Catégorie : Société

  • Marie Pélissier : « #MeToo », premier extrait de son album « Résilience »

     

     

    En 2014, nous faisions la connaissance de Marie Pélissier, à qui nous consacrions, à l’époque, un article à sa peinture. Et nous gardons un souvenir nostalgique des premiers artistes que nous avions eu la chance de rencontrer, lorsque nous étions encore tout petits. Alors, le fait de garder contact, malgré le temps qui passe, nous remplit de joie et d’espoir. Et c’est ainsi que nous retrouvons Marie, après toutes ces années, avec de nouveaux projets, et c’est comme si nous nous étions quittés la veille.

     

    Tarnaise depuis quelques années, Marie Pélissier a pourtant fait ses premiers pas dans la vie et en musique en plein coeur de la campagne normande. Petite fille sensible à la nature et au monde qui l’entoure, elle apprend le piano et se lance dans l’écriture à seulement huit ans. Autant de passions qui ne la quitteront plus…

    Deux ans plus tard, elle foule avec détermination les planches d’une classe de théâtre, avant de rejoindre les bancs du prestigieux Cours Florent à Paris, dont elle sort diplômée à 20 ans. Parallèlement à sa carrière naissante de comédienne, qui lui vaut quelques rôles dans des courts-métrages, Marie poursuit inlassablement ses rêves…

    En coulisse ou dans la lumière des projecteurs, elle travaille sans relâche et s’épanouit dans son art, au sein de divers groupes musicaux ; de Baobab à Matty, Marie devient, au fil de son voyage initiatique, auteur, compositeur, interprète, et joue ses propres chansons à guichet fermé dans des salles parisiennes mythiques, comme le Gibus ou le New Morning.

    En 2014, c’est sa rencontre avec Julien David B, musicien et producteur arrivé tout droit d’Australie, qui l’encourage à explorer des terres inconnues. Le duo aux influences electro, baptisé M’Jay, sort quatre titres en Anglais et collectionne les vues sur YouTube, notamment avec son titre « Sensitive », diffusant un message altruiste sur le monde de demain, la nature et l’amour de l’être humain. Des valeurs que Marie partage également avec Fredo Volovitch, membre du célèbre groupe de chanson française Volo, qu’elle rencontre grâce à internet et qui la pousse à exaucer son souhait le plus cher : enregistrer un album solo.

    Sous le regard bienveillant de son mentor, tout en profitant du confinement pour peaufiner cet opus tant attendu et désiré, intitulé « Résilience », Marie a choisi, comme une évidence, la chanson « #MeToo » comme premier extrait de son album. Encouragée par l’émergence irrépressible d’un phénomène de société auquel elle se sent étroitement liée, Marie témoigne avec sensibilité, délicatesse et poésie sur son parcours pourtant chaotique de survivante d’inceste. Tout simplement pour que l’injustice cesse…

    Avec « #MeToo », elle nous raconte cette sale histoire qui est la sienne, avec beaucoup de dignité, de détachement, de recul et de classe. La prod de Julien B David est parfaite, minimaliste à souhait, dépouillée, avec juste ce qu’il faut là où il faut. A écouter d’urgence, pour les mots forts que cette chanson véhicule, avant de pouvoir découvrir prochainement l’album « Résilience », qui porte bien son titre, car il faut être taillée dans la plus dure des pierres précieuses, pour parvenir à traverser ce genre d’épreuves et en sortir indemne, en apportant la preuve qu’on n’est pas forcément condamnée à accepter la fatalité sans se battre…

     

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    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Marie Pélissier, du talent à revendre

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Marie Pélissier Peintre

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  • Le 11 Mai by Hubert

     

     

    Dans ma série de billets d’humeur devenue culte, « Hubert a des p*bip*ains de problèmes dans la vie », je souhaitais aborder aujourd’hui : Le 11 Mai.

     

    … Alors qu’hier après-midi, il faisait beau et chaud, je profitais de mon heure allouée pour promener mon chien. Ah non, je n’ai pas de chien, c’est vrai… Bon, reprenons. Je profitais de mon heure allouée pour faire un peu de footing… bah non, non plus, j’ai horreur de courir boudiné dans un pantalon de jogging et encore moins de devoir arborer cette tête hyper concernée par l’entretien de mon corps et de ses fonctions vitales. J’allais travailler, peut-être… Que nenni.

    Bon, je reprends… Alors que muni de mon attestation remplie, signée, certifiée sur l’honneur, croix d’bois, croix d’fer, si j’mens j’mange des vers de terre, je profitais de cette heure consentie pour faire un plein de courses et remplir à ras bord mon caddie de produits de première nécessité et de survie (principalement 16 paquets de papier essuyage de fesses triple épaisseur et parfumé au jojoba, 20 kilos de pâtes Barillazani et riz Oncle Benjamin, une palette de Choco BN, environ trois tonnes de yaourts en tous genres et fromage blanc au lait de cactus), tout cela en respectant un mètre de distance avec mes congénères dans la file d’attente, ainsi que partout dans les rayons, malgré le masque ffp3, les gants, la combinaison étanche, les lunettes et un comportement encore plus hostile et agressif envers mon prochain qu’en temps normal.

    Car oui, je vis à Paris et le Parisien a l’impression qu’est enfin arrivé le Jour J tant attendu où il peut montrer toute l’étendue de son talent, à savoir être une sacré tête de c*bip*n, mais en pire encore… Avant toute cette histoire de grippette qui aurait rencontré Hulk, ça n’était qu’une répétition, un entrainement, en perspective de ce fameux grand jour où il pourra enfin être un super gros co*bip*ard égoïste et l’assumer pleinement, eu égard aux circonstances. Quel bonheur !

    Mais ça n’était pas ça non plus, car j’avais déjà fait des courses la veille… Mon frigo et mes placards étaient pleins à craquer et je pouvais tenir ainsi aussi longtemps que tous les sièges d’Arras mis bout-à-bout. Bon alors, c’était quoi, au juste, la raison impérieuse qui pouvait justifier cette sortie ? Non rien, juste une petite ballade… Une simple marche tranquille sur les trottoirs de mon quartier, afin de respirer à pleins poumons un air moins chargé en particules fines et en gaz carbonique, entendre davantage les oiseaux qui chantent le printemps, sentir le soleil sur ma peau.

    Tout cela évidemment en prenant soin de m’écarter dès que je voyais un autre quidam comme moi arriver en face, tout en feignant de l’ignorer ; il l’a ? Il l’a pas ? Je ne sais pas pourquoi mais… mais je suis sûr qu’il l’a ! Je le sens ! Mais moi, d’ailleurs, l’ai-je ? Je ne sais pas, je n’ai pas encore été testé. Le serai-je un jour ? Et merde… Mais alors, comment va-t-on savoir ? Il n’en reste pas moins que tous ces potentiels contaminés, je ne pouvais m’empêcher de les regarder de manière suspicieuse, ces quelques rares passants qui me frôlaient pourtant… de bien deux mètres, m’sieur le commissaire ! Car j’étais même à deux doigts d’aller les dénoncer aux forces de l’ordre, pour qu’ils se prennent une prune à 135 euros dans leur face, tous ces fils de p*bip*e. Je suis sûr qu’ils trichent, comme moi. Salauds de confinés !

    Mais c’est alors que je me voyais soudain submergé par une vague de panique, de doute, de que sais-je encore, et me voilà rebroussant chemin, gravissant les marches quatre à quatre pour remonter chez moi, dans mon nid d’aigle ; le seul lieu sûr que je connaisse, finalement, cet idéal, ce bunker où je suis peut-être en train de vivre les derniers jours du monde. Haletant, je claque la porte et je m’enferme à double tour. J’ouvre mes placards et mon frigo, certes pour me rassurer, mais aussi pour évaluer combien de temps je peux tenir avant de devoir ressortir, slalomer entre les dangers potentiels, tandis que dehors, le Covid-19 choisit arbitrairement ses prochaines victimes (toi j’t’aime, toi j’t’aime pas, toi j’t’aime, non en fait, j’t’aime pas… allez, tiens, toi, toi, toi pis toi ! euh… moi ?)

    Pour faire un point précis sur ma situation, je me mets à compter très précisément le nombre d’objets dont je dispose dans mon bunker, dans le but d’évaluer au mieux la durée potentielle de mon autarcie culturelle… Avec mes milliers de DVD, auxquels on peut ajouter les fichiers de films qui attendent sagement sur mes nombreux disques durs externes ainsi que la flopée de séries en réserve (tiens, je pourrais me faire « L’Homme de Picardie » ?!), je calcule rapidement que je devrais pouvoir encore tenir comme ça jusqu’en 2029… Cette dernière pensée me rassure quelques instants, avant de muter insidieusement en vision cauchemardesque (à moins que ça ne soient les histoires d’écluses et Christian Barbier qui me foutent les boules, je ne sais pas…)

    Le confinement, confiner, confit… Cuisse de canard ?? Café, décaféiné, déconfinement… Je déconfine, tu déconfines, nous déconfinons, ils déconfinaient… Que je déconfinasse ? Un temps certain s’écoule avant que je parvienne à me calmer. je ferme les yeux et je relativise. Je me dis qu’il y a pire comme situation que la mienne, qui partage pour l’occasion ma quarantaine avec mon chat. Je pense à « celles et ceux » qui sont obligés de tenir le coup avec des personnes qu’ils ne supportaient déjà plus avant, mais qu’ils ne voyaient finalement que très peu dans une journée. Tous ces couples qui ne peuvent plus se blairer. Ces parents qui meurent d’envie de défenestrer leur progéniture… Oui, tous ces êtres mis pour la première fois dans un contexte inédit, seuls face à leurs pires travers, leurs plus grosses angoisses : les autres. Comme si d’un coup, toutes les pendules du monde se remettaient à l’heure et que les karmas sonnaient la fin de la récré…

    Heureusement, pour se rassurer et savoir où on en est, se succèdent sur les chaines d’information en continue, les mêmes spécialistes, les mêmes médecins, qui toutes les heures, et ça depuis le début de « ce petit pépin inopportun », viennent nous expliquer avec le plus grand des sérieux que tout est « blanc ». Le lendemain, les mêmes nous affirment désormais que c’est le « noir » qui prévaut. C’est alors que des fans du professeur Raoult, l’ayant confondu depuis le début avec Jeff Bridges période « Big Lebowski », viennent nous asséner  que ça n’est ni « blanc » ni « noir » mais plutôt « gris ».

    Là-dessus, v’la t’y pas que la porte-parole de notre cher gouvernement, Sibeth Ndiaye, pour ne pas la nommer, s’en mêle également ; une péronnelle utilisée comme pare-feu, qui vient nous gratifier de sa science infuse et de ses moues arrogantes, nous autres, sombres petites merdes fumantes, à qui on doit vraiment tout expliquer. D’ailleurs, à ce sujet, je me pose une question (en ces temps incertains, il nous vient à l’esprit de drôles de petits défis que l’on se lance à nous-mêmes…) : est-ce que je préférerais attraper le coronavirus (thiz iz ze rizzem of ze night, oh yeah !!) ou bien passer une seule journée dans le corps et l’esprit de la porte-parole de l’état (que ne nous envie pas le Sénégal, soit dit en passant…) ? Challenge intéressant, non ?

    Mais il nous reste un espoir ! Regardez dans le ciel ! It’s a bird ?!  No ! It’s a plane ?! No ! Superman ?! non plus, mieux ! It’s Emmanuel Macron (prononcez Immanouel Macwon) ! On se régale d’ailleurs de chacune de ses (loooongues…) interventions à base de prompteur et de mine contrite. On s’abreuve de ses mots qu’il aime tant prononcer en suivant à la lettre chaque phrase qui défile devant ses yeux vides, pour nous rassurer, nous cajoler. On se souvient du désormais célèbre « nous sommes en guerre », c’est la merde, c’est la chiasse, c’est pas d’bol, c’est pas moi c’est lui…

    Mais… Mais pourtant, tout est sous contrôle, Emmanuel a tout prévu ou presque, car à défaut de masques qui seraient tous partis sur la lune en 1969 avec les gars de la mission Apollo 11, de tests et d’idées, il nous dit que tout est néanmoins verrouillé et que même pas le petit Poucet ne sera laissé de côté, dans cette bataille qu’il livre seul contre l’ignoble virus ! Pardon ? Ah oui, avec bien-sûr aussi le personnel de santé qui file quand même un petit coup de main. Tous ces soldats apparemment prêts à mourir pour le général en chef Immanouel Macwon.

    Après le « nous sommes en guerre » scandé façon général Patton, avec en décor de fond un hôpital militaire sur le front de l’Est, le slogan super trendy est désormais « Le 11 mai »… Le 11 mai ! Le 11 mai… Le onzmèèè… Ça claque, ça pulse, ça déménage ! Je 11 mai, tu 11 mai, vous 11 mai… Que je 11 mai, 11 masse ?… 11 mai, le film (par les producteurs de « Youppie, tagada, tsoin tsoin !! »). 11 mai, The new Emmanuel Macron’s fragrance (prononcez fwaguince)… « 11 mai for her and him, Paris ». Le 11 mai, a new world, a new dimencheun (grosse voix de bande annonce de film américain)… Le 11, mais…

    … Oui bon, Emmanuel Macron, on l’aura compris, n’est définitivement pas Jupiter mais juste la lune, cet astre mort qui gravite autour de la terre (comme la France autour du monde). Cette lune qui nous fait entrevoir sa face pleine de cratères, sans atmosphère, mais autour de laquelle tous ces obscurs intermédiaires, experts, ministres et communicants (Pintard, Michonnet, Paimboeuf et Poulardin) lévitent en apesanteur. Allez, le 11 mai, fini le confinement, mais au-dessus de nos têtes, toujours et encore ces finement cons… Comme la lune ?

    Mais vous n’êtes pas obligés de me croire…

     

     

     

  • French Connection (1978-1982) : Episode 05

     

     

    Plongée dans la France de la toute fin des années 70, les années Giscard : période des grands bouleversements sociétaux et d’un certain sentiment de modernité, entre libéralisation du divorce et éclatement de l’ORTF. Pourtant, la jeunesse s’ennuie et se réfugie alors dans l’émergence de nouvelles scènes rock et new-wave. Parmi les groupes qui s’imposent : Téléphone, Starshooter ou Bijou.

     

    Cette même année 1980, on trouve aussi dans les bacs d’étranges 45T, comme ce « A Mon Âge Déjà Fatigué », pop légère, hédoniste quoique désabusée, enregistré par le chanteur Pierre-Edouard et écrit par un certain Jay Alanski, en collaboration avec le musicien Wally Badarou. Jay Alanski qui se fait connaître en 1979 en composant la musique des premières chansons de Lio avec laquelle il travaillera durant de nombreuses années.

     

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    Mais soudain surgit 1981 et l’élection présidentielle, à laquelle Coluche ne s’était finalement pas présenté. L’accession au pouvoir de Mitterrand scelle la fin de ces années 70, juste après le virage radical qu’amorce le monde à partir de 1979. La jeunesse en avait momentanément oublié sa fatigue et pensait ne plus jamais s’ennuyer…

     

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    Téléphone, qui s’était toujours posé comme un groupe politiquement engagé, se produisant à la Fête de l’Humanité, participe en juin 1981 à un concert géant et gratuit, Place de la République, pour fêter l’élection de Mitterrand. Ils y partagent notamment la scène avec Jacques Higelin et y interprètent ce titre, « Fait Divers », extrait de leur deuxième album sorti en 1979, qui deviendra un temps le générique du journal télévisé de la nuit d’Antenne 2.

     

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    Les années suivantes seront marquées par l’explosion des radios libres, initiée en 1981. Cette même année, le Golf Drouot ferme ses portes, après un ultime concert. Le Rock marque le pas… Bientôt, Téléphone tentera de prendre un virage grand public, mais finira par se séparer, comme Starshooter ou Bijou. La Cold Wave, la New Wave à la Française, accouchera quant à elle d’une sorte de Pop réinventée. On pense évidemment à tous ceux qui marqueront cette nouvelle décennie, entre Etienne Daho et Niagara, en passant aussi par le groupe Taxi Girl apparu en 1981, et son chanteur emblématique Daniel Darc, qui deviendra l’icône de cette scène chic parisienne, décontractée et moderne.

     

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    Ainsi s’achève notre évocation de cette « French Connection » des années 1978 à 1982. Nous aurions évidemment pu aussi citer d’autres formations qui auront marqué la période, de Shakin’ Street à Stinky Toys, en passant par Little Bob Story, Les Dogs ou encore Les Olivensteins. Peut-être pour une prochaine fois…

     

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    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »]  French Connection (1978-1982) : Episode 01

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] French Connection (1978-1982) : Episode 02

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] French Connection (1978-1982) : Episode 03

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] French Connection (1978-1982) : Episode 04

     

     

     

  • Restez chez vous et baisez-vous…

     

     

    « Je ne savais pas que l’amour, c’était une maladie. Vous au moins vous êtes tranquille, vous vous êtes fait vacciner ! » 

     

    Parce que ce matin, j’en profite pour vous dire : Si vous interrogez 50 experts, vous savez, les mêmes que notre gouvernement a interrogés, eh bien, vous constaterez que vous aurez en général 50 avis différents, et ce pour évidemment des considérations, des objectifs tous différents, quand on ne parle même pas de pathologies psychologiques lourdes ; entre ceux qui savent tout sur tout, ceux qui sont dans l’idéologie mortifère, ceux qui ne voulaient pas effrayer la population, ceux qui sont souvent dans le déni, ceux qui ne voulaient pas dire la vérité pour que les élections se tiennent bien, ceux qui ont fait prévaloir l’intérêt économique avant l’intérêt humain et sanitaire, et bien d’autres raisons encore sans rapport avec la réalité des faits…

    Alors, aujourd’hui, à qui pouvons-nous nous fier ? Evidemment à ceux qui sont au coeur de cette guerre, qui eux savent parce qu’ils le vivent au quotidien, dans leur chair. Je prends comme exemple un médecin français qui travaille à Wuhan depuis des années, qui n’a pas vu sa famille depuis plus de deux mois, et qui nous adresse ce message : « Restez chez vous à partir de maintenant, tout de suite ! N’ayez aucun contact avec l’extérieur pendant 2, 3 semaines, 4 semaines si nécessaire, AUCUN ! Et si tout le monde respecte cela, vous vous protégerez, vous protégerez vos proches, le personnel soignant, les gens qui vous nourrissent, et il n’est pas impossible que vous voyiez la courbe des contaminations commencer à s’infléchir ».

    Qu’est-ce que c’est, quelques semaines, dans une vie ?? Et quand tout ce film d’épouvante sera terminé, il sera temps d’en tirer les conclusions qui s’imposent, et il faudra que tous ceux qui nous ont menés à ce désastre rendent des comptes, dans les urnes comme dans leurs petites consciences bien rances ! Car préparons-nous à ce que plus rien ne soit comme avant… Alors faisons en sorte que ça soit pour le bien !!!

    Et comme les distances de sécurité n’ont pas lieu d’être sur internet : un baiser par jour, sur ce fil. De ces baisers qui redonnent espoir, avec plein de salive autour !

     

    Jour 01 du Grand Confinement : Rita Hayworth et Glenn Ford dans « Gilda ».

     

    Jour 02 du Grand Confinement : Marcello Mastroianni et Anita Ekberg dans « La Dolce Vita ».

     

    Jour 03 du Grand Confinement : Michèle Morgan et Jean Gabin dans « Quai des Brumes ».

     

    Jour 04 du Grand Confinement : Faye Dunaway et Steve McQueen dans « L’Affaire Thomas Crown ».

     

    Jour 05 du Grand Confinement : Deborah Kerr et Burt Lancaster dans « Tant qu’il y aura des hommes ».

     

    Jour 06 du Grand Confinement : Eva-Marie Saint et Marlon Brando dans « On The Waterfront ».

     

    Jour 07 du Grand Confinement : Jean Seberg et Jean-Paul Belmondo dans « A Bout de Souffle ».

    Jour 08 du Grand Confinement : Brigitte Bardot et Jean-Louis Trintignant dans « Et Dieu créa la Femme ».

     

    Jour 09 du Grand Confinement : Ingrid Bergman et Cary Grant dans « Notorious ».

     

    Jour 10 du Grand Confinement : Vivien Leigh et Clark Gable dans « Autant En Emporte Le Vent ».

     

    Jour 11 du Grand Confinement : Audrey Hepburn et Gregory Peck dans « Vacances Romaines ».

     

    Jour 12 du Grand Confinement : Ingrid Bergman et Cary Grant dans « Les Enchaînés ».

     

    Jour 13 du Grand Confinement : Anna Karina et Jean-Paul Belmondo dans « Pierrot Le Fou ».

     

    Jour 14 du Grand Confinement : Cameron Diaz et Jim Carey dans « The Mask ».

     

    Jour 15 du Grand Confinement : Audrey Hepburn et George Peppard dans « Breakfast At Tiffany’s ».

     

    Jour 16 du Grand Confinement : Scarlett Johansson et Jonathan Rhys-Meyers dans « Match Point ».

     

    Jour 17 du Grand Confinement : La Belle et Le Clochard dans… « La Belle et le Clochard ».

     

    Jour 18 du Grand Confinement : Kate Winslet et Leonardo DiCaprio dans « Titanic ».

     

    Jour 19 du Grand Confinement : Vivien Leigh et Clark Gable dans « Autant En Emporte Le Vent ».

     

    Jour 20 du Grand Confinement : Dakota Johnson et Jamie Dornan dans « 50 Nuances de Grey ».

     

    Jour 21 du Grand Confinement : Zira et Charlton Heston dans « La Planète des Singes ».

     

    Jour 22 du Grand Confinement : Vittoria Puccini et Stefano Accorsi dans « Encore Un Baiser ».

     

    Jour 23 du Grand Confinement : Ellen Ripley et Alien dans « Alien 3 ».

     

     

     

  • French Connection (1978-1982) : Episode 04

     

     

    Plongée dans la France de la toute fin des années 70, les années Giscard : période des grands bouleversements sociétaux et d’un certain sentiment de modernité, entre libéralisation du divorce et éclatement de l’ORTF. Pourtant, la jeunesse s’ennuie et se réfugie alors dans l’émergence de nouvelles scènes rock et new-wave. Parmi les groupes qui s’imposent : Téléphone, Starshooter ou Bijou.

     

    C’est la nouvelle vague, plastique et fluo et Skaï
    Super dégaine spéciale, électricité en pagaille
    C’est la nouvelle vague, sans paradis artificiels
    Sans illusions superficielles, sans mémoire…

    Starshooter, 1979

     

    Mais la nouvelle vague, cette année-là, reste essentiellement celle des musiciens du groupe Téléphone, qui en ce début de l’année 1979, enregistrent à Londres leur 2ème album, « Crache Ton Venin ». Les textes réalistes abordent de front les thèmes de société, entre menace atomique (« La Bombe Humaine »), révolte et conflits familiaux des adolescents. Porté par une pochette conçue par le photographe Jean-Baptiste Mondino, l’album consacre le groupe, trois ans à peine après son tout premier concert. Même si, en marge de cette nouvelle scène rock, d’autres courants musicaux sont alors en gestation.

     

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    « C’est pour essayer de penser à autre chose, parce que c’est tellement triste, tout ce qui arrive, qu’il faut bien s’étourdir. Sortir le plus possible, sortir toute la nuit, aller boire, aller danser. Avant de mourir, il faut prendre du plaisir et jouir de l’instant présent. » (Alain Pacadis sur le plateau d’Apostrophes, 07/04/1978)

     

    A l’image de l’étrange et provocateur Alain Pacadis, chroniqueur déglingué des nuits parisiennes, notamment pour le quotidien Libération, apparaissent alors les nouveaux punks, ces dandys urbains et sophistiqués qui se défoncent à l’héroïne, dorment le jour et arpentent la nuit les institutions festives qui s’ouvrent en cascade. Il y eut d’abord La Main Bleue, ouverte en 76 dans un ancien centre commercial de Montreuil, près de Paris. Initialement fréquentée par tous les Africains et les Antillais qui se faisaient refouler des boîtes parisiennes, La Main Bleue devient un lieu branché investi par les bourgeois bohèmes blancs de la capitale.

     

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    En mars 78, dans un ancien théâtre à l’Italienne situé près des Grands Boulevards ouvrait ensuite l’inévitable Palace, sous l’impulsion de Fabrice Emaer, devenant le comble des sociabilités « People », des vanités chics et délurées. Plus intimistes, les Bains-Douches sont inaugurés en décembre de la même année, Rue du Bourg l’Abbé, près du Marais, rachetés par deux antiquaires qui en confient la décoration à Philippe Starck. Le premier soir, deux-mille personnes se pointent et la Préfecture de Police, qui redoute des débordements, a posté huit cars de CRS de part et d’autre de la rue.

     

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    En l’espace de quelques mois, avec le concours actif des médias, Libération ou Actuel en tête, la danse en boîte de nuit, le « Clubbing », comme on l’appelle, devient l’horizon incontournable de la jeunesse urbaine française, ou du moins parisienne. Parmi les créateurs, les couturiers, les stars ou les vedettes de passage, on y croise aussi Gainsbourg et la jeune garde du rock français, comme les membres du groupe Bijou, qui en 1979, sortent sur leur deuxième album une reprise des « Papillons Noirs » gainsbouriens.

     

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    « Les Papillons Noirs » signé Gainsbourg, que ce dernier avait enregistré en 1966 avec Michèle Arnaud, est repris en 1979 par le groupe Bijou, trio arty, mélange de rock dur et de romantisme, sur son album « Ok Carole ». En février 1980, le magazine Actuel intitule un article d’une formule efficace, qui allait devenir une appellation musicale, pour résumer l’époque : « Les jeunes gens modernes aiment leurs mamans ». Entre les Rennais de Marquis de Sade, Jacno ou Marie et Les Garçons, les groupes n’ont pas grand chose à voir entre eux, mais peu importe…

    Associé à cette mouvance, le groupe parisien Edith Nylon, formé là encore par des lycéens de bonne famille autour de la chanteuse Mylène Khaski, enregistre son tout premier album en 1979, pendant les vacances scolaires. Mylène et sa chevelure de feu s’y autoproclamant « femme bionique, artères antistatiques, perruque de nylon, utérus en Téflon, seins gonflés silicone, lèvres glacées de chrome… Edith Nylon, c’est moi… ».

     

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    « Edith Nylon » par le groupe du même nom, dont les paroles évoquent la société d’alors, le féminisme, mais aussi les périls futurs, comme les manipulations génétiques ou le transhumanisme, et dont la new-wave inspirera par la suite des groupes comme les Rita Mitsouko. Pour l’heure, ce changement de décennie est surtout marqué par le rock et l’émergence d’un nouveau groupe, Trust.

    Formé en 1977 par deux mecs de banlieue parisienne, le chanteur Bernie Bonvoisin venu de Nanterre et le guitariste Norbert « Nono » Krief originaire des Mureaux, Trust, après avoir passé trois longues années dans l’ombre de Téléphone, connaît un immense succès à partir de 1980 avec la parution de son second album « Répression », dénonçant le sort de Jacques Mesrine dans la chanson « Le Mitard » ou encore l’ensemble du système, dont les dés sont pipés. Il s’en écoule plusieurs centaines de milliers d’exemplaires dès sa sortie.

     

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    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »]  French Connection (1978-1982) : Episode 01

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] French Connection (1978-1982) : Episode 02

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] French Connection (1978-1982) : Episode 03

     

     

     

  • French Connection (1978-1982) : Episode 03

     

     

    Plongée dans la France de la toute fin des années 70, les années Giscard : période des grands bouleversements sociétaux et d’un certain sentiment de modernité, entre libéralisation du divorce et éclatement de l’ORTF. Pourtant, la jeunesse s’ennuie et se réfugie alors dans l’émergence de nouvelles scènes rock et new-wave. Parmi les groupes qui s’imposent : Téléphone, Starshooter ou Bijou.

     

    Jusque là, la scène rock et pop progressive française, malgré son succès auprès de la jeunesse, qu’on songe aux groupes Magma, Ange, Triangle ou aux Variations, ne bénéficie presque d’aucune promotion de la part des maisons de disques. Et par conséquent d’aucun passage à la radio ni à la télé. L’explosion du mouvement punk en Grande-Bretagne allait sacrément rebattre les cartes… Avant même cela, le punk, au début des années 70, trouve déjà des adeptes dans le petit monde parisien de la musique. Ne jurant que par les Stooges d’Iggy Pop, le Velvet Underground ou les New York Dolls, le journaliste Yves Adrien s’en fait l’écho dès 72 dans les colonnes de Rock & Folk.

    Prônant une révolution rock électrique pour ceux qui aiment le rock violent, éphémère et sauvagement teenager, il écrit : « des teenagers qui préfèrent le bubble gum au Marxisme, et c’est heureux. La rock music n’a que faire des slogans. L’aventure gauchiste n’est pas, dans le concept musical et électrique qui nous préoccupe, plus importante que la mode du twist ou des bottes à semelles compensées ». Le punk, dont on trouve les disques importés des Etats-Unis chez Open Market, éphémère disquaire parisien créé par Marc Zermati, tête chercheuse musicale et fondateur déjà en 1972 du label Skydog. A peine trentenaire, Zermati avait ouvert sa boutique dans le quartier des Halles, alors en plein chamboulement après la destruction des Halles Baltard et la prochaine ouverture du Forum des Halles et du Centre Pompidou.

     

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    La cave située sous sa boutique du 58 Rue des Lombards accueille les répétitions des Havrais du groupe Little Bob Story ou des Parisiens du groupe Asphalt Jungle, formé en 1976 par le jeune critique rock Patrick Eudeline, âgé de vingt-deux ans. L’été 76, Marc Zermati organisait à Mont-de-Marsan, dans les Landes, le premier festival punk français. Un an plus tard, il remet ça. Deux jours de concert, début août, qui attirent 4000 spectateurs. En têtes d’affiche, les Britanniques de The Clash et d’Eddie & The Hot Rods, précédés chaque soir sur scène de plusieurs groupes français : Strychnine, les Lou’s, un groupe de punk 100 % féminin, Shakin’ Street, Marie et les Garçons, Bijou ou encore Asphalt Jungle.

    La jungle de l’asphalte, dont le chanteur et leader Patrick Eudeline, qui a fait ses études au très conservateur collège Stanislas à Paris, est devenu dix ans plus tard critique musical pour le magazine Best. Eudeline, qui traîne par ailleurs souvent au Gibus, une petite salle située à un jet de pierre de la Place de la République, où l’on peut dîner jusque tard et écouter de la musique. Il y décroche un engagement pour son groupe et en profite pour ouvrir la scène à d’autres formations, lors d’un mini-festival de musique punk qui aide à la promotion de ce nouveau courant. Asphalt Jungle, qui sortira en 78 son titre « Poly Magoo », hommage au film de William Klein et aux paroles aussi énigmatiques que son oeuvre inspiratrice : « Quelque chose de bubble gum, à chemin nos uniformes, habitude bien trop étrange, je veux être Poly Magoo… »

     

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    « Poly Magoo », troisième single du groupe Asphalt Jungle, sorti en 1978. Pourtant, le groupe ne durera pas et se séparera l’année suivante. Les punks, qui se retrouvent donc les soirs au Gibus, ou bien dans les premiers McDo qui ouvrent en France. Le tout premier, sur les Champs-Elysées en 1973 ; à 6,30 Francs le BigMac et 3,20 Francs les super-frites congelées… « Les plus beaux musées du 20ème siècle », comme les avait qualifiés Andy Wharol, deviennent les rendez-vous gastronomiques obligés des punks parisiens, souvent fauchés. Du moins pour se nourrir… Christian Eudeline, le frère de Patrick, qui chroniquera lui aussi ces années-là, écrit : « La plupart des premiers punks étaient très sensibles, gentils, doux, souvent timides, ce qui contrastait avec la violence de leur musique et de leurs textes. Ils carburaient au Fringanor, une amphétamine, ou encore à l’héroïne, mettant un point d’honneur à ne pas fumer de joints, qu’ils considéraient comme des trucs de babas… ».

    Cette année 78 est votée la loi « Informatique et Liberté » dont l’article 8 énonce « l’interdiction de collecter des données à caractère personnel faisant apparaître les origines raciales, ethniques, les opinions politiques, philosophiques, religieuses ou syndicales, de même que les orientations sexuelles ». Vingt ans avant l’avénement d’Internet, la France posait ainsi l’un des premiers jalons en la matière. Même si, à vouloir protéger les citoyens des intrusions et de la surveillance des grandes bases de données dont les administrations commençaient à se doter, la France ne réalisait pas qu’elle manquait en fait d’informations essentielles, et qu’entre sa jeunesse et elle, un angle mort s’était peu à peu formé… Comme en témoigne cette archive Ina du 09 décembre 1978, « La France des adultes ne connaît pas les jeunes » (Jean-Claude Bourret et Dominique Laury, TF1).

     

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    Or, malgré le scepticisme ambiant, une frange des jeunes commence à s’agiter. Illustration de cette agitation naissante, juillet 1978 à l’Olympia, où est organisé le festival « Le Rock d’Ici ». Trois soirs de concert montés par Philippe Constantin, qui travaille à l’époque chez Pathé Marconi. Sur scène, neuf groupes rock ou punk font face à 2000 spectateurs, dans une ambiance particulièrement déchaînée. Ainsi, le groupe Metal Urbain ne joue-t-il que trois ou quatre morceaux, le temps que son clavier, imbibé de bière, ne se prenne les pieds dans les câbles de ses synthés et que tout n’explose… Le reste est à l’avenant.

    En coulisse, les groupes se foutent joyeusement sur la gueule pour faire modifier l’ordre de passage, tandis que sur scène, Kent, le chanteur de Starshooter, fait remarquer à la foule qu’à l’époque de Bécaud, les gens pétaient les fauteuils. Qu’à cela ne tienne, la foule de 1978 se retrousse les manches et en fait de même. Un à un, les fauteuils sont déposés sur scène, comme autant d’offrandes à la contestation. Résultat : 200 fauteuils arrachés, et une sulfureuse mais efficace publicité pour la manifestation.

    Starshooter, qui ce soir-là pendant sa prestation, accueille une performance de Marie-France, actrice et figure des nuits interlopes parisiennes ; laquelle se pointe sur scène sapée en diva-rock et entame un strip tease irréel. Sauf que Marie-France, militante du Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire et du groupuscule des Gazolines, n’est pas encore arrivée au bout de sa transformation chirurgicale… A l’avant-dernière étape de son effeuillage sur scène, les punks ont la mâchoire qui se décroche… La nouvelle vague n’a décidément peur de rien et elle ose tout.

     

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    Source : Amaury Chardeau pour Juke Box / Ina

     

     

  • French Connection (1978-1982) : Episode 02

     

     

    Plongée dans la France de la toute fin des années 70, les années Giscard : période des grands bouleversements sociétaux et d’un certain sentiment de modernité, entre libéralisation du divorce et éclatement de l’ORTF. Pourtant, la jeunesse s’ennuie et se réfugie alors dans l’émergence de nouvelles scènes rock et new-wave. Parmi les groupes qui s’imposent : Téléphone, Starshooter ou Bijou.

     

    La France où jusqu’alors, malgré les cafés, les flippers, les MJC, la jeunesse s’ennuyait ferme. Et même si le moule traditionnel commençait à se fissurer. Giscard, propulsé en 1974 à l’Elysée, avait abaissé l’âge de la majorité de 21 à 18 ans. Mais en dehors de ça, rien ne semble bouger. La société reste guindée, conservatrice. Aux yeux de la jeunesse, la partie est jouée, les dés sont pipés et la génération d’avant reste aux commandes. Certes, depuis 75, les couples peuvent divorcer plus simplement. Mais les jeunes, eux, s’en foutent, ils ne sont pas mariés. Quant à l’ORTF, dont la mission s’affichait fièrement, « satisfaire les besoins d’information, de culture et de distraction du public », mais qui se trouvait de plus en plus concurrencée par les radios périphériques, elle est démantelée.

    Car la jeunesse semble ne plus croire en rien. Elle a fini par se faire à l’idée que la société, dans ses travers, n’est pas réformable. L’effervescence post-68, le fameux « esprit de mai », tend à se dissoudre peu à peu. Le sociologue Jean Duvignaud, qui vient de passer deux ans à son chevet,  publie en 1975 les résultats de son enquête, « La Planète des Jeunes », dans laquelle il pointe du doigt tant sa soudaine dépolitisation que la perte d’influence progressive du gauchisme sur celle-ci. Selon Duvignaud, la jeunesse deviendrait passive et serait repliée sur ses problèmes personnels. Devant l’échec des croyances, des idéologies, des utopies, elle se réfugie de plus en plus dans ce que le sociologue qualifie de « niches » ; appartements plus chaleureux, métiers plus isolatoires, mais surtout bals, boîtes et drogues…

     

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    « Attitudes » par Marie et Les Garçons. Le groupe se forme à Lyon en 1976, au sein d’une bande de lycéens. Fin 77, leur premier single, « Rien à Dire », un rock efficace, sortait et se retrouvait dans la foulée entre les mains de John Cale, illustre membre du Velvet Underground. Excusez du peu… Quelques mois plus tard, au printemps 78, Marie Girard, d’abord chanteuse puis batteuse du groupe, se retrouve avec les autres à New York, où le groupe enregistre ce deuxième single, « Attitudes », avec le même John Cale au piano. Mais n’allons pas trop vite en besogne… En effet, la new wave et la cold wave à la Française n’arriveront qu’un peu plus tard. Pour l’heure, disons que la jeunesse locale se cherche justement de nouvelles… attitudes.

     

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    De nouvelles attitudes, donc. Des échappatoires, des lieux rien qu’à eux. A Paris, c’est notamment le Golf Drouot, un ancien salon de thé, poussiéreux, quoique pourvu d’un étrange mini-golf de neuf trous, mais ne comptant pas beaucoup plus de clients… Et qu’un type, un certain Henri Leproux, transforme finalement en discothèque. Mais aussi en véritable temple du rock, y installant une scène permettant depuis le début des années 60 à de jeunes groupes de se faire connaître, à l’occasion de tremplins organisés le vendredi soir. C’est sur cette scène qu’avaient démarré tous les pionniers français, de Johnny Hallyday aux Chaussettes Noires. Puis Le Golf Drouot accueille les premières stars anglo-saxonnes, The Who, David Bowie, pour devenir un incontournable de la scène rock tant française qu’internationale.

     

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    « Au Golf Drouot, première surprise, on ne descend pas dans la boîte, on y monte. D’abord, un escalier, un escalier gigantesque… Dont Henri Leproux, le propriétaire des lieux, dira qu’il est plus facile à descendre qu’à monter. Et parfois, c’est pratique. » (Reportage au Golf Drouot – Archive Antenne 2, 21 avril 1976)

     

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    1978, Starshooter et son « Betsy Party »… Starshooter, groupe lui aussi Lyonnais, formé peu de temps auparavant autour du chanteur Kent Despesse, dit Kent Hutchinson ou encore Kent Cokenstock, les musiciens s’affublant tous de noms potaches à consonance anglo-saxonne. Il y a Mickey Snack à la basse, Phil Pressing à la batterie ou Jello à la guitare. Ils ont vingt ans et s’attirent rapidement les éloges de la critique. A sa sortie, « Betsy Party » passe d’ailleurs en boucle sur l’antenne d’Europe 1. Leurs concerts impressionnent par la puissance scénique déployée, malgré les provocations et les jets de canettes de bière. Eux aussi, dès 1977, s’étaient produits sur la petite scène du Golf Drouot.

     

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    Source : Amaury Chardeau pour Juke Box

     

     

     

  • French Connection (1978-1982) : Episode 01

     

     

    Plongée dans la France de la toute fin des années 70, les années Giscard : période des grands bouleversements sociétaux et d’un certain sentiment de modernité, entre libéralisation du divorce et éclatement de l’ORTF. Pourtant, la jeunesse s’ennuie et se réfugie alors dans l’émergence de nouvelles scènes rock et new-wave. Parmi les groupes qui s’imposent : Téléphone, Starshooter ou Bijou.

     

    [youtube id= »bJMvV8VjeDs » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

    Dans la foulée de son accession à l’Elysée en 1974, Valéry Giscard-d’Estaing initie plusieurs grandes réformes sociétales : abaissement de l’âge de la majorité de 21 à 18 ans, instauration du divorce par consentement mutuel, éclatement de l’ORTF, dépénalisation de l’avortement… Pourtant, la jeunesse française s’ennuie. Le sociologue Jean Duvignaud pointe dans « La Planète des Jeunes » (Stock 1975) leur dépolitisation et, face à l’échec des utopies soixante-huitardes, leur repli sur leurs problèmes personnels.

    La révolution Punk s’immisce ainsi dans la brèche et voit l’ouverture des grands clubs parisiens. Le rock français, boudé jusque-là par les grands médias, se fraie un chemin. C’est le début des années Téléphone, Starshooter ou Trust, mais aussi de l’émergence des scènes post-punk et new wave, celles des Edith Nylon ou Taxi Girl. Bref, une certaine idée de la France branchée qui basculera en 81 avec l’élection de Mitterrand, dans laquelle on croise des gens de bonne famille, des fauteuils de velours arrachés, des dandys déglingués et des frites congelées. Retour sur cette période 1978 – 1982…

     

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    Le transistor posé sur la table en acajou du salon, personne ne semble l’écouter. Ni monsieur, enfoncé dans son fauteuil à lire le journal, ni madame qui termine son repassage… C’est un intérieur cossu, confortable. L’année dernière, ils ont installé partout une moquette bégasse, dont ils sont très contents. Dans l’entrée de l’appartement aussi, où trône le téléphone familial. Son fil tirebouchonné, reliant le socle au combiné, a été étiré comme un élastique, jusque sous une porte fermée, derrière laquelle s’est adossée une jeune fille, en pleine conversation.

    Elle souffle sur la mèche qui lui barre le visage, tandis que face à elle, ses idoles rock la toisent, sur papier glacé. Elle échange encore quelques mots à voix basse, puis se contorsionne pour éviter d’arracher le fil. Elle se relève, enfile une veste de cuir achetée la semaine précédente et se glisse sans un bruit hors de l’appartement, loin des causeries présidentielles.

     

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    Dans la ville, ce mardi soir, la nuit est tombée, crevée par les néons des pharmacies ou des PMU. Les juke-box diffusent à plein tube, parmi les papiers gras. Cette France où Giscard, débonnaire, annonce que ça risque encore de se compliquer pendant un moment, que la crise est là. Notre jeune fille en suit les rues anonymes, puis parvenue devant un bar, elle attend en face du kiosque à journaux. Sa copine est en retard et elle hésite à entrer dans le rade, retenue par la présence d’une dizaine d’habitués, avinés au comptoir.

    Par la vitrine, elle avise aussi un groupe de jeunes types, penchés sur un flipper. Elle les trouve pas mal, alors elle les regarde un moment jouer et tirer sur leur clope. Elle n’a pas le son… Elle s’apprête à s’éloigner et faire quelques pas, quand soudain la belle tignasse brune accoudée au flipper tourne la tête vers elle, la dévisage et lui sourit.

     

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    « On te donne trois balles, la première, t’es un môme. Tu prends la cadence, tu entres dans la danse. Dans la violence des chocs, tu comprends ta chance. Tu sais maintenant comment ton histoire commence. »… Signé Louis Bertignac, ce « Flipper » qui clôt le premier album du groupe Téléphone, raconte cette jeunesse qui joue sa vie, de bumper en bumper. Téléphone, qui avait vu le jour le 12 novembre 1976, à la faveur d’un concert donné au Centre Américain de Paris, Boulevard Raspail, à l’emplacement de l’actuelle Fondation Cartier.

    Jean-Louis Aubert, un jeune des beaux quartiers, se rebelle contre son éducation de scout et d’enfant de choeur, et doit s’y produire avec son pote de lycée, le batteur Richard Kolinka. Sauf qu’il leur manque deux musiciens. Pour l’occasion, Ils recrutent donc le guitariste Louis Bertignac et sa copine de l’époque, la bassiste Corine Marienneau. Tous deux avaient joué dans un groupe de hard-rock francilien, les Shakin Street. L’affluence ce soir-là au Centre Américain, 5 à 600 personnes, raconte quelque part l’impatience qui tiraille alors la jeunesse française. 

    Téléphone et sa formule gagnante allait devenir, en l’espace de deux albums et trois années, l’incarnation du renouveau du rock français…

     

    Source : Amaury Chardeau pour Juke Box

     

     

     

  • 1979, l’année qui changea le monde, Episode 14 : Entretien avec Amin Maalouf

     

    [kleo_pin type= »circle » left= »yes » right= » » top= » » bottom= » »]          « FOCUS » : un article de fond sur un thème que nos rédacteurs ont sélectionné.

     

     

    L’année 1979 est définitivement une année-charnière, comme la fin d’un cycle. Elle scelle le sort des dernières utopies. Le monde prend une pelle et enterre à la hâte les cadavres encore fumants de nos illusions perdues. Après 1979, rien ne sera plus vraiment comme avant…

     

    Coincée à la fin d’une décennie qui paraît un peu creuse, durant laquelle les dirigeants politiques semblent manquer de charisme (le pâle Carter face au cowboy médiatique Reagan, VGE après De Gaulle et Pompidou), l’année 1979 n’attire décidément pas les flashes. Et pourtant… Que d’événements considérables ont eu lieu cette année-là, autant de tremblements qui ont marqué la face du monde et dont on ressent encore les répliques quarante ans plus tard.

    Révolution iranienne, arrivée de Saddam Hussein au pouvoir en Irak, début de la Guerre d’Afghanistan qui mènera à la chute de l’URSS et à l’apparition du terrorisme islamiste, second choc pétrolier et crise économique mondiale, paix entre Israël et l’Egypte, fin des Khmers Rouges… Il n’est pas insensé de penser que 1979 a en réalité été l’année la plus importante de l’après-Seconde Guerre Mondiale.

     

    Bien des événements emblématiques de notre époque, de la chute du mur de Berlin à l’écroulement des tours du World Trade Center, partent ainsi du même point : 1979. Une année où sont survenus des bouleversements tels qu’on en subit encore les conséquences, soutient l’écrivain Amin Maalouf.

     

    En 1979, le monde est ébranlé par deux événements majeurs : la révolution iranienne, qui va propulser l’ayatollah Khomeiny au pouvoir, et la révolution conservatrice au Royaume-Uni, marquée par l’élection de Margaret Thatcher. Ces révolutions enclenchent ce qu’Amin Maalouf, écrivain franco-libanais, qualifie de « grand retournement » et dont nous subissons toujours les secousses. Dans son tout dernier essai, « Le naufrage des civilisations » (paru cette année chez Grasset), l’auteur de « Léon l’Africain », de « Samarcande » et d’une dizaine d’autres livres (et membre de l’Académie française) écrit que les événements de cette année fatidique ont métamorphosé les sociétés humaines et conduit les civilisations au bord du précipice.

     

    Vous établissez l’année 1979 comme celle marquant le début des dérèglements mondiaux. Pourquoi ?

    Il y a des dates qui deviennent en quelque sorte des marque-pages dans le grand registre du temps, signalant la fin d’un chapitre et le commencement d’un autre. En 1979 se sont mis en place les paramètres politiques et intellectuels qui ont façonné le monde tel que nous le connaissons aujourd’hui : la montée de l’islamisme radical et, plus généralement, des tensions identitaires ; et la montée d’une nouvelle forme de gestion économique, caractérisée par un reflux des politiques sociales et par une dénonciation de l’« Etat-Providence ». Les deux événements emblématiques de cette évolution sont le triomphe de la révolution iranienne, en février 1979, avec la proclamation par l’ayatollah Khomeiny d’une République islamique ; puis, trois mois plus tard, en mai, au Royaume-Uni, la victoire électorale de Margaret Thatcher et l’avènement de ce qu’elle a appelé sa « révolution conservatrice », qui allait influencer les dirigeants du monde entier.

     

     

     

    Ces deux phénomènes ne sont pas semblables. Pourquoi les relier ?

    Il est vrai qu’il y a d’énormes différences entre les deux événements, entre les deux personnages, comme entre les deux conservatismes. Mais ils ont provoqué, sur l’ensemble de la planète, un « retournement » durable des idées et des attitudes. Leur proximité dans le temps n’était sûrement pas le résultat d’une action concertée, mais elle n’était pas non plus le fruit du hasard. Je parlerai plutôt de « conjonction ». C’est comme si une nouvelle « saison » était arrivée à maturité, et qu’elle faisait éclore ses fleurs en mille endroits à la fois. Ou comme si « l’esprit du temps » était en train de nous signifier la fin d’un cycle, et le commencement d’un autre. Désormais, c’est le conservatisme qui se proclamera révolutionnaire, tandis que les tenants du « progressisme » n’auront plus d’autre but que la conservation des acquis.

     

    Commençons par les turbulences identitaires. Pourquoi frappent-elles surtout le monde arabo-musulman ?

    Dans mon dernier livre, je m’efforce de trouver les raisons pour lesquelles ma région natale, le Proche-Orient, a connu une dérive identitaire meurtrière. Je ne prétends pas expliquer l’ensemble du phénomène, mais j’essaie d’offrir quelques pistes de réflexion. En partant de ma propre expérience. Je suis né à Beyrouth, et j’ai eu le triste privilège d’assister, en avril 1975, de la fenêtre de mon appartement, au massacre qui fut le déclencheur de la guerre du Liban. À partir de là, la coexistence entre les ressortissants des diverses communautés a été rompue. Jusque-là, elle fonctionnait à peu près, même si elle n’a jamais été idyllique.

     

     

     

     

    Mais le Proche-Orient a été secoué par d’autres événements. Vous montrez du doigt les actions de Nasser, le dirigeant égyptien qui a renversé la monarchie en 1952. N’est-il pas tout à la fois héros et fossoyeur du monde arabe ?

    Nasser arrive à un moment clé de l’histoire de cette région et du monde. Lorsqu’il prend le pouvoir en 1952, il est vu comme un libérateur. Il renverse une monarchie discréditée et redonne aux peuples arabes leur fierté. Il atteint son moment de gloire en 1956 lorsqu’il nationalise le canal de Suez et sort politiquement gagnant de son différend avec la France, le Royaume-Uni et Israël. Il devient un leader de stature mondiale, et une idole pour les foules arabes. Mais sa manière de gouverner se révèle désastreuse. Il nationalise à tour de bras, réprime l’opposition et pousse vers la sortie les communautés dites « égyptianisées » — des centaines de milliers de Grecs, d’Italiens, de Juifs, de Syro-Libanais, de Français, etc. — dont certaines étaient installées dans la vallée du Nil depuis plusieurs générations, voire plusieurs siècles. En 1967, il perd la guerre contre Israël. Et le monde arabe ne s’est jamais relevé de cette défaite.

     

    L’échec de Nasser signe la montée d’une autre force politique déjà bien ancrée dans le monde arabo-musulman, l’islamisme. Et c’est l’Iran de Khomeiny qui va s’en emparer, n’est-ce pas ?

    La révolution khomeiniste de 1979 va effectivement marquer une victoire spectaculaire pour l’islamisme politique et ébranler la civilisation arabo-musulmane. L’Iran, bien que n’étant pas un pays arabe, va se faire le champion des causes que défendait jusque-là le nationalisme arabe, notamment le soutien aux mouvements palestiniens et le combat contre Israël. Les monarchies arabes sont blâmées pour leur faiblesse face aux Occidentaux. L’Iran leur apparaît comme une menace mortelle.

     

     

    Mais d’autres événements vont alimenter l’islamisme ?

    Là encore, 1979 est une année charnière. La révolution iranienne éclate donc en février. En mars, le premier ministre laïque du Pakistan, Ali Bhutto, est exécuté par des militaires prônant l’application de la loi coranique. En juillet, Washington commence à armer les moudjahidines islamistes afghans. En novembre, des militants radicaux prennent d’assaut la grande mosquée de La Mecque et ébranlent le pouvoir saoudien, ce qui le pousse à se durcir considérablement. Enfin, en décembre, l’Union soviétique envahit l’Afghanistan, ce qui déclenche une mobilisation sans précédent dans le monde arabo-musulman, et précipite la défaite du communisme.

     

    Et nous vivons toujours les effets de cet ébranlement ?

    Bien des moments emblématiques qui ont façonné notre époque, de la chute du mur de Berlin en 1989 à l’écroulement des tours jumelles de Manhattan en 2001, trouvent effectivement leur origine dans les événements de cette année-là.

     

    L’autre événement clé du grand retournement dont vous parlez est la révolution conservatrice. Vous l’attribuez à Margaret Thatcher. En quoi est-ce important ?

    L’avènement au pouvoir de Margaret Thatcher en 1979 n’aurait pas eu la même portée s’il ne s’inscrivait pas dans un mouvement profond et ample qui allait dépasser très vite les frontières du Royaume-Uni. Son socle reposait sur le soulèvement des acteurs économiques, et plus généralement des possédants, contre les empiétements de l’État redistributeur des richesses. Cette révolution avait comme programme de diminuer l’intervention du gouvernement dans la vie économique, de limiter les dépenses sociales, d’accorder plus de latitude aux entrepreneurs et de réduire l’influence des syndicats.

     

     

     

    Et cette révolution a rapidement touché la planète entière ?

    Elle s’est révélée, en effet, fort attrayante. Et elle s’est propagée très vite. D’abord vers les États-Unis, avec l’élection de Ronald Reagan en novembre 1980 ; puis vers le reste du monde. Les préceptes de la révolution conservatrice anglo-américaine seront adoptés par de nombreux dirigeants de droite comme de gauche, parfois avec enthousiasme, parfois avec résignation. La révolution conservatrice a mis fin à la « timidité » qu’éprouvait jusqu’alors la droite dans le débat politique et intellectuel, notamment sur les questions sociales. C’est là une dimension difficile à saisir, mais elle est essentielle pour comprendre le bouleversement qui s’est opéré dans les mentalités, partout dans le monde. La domination qu’exerçaient jusque-là les idées et le vocabulaire de la gauche s’est effritée.

     

    Quels ont été ses résultats ?

    Ils ont été nuancés. Le triomphe d’un capitalisme décomplexé a eu pour effet de libérer des forces économiques puissantes, et de favoriser le décollage des plus grandes nations non occidentales, comme la Chine ou l’Inde. Mais il a accentué les inégalités, au point de créer une petite caste d’hypermilliardaires, chacun d’eux plus riche que des nations entières ; et il a désavantagé de vastes couches de la population, qui se sentent aujourd’hui marginalisées, et même délaissées.

     

    Vous parlez de naufrage des civilisations, alors que le professeur Samuel Huntington, dans son livre phare de 1996, parle de « choc des civilisations ». Y a-t-il une différence ?

    Samuel Huntington a prédit que le monde allait se constituer en sept ou huit blocs, ou « aires de civilisation ». Pourtant, ce qui caractérise l’humanité aujourd’hui, ce n’est pas une tendance à se regrouper au sein de très vastes ensembles, mais une propension au morcellement, au fractionnement, souvent dans la violence. C’est évidemment vrai dans le monde arabe, mais c’est également vrai en Europe, et ailleurs. Partout dans le monde, il y a au sein des sociétés humaines de plus en plus de facteurs qui fragmentent, et de moins en moins de facteurs qui cimentent.

     

    Faut-il donc conclure à l’inexorable naufrage des civilisations ?

    Les années à venir vont très probablement nous apporter des secousses majeures. Mais je reste persuadé que l’on finira par connaître une prise de conscience, et un sursaut. C’est dans cet espoir que j’ai écrit mon livre.

     

     

    Entretien avec Jocelyn Coulon pour L’Actualité (09 octobre 2019)

     

     

     

  • 1979, l’année qui changea le monde, Episode 13 : McDonald’s

     

    [kleo_pin type= »circle » left= »yes » right= » » top= » » bottom= » »]          « FOCUS » : un article de fond sur un thème que nos rédacteurs ont sélectionné.

     

     

    L’année 1979 est définitivement une année-charnière, comme la fin d’un cycle. Elle scelle le sort des dernières utopies. Le monde prend une pelle et enterre à la hâte les cadavres encore fumants de nos illusions perdues. Après 1979, rien ne sera plus vraiment comme avant…

     

    Coincée à la fin d’une décennie qui paraît un peu creuse, durant laquelle les dirigeants politiques semblent manquer de charisme (le pâle Carter face au cowboy médiatique Reagan, VGE après De Gaulle et Pompidou), l’année 1979 n’attire décidément pas les flashes. Et pourtant… Que d’événements considérables ont eu lieu cette année-là, autant de tremblements qui ont marqué la face du monde et dont on ressent encore les répliques quarante ans plus tard.

    Révolution iranienne, arrivée de Saddam Hussein au pouvoir en Irak, début de la Guerre d’Afghanistan qui mènera à la chute de l’URSS et à l’apparition du terrorisme islamiste, second choc pétrolier et crise économique mondiale, paix entre Israël et l’Egypte, fin des Khmers Rouges… Il n’est pas insensé de penser que 1979 a en réalité été l’année la plus importante de l’après-Seconde Guerre Mondiale.

     

    17 septembre 1979, ouverture officielle du premier McDonald’s en France. Ça, c’est pour la version officielle… Car l’histoire a été réécrite de toutes pièces : c’est en effet un certain Raymond Dayan qui a importé la marque comme le concept du fast-food en France sept ans plus tôt, en 1972, alors que la maison-mère américaine était très sceptique quant à la viabilité d’une implantation dans notre doux pays.

     

    Cet anniversaire ne serait donc qu’une escroquerie barbouillée de ketchup et surmontée d’une rondelle de pickle ? Ce 17 septembre 1979, c’est pourtant encore aujourd’hui très officiellement la date gravée dans le marbre de l’histoire du géant américain de la restauration rapide, ainsi que sur la façade de la première enseigne McDonald’s ouverte en France, à Strasbourg. « Nous étions des pionniers », se souvient Michel Ksiazenicer, le premier franchisé. « Cependant l’accueil fut plutôt chaleureux, et les réactions des Alsaciens plus curieuses qu’hostiles », comme nous indique le site de la maison-mère. Sans doute… Car ça fleurait bon le bonheur qui dégouline entre deux buns, à en croire le reportage du journal télévisé de l’époque.

     

    [youtube id= »vAt1y7NECCw » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

    Mais il n’en reste pas moins que l’histoire a été réécrite de toutes pièces… Car McDonald’s cherche en fait depuis quarante ans à effacer des tablettes un homme, Raymond Dayan, celui qui importa la marque comme le concept du fast food en France sept ans plus tôt, en 1972, après une première expérience à Chicago. Les hamburgers en France, McDo n’y croit pas et accorde une licence à des conditions plus qu’avantageuses à l’entrepreneur français, qui obtient de surcroît l’exclusivité sur tout le territoire.

    Raymond Dayan est ainsi autorisé à ouvrir jusqu’à 150 restaurants et la licence lui est accordée pour trente ans. Mais surtout, les conditions financières négociées par l’homme d’affaires sont royales : il ne doit reverser que 1,5 % de son chiffre d’affaires à la maison mère contre près de 20 % aujourd’hui pour un franchisé McDo lambda.

     

    « Je suis vraiment l’incarnation du rêve américain, le seul pays au monde où un émigrant qui a l’esprit d’entreprise et qui a une nouvelle idée, peut venir, y concrétiser son projet et réussir. La France, c’est le pays de l’excellence culinaire. Et venir y importer un concept tel que le hamburger, McDonald’s n’y croyait évidemment pas. Manger avec les doigts, souvent debout, les Américains pensaient que les Français ne s’y mettraient jamais… » (Raymond Dayan en 1984)

     

    Le premier McDo ouvre donc, non pas à Strasbourg en 1979, mais à Créteil, en région parisienne, le 30 juin 1972. Un fast food qui existe d’ailleurs encore aujourd’hui… Les débuts sont cependant quelque peu laborieux. Si les curieux se pressent à Créteil pour voir ce nouveau concept qui cartonne aux Etats-Unis, la mayonnaise ne prend pas immédiatement.

    Raymond Dayan a beau ouvrir un second McDonald’s sur les Champs-Elysées à Paris en 1973, il faudra attendre trois ans pour que ses restaurants cessent de perdre de l’argent. Mais à la fin des années 70, l’homme d’affaires est le roi du hamburger. Il est à la tête de quatorze restaurants qui servent 6 millions de repas par an et réalisent 60 millions de francs de chiffre d’affaires (près de 33 millions d’euros actuels en prenant en compte l’érosion monétaire).

     

    « En 1972, après avoir ouvert le premier McDonald’s à Créteil, j’ai du trouver très rapidement des gens qui sachent faire des hamburgers pour mes autres restaurants. Comme j’étais le premier à lancer le concept, j’ai du former le personnel…  » (Raymond Dayan en 1972)

     

    McDonald’s réalise alors son erreur et propose dans un premier temps à Raymond Dayan de racheter ses restaurants. Celui-ci refuse et la marque américain contre-attaque en invoquant le non-respect de ses règles d’hygiène. S’ensuit une terrible bataille juridique remportée finalement par le géant américain en 1982. Si l’entrepreneur français gagne le procès en première instance, il perd finalement en appel et doit rebaptiser ses 14 restaurants O’Kitch. La marque sera rachetée ensuite par le belge Quick, qui veut se faire une place au soleil sur le marché français.

    Aujourd’hui la filiale française de McDonald’s est l’une de plus florissantes du groupe. Près de 1500 restaurants, 69.000 salariés et 1,8 million de repas servis par jour. Elle se paie même le luxe de posséder le McDo qui réalise le plus gros chiffre d’affaires du monde, celui des Champs-Elysées à Paris, l’artère sur laquelle Raymond Dayan avait ouvert son deuxième restaurant en 1973. Manger avec les doigts, parfois debout, les Français s’y sont finalement mis…