour du monde ! », a commenté sur Instagram le street-artist allemand Fake, basé à Amsterdam.

    Fake est né le 15 mai 1980 et pratique le graffiti depuis plus de vingt ans. Ayant grandi dans un environnement gris et ennuyeux, il a vite ressenti le besoin de faire sourire les visages des autres par le biais de l’ironie et de l’humour. Après avoir découvert le pouvoir du pochoir, il en est finalement tombé accro. Autodidacte, Fake a commencé à expérimenter et à combiner les styles dès ses débuts, pour parvenir à une signature graphique unique.

     

    https://www.instagram.com/p/B-ACb_4lMCf/?utm_source=ig_embed

     

     

    Pobel (Bryne, Norvège)

    « En ces temps difficiles, j’espère que cette pièce peut être une contribution positive et apportera de la joie. Soyez prudents et prenez soins les uns des autres », a écrit Pøbel, en précisant le titre de l’oeuvre : « Lovers ».

    Originaire d’Oslo en Norvège, Pøbel a commencé à utiliser des pochoirs à la fin des années 90, pour ensuite peindre des fresques en extérieur dans le courant des années 2000. Mais la Norvège ne comportant pas de très grandes agglomérations, Pøbel s’est vite senti à l’étroit et a eu l’idée d’amener la culture urbaine à la campagne, là où on ne l’attend pas.

     

    https://www.instagram.com/p/B9rmlkagxkA/?utm_source=ig_embed

     

     

    Hijack (Los Angeles, Californie)

    « En tant qu’humains, nous aimons penser que nous sommes maîtres de notre propre coin de l’univers. Mais de temps à autre, une entité microscopique vient nous rappeler que nous ne le sommes pas », commente Hijack.

    Né à Los Angeles, Hijack s’est imposé en quelques années comme l’un des artistes les plus prometteurs du street art. En avril 2013, à 20 ans, alors qu’il expose dans la prestigieuse galerie Mead Carney à Londres, Hijack y est encensé par la critique et considéré comme le nouveau Banksy. La même année, son exposition au Mexique est prolongée de plusieurs mois, et la galerie Moretti & Moretti présente ses œuvres à la manifestation « Street & Pop ». En 2014, une exposition en solo lui permet de donner à voir et à rêver de nouveaux horizons.

     

    https://www.instagram.com/p/B92H7YxpSVh/?utm_source=ig_embed

     

     

    Nello Petrucci (Pompei, Italie)

    Un collage baptisé « Sweet Home » représentant la famille Simpson et pour nous rappeler de rester à la maison (regardez les trois images en suivant la flèche à droite).

    Pour Nello Petrucci, les coupures de journaux, les photographies et les affiches de films sont le point de départ d’un monde à plusieurs niveaux. Ses œuvres allient collage et peinture, de façon unique. À partir des compositions et des graphiques solides qu’il appelle des « images capturées », Petrucci décompose ces images en leurs composants et les rassemble de nouveau, en nous offrant d’autres perspectives.

     

    https://www.instagram.com/p/B9l3pbaIrnw/?utm_source=ig_embed

     

     

    RBS Crew (Sénégal)

    Le collectif sénégalais RBS Crew a choisi de mettre ses bombes de peinture au service de la lutte contre le coronavirus. Il multiplie les fresques de prévention avec un rappel des gestes barrières, comme ici (faites défiler les différentes photos en suivant la flèche).

     

    https://www.instagram.com/p/B-FAGnGnUeF/?utm_source=ig_embed

     

     

    Darion Fleming (Charlotte, Etats-Unis)

    « Pure’ll Gold » (Notez le message « Nouveau ! Disponible nulle part » sur le flacon de cette splendide fausse publicité de gel hydro-alcoolique). « J’espère que cela pourra offrir un peu de soulagement comique dans cette période grave et éprouvante pour l’humanité. Restez à l’abri, restez en bonne santé et restez créatifs », a écrit Darion Fleming sur Instagram.

     

    https://www.instagram.com/p/B-AI3E7ptUc/?utm_source=ig_embed

     

     

    Tyler (Mumbai, Inde)

    « Keep calm and corona », a simplement écrit l’artiste Tyler.

     

    https://www.instagram.com/p/B9we_-Jps7n/?utm_source=ig_embed

     

     

    Onemizer (France)

    « L’amour est la clé », a écrit l’artiste français Onemizer, alias Cyril Valade.

    Onemizer puise son inspiration dans les classiques du Pop Art tels que Basquiat, Warhol… ainsi que plus simplement dans sa vie quotidienne, ce qui l’entoure, et dans la scène street art. Il aime travailler les lettrages, revisiter les portraits de personnalités ou objets qui ont marqué l’Histoire ou son histoire personnelle.

     

    https://www.instagram.com/p/B94jse4ILJJ/?utm_source=ig_embed

     

     

    TV Boy (Barcelone, Espagne)

    Le street-artist italien TV Boy a réalisé cette oeuvre à Barcelone. « Divided We Stand, United We Fall », a-t-il écrit, ajoutant #Stay Home. En détournant cette image de l’Oncle Sam (qui personnifie les Etats-Unis), il a souhaité critiquer le président Trump qui a tardé à admettre l’ampleur de la crise sanitaire. En inversant le slogan habituel : « Restons unis, divisés nous tombons » en « Restons divisés, ensemble nous tombons », il souligne la nécessité de la distanciation sociale.

     

    https://www.instagram.com/p/B9pmhqEqWVs/?utm_source=ig_embed

     

     

    Jilly Ballistic (Brooklyn, New York, Etats-Unis)

    « Un autre nouveau normal », a écrit l’artiste américain Jilly Ballistic autour de ce collage réalisé à New York, qui appelle avec humour à la distance sociale.

     

    https://www.instagram.com/p/B-KcLtVp5EE/?utm_source=ig_embed

     

     

    Gnasher (Essex, Angleterre)

    « A la vôtre, restez en sécurité… Je ne mange pas de pâtes ni ne m’essuie le cul ce soir… mais j’ai plein de bières », a écrit cet artiste anglais. #washyourhands

     

    https://www.instagram.com/p/B9pU46Fp3v6/?utm_source=ig_embed

     

     

    Pony Wave (Venice Beach, Los Angeles, Californie)

    « J’ai réalisé ce mural il y a plusieurs jours. Maintenant je reste à la maison, comme tout le monde », a tenu à préciser la street-artist Pony Wave. « Restez à l’intérieur, s’il-vous-plaît ! Je promets de revenir à Venice lorsque ce sera terminé et de peindre ».

     

    https://www.instagram.com/p/B-H0sOrAa-l/?utm_source=ig_embed

     

     

    Airá Ocrespo (Brésil)

    « Masque de Bolsonaro contre le coronavirus », a écrit l’artiste brésilien Airá Ocrespo sur son oeuvre. « Menteur, psychopathe, répugnant, vil, mesquin… », le street artist brésilien n’a pas de mots assez durs pour qualifier le président brésilien Bolsonaro dans son post Instagram. « Vous pouvez ajouter votre pire insulte contre cette crapule », conclut-il.

     

    https://www.instagram.com/p/B94FWBCJ1_F/?utm_source=ig_embed

     

     

    Muckrock (Miami, Etats-Unis)

    L’artiste californien Muckrock a réalisé cette oeuvre représentant Anna Nicole Smith avec un masque barré du mot « Peur », alors qu’il se trouvait à Miami au début de la panique des Américains devant l’arrivée du coronavirus. Pourtant, a-t-il écrit dans son post, « Miami est un bon endroit pour être en confinement ».

     

    https://www.instagram.com/p/B9poiVfpLHJ/?utm_source=ig_embed

     

     

    Teachr1 (Miami, Etats-Unis)

    Sans commentaire…

     

    https://www.instagram.com/p/B9yaxYYpMYH/?utm_source=ig_embed

     

     

    The Rebel Bear (Glasgow, Ecosse)

    « Un jour viendra où les masques pourront tomber, les frontières réouvriront et les connexions pourront reprendre – espérons-le plus fortes que jamais. Plein d’amour et prenez-soin de vous », a écrit l’artiste écossais.

     

    https://www.instagram.com/p/B94pLZYjrny/?utm_source=ig_embed

     

     

    Source : France Info

     

     

     

  • French Connection (1978-1982) : Episode 05

     

     

    Plongée dans la France de la toute fin des années 70, les années Giscard : période des grands bouleversements sociétaux et d’un certain sentiment de modernité, entre libéralisation du divorce et éclatement de l’ORTF. Pourtant, la jeunesse s’ennuie et se réfugie alors dans l’émergence de nouvelles scènes rock et new-wave. Parmi les groupes qui s’imposent : Téléphone, Starshooter ou Bijou.

     

    Cette même année 1980, on trouve aussi dans les bacs d’étranges 45T, comme ce « A Mon Âge Déjà Fatigué », pop légère, hédoniste quoique désabusée, enregistré par le chanteur Pierre-Edouard et écrit par un certain Jay Alanski, en collaboration avec le musicien Wally Badarou. Jay Alanski qui se fait connaître en 1979 en composant la musique des premières chansons de Lio avec laquelle il travaillera durant de nombreuses années.

     

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    Mais soudain surgit 1981 et l’élection présidentielle, à laquelle Coluche ne s’était finalement pas présenté. L’accession au pouvoir de Mitterrand scelle la fin de ces années 70, juste après le virage radical qu’amorce le monde à partir de 1979. La jeunesse en avait momentanément oublié sa fatigue et pensait ne plus jamais s’ennuyer…

     

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    Téléphone, qui s’était toujours posé comme un groupe politiquement engagé, se produisant à la Fête de l’Humanité, participe en juin 1981 à un concert géant et gratuit, Place de la République, pour fêter l’élection de Mitterrand. Ils y partagent notamment la scène avec Jacques Higelin et y interprètent ce titre, « Fait Divers », extrait de leur deuxième album sorti en 1979, qui deviendra un temps le générique du journal télévisé de la nuit d’Antenne 2.

     

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    Les années suivantes seront marquées par l’explosion des radios libres, initiée en 1981. Cette même année, le Golf Drouot ferme ses portes, après un ultime concert. Le Rock marque le pas… Bientôt, Téléphone tentera de prendre un virage grand public, mais finira par se séparer, comme Starshooter ou Bijou. La Cold Wave, la New Wave à la Française, accouchera quant à elle d’une sorte de Pop réinventée. On pense évidemment à tous ceux qui marqueront cette nouvelle décennie, entre Etienne Daho et Niagara, en passant aussi par le groupe Taxi Girl apparu en 1981, et son chanteur emblématique Daniel Darc, qui deviendra l’icône de cette scène chic parisienne, décontractée et moderne.

     

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    Ainsi s’achève notre évocation de cette « French Connection » des années 1978 à 1982. Nous aurions évidemment pu aussi citer d’autres formations qui auront marqué la période, de Shakin’ Street à Stinky Toys, en passant par Little Bob Story, Les Dogs ou encore Les Olivensteins. Peut-être pour une prochaine fois…

     

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    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »]  French Connection (1978-1982) : Episode 01

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] French Connection (1978-1982) : Episode 02

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] French Connection (1978-1982) : Episode 03

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] French Connection (1978-1982) : Episode 04

     

     

     

  • Restez chez vous et baisez-vous…

     

     

    « Je ne savais pas que l’amour, c’était une maladie. Vous au moins vous êtes tranquille, vous vous êtes fait vacciner ! » 

     

    Parce que ce matin, j’en profite pour vous dire : Si vous interrogez 50 experts, vous savez, les mêmes que notre gouvernement a interrogés, eh bien, vous constaterez que vous aurez en général 50 avis différents, et ce pour évidemment des considérations, des objectifs tous différents, quand on ne parle même pas de pathologies psychologiques lourdes ; entre ceux qui savent tout sur tout, ceux qui sont dans l’idéologie mortifère, ceux qui ne voulaient pas effrayer la population, ceux qui sont souvent dans le déni, ceux qui ne voulaient pas dire la vérité pour que les élections se tiennent bien, ceux qui ont fait prévaloir l’intérêt économique avant l’intérêt humain et sanitaire, et bien d’autres raisons encore sans rapport avec la réalité des faits…

    Alors, aujourd’hui, à qui pouvons-nous nous fier ? Evidemment à ceux qui sont au coeur de cette guerre, qui eux savent parce qu’ils le vivent au quotidien, dans leur chair. Je prends comme exemple un médecin français qui travaille à Wuhan depuis des années, qui n’a pas vu sa famille depuis plus de deux mois, et qui nous adresse ce message : « Restez chez vous à partir de maintenant, tout de suite ! N’ayez aucun contact avec l’extérieur pendant 2, 3 semaines, 4 semaines si nécessaire, AUCUN ! Et si tout le monde respecte cela, vous vous protégerez, vous protégerez vos proches, le personnel soignant, les gens qui vous nourrissent, et il n’est pas impossible que vous voyiez la courbe des contaminations commencer à s’infléchir ».

    Qu’est-ce que c’est, quelques semaines, dans une vie ?? Et quand tout ce film d’épouvante sera terminé, il sera temps d’en tirer les conclusions qui s’imposent, et il faudra que tous ceux qui nous ont menés à ce désastre rendent des comptes, dans les urnes comme dans leurs petites consciences bien rances ! Car préparons-nous à ce que plus rien ne soit comme avant… Alors faisons en sorte que ça soit pour le bien !!!

    Et comme les distances de sécurité n’ont pas lieu d’être sur internet : un baiser par jour, sur ce fil. De ces baisers qui redonnent espoir, avec plein de salive autour !

     

    Jour 01 du Grand Confinement : Rita Hayworth et Glenn Ford dans « Gilda ».

     

    Jour 02 du Grand Confinement : Marcello Mastroianni et Anita Ekberg dans « La Dolce Vita ».

     

    Jour 03 du Grand Confinement : Michèle Morgan et Jean Gabin dans « Quai des Brumes ».

     

    Jour 04 du Grand Confinement : Faye Dunaway et Steve McQueen dans « L’Affaire Thomas Crown ».

     

    Jour 05 du Grand Confinement : Deborah Kerr et Burt Lancaster dans « Tant qu’il y aura des hommes ».

     

    Jour 06 du Grand Confinement : Eva-Marie Saint et Marlon Brando dans « On The Waterfront ».

     

    Jour 07 du Grand Confinement : Jean Seberg et Jean-Paul Belmondo dans « A Bout de Souffle ».

    Jour 08 du Grand Confinement : Brigitte Bardot et Jean-Louis Trintignant dans « Et Dieu créa la Femme ».

     

    Jour 09 du Grand Confinement : Ingrid Bergman et Cary Grant dans « Notorious ».

     

    Jour 10 du Grand Confinement : Vivien Leigh et Clark Gable dans « Autant En Emporte Le Vent ».

     

    Jour 11 du Grand Confinement : Audrey Hepburn et Gregory Peck dans « Vacances Romaines ».

     

    Jour 12 du Grand Confinement : Ingrid Bergman et Cary Grant dans « Les Enchaînés ».

     

    Jour 13 du Grand Confinement : Anna Karina et Jean-Paul Belmondo dans « Pierrot Le Fou ».

     

    Jour 14 du Grand Confinement : Cameron Diaz et Jim Carey dans « The Mask ».

     

    Jour 15 du Grand Confinement : Audrey Hepburn et George Peppard dans « Breakfast At Tiffany’s ».

     

    Jour 16 du Grand Confinement : Scarlett Johansson et Jonathan Rhys-Meyers dans « Match Point ».

     

    Jour 17 du Grand Confinement : La Belle et Le Clochard dans… « La Belle et le Clochard ».

     

    Jour 18 du Grand Confinement : Kate Winslet et Leonardo DiCaprio dans « Titanic ».

     

    Jour 19 du Grand Confinement : Vivien Leigh et Clark Gable dans « Autant En Emporte Le Vent ».

     

    Jour 20 du Grand Confinement : Dakota Johnson et Jamie Dornan dans « 50 Nuances de Grey ».

     

    Jour 21 du Grand Confinement : Zira et Charlton Heston dans « La Planète des Singes ».

     

    Jour 22 du Grand Confinement : Vittoria Puccini et Stefano Accorsi dans « Encore Un Baiser ».

     

    Jour 23 du Grand Confinement : Ellen Ripley et Alien dans « Alien 3 ».

     

     

     

  • La Nuit Body Snatchers à la Cinémathèque

     

     

    Ce qui, à l’origine constituait le postulat d’une nouvelle de science-fiction, (« Graines d’épouvante » de Jack Finney publiée en 1955), soit l’invasion d’entités extraterrestres prenant forme humaine et « remplaçant » ainsi, à terme, l’humanité, individu par individu, est devenu plus qu’un thème cinématographique. C’est un motif, un principe abstrait et théorique qui allait dépasser les déterminations des genres.

     

    En 1955, sous la férule du producteur indépendant Walter Wanger, Don Siegel réalise ce qui s’appellera en français, à la suite d’une erreur de traduction, « L’Invasion des profanateurs de sépultures ». La peur et le malaise y sont principalement liés à la question de la déshumanisation qui devient une véritable interrogation esthétique et morale (qu’est-ce qu’une figure humaine dans un film ?).

    Le remake que signe Philip Kaufman en 1978 est représentatif d’un changement radical de la société et du spectateur. Les temps, devenus incrédules, exigent que le processus de transformation de l’homme en un double « différent » soit l’explication d’une logique psychologique particulière. Dans sa version, réalisée en 1992, Abel Ferrara, enfin, révèle, grâce à un dispositif très particulier situant le récit au cœur d’une base militaire, qu’il y a pire que le cauchemar du devenir-autre, il y a l’enfer du même.

    Ce thème de la transmutation de l’unique en son « autre » connaitra encore de nombreuses variations cinématographiques, dont « Invasion » d’Oliver Hirschbiegel réalisé en 2007 constitue un exemple.

     

    Jean-François Rauger

     

    C’est à la Cinémathèque et c’est le samedi 07 mars à 22h00 ! Au Programme :

     

    « L’Invasion des Profanateurs » (Invasion of the Body Snatchers)
    Philip Kaufman (Etats-Unis / 1978 / 115 min / DCP / VOSTF)
    D’après le roman « L’Invasion des profanateurs de sépultures » de Jack Finney.
    Avec Donald Sutherland, Brooke Adams, Leonard Nimoy, Jeff Goldblum.

     

    « L’Invasion des profanateurs de sépultures » (Invasion of the Body Snatchers)
    Don Siegel (Etats-Unis / 1955 / 80 min / DCP / VOSTF)
    D’après le roman « The Body Snatchers » de Jack Finney.
    Avec Kevin McCarthy, Dana Wynter, King Donovan, Carolyn Jones.

     

    « Body Snatchers »
    Abel Ferrara (Etats-Unis / 1992 / 87 min / 35mm / VOSTF)
    Avec Terry Kinney, Meg Tilly, Gabrielle Anwar.

     

    « The Invasion »
    Oliver Hirschbiegel (Etats-Unis / 2005 / 98 min / 35mm / VOSTF)
    D’après le roman « L’Invasion des profanateurs » de Jack Finney.
    Avec Nicole Kidman, Daniel Craig, Jeremy Northam.

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] La Nuit Body Snatchers

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] The Body Snatchers à Instant City

     

     

     

  • French Connection (1978-1982) : Episode 04

     

     

    Plongée dans la France de la toute fin des années 70, les années Giscard : période des grands bouleversements sociétaux et d’un certain sentiment de modernité, entre libéralisation du divorce et éclatement de l’ORTF. Pourtant, la jeunesse s’ennuie et se réfugie alors dans l’émergence de nouvelles scènes rock et new-wave. Parmi les groupes qui s’imposent : Téléphone, Starshooter ou Bijou.

     

    C’est la nouvelle vague, plastique et fluo et Skaï
    Super dégaine spéciale, électricité en pagaille
    C’est la nouvelle vague, sans paradis artificiels
    Sans illusions superficielles, sans mémoire…

    Starshooter, 1979

     

    Mais la nouvelle vague, cette année-là, reste essentiellement celle des musiciens du groupe Téléphone, qui en ce début de l’année 1979, enregistrent à Londres leur 2ème album, « Crache Ton Venin ». Les textes réalistes abordent de front les thèmes de société, entre menace atomique (« La Bombe Humaine »), révolte et conflits familiaux des adolescents. Porté par une pochette conçue par le photographe Jean-Baptiste Mondino, l’album consacre le groupe, trois ans à peine après son tout premier concert. Même si, en marge de cette nouvelle scène rock, d’autres courants musicaux sont alors en gestation.

     

    [youtube id= »rah-s-hJwTQ » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

    « C’est pour essayer de penser à autre chose, parce que c’est tellement triste, tout ce qui arrive, qu’il faut bien s’étourdir. Sortir le plus possible, sortir toute la nuit, aller boire, aller danser. Avant de mourir, il faut prendre du plaisir et jouir de l’instant présent. » (Alain Pacadis sur le plateau d’Apostrophes, 07/04/1978)

     

    A l’image de l’étrange et provocateur Alain Pacadis, chroniqueur déglingué des nuits parisiennes, notamment pour le quotidien Libération, apparaissent alors les nouveaux punks, ces dandys urbains et sophistiqués qui se défoncent à l’héroïne, dorment le jour et arpentent la nuit les institutions festives qui s’ouvrent en cascade. Il y eut d’abord La Main Bleue, ouverte en 76 dans un ancien centre commercial de Montreuil, près de Paris. Initialement fréquentée par tous les Africains et les Antillais qui se faisaient refouler des boîtes parisiennes, La Main Bleue devient un lieu branché investi par les bourgeois bohèmes blancs de la capitale.

     

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    En mars 78, dans un ancien théâtre à l’Italienne situé près des Grands Boulevards ouvrait ensuite l’inévitable Palace, sous l’impulsion de Fabrice Emaer, devenant le comble des sociabilités « People », des vanités chics et délurées. Plus intimistes, les Bains-Douches sont inaugurés en décembre de la même année, Rue du Bourg l’Abbé, près du Marais, rachetés par deux antiquaires qui en confient la décoration à Philippe Starck. Le premier soir, deux-mille personnes se pointent et la Préfecture de Police, qui redoute des débordements, a posté huit cars de CRS de part et d’autre de la rue.

     

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    En l’espace de quelques mois, avec le concours actif des médias, Libération ou Actuel en tête, la danse en boîte de nuit, le « Clubbing », comme on l’appelle, devient l’horizon incontournable de la jeunesse urbaine française, ou du moins parisienne. Parmi les créateurs, les couturiers, les stars ou les vedettes de passage, on y croise aussi Gainsbourg et la jeune garde du rock français, comme les membres du groupe Bijou, qui en 1979, sortent sur leur deuxième album une reprise des « Papillons Noirs » gainsbouriens.

     

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    « Les Papillons Noirs » signé Gainsbourg, que ce dernier avait enregistré en 1966 avec Michèle Arnaud, est repris en 1979 par le groupe Bijou, trio arty, mélange de rock dur et de romantisme, sur son album « Ok Carole ». En février 1980, le magazine Actuel intitule un article d’une formule efficace, qui allait devenir une appellation musicale, pour résumer l’époque : « Les jeunes gens modernes aiment leurs mamans ». Entre les Rennais de Marquis de Sade, Jacno ou Marie et Les Garçons, les groupes n’ont pas grand chose à voir entre eux, mais peu importe…

    Associé à cette mouvance, le groupe parisien Edith Nylon, formé là encore par des lycéens de bonne famille autour de la chanteuse Mylène Khaski, enregistre son tout premier album en 1979, pendant les vacances scolaires. Mylène et sa chevelure de feu s’y autoproclamant « femme bionique, artères antistatiques, perruque de nylon, utérus en Téflon, seins gonflés silicone, lèvres glacées de chrome… Edith Nylon, c’est moi… ».

     

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    « Edith Nylon » par le groupe du même nom, dont les paroles évoquent la société d’alors, le féminisme, mais aussi les périls futurs, comme les manipulations génétiques ou le transhumanisme, et dont la new-wave inspirera par la suite des groupes comme les Rita Mitsouko. Pour l’heure, ce changement de décennie est surtout marqué par le rock et l’émergence d’un nouveau groupe, Trust.

    Formé en 1977 par deux mecs de banlieue parisienne, le chanteur Bernie Bonvoisin venu de Nanterre et le guitariste Norbert « Nono » Krief originaire des Mureaux, Trust, après avoir passé trois longues années dans l’ombre de Téléphone, connaît un immense succès à partir de 1980 avec la parution de son second album « Répression », dénonçant le sort de Jacques Mesrine dans la chanson « Le Mitard » ou encore l’ensemble du système, dont les dés sont pipés. Il s’en écoule plusieurs centaines de milliers d’exemplaires dès sa sortie.

     

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    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »]  French Connection (1978-1982) : Episode 01

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] French Connection (1978-1982) : Episode 02

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] French Connection (1978-1982) : Episode 03

     

     

     

  • Philippe d’Anière : « Pressing », chroniques de sa seconde vie

     

     

    « Pressing, c’est le pseudo que j’ai pris à vingt ans pour faire batteur de Starshooter. Et je croyais vivre les années les plus rock de ma vie… Je rigole… J’ai jamais été aussi entouré, chouchouté, assisté, invité. C’est après que ma vie est devenue vraiment Punk. »

     

    Bon, je dois admettre que les mémoires d’un punk, je n’adhère pas forcément au concept. De surcroît, pour ceux qui suivent Philippe d’Anière sur Facebook, puisque c’est bien de lui qu’il s’agit, ils pourraient aisément en tirer des conclusions hâtives, tant les sorties du bonhomme semblent souvent reposer sur de la provocation gratuite, sans réel fondement objectif. Il n’en reste pas moins qu’au fil de ses « Chroniques Californiennes », acides et sarcastiques, on est en droit de se poser tout de même quelques questions…

    Le mec était le batteur de Starshooter, certes. Il l’évoque souvent mais sans jamais vraiment s’appesantir sur le sujet, et il ne semble pas y avoir une quelconque nostalgie dans ses références à cette époque, comme si, finalement, ça n’était plus pour lui qu’un passé lointain. Tandis que Kent, le chanteur du groupe, ou les autres gloires éphémères de ces temps révolus, ont continué, de près ou de loin, tant bien que mal, à évoluer dans le domaine de la musique ou de l’écriture, Phil Pressing a repris son nom de baptême et a tracé la route… Disparu des écrans radars… Hasta la vista, baby.

    Alors, lorsque j’apprends que le gaillard se décide finalement à nous en dire un peu plus et à lever le voile sur sa vie après la musique, malgré mes réticences, je dois admettre que je suis curieux d’en savoir plus. Je me procure donc un exemplaire de ce bien énigmatique « Pressing », dès sa sortie. Tiens, publié chez Amazon. Petite surprise qui n’en est pas une, finalement. Avec le recul, je ne suis pas convaincu qu’une maison d’édition française classique aurait accepté de se lancer dans une entreprise qui pouvait se révéler quelque peu hasardeuse, au vu des positions assez tranchées affichées par Philippe d’Anière dans ses chroniques facebookiennes…

    La couverture de « Pressing » participe à ma curiosité grandissante. Voir son auteur ainsi, avant même de commencer à nous raconter son histoire, affublé d’épaisses lunettes noires, le visage à moitié coupé, le bras droit couvert de tatouages lorsqu’on soupçonne le gauche d’en être dépourvu, comme si, par pudeur ou par timidité, il rechignait dans un premier temps à nous permettre de dépasser la première impression que nous pourrions avoir de lui. Et des palmiers, toujours des palmiers…

     

     

     

    Il faut dire que l’homme a changé. Le Phil Pressing des débuts de Starshooter, à l’allure fine et svelte, est devenu plus massif. Et même si on peut partir du postulat que nous sommes tous égaux face au temps qui passe, la couverture de « Pressing » atteste que la seconde vie de Philippe d’Anière ne fut pas forcément toujours un long fleuve tranquille…

     

    « C’est ma vie, c’est sex, violent, business, drôle, plein d’amour, pas du tout politically correct et ça fait 382 pages. »

     

    A la lecture de « Pressing », le moins que l’on puisse dire, c’est que Philippe d’Anière va plutôt « straight to the point », tant le livre semble être constitué de notes écrites à la volée sur des bouts de papier, comme autant de souvenirs d’une vie capturés avant qu’ils ne s’effacent. Le trait est direct, sans fioriture, dans une sorte d’urgence qui nous fait vite oublier une ponctuation approximative, les quelques coquilles et les petites lourdeurs de style. Mais, après tout, quelle importance ? Car le récit nous happe rapidement et on se surprend à dévorer l’ouvrage, en faisant au fil des 382 pages le grand écart entre Lyon et L.A., entre plans panoramiques et serrés, comme entre les séquences d’un road movie épique…

     

    « Un bateau est plus en sécurité quand il est au port mais ce n’est pas pour cela qu’ont été construits les bateaux. » (Paulo Coelho)

     

    De la contrainte de départ, Philippe d’Anière est parvenu à en faire son idéal. Forcé de quitter la France à l’âge de 29 ans, l’ex-batteur de Starshooter s’envole pour la Californie, avec 300 $ en poche. Il laisse derrière lui sa famille, sa compagne et tout ce qu’il possède. « Je suis arrivé à Los Angeles avec $300 en poche, accompagné de mon pote Franck Dubary. Nous partagions une chambre de West Hollywood, j’ouvre la télé au milieu de la nuit et… Freedom !… Je tombe sur HBO, movies all night ! Quand en France on en était encore à l’ORTF, dodo et grésillage à partir de minuit, après Pimprenelle et Nicolas !  Le déclic fut révélateur. Tout semblait possible. »

    Flashback arrière… Retour à Lyon en 1975. « Avec Kent et Jello, nous sommes au bahut ensemble, au lycée Saint-Exupéry. Mickey est arrivé un peu après. Les gens de Marie et les Garçons, ainsi que ceux d’Electric Callas, le fréquentent également. On commence à répéter chez moi, dans une cabane au fond du jardin. Je choisis la batterie parce qu’il n’y a pas besoin de savoir jouer. Je ne sais toujours pas jouer, d’ailleurs… Ça n’est que très récemment que j’ai commencé à prendre des cours ».

     

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    Après quatre albums studio et une douzaine de singles sortis entre 1977 et 1982, des concerts mémorables, des fauteuils cassés et des lendemains qui ne demandaient qu’à chanter, l’aventure Starshooter s’arrête comme elle avait commencé… « Il faut bien comprendre que quand on est arrivé, il n’y avait personne. Ça n’existait pas en 1977, un groupe de rock chantant en français. Mais on réalisait aussi qu’on ne se voyait pas vieillir dans ce business. Les Stones nous paraissaient déjà extrêmement vieux, à nous qui n’avions que 20 ans. Alors, on a convenu qu’on arrêterait à 25 ans ».

    Chacun trace la route. Phil Pressing redevient Philippe d’Anière, ouvre une bijouterie à Lyon et rencontre en 1984 celle qui allait déterminer la suite de son existence : Kiki, une prostituée lyonnaise dont il tombe éperdument amoureux. Bon, seul petit hic, et non des moindres, Kiki n’est autre que la femme de Gaëtan Zampa, le célébrissime et redouté parrain du milieu marseillais, qui vient tout juste de mourir en prison…

     

    « C’était une nuit de pleine lune, j’ouvrais la fenêtre et criais « Freeeeeeedom » ! J’étais à Los Angeles pour n’en plus repartir. »

     

    C’est précisément à cet instant que commence la seconde vie de Philippe d’Anière, embarqué dans une nouvelle aventure qui le mènera des rues trop étroites pour lui du Lyon de son enfance aux larges avenues rectilignes de Los Angeles, où il s’acharnera à accomplir son rêve américain. Mais la suite est à découvrir dans « Pressing »…

    Il n’en reste pas moins qu’au fil du récit, nous obtenons les réponses aux nombreuses questions que nous nous posions avant sa lecture. Et nous comprenons mieux le sens profond des « Chroniques Californiennes »… Car passée la première impression de sorties uniquement muées par la provocation facile et le détachement, nous découvrons, derrière cette façade de dur que Philippe d’Anière a été forcé de se construire, avant tout pour se protéger et surmonter les ups & downs de sa vie américaine, un homme plus sensible qu’il n’y paraît, attaché à ses racines et fidèle en amitié. Il suffit juste qu’il enlève ses lunettes noires pour s’en rendre compte. Et lorsqu’il évoque alors la France, ça n’est pas de l’amertume qu’on peut lire dans ses yeux, mais de la déception…

     

     

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    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] « Pressing » sur Amazon

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Interview par Christian Eudeline (Novembre 2019)

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Interview par Jérôme Enez-Vriad (Juin 2015)

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Interview pour Gonzo Music (Septembre 2015)

     

     

     

  • Jude La Cigale : la petite bête qui monte

     

     

    Accompagnée de sa guitare et d’un simple sac à dos, Jude a ramené de ses voyages, des textes et des mélodies chargées de passion, d’amour et de rage de vivre. Ne vous attendez pas à découvrir une nymphe à la voix éthérée…C’est une Cigale !

     

    Cette jeune artiste de 22 ans, autodidacte, offre sa voix généreuse comme on offre son âme. Le timbre y est chaleureux, tantôt sensible et tendre, tantôt incisif et fédérateur de bonne humeur. Entière, bondissante et sincère, cette grande fille brune au regard de braise, à l’allure d’un poulbot indomptable, est aussi une vraie show girl !

    Le voilà enfin, le tout premier clip d’une longue série, nous lui souhaitons, filmé façon old school, pour son cover de « Creep » de Radiohead, réalisé dans le désert des Bardenas Reales de Navarra. A découvrir.

     

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    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

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  • French Connection (1978-1982) : Episode 03

     

     

    Plongée dans la France de la toute fin des années 70, les années Giscard : période des grands bouleversements sociétaux et d’un certain sentiment de modernité, entre libéralisation du divorce et éclatement de l’ORTF. Pourtant, la jeunesse s’ennuie et se réfugie alors dans l’émergence de nouvelles scènes rock et new-wave. Parmi les groupes qui s’imposent : Téléphone, Starshooter ou Bijou.

     

    Jusque là, la scène rock et pop progressive française, malgré son succès auprès de la jeunesse, qu’on songe aux groupes Magma, Ange, Triangle ou aux Variations, ne bénéficie presque d’aucune promotion de la part des maisons de disques. Et par conséquent d’aucun passage à la radio ni à la télé. L’explosion du mouvement punk en Grande-Bretagne allait sacrément rebattre les cartes… Avant même cela, le punk, au début des années 70, trouve déjà des adeptes dans le petit monde parisien de la musique. Ne jurant que par les Stooges d’Iggy Pop, le Velvet Underground ou les New York Dolls, le journaliste Yves Adrien s’en fait l’écho dès 72 dans les colonnes de Rock & Folk.

    Prônant une révolution rock électrique pour ceux qui aiment le rock violent, éphémère et sauvagement teenager, il écrit : « des teenagers qui préfèrent le bubble gum au Marxisme, et c’est heureux. La rock music n’a que faire des slogans. L’aventure gauchiste n’est pas, dans le concept musical et électrique qui nous préoccupe, plus importante que la mode du twist ou des bottes à semelles compensées ». Le punk, dont on trouve les disques importés des Etats-Unis chez Open Market, éphémère disquaire parisien créé par Marc Zermati, tête chercheuse musicale et fondateur déjà en 1972 du label Skydog. A peine trentenaire, Zermati avait ouvert sa boutique dans le quartier des Halles, alors en plein chamboulement après la destruction des Halles Baltard et la prochaine ouverture du Forum des Halles et du Centre Pompidou.

     

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    La cave située sous sa boutique du 58 Rue des Lombards accueille les répétitions des Havrais du groupe Little Bob Story ou des Parisiens du groupe Asphalt Jungle, formé en 1976 par le jeune critique rock Patrick Eudeline, âgé de vingt-deux ans. L’été 76, Marc Zermati organisait à Mont-de-Marsan, dans les Landes, le premier festival punk français. Un an plus tard, il remet ça. Deux jours de concert, début août, qui attirent 4000 spectateurs. En têtes d’affiche, les Britanniques de The Clash et d’Eddie & The Hot Rods, précédés chaque soir sur scène de plusieurs groupes français : Strychnine, les Lou’s, un groupe de punk 100 % féminin, Shakin’ Street, Marie et les Garçons, Bijou ou encore Asphalt Jungle.

    La jungle de l’asphalte, dont le chanteur et leader Patrick Eudeline, qui a fait ses études au très conservateur collège Stanislas à Paris, est devenu dix ans plus tard critique musical pour le magazine Best. Eudeline, qui traîne par ailleurs souvent au Gibus, une petite salle située à un jet de pierre de la Place de la République, où l’on peut dîner jusque tard et écouter de la musique. Il y décroche un engagement pour son groupe et en profite pour ouvrir la scène à d’autres formations, lors d’un mini-festival de musique punk qui aide à la promotion de ce nouveau courant. Asphalt Jungle, qui sortira en 78 son titre « Poly Magoo », hommage au film de William Klein et aux paroles aussi énigmatiques que son oeuvre inspiratrice : « Quelque chose de bubble gum, à chemin nos uniformes, habitude bien trop étrange, je veux être Poly Magoo… »

     

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    « Poly Magoo », troisième single du groupe Asphalt Jungle, sorti en 1978. Pourtant, le groupe ne durera pas et se séparera l’année suivante. Les punks, qui se retrouvent donc les soirs au Gibus, ou bien dans les premiers McDo qui ouvrent en France. Le tout premier, sur les Champs-Elysées en 1973 ; à 6,30 Francs le BigMac et 3,20 Francs les super-frites congelées… « Les plus beaux musées du 20ème siècle », comme les avait qualifiés Andy Wharol, deviennent les rendez-vous gastronomiques obligés des punks parisiens, souvent fauchés. Du moins pour se nourrir… Christian Eudeline, le frère de Patrick, qui chroniquera lui aussi ces années-là, écrit : « La plupart des premiers punks étaient très sensibles, gentils, doux, souvent timides, ce qui contrastait avec la violence de leur musique et de leurs textes. Ils carburaient au Fringanor, une amphétamine, ou encore à l’héroïne, mettant un point d’honneur à ne pas fumer de joints, qu’ils considéraient comme des trucs de babas… ».

    Cette année 78 est votée la loi « Informatique et Liberté » dont l’article 8 énonce « l’interdiction de collecter des données à caractère personnel faisant apparaître les origines raciales, ethniques, les opinions politiques, philosophiques, religieuses ou syndicales, de même que les orientations sexuelles ». Vingt ans avant l’avénement d’Internet, la France posait ainsi l’un des premiers jalons en la matière. Même si, à vouloir protéger les citoyens des intrusions et de la surveillance des grandes bases de données dont les administrations commençaient à se doter, la France ne réalisait pas qu’elle manquait en fait d’informations essentielles, et qu’entre sa jeunesse et elle, un angle mort s’était peu à peu formé… Comme en témoigne cette archive Ina du 09 décembre 1978, « La France des adultes ne connaît pas les jeunes » (Jean-Claude Bourret et Dominique Laury, TF1).

     

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    Or, malgré le scepticisme ambiant, une frange des jeunes commence à s’agiter. Illustration de cette agitation naissante, juillet 1978 à l’Olympia, où est organisé le festival « Le Rock d’Ici ». Trois soirs de concert montés par Philippe Constantin, qui travaille à l’époque chez Pathé Marconi. Sur scène, neuf groupes rock ou punk font face à 2000 spectateurs, dans une ambiance particulièrement déchaînée. Ainsi, le groupe Metal Urbain ne joue-t-il que trois ou quatre morceaux, le temps que son clavier, imbibé de bière, ne se prenne les pieds dans les câbles de ses synthés et que tout n’explose… Le reste est à l’avenant.

    En coulisse, les groupes se foutent joyeusement sur la gueule pour faire modifier l’ordre de passage, tandis que sur scène, Kent, le chanteur de Starshooter, fait remarquer à la foule qu’à l’époque de Bécaud, les gens pétaient les fauteuils. Qu’à cela ne tienne, la foule de 1978 se retrousse les manches et en fait de même. Un à un, les fauteuils sont déposés sur scène, comme autant d’offrandes à la contestation. Résultat : 200 fauteuils arrachés, et une sulfureuse mais efficace publicité pour la manifestation.

    Starshooter, qui ce soir-là pendant sa prestation, accueille une performance de Marie-France, actrice et figure des nuits interlopes parisiennes ; laquelle se pointe sur scène sapée en diva-rock et entame un strip tease irréel. Sauf que Marie-France, militante du Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire et du groupuscule des Gazolines, n’est pas encore arrivée au bout de sa transformation chirurgicale… A l’avant-dernière étape de son effeuillage sur scène, les punks ont la mâchoire qui se décroche… La nouvelle vague n’a décidément peur de rien et elle ose tout.

     

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    Source : Amaury Chardeau pour Juke Box / Ina