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  • Lino Ventura : le mythe aurait eu cent ans cette année

     

     

    Plus de trente ans après sa disparition, on célébrait le 14 juillet 2019 le centenaire de la naissance de Lino Ventura, né à Parme le 14 juillet 1919. Ancien champion d’Europe de catch, sa présence devant la caméra fascinait autant qu’elle impressionnait. Des « Tontons Flingueurs » à « L’aventure c’est l’aventure », retour sur le parcours d’un acteur unique.

     

    Pourquoi Lino Ventura est-il encore aujourd’hui un tel mythe, plus de trente ans après sa disparition ?

    Certainement déjà grâce à ses films, à commencer par la comédie culte parmi les comédies cultes, « Les Tontons Flingueurs ». Entre 1954, avec son tout premier film, « Touchez pas au Grisbi », et sa disparition en 1987, en 33 ans de carrière, Lino Ventura va tourner pas moins de 75 films, soit une moyenne de deux films par an, ce qui est considérable.

    Lino Ventura, c’est évidemment Fernand Naudin, le chef de ces « Tontons » qui flinguaient à tout va en maniant la langue d’Audiard. C’est encore le brigadier Théo Dumas, l’obstiné « con qui marche et qui va plus loin que deux intellectuels assis » (les excellents Charles Aznavour et Maurice Biraud, en l’occurrence) d’un « Taxi pour Tobrouk ». C’est toujours le Simon de Claude Lelouch dans « La Bonne Année », un braqueur de bijouteries à l’âme tendre et aux manières viriles qui séduit une très belle et très distinguée antiquaire campée par Françoise Fabian.

    Pour tous ces films passés à la postérité, Lino Ventura fait donc encore partie aujourd’hui des acteurs français les plus iconiques, déjà car ces films étaient bons. Mais aussi parce que Lino avait une vraie gueule, une présence. Il a d’ailleurs joué dans un film qui s’appelait « Les Grandes Gueules »…

    Une petite anecdote : nous sommes en 1953 ou 54. Pour son prochain film, « Touchez pas au Grisbi », Jacques Becker cherche un acteur pour donner la réplique à l’immense Jean Gabin. Pas un acteur normal, non, mais un gros dur, un physique de tueur à gage. Un type dit à Becker qu’il connaît un gars qui pourrait faire l’affaire, un catcheur. Le parfait homme de main… Ventura, qui n’a jamais joué dans un film et qui n’a jamais pris le moindre cours de comédie, se retrouve à faire un essai, en présence de Gabin.

    Lino Ventura fait donc pour la première fois de sa vie face à une caméra. On lui demande comme dans n’importe quel essai à l’époque de dire deux ou trois phrases. Gabin, à qui on ne la raconte pas en terme de jeu, lance à Becker : « Mais qui c’est, ce gars ? T’as vu cette présence ! Quelle gueule ! ». et Lino a le rôle…

    Avec « Touchez pas au Grisbi », l’acteur commence une incroyable carrière tandis que l’inoubliable Pépé le Moko interrompt avec ce film noir sa longue traversée du désert qui avait fait sacrément pâlir son étoile après la Deuxième Guerre mondiale… Les deux taiseux tourneront six films ensemble et deviendront d’inséparables amis.

     

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    D’où lui vient cette incroyable force caractère ?

    Angiolino Giuseppe Pasquale Ventura naît le 14 juillet 1919, à Parme. En 1927, il est âgé de huit ans lorsqu’il quitte l’Italie avec sa mère pour rejoindre son père parti travailler comme représentant de commerce à Paris quelques années auparavant. Mais arrivés à Montreuil le 7 juin 1927, la mère et le fils ne retrouveront jamais Giovanni. Le père a disparu dans la nature.

    A 21 ans, comme il a gardé la nationalité italienne, Lino Ventura se retrouve enrôlé dans l’armée italienne au début de la Seconde Guerre mondiale. Le jeune homme n’a pas de conviction particulière et il se tiendra toute sa vie toujours éloigné de la politique.

    Il déserte au moment de l’effondrement du régime fasciste (juillet 1943) pour rejoindre à Paris Odette qu’il a épousée le 8 janvier 1942. Redoutant d’être dénoncé, il doit se cacher dans une maison servant de grange à Baracé, dans le Maine-et-Loire, afin de ne pas être arrêté par les Allemands (il y reviendra après la guerre et achètera cette maison).

    Après la guerre, il entame une carrière de catcheur professionnel, plus rémunératrice que la lutte, et participe à des combats à la salle Wagram et au Cirque d’Hiver, où il lutte sous le nom de Lino Borrini (le nom de famille de sa mère), alias « la fusée italienne ». Sa carrière de catcheur atteint son apogée en février 1950 lorsqu’il devient champion d’Europe des poids moyens pour l’Italie.

    Mais sa carrière prend fin brutalement le 31 mars 1950, après qu’Henri Cogan le blesse en le projetant dans des chaises métalliques, lui occasionnant une double fracture ouverte à la jambe droite. Il devient alors organisateur de combats pour une vingtaine de catcheurs de son écurie.

    Lino Ventura gardera de cette expérience de catcheur, mais aussi de son enfance, une certaine aptitude à la bagarre. Car lorsqu’on était un petit immigré italien en France dans ces années-là et qu’on se faisait traiter de « macaroni », il fallait savoir jouer des coudes (et des poings) pour se faire respecter.

     

    « Ça a marqué beaucoup ma vie. C’est pour ça que je suis autant à fleur de peau dès qu’on touche à la dignité de l’homme. » (Lino Ventura)

     

    Dans nombre de ses films, et en particulier « Les Tontons Flingueurs », on sent que l’acteur sait se battre et qu’il n’a pas besoin d’être doublé pour les scènes de baston… Et c’est probablement pour toutes ces raisons que Lino Ventura se forgera cette incroyable force de caractère qui sautait aux yeux lorsqu’on le voyait jouer au cinéma.

     

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    Force de caractère mais grande sensibilité…

    Comme souvent chez ce genre de rocs, on décèle sous la carapace des failles et des blessures encore béantes. Et Lino Ventura ne fait pas exception à la règle. Certes, il était une vraie force de caractère, mais pour mieux masquer une grande sensibilité.

    D’abord, Lino Ventura s’est construit tout seul, sans la figure tutélaire du père pour l’aider à trouver sa place dans la société.

    Et puis, Lino Ventura, c’est aussi l’homme de cœur qui arrivera à dominer sa pudeur et sa sensibilité pour alerter à la télévision la population française, dès 1965, du peu de considération qu’avaient alors les pouvoirs publics pour les enfants souffrant d’un handicap.

    Lui qui n’aime pas beaucoup les médias et qui n’a pas forcément l’habitude de s’épancher en public, celui qui incarne l’oncle Fernand dans « Les Tontons Flingueurs » ou le flic intraitable dans « Adieu Poulet » va devoir pour la première fois se faire violence en levant le voile sur sa vie privée, et interpeller les Français sur quelque chose qui le touche au plus profond de son être.

    Avec son épouse Odette, pour sa fille Linda, « une enfant pas comme les autres », il crée en 1966 l’association Perce-Neige qui avait pour premier objectif de venir en aide à l’enfance inadaptée. Aujourd’hui, ce qu’il qualifiera de « son œuvre la plus remarquable » est plus active que jamais et gère 35 maisons qui accueillent plus de 900 enfants.

     

    R… Comme Rital…

    Luisa Borrini, la mère de Lino qui l’éleva seule, transmettra à son fils le goût des pâtes et de la cuisine : « Manger avec des amis et leur faire la cuisine, c’est pour moi un immense plaisir », dira-t-il.

    Et en bon italien, les potes, les copains, avec qui il partageait régulièrement un bon gueuleton, et les anecdotes truculentes qui vont avec, c’était forcément essentiel à l’équilibre du bonhomme…

     

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    Même s’il était très attaché à son pays d’accueil, Lino Ventura est resté un « Rital » dans l’âme et un modèle pour tous ces descendants d’immigrés italiens qui vivent aujourd’hui en France, comme la famille de Roberto Alagna.

     

    « Lino Ventura parlait Français sans aucun accent, ayant passé l’essentiel de sa vie en France, et s’exprimait en italien avec une pointe d’accent de Parme. Mais surtout, il parlait un Français châtié, lui qui avait été élevé par sa mère et qui avait commencé à faire des petits boulots à l’âge de neuf ans, pour l’aider… Exactement la vie qu’ont eue mes oncles quand ils sont arrivés en France. » (Roberto Alagna)

     

    S… Comme Secret…

    Lino Ventura n’avait pas beaucoup l’habitude d’afficher ses sentiments. Pourtant, dans « La Bonne Année » avec Françoise Fabian, il doit forcer sa nature profonde.

     

    « C’est moi qui dis ça : « qu’est-ce que c’est pour vous, une femme ? Et Lino répond « une femme ? une femme, c’est… c’est un homme qui pleure de temps en temps. Il n’aimait pas beaucoup jouer les séducteurs… Non, il voulait jouer les mecs. Les mecs honnêtes, les mecs forts, les mecs drôles. Il ne voulait surtout pas s’attendrir. » (Françoise Fabian)

     

    Bourru mais attachant, aux côtés de Gabin ou Delon, Ventura étaient un des derniers géants du cinéma français.

     

     

     

    A présent, ne boudons pas notre plaisir en nous délectant, probablement une millième fois, mais ça n’est pas grave, de la scène culte de la cuisine dans « Les Tontons Flingueurs »…

     

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    Source : « Signé Lino Ventura » de Clelia Ventura (Ed. Marque-Pages) / Wikipedia

     

     

     

  • Il était une fois… Michel Audiard

     

     

    « J’parle pas aux cons, ça les instruit »

     

    Trente-trois ans que le type à la casquette a cassé sa pipe. Et voilà, enfin, un documentaire qui ne se contente pas d’empiler les dialogues qui flinguent. Dans ce portrait, il y a d’ailleurs plus d’images de vélo que de scènes de films, et plus de littérature que de cinéma.

    Il était une fois, donc, un gosse abandonné du 14ème arrondissement, qui passe son certif et puis c’est marre, veut devenir coureur cycliste, mais finit livreur de journaux, puis journaliste, puis critique de cinéma, puis auteur de polars, puis dialoguiste, parce que les mots lui viennent plus vite que le petit blanc coule au zinc.

    Il était une fois, surtout, un mec à genoux devant Rimbaud et Céline, mais faisant mine de ne pas être intello par pudeur et pour emmerder la Nouvelle Vague ; un grand désillusionné, aussi, depuis que, tout jeune homme, il fut le témoin écoeuré de l’épuration, avec lynchage par les « braves gens » d’une petite nana trop peu farouche avec l’occupant et qu’il aimait bien.

    « Se méfier des hommes et n’en aimer qu’une poignée », telle était la ligne de conduite de ce grand partisan des « copains d’abord », qui faisait ses deuils en silence et avec de l’encre (« La Nuit, le Jour et toutes les autres nuits » est disponible en poche). On connaît les copains les plus célèbres : Blier, Ventura, Serrault, Gabin, Carmet, Maurice Biraud et… Mireille Darc, et ils sont tous là dans des archives épatantes et rieuses. En bonus d’intelligence : Jacques Audiard, qui décrypte si bien son père. On sort de ce documentaire ému, instruit, et moins con.

     

    Source : Guillemette Odicino / Télérama

     

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    Et cadeau de la maison, un florilège de citations d’Audiard…

     

    ✓ « On est gouvernés par des lascars qui fixent le prix de la betterave et qui ne sauraient pas faire pousser des radis. » (Les Tontons Flingueurs)

    ✓ « Si on mettait un point rouge sur la tête de tous les cons, le monde ressemblerait à un champ de coquelicots. » (Les Tontons Flingueurs)

    ✓ « Moi, les dingues, j’les soigne, j’m’en vais lui faire une ordonnance, et une sévère, j’vais lui montrer qui c’est Raoul. Aux quatre coins d’Paris qu’on va l’retrouver, éparpillé par petits bouts, façon puzzle… » (Les Tontons Flingueurs)

    ✓ « Moi, quand on m’en fait trop, j’correctionne plus, j’dynamite, j’disperse, j’ventile. » (Les Tontons Flingueurs)

    ✓ « Les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît. » (Les Tontons Flingueurs)

    ✓ « Les ordres sont les suivants : on courtise, on séduit, on enlève et en cas d’urgence on épouse. » (Les Barbouzes)

    ✓ « Quand les types de 130 kilos disent certaines choses, ceux de 60 kilos les écoutent. » (100 000 dollars au soleil)

    ✓ « La tête dure et la fesse molle, le contraire de ce que j’aime. » (Comment réussir quand on est con et pleurnichard)

    ✓ « Un pigeon, c’est plus con qu’un dauphin, d’accord, mais ça vole. » (Faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des canards sauvages)

    ✓ « Mais pourquoi j’m’énerverais ? Monsieur joue les lointains ! D’ailleurs je peux très bien lui claquer la gueule sans m’énerver ! » (Le cave se rebiffe)

    ✓ « Quand on mettra les cons sur orbite, t’as pas fini de tourner. » (Le Pacha)

    ✓ « La justice, c’est comme la Sainte Vierge. Si on la voit pas de temps en temps, le doute s’installe. » (Pile ou Face)

    ✓ « Si la connerie n’est pas remboursée par les assurances sociales, vous finirez sur la paille. » (Un Singe en Hiver)

    ✓ « Deux intellectuels assis vont moins loin qu’une brute qui marche. » (Un Taxi pour Tobruk)

    ✓ « Vous savez quelle différence il y a entre un con et un voleur ? Un voleur, de temps en temps, ça se repose. » (Le Guignolo)

    ✓ « Dans la vie, il faut toujours être gentil avec les femmes, même avec la sienne. » (Série Noire)

    ✓ « Je suis pas contre les excuses, je suis même prêt à en recevoir. » (Les Grandes Familles)

    ✓ « Il vaut mieux s’en aller la tête basse que les pieds devant. » (Archimède le Clochard)

    ✓ « Quand on a pas de bonne pour garder ses chiards, eh bien on en fait pas. » (Mélodie en Sous-Sol)

    ✓ « Plus t’as de pognon, moins t’as de principes. L’oseille, c’est la gangrène de l’âme. » (Des pissenlits par la racine)

    ✓ « Deux milliards d’impôts ? J’appelle plus ça du budget, j’appelle ça de l’attaque à main armée. » (La chasse à l’homme)

    ✓ « Je suis ancien combattant, militant socialiste et bistrot. C’est dire si, dans ma vie, j’en ai entendu, des conneries. » (Un idiot à Paris)

    ✓ « Le flinguer, comme ça, de sang froid, sans être tout à fait de l’assassinat, y’aurait quand même comme un cousinage. » (Ne nous fâchons pas)

    ✓ « A travers les innombrables vicissitudes de la France, le pourcentage d’emmerdeurs est le seul qui n’ait jamais baissé. » (Une Veuve en Or)

     

     

     

  • Mireille Darc, une lionne entrée dans la lumière quand elle est devenue blonde

     

     

    Le 24 août 2018, à l’occasion du premier anniversaire de la disparition de Mireille Darc, France 3 diffusait un documentaire exceptionnel consacré à l’actrice disparue le 28 août 2017, « Mireille Darc, la femme libre ». 

     

    On croyait tout savoir de la « Grande Sauterelle », mais on en apprend encore et encore, grâce à des archives réellement inédites et des témoignages de ses proches. Un vrai plaisir de télévision que cet hommage sans faille à une femme de cœur.

    Un an après sa mort, Mireille Darc reste une star populaire. Aimée par ses partenaires, Michel Audiard et Georges Lautner, elle était un sex-symbol, une photographe passionnée, une réalisatrice de documentaires et une militante engagée dans l’association « La Chaîne de l’Espoir ».

    A travers des interviews intimes, elle raconte les drames de son enfance, sa vie passionnée avec Alain Delon et sa rupture douloureuse. Ses proches, son mari Pascal Desprez, Anthony Delon, Michel Sardou ou encore Véronique de Villèle témoignent eux aussi et évoquent la femme libre qu’elle incarnait, l’icône de la féminité émancipée et de la liberté sexuelle.

    Sylvain Bergère brosse dans « Mireille Darc, la femme libre » le portrait d’une artiste indépendante et combative, souvent éprouvée et pourtant toujours douce et souriante, de ses débuts d’actrice au théâtre et au cinéma à ses reportages sur les prostituées du bois de Boulogne, en passant par ses fragilités d’enfant et sa grande histoire d’amour avec Alain Delon.

    Une lionne entrée dans la lumière quand elle est devenue blonde, une femme qui s’est construite toute seule, une icône du septième art, forte malgré ce cœur qui la lâche. « Mireille Darc, la femme libre » est un hommage touchant, ponctué d’images d’archives, de confidences en voix off de l’actrice et de témoignages de proches.

     

    Rediffusion sur France 3 les 31 août et 04 septembre 2018.

    Image à la Une : Mireille Darc photographiée en Normandie le 18 juillet 1998 © Richard Melloul / Sygma / Corbis

     

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    Et en cadeau, le portrait d’artiste consacré à Mireille Darc, diffusé le 03 octobre 1970 sur la RTS…

     

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  • Les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnait…

     

     

    « Les Tontons Flingueurs », comédie franco-germano-italienne réalisée par Georges Lautner en 1963, sur un scénario d’Albert Simonin et des dialogues de Michel Audiard, sera éreinté par la critique à sa sortie en salle avant de devenir au fil du temps un incroyable succès populaire.

     

    Albert Simonin, né à Paris en 1905 et mort en 1980, est un écrivain et scénariste français, auteur de romans policiers illustrant l’usage de l’argot dans le milieu. Sa trilogie à succès consacrée à un truand vieillissant, « Max le Menteur », a été adaptée à l’écran : « Touchez pas au Grisbi ! » réalisé par Jacques Becker en 1954, « Le Cave se Rebiffe » de Gilles Grangier sorti en 1961 et « Les Tontons Flingueurs », les deux derniers sur des dialogues du grand Michel Audiard.

    Auteur d’un dictionnaire d’argot publié en 1957, Albert Simonin reproduit dans ses romans le parler des voyous avec un grand souci d’exactitude et de précision. Si ce style est sujet aux effets de mode ainsi qu’à l’obsolescence intrinsèque du langage de la rue, il en a légitimé l’emploi en littérature et ouvert la voie à des Frédéric Dard ou Jean Vautrin.

     

     

    Dans « Les Tontons Flingueurs », le personnage récurrent de la trilogie d’Albert Simonin, « Max le Menteur », devient Fernand Naudin (incarné par Lino Ventura), un ex-truand reconverti dans le négoce de matériel de travaux publics, à Montauban. Le film qui s’ouvre sur son départ, en pleine nuit, pour Paris, donne tout de suite le ton : pastiche des films noirs américains, l’humour sculpte l’ensemble des dialogues.

     

     

    La petite vie tranquille de Fernand va basculer lorsque son ami d’enfance, Louis, dit le Mexicain, un gangster notoire, de retour à Paris, l’appelle à son chevet. Celui-ci, mourant, confie à Fernand avant de s’éteindre la gestion de ses « affaires » ainsi que l’éducation de sa petite Patricia (Sabine Sinjen), au mécontentement de ses troupes et sous la neutralité bienveillante de Maître Folace (Francis Blanche), son notaire, qui ne s’émeut pas trop de la querelle de succession à venir, pas plus que Jean (Robert Dalban), l’ancien cambrioleur reconverti en majordome.

    Fernand Naudin doit affronter les frères Volfoni – Raoul (Bernard Blier) et Paul (Jean Lefebvre) – qui ont des visées sur les affaires du Mexicain, parmi lesquelles un tripot clandestin, une distillerie tout aussi clandestine, une maison close… D’autres « vilains » vont se révéler être très intéressés par la succession, dont Théo et son ami Tomate. Pour se défendre contre ce petit monde, Fernand pourra compter sur Pascal (Venantino Venantini), fidèle première gâchette.

     

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  • Signé Audiard

     

    « J’parle pas aux cons, ça les instruit »

     

    Trente ans que le type à la casquette a cassé sa pipe. Et voilà, enfin, un documentaire qui ne se contente pas d’empiler les dialogues qui flinguent. Dans ce portrait, il y a d’ailleurs plus d’images de vélo que de scènes de films, et plus de littérature que de cinéma. Il était une fois, donc, un gosse abandonné du 14ème arrondissement, qui passe son certif et puis c’est marre, veut devenir coureur cycliste, mais finit livreur de journaux, puis journaliste, puis critique de cinéma, puis auteur de polars, puis dialoguiste, parce que les mots lui viennent plus vite que le petit blanc coule au zinc. Il était une fois, surtout, un mec à genoux devant Rimbaud et Céline, mais faisant mine de ne pas être intello par pudeur et pour emmerder la Nouvelle Vague ; un grand désillusionné, aussi, depuis que, tout jeune homme, il fut le témoin écoeuré de l’épuration, avec lynchage par les « braves gens » d’une petite nana trop peu farouche avec l’occupant et qu’il aimait bien.

    « Se méfier des hommes et n’en aimer qu’une poignée », telle était la ligne de conduite de ce grand partisan des « copains d’abord », qui faisait ses deuils en silence et avec de l’encre (« La Nuit, le Jour et toutes les autres nuits » est disponible en poche). On connaît les copains les plus célèbres : Blier, Ventura, Serrault, Gabin, Carmet, Maurice Biraud et… Mireille Darc, et ils sont tous là dans des archives épatantes et rieuses. En bonus d’intelligence : Jacques Audiard, qui décrypte si bien son père. On sort de ce documentaire ému, instruit, et moins con.

     

    © Guillemette Odicino / Télérama

     

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    ✓ « On est gouvernés par des lascars qui fixent le prix de la betterave et qui ne sauraient pas faire pousser des radis. » (Les Tontons Flingueurs)

    ✓ « Si on mettait un point rouge sur la tête de tous les cons, le monde ressemblerait à un champ de coquelicots. » (Les Tontons Flingueurs)

    ✓ « Moi, les dingues, j’les soigne, j’m’en vais lui faire une ordonnance, et une sévère, j’vais lui montrer qui c’est Raoul. Aux quatre coins d’Paris qu’on va l’retrouver, éparpillé par petits bouts, façon puzzle… » (Les Tontons Flingueurs)

    ✓ « Moi, quand on m’en fait trop, j’correctionne plus, j’dynamite, j’disperse, j’ventile. » (Les Tontons Flingueurs)

    ✓ « Les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît. » (Les Tontons Flingueurs)

    ✓ « Les ordres sont les suivants : on courtise, on séduit, on enlève et en cas d’urgence on épouse. » (Les Barbouzes)

    ✓ « Quand les types de 130 kilos disent certaines choses, ceux de 60 kilos les écoutent. » (100 000 dollars au soleil)

    ✓ « La tête dure et la fesse molle, le contraire de ce que j’aime. » (Comment réussir quand on est con et pleurnichard)

    ✓ « Un pigeon, c’est plus con qu’un dauphin, d’accord, mais ça vole. » (Faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des canards sauvages)

    ✓ « Mais pourquoi j’m’énerverais ? Monsieur joue les lointains ! D’ailleurs je peux très bien lui claquer la gueule sans m’énerver ! » (Le cave se rebiffe)

    ✓ « Quand on mettra les cons sur orbite, t’as pas fini de tourner. » (Le Pacha)

    ✓ « La justice, c’est comme la Sainte Vierge. Si on la voit pas de temps en temps, le doute s’installe. » (Pile ou Face)

    ✓ « Si la connerie n’est pas remboursée par les assurances sociales, vous finirez sur la paille. » (Un Singe en Hiver)

    ✓ « Deux intellectuels assis vont moins loin qu’une brute qui marche. » (Un Taxi pour Tobruk)

    ✓ « Vous savez quelle différence il y a entre un con et un voleur ? Un voleur, de temps en temps, ça se repose. » (Le Guignolo)

    ✓ « Dans la vie, il faut toujours être gentil avec les femmes, même avec la sienne. » (Série Noire)

    ✓ « Je suis pas contre les excuses, je suis même prêt à en recevoir. » (Les Grandes Familles)

    ✓ « Il vaut mieux s’en aller la tête basse que les pieds devant. » (Archimède le Clochard)

    ✓ « Quand on a pas de bonne pour garder ses chiards, eh bien on en fait pas. » (Mélodie en Sous-Sol)

    ✓ « Plus t’as de pognon, moins t’as de principes. L’oseille, c’est la gangrène de l’âme. » (Des pissenlits par la racine)

    ✓ « Deux milliards d’impôts ? J’appelle plus ça du budget, j’appelle ça de l’attaque à main armée. » (La chasse à l’homme)

    ✓ « Je suis ancien combattant, militant socialiste et bistrot. C’est dire si, dans ma vie, j’en ai entendu, des conneries. » (Un idiot à Paris)

    ✓ « Le flinguer, comme ça, de sang froid, sans être tout à fait de l’assassinat, y’aurait quand même comme un cousinage. » (Ne nous fâchons pas)

    ✓ « A travers les innombrables vicissitudes de la France, le pourcentage d’emmerdeurs est le seul qui n’ait jamais baissé. » (Une Veuve en Or)