Étiquette : Jim (Thierry Terrasson)

  • Ulysse Terrasson : L’Interview « Nuit à Rome »

     

     

    Ulysse Terrasson vient de publier son second livre. Il s’agit d’une adaptation de la BD « Une Nuit à Rome », réalisée par son père, Jim, dont le tome 4 vient de paraître chez Bamboo Eds.

     

    On retrouve avec bonheur l’auteur de « Plein de Promesses », sorti en 2018, et son style à la sensibilité toute particulière, fait de chapitres courts et de formules poétiques, comme autant de concentrés d’humour, de tendresse et de douceur. Car Ulysse Terrasson est talentueux dans l’art d’exprimer l’intimité de ses personnages. Celui de Sophia en est la pleine illustration. L’auteur sait comme nul autre pareil amener le lecteur à comprendre de l’intérieur les agissements de ses personnages. Il ne décrit pas des faits. Il n’est pas dans l’histoire événementielle, cette forme d’histoire qui articule la narration et l’événement. Il s’agit d’une histoire qui se ressent et d’une narration qui se devine à travers l’intériorité des protagonistes.

    L’exercice d’adaptation est peu confortable et plutôt glissant. Un travail d’équilibriste entre la trame narrative, impossible à contourner, et le besoin de développer l’univers intime des personnages.

    Instant City a pris plaisir à retrouver cet auteur attachant pour une nouvelle interview très riche. Des retrouvailles après deux années trop longues à notre goût. Le temps qu’il aura fallu à ce jeune écrivain de 25 ans pour nous offrir de nouveaux moments de grâce par l’exploration d’autres personnages, avec ce don qu’a Ulysse Terrasson de nous faire voyager dans l’intériorité d’hommes et de femmes qui parfois nous ressemblent, parfois non.

     

    IC : Votre premier livre « Plein de Promesses » est paru il y a deux ans. Quel est le bilan de la sortie de votre premier livre ?

    UT : J’en garde le souvenir d’une expérience incroyable. On est toujours très heureux et très fier de voir son premier roman publié. Les ventes ont dépassé mes espérances. Bien que je ne m’intéresse pas tant que ça aux chiffres, mais plus à l’écriture et au travail en lui-même, c’est dingue de se dire qu’autant de gens ont acheté et lu le livre. J’ai reçu de nombreux retours positifs. « Plein de Promesses » est en quelque sorte devenu mon CV : je l’ai donné comme on donne une carte de visite. Cela m’a permis d’approcher les artistes que je chéris. C’était magique. Un livre, c’est beaucoup de travail, de patience, d’investissement, mais à la fin ça devient un produit dans une librairie et, si on a de la chance, un tremplin pour en écrire d’autres.

     

    IC : Que s’est-il passé durant ces deux années ?

    UT : J’ai déménagé à Paris avec mon amoureuse. J’ai fait des petits boulots. Je ne sais pas, j’ai joué au bowling… (Rires). Et puis, surtout, j’ai écrit. Beaucoup. Des nouvelles. De nombreuses nouvelles. L’intention n’était pas de publier, mais de découvrir, d’apprendre, d’expérimenter de nouvelles techniques d’écriture. Parallèlement à cela, j’ai démarré un gros projet dont la réalisation va nécessiter trois ou quatre ans de mise en place. Alors quand l’éditeur d’« Une Nuit à Rome » m’a contacté pour savoir si cela m’intéresserait d’écrire l’adaptation de la BD en roman, j’y ai vu l’occasion de faire une pause.

     

    IC : Justement, comment l’idée de cette collaboration père-fils est-elle née ?

    UT : Le tome 3 de la BD venait de sortir. Bamboo, l’éditeur, et mon père, l’auteur, voulaient faire un événement autour de cette fin de cycle : une adaptation au cinéma et un roman. Ils ont pensé à moi et j’ai accepté. C’est une histoire que je chéris depuis toujours. J’ai vu mon papa travailler dessus lorsque j’étais tout jeune adolescent. J’ai vu les planches, les doutes, j’ai parfois posé pour l’aider à dessiner certaines silhouettes. Bref, c’est devenu une histoire de famille : mon père s’occupe du scénario et des dessins, ma mère des couleurs, le fils du roman. Question : qu’est-ce que ma sœur attend pour y apporter son grain de sel ? (Rires). Au-delà de ça, les thèmes développés dans « Une Nuit à Rome » me touchent particulièrement : la nostalgie de la jeunesse, la difficulté d’être adulte. Le travail, la famille, l’amour : toutes les histoires tournent plus ou moins autour de ces trois sujets.

     

    IC : Le thème du père était déjà très présent dans votre premier ouvrage. Il revient sur le devant de la scène, avec cette adaptation faite par son fils.

    UT : Oui. Le thème du père était déjà, comme vous l’avez souligné, très présent dans mon premier roman. Parce que c’est un thème très présent dans la littérature : je pense à John Fante, je pense à « L’Odyssée », je pense à « Star Wars ». Ou parce que le cordon ombilical est difficile à couper… (Rires) J’ai la chance d’être le fils d’un artiste que j’admire. Alors, pourquoi me priver d’une telle collaboration ?

     

    IC : Quelle est la différence entre la BD et le roman ? Les lecteurs de la BD vont-ils retrouver dans le roman la même histoire, les mêmes textes ?

    UT : J’espère que oui. À vrai dire, j’ai essayé d’écrire deux romans en un : un pour ceux qui ont déjà lu la BD avant, un pour ceux qui ne l’ont jamais lue. Ce qui m’a intéressé, c’était de permettre à la première catégorie de lecteurs d’entrer dans la tête des personnages, d’en savoir un peu plus sur eux, d’apprendre à mieux les connaître ou, du moins, à les connaître différemment. Et puis, pour la seconde catégorie de lecteurs, de proposer un roman tout ce qu’il y a de plus indépendant. Une histoire, des personnages, des phrases… Un roman, quoi !

     

    IC : Comment avez-vous articulé texte original et roman ? Quelle est la part du texte issu de la BD et celle issue de votre propre créativité ?

    UT : Il a fallu avant tout faire preuve de méthodologie. L’avantage était que je connaissais la BD par cœur. Si « Plein de Promesses » était construit sur la base d’une série, avec tout un tas de petites unités, pour « Une Nuit à Rome », la base était davantage cinématographique. Il y avait un début, un milieu, une fin. Il y avait des exigences narratives. D’abord, j’ai retapé tous les dialogues sur mon ordinateur : en termes de volume de texte, ça faisait déjà un petit roman. Ensuite, j’ai découpé le texte en chapitres. J’ai établi un plan de l’histoire, scindé ses étapes, assimilé comment l’œuvre était construite. Je me suis arraché les cheveux. J’ai rajouté des choses, j’en ai supprimé d’autres. J’ai douté, j’ai arrêté de douter. Finalement, j’ai terminé. Si le roman s’inspire de la BD, je refusais d’en faire un simple copier/coller. Je pensais à Abdellatif Kechiche et à Ghalya Lacroix, absorbant le roman graphique de Julie Maroh, « Le bleu est une couleur chaude », pour en faire leur scénario de « La Vie d’Adèle ».

    Il y avait trois challenges à réussir, en gros. Le premier, c’était de traduire en langage romanesque ce qui forme l’essence du roman graphique : l’aspect visuel. Par exemple, au début de la BD, il y a chez Raphaël une peinture accrochée à un mur. Cette toile est censée dire son époque aux Beaux-Arts. Cette toile m’a beaucoup embêté, au début. Et puis, j’ai eu l’idée de cette boîte rangée dans un placard, remplie de son ancien matériel à peinture, en souvenir du passé, au cas où. Et paf, c’est devenu une idée littéraire, comme ça. Le second, c’était de faire en sorte que le lecteur s’attache à l’intimité des personnages, s’attarde sur leur intériorité, et en découvre quelque chose de nouveau, quelque chose de plus que dans la BD, parce que sinon à quoi bon en faire un roman ? Le troisième, enfin, c’était de réussir à jongler entre l’histoire, la vraie narration pure et dure qui n’a jamais été mon fort, et mes petites digressions, ces moments d’intimité ajoutés, durant lesquels on entre dans la tête des personnages, ce qui parfois ralentit l’action.

     

    IC : Certains lecteurs pourraient ressentir une rupture de style parfois, entre des chapitres plus narratifs et d’autres plus introspectifs. Les premiers plutôt liés à la BD et les seconds venant de vous. On sent selon les chapitres deux univers dans un même roman, deux écritures et deux sensibilités : la vôtre et celle de votre père.

    UT : Ah merde, pourtant je voulais qu’il n’y ait qu’un seul souffle… Mais c’est possible. Il y a deux écritures dans ce roman, même si j’ai essayé de n’en faire qu’une, comme on peut dire grosso modo qu’il y a deux styles d’écriture : l’écriture à l’américaine, dans laquelle on se focalise sur l’histoire, dont l’objectif est de pousser le lecteur à tourner la page, et l’écriture à la française, où ce sont plus les mots qui sont mis en avant, les petites phrases, les détails du quotidien… On ne lit pas vraiment Proust pour le scénario. (Rires)

    C’est dans ce cadre que nous avons élaboré le projet du roman « Une Nuit à Rome ». Parce que mon père a proposé dans sa BD une histoire visuelle, dont les dessins traduisent la sensualité, j’étais dès le début face à un obstacle : il m’était matériellement impossible de montrer le corps de Marie à chaque page – d’autant plus que je ne suis pas un grand fan des descriptions. Là où dans la BD mon père montre le côté femme fatale de Marie, mystérieuse et inaccessible, belle, je me suis dans le roman plus intéressé à l’intériorité de Raphaël face à elle, ce qu’il voit, ce qu’il croit comprendre et ce qu’il ne comprend pas. J’ai voulu raconter cette histoire autrement. Certains m’ont fait la réflexion, d’ailleurs. On m’a fait remarquer que la sensualité de Marie ressortait moins dans le roman que dans la BD. C’était un risque, qui découle du choix de me concentrer sur les sentiments des personnages. De m’intéresser moins au corps de Marie, mais à ce qui se passe dedans. D’exprimer sa vérité avec des mots, des détails, d’entrer dans sa tête, de pointer du doigt ce qui exprime son émotion, de l’humaniser en somme. J’ai voulu la montrer autrement.

     

    IC : Quelle a été votre moteur pour l’écriture de ce roman ?

    UT : Je me souviens que, quand j’étais petit, j’aimais beaucoup les romans « Star Wars ». Les films, je les connaissais par cœur, et pourtant j’aimais lire les romans ensuite. Mais pourquoi ? Je n’avais vraiment pas mieux à faire ? Qu’est-ce que je trouvais aux romans que je n’avais pas dans les films ? Je pense que c’est ça qui a été le plus fort moteur pour l’écriture de ce livre : redécouvrir l’histoire, à travers un angle différent. Le cinéma et le roman proposent deux expériences différentes : au cinéma, on reçoit le film d’un coup, dans sa globalité, alors qu’un livre, on le picore, un chapitre après l’autre ; finalement, c’est assez rare de le gober d’une traite. Dans une salle de cinéma, je ne fais pas de pause, je suis emporté dans le flot de l’action, de l’histoire, les images défilent sans me laisser le temps de souffler. Mais dans un bouquin, rien qu’en changeant de chapitre, je fais un break. Je me pose la question de continuer ou non. Devant un film, il n’y a que le film ; devant un livre, il y a moi et il y a le livre. C’est une expérience différente ; c’est une relation différente, même. Et j’aime ça. Et c’est pourquoi les novellisations se doivent de n’être pas tout à fait pareilles aux films « Star Wars », à la BD « Une Nuit à Rome ». J’ai fini par comprendre qu’il fallait traduire l’expérience d’un medium à travers les outils de l’autre. Et c’est ce que j’ai essayé de faire.

     

    IC : Quel est le personnage qui vous a le plus inspiré ?

    UT : Indéniablement, Sophia. C’est un personnage assez peu développé dans la BD, et pourtant je l’aime beaucoup, elle m’émeut profondément. D’ailleurs, le passage que je préfère dans le roman est celui où – spoiler alert – le train arrive à Fignac, Raphaël l’a laissée tomber, elle est seule avec son chat, et elle remarque son père qui l’attend sur le quai de gare, et… et stop : pour savoir ce qui s’y passe, lisez le livre ! (Rires)

     

    IC : Autant Marie est attachante dans la BD car elle est très belle, autant dans le roman elle apparaît plus comme une diva capricieuse et inconséquente. Est-ce comme cela que vous l’avez abordée ?

    UT : Pas du tout. Pour moi, Marie est un personnage en perdition, qui a besoin d’aide. J’ai de la compassion pour elle parce qu’elle ne sait pas très bien ce qu’elle fait. Je crois que Marie est le genre de personne qui, depuis son enfance, a toujours entendu et vu les gens s’extasier sur elle à cause de sa beauté. Elle a reçu tous les suffrages, toutes les attentions, mais parce qu’elle est belle. Et c’est terrible. Marie me touche parce qu’elle vit un genre de tragédie. Comment se défaire du « tu me plais parce que tu es jolie » ? Comment être plus que ça aux yeux des autres ? Prenons le début de l’histoire, par exemple. Elle se tient en haut d’une falaise et elle se jette dans l’océan. Mais pour quoi faire ? Pour en finir ? Pour fracasser sa beauté, ainsi se venger ? Pour ressusciter ? Mystère et boule de gomme… Selon moi, Marie n’est pas une diva capricieuse et inconséquente, c’est un être humain avec des failles, des regrets et de la peur. De la peur, surtout : la peur de vieillir. Et cette peur-là, je crois, c’est le fondement d’« Une Nuit à Rome ».

     

    IC : Une nuit à Rome pourrait donc être perçu comme un roman sur la crise de la quarantaine ?

    UT : Carrément ! (Rires) Marie et Raphaël se sont rencontrés à l’école des Beaux-Arts. Tous deux rêvaient d’être artistes. Marie est celle qui est restée la plus proche de ce rêve : elle est prof dans le milieu qu’elle affectionnait plus jeune. Raphaël, lui, est maintenant dans l’immobilier : il vend des appartements. Voilà grosso modo la situation initiale. Et puis, BAM ! Ils se retrouvent face à un choix : continuer leur vie normalement, avec tout ce que cela compte de routine, de pilotage automatique ; ou s’en aller, partir, et peut-être retrouver les anciennes sensations, la bouteille de rosé, la jeunesse perdue, le sexe sans l’habitude, les nuits blanches… C’est un choix d’autant plus difficile que, s’ils ont la nostalgie de leurs vingt ans, ils ont surtout quarante ans bientôt. Ils ont des vies bien engagées. Ils comprennent que ça va être tout le temps un peu ça. Que les surprises ont été remplacées par les responsabilités. Et ils ont peur. Et c’est ça, cette crise, qui est le thème central d’« Une Nuit à Rome ». Cette impression d’inachevé.

     

    Interview par Anne Feffer

    © Photo Ulysse Terrasson : Manon Caré

    © Photo à la Une avec l’aimable autorisation de Jim Thierry Terrasson

     

     

     

     

  • Ulysse Terrasson, un auteur « Plein de Promesses »

     

     

    Ulysse Terrasson est un auteur « Plein de promesses ». Le format autant que l’écriture, les personnages et leur histoire contribuent à la réussite de ce premier roman dont le succès à venir est sans nul doute assuré. Car ce n’est pas un petit livre anecdotique.

     

    Dans ce roman, il y a plusieurs niveaux de lecture. Le plaisir, d’abord : le ton est à l’humour, omniprésent, aux phrases choisies, travaillées pour être percutantes. Les chapitres sont très courts, rythmés. L’émotion ensuite, produite en grande partie par une tendresse infinie qui émane de l’écriture. La verve transpire de chaleur et de bienveillance à l’égard des ces personnages parfois malmenés par les mots, mais pour lesquels on sent une immense affection. Et enfin l’histoire, dont on a tant envie de connaître l’issue.

    Qui remportera les suffrages d’Ulysse, ce jeune homme de presque vingt ans dans quelques jours, qui navigue entre Ingrid et Claire, Victor et Marius, son appartement et L’Esprit Vin, Paris et Montpellier, Nicolas Rey et Frédéric Beigbeder ? Car, au-delà du passage à l’âge adulte, l’auteur nous raconte un parcours amoureux. On est surpris de manière assez globale, qu’un jeune de dix-neuf ans parle en ces termes du couple, de la paternité, des enfants. Et il en est beaucoup question. Le père, ou plutôt le papa, prend une place assez importante dans le livre. Le papa qu’on a eu et celui qu’on va devenir. Les enfants, ceux des autres, celui qu’on a été, ceux de la fratrie, ceux que l’on regarde par la fenêtre, un des thèmes forts du livre avec la relation amoureuse et la maturité.

    Pour Instant City, Ulysse Terrasson a accepté de répondre à nos questions. De cet échange a émergé la partie cachée de l’iceberg, une comparaison qui lui est chère. Les personnages en première lecture égoïstes ou narcissiques eu égard à leur jeune âge, un peu immatures aussi, apparaissent en fin de roman transformés. On sent qu’une prise de conscience a eu lieu. Le passage de dix-neuf à vingt ans, comme la traversée d’une rive à l’autre, de l’état d’enfant à celui d’adulte, s’accompagne d’une compréhension du monde adulte. Il s’agit de faire des choix, de comprendre la relation à l’autre, de vouloir en toute conscience tirer parti des événements plutôt que de les subir.

    Explications par l’auteur lui-même, riche d’un univers déjà bien construit.

     

    Instant City : Bonjour Ulysse, comment est-ce qu’on se sent à trois jours de la sortie de son premier livre ?

    Ulysse Terrasson : On se sent comme un type qui est interviewé pour la première fois de sa vie. C’est très excitant. Depuis un mois, je m’amuse à faire un compte à rebours sur Facebook et Instagram. Chaque jour, hop, un petit post. Des choses évidentes comme la couverture du livre, deux-trois citations, les dédicaces prévues… Mais aussi d’autres choses plus intimes, plus personnelles. Quand j’ai tenu « Plein de Promesses » pour la première fois dans mes mains, par exemple. Et là, aujourd’hui, c’est cette interview que je veux partager. Ce moment. Ce jour historique qu’est J-3, pour moi.

     

    Instant City : Comment imaginez-vous les jours, les semaines qui vont suivre cette sortie ?

    Ulysse Terrasson : Je les imagine comme des jours qui se suivent mais ne se ressemblent pas. Il y a cette chose incroyable qui apparaît en même temps qu’un livre : les dédicaces. Et il y a cette chose encore plus incroyable : la complicité entre les dédicaces en question et mon cheminement personnel. À Montpellier, par exemple. Je bosse parfois en intérim à la Fnac de Montpellier. Et bim, où vais-je dédicacer vendredi 19 mai ? À la Fnac de Montpellier. De même, j’ai travaillé quatre années de suite à la Comédie du Livre. Je faisais partie de l’équipe des bénévoles qui s’occupent des écrivains, les amènent sur leurs stands pour dédicacer, à tel ou tel café pour qu’ils soient interviewés… Et bim, où vais-je dédicacer le week-end du 25 au 27 mai ? À la Comédie du Livre. Je trouve ça magique. Les semaines qui vont suivre et ne pas se ressembler seront pour moi une gigantesque enquête, à découvrir et comprendre l’arrière du spectacle…

     

    Instant City : Si vous deviez vous présenter à vos futurs lecteurs ?

    Ulysse Terrasson : D’abord, je leur dirais bonjour. Parce que la politesse, c’est essentiel. En tout cas, le grand philosophe Vald semble de cet avis… (Rires). Et puis, ensuite, je ne sais pas, je leur parlerais de l’éternelle difficulté pour la jeunesse d’exister par elle-même. De « La Confession d’un enfant du siècle » chez Musset, devenue 150 ans plus tard le « Monde sans Pitié » d’Eric Rochant. Peut-être aussi des « 37°2 le matin » de Philippe Djian et de Jean-Jacques Beinex. Parce que « Plein de promesses », c’est un peu tout ça à la fois. C’est essayer de sauvegarder sa jeunesse tout en jouant le jeu du réel autour de soi. Comment survivre à l’éloignement de nos plus proches ? Comment s’aimer quand la magie des rencontres est remplacée par les algorithmes de Tinder ? Et surtout : comment rester jeune quand la publicité nous interdit de vieillir, et en même temps comment vieillir quand le monde du travail nous interdit de rester jeune ?

     

    Instant City : Selon vous, qu’est-ce qui vous définit ?

    Ulysse Terrasson : Je dirais : l’intimité. Mon but ultime, c’est d’être l’écrivain de l’intime. Mais une intimité qui se mêle à une ambiance un peu rock. Mes lectures préférées sont toutes comme ça : elles allient l’émotion des grands moments au fun des plus petits. Et plus que mes lectures, on peut dire que mes histoires préférées sont toutes comme ça. Ce que j’aime, au fond, c’est le genre de la comédie dramatique. S’il y a autant de dialogues dans mes écrits, c’est parce qu’il y a énormément de séries TV parmi mes influences. Je pense à « Californication », mais aussi à « How I Met Your Mother », « Friends »…

     

    Instant City : Racontez-nous la genèse de votre roman.

    Ulysse Terrasson : Au début, c’était très intime. Je piochais dans mon vécu pour en faire des nouvelles. Mon but, c’était de traduire mes émotions le plus fidèlement possible, en les transposant sur la page le plus sincèrement possible. Et, idéalement, de dégoter une petite vérité universelle là-dedans. J’étais très attiré par le romantisme américain des Bukowski, John Fante, Kerouac, Henry Miller… Ce mélange entre la vie insérée dans l’écriture et l’écriture insérée dans la vie. Et un jour, j’ai sauté le pas. J’en ai envoyé une à Nicolas Rey. Et il l’a aimée. Je me souviendrai toujours de ce moment-là. Dans la nuit, le téléphone sonne. Et c’est Nicolas Rey. Je me demande si je ne suis pas en train de rêver. Après tout, c’est la nuit. Et il me dit que ce n’est pas une nouvelle, ce que je lui ai envoyé. Que c’est le début d’un roman. Qu’il me faut écrire le roman. Et voilà. Qu’auriez-vous fait à ma place ? Vous vous seriez recouchée ? (Rires)

     

    Instant City : Comment avez-vous travaillé ?

    Ulysse Terrasson : En interrogeant beaucoup mes amis. C’est ensemble qu’on a convenu d’une « crise de la vingtaine ». Dans un monde qui va toujours plus vite, où les plus jeunes obtiennent plus tôt les choses des plus grands, ça nous est apparu comme une évidence : on vieillit de plus en plus jeune. D’abord, il y a eu la crise de la cinquantaine. Ensuite, celle de la quarantaine. Enfin, celle de la trentaine. Et maintenant, voili voilou : la crise de la vingtaine. Bon, ça ne veut peut-être pas dire grand-chose. Mais quand j’imagine un monde où tout est devenu à portée de main, de doigts, de clics, quand je pense à la génération de mes parents, poireautant pendant des heures dans l’espoir d’un appel, le téléphone fixe sur les genoux, rêvant à l’intonation d’une voix, aux choses qui seront dites, et quand je me rappelle avec quelle précipitation la mienne de génération a eu accès à tout ça, et encore plus, je me dis : ça a tué l’attente, la magie de l’attente. Même au cinéma, on peut réserver nos places à présent. Pour le prochain Star Wars, je n’aurai pas à patienter trois plombes dans une queue interminable : j’ai juste à être au Gaumont Multiplexe, place M17, à 13h20. Sauf que l’imagination vient justement de cette attente, de cette frustration, de cette incompréhension.

    Bref, c’est comme ça que j’ai écrit « Plein de Promesses » : en reprenant goût à cette attente, cette frustration, cette incompréhension. En débranchant Internet, d’abord. En éteignant mon portable, ensuite. Et en m’enfermant chez moi ou dans un café (l’Esprit Vin), enfin. Pour écrire vraiment. C’est-à-dire : en essayant de piger les choses par moi-même, plutôt qu’en les googlisant. Mais j’interrogeais aussi beaucoup mes potes sur leur rapport au couple, aux amis, aux parents, à l’avenir – à la vie, quoi. Parce que je voulais savoir ce qu’il y avait de commun à cette génération, au-delà de mon petit cas personnel. Je voulais embrasser la vie d’un jeune homme de presque vingt ans et en saisir les rêveries, les fantasmes, les émotions, sans les étouffer tout de suite par l’immédiateté des technologies. Ça a tout déclenché. Les chapitres sont très courts, mais c’est une rapidité qui va de paire avec l’époque. C’est une suite d’épisodes avec les mêmes personnages, mais c’est comme ça qu’est faite la vie. C’est encore parfois très naïf, mais c’est une naïveté qui va de paire avec l’âge décrit. Enfin, j’aime à le croire… Ça me rassure de penser que c’est fait exprès… (Rires)

     

    « Le meilleur café de Montpellier – et donc du monde – se situe au 3 place Chabaneau. Cette place est si merveilleuse que Francis Ponge en personne a décidé d’y naître, le 27 mars 1899. Ça n’est nullement une coïncidence. L’Esprit Vin est à côté. » (p. 14)

     

    Instant City : Vous êtes chez vous maintenant à l’Esprit Vin (auquel un chapitre est consacré) ?

    Ulysse Terrasson : C’est mon Q.G. ! D’ailleurs, à ce sujet, une petite anecdote que je trouve rigolote. J’étais censé recevoir quelques exemplaires du livre avant sa sortie. Plusieurs fois par jour, j’allais voir du côté de ma boîte aux lettres si le colis était arrivé. Avec mon père, on s’appelait souvent : « Tu l’as reçu, toi ? Dis, est-ce que tu l’as reçu ? », « Non, pas encore. », « T’es sûr ? Tu ne me mens pas afin de le garder pour toi ? », « Non, je t’assure. », « Ouais, c’est ça, je veux une preuve ! » (Rires). Bref, j’avais hâte de tenir l’objet dans ma main. Et puis, un jour, je reçois un appel. Mon père. « Va faire un tour à l’Esprit Vin, une surprise t’y attend ». Curieux, je suis son jeu de piste. Et sitôt arrivé, le serveur me sort un petit colis et, vlan ! Je me retrouve à tenir le livre dans mes mains, l’objet, la matérialisation d’un rêve, pour la première fois de ma vie. C’était le bonheur ! J’aime cette idée d’avoir un petit endroit pour soi, pour venir écrire, pour rejoindre ses potes, comme le prolongement de son propre appartement – et de soi, un peu, par la même occasion. Philippe Jaenada a son Bistrot Lafayette ; Frédéric Beigbeder a son Café de Flore ; j’ai mon Esprit Vin. J’aime cette idée d’un écrivain dont la vie intime est accessible à tout le monde. Et je continue d’y aller. Plusieurs fois par semaine, même…

     

    Instant City : Comment s’est fait le choix de l’éditeur « Bamboo Edition » ?

    Ulysse Terrasson : Ça s’est fait en deux temps, en fait. Comme Bamboo publiait seulement des BD, je n’avais pas pensé à leur envoyer un manuscrit. C’est mon père qui, auteur chez eux, curieux de savoir ce qu’ils en penseraient, leur en a envoyé un Long story short, ce qu’ils ont lu leur a plu et ils ont voulu l’adapter en BD. Je n’étais pas contre, mais je faisais la fine bouche parce que je voulais le publier en roman – d’abord. Si je me permettais de faire le compliqué comme ça, c’était parce que, au même moment, Flammarion s’intéressait à moi. Pendant une année, Robert Macia des éditions Flammarion et moi avons rebossé le manuscrit comme des malades mentaux. Voilà pour le premier temps. Sauf que, au bout de la dix-neuvième version, ça ne lui plaisait toujours pas et on a laissé tomber. Et puis, pouf : le deuxième temps. Par je ne sais quel miracle, Bamboo a fait : « Bon, rien à foutre, on ouvre une section littérature ! Ulysse, tu te joins à nous ? » J’étais tellement honoré, je me suis empressé d’accepter.

     

    Instant City : Qu’est-ce que vous appelez « rebosser sur un manuscrit » ?

    Ulysse Terrasson : Ce petit enfer qu’est la grande minutie. Hemingway racontait que le premier jet de n’importe quoi était de la merde. Je ne sais pas pour lui, mais pour moi, c’est sûr à 100 %. D’ailleurs, c’est ce que m’a raconté Robert Macia lorsque mon manuscrit a atterri sur son bureau : « Le potentiel n’est pas suffisamment exploité. Allez, au boulot ! ». J’ai eu de la chance. Il a réussi, par je ne sais quel miracle, à dégoter un peu de potentiel derrière le fouillis de mon texte. Il me l’a ensuite renvoyé, raturé au possible – de notes pertinentes, avec du rouge partout, j’avais l’impression de retourner à l’école. Il m’a donné de nombreuses pistes de travail et de réécriture : passages à modifier, passages à rajouter, passages à laisser tomber. Au tout début, il y a eu une intuition : le premier jet était la tentative d’exprimer cette intuition dans une forme romanesque. J’ai énormément écrit. Le plus souvent, tôt le matin ou tard la nuit ; j’étais en classe prépa, je venais de me faire larguer, je manquais de temps. Par je ne sais quel miracle, j’ai réussi à écrire 800 pages en une année. Ces 800 pages furent cette tentative. Ensuite, il a fallu tout retoucher et retourner à l’intuition initiale, revenir à l’émotion première. Robert Macia m’y a sacrément aidé. En fait, quand j’y pense, ce livre n’est pas si éloigné de la première version. C’est la première version qui s’éloignait du livre, plutôt…

     

    Instant City : Dans quelle mesure votre roman est-il autobiographique ?

    Ulysse Terrasson : Aïe, la question qui fâche ! (Rires). Je me rappelle Nicolas Rey me donnant un superbe conseil, une fois : « Quand tu écris et que tu penses : « Oups, non, ça c’est trop perso, pas moyen de révéler ça, c’est mon secret », eh bien, c’est très simple : tu vires tout ce qu’il y avait avant et tu commences là. Parce que c’est là que ça devient intéressant. ». Et je crois qu’il a raison. Je pense comme lui que, si ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort, ce qui nous tue un peu nous rend plus vrai. C’est pourquoi le livre est autant autobiographique. Parce que c’est dans les secrets, dans ce qu’on cache habituellement, que le lecteur se retrouve vraiment – enfin, je crois. Céline disait qu’il fallait « mettre sa peau sur la table ». Et c’est aussi un peu ça, « mettre sa peau sur la table », pour que le lecteur ensuite se glisse dedans…

     

    Instant City : Que ressent-on au moment de donner à lire le contenu à son entourage ?

    Ulysse Terrasson : On fait les cent pas dans son appartement, en se posant mille questions. Oui, quelque chose dans le genre : un pas, dix questions. Mais ce n’est pas aussi angoissant qu’on peut le croire. Au contraire. Bon, je suis peut-être maso sur les bords, mais je crois que j’aime carrément ça. J’aime que mon entourage me connaisse vraiment, comme j’aime à le connaître tout à fait. J’ai une bande d’amis qui sont pour moi une véritable famille, avec qui on déconne pas mal, mais avec qui on se dévoile beaucoup aussi. Et je refuse de leur cacher quoi que ce soit, parce que c’est très désagréable d’être aimé pour ce que l’on n’est pas. C’est tricher. Et les décevoir parfois fait partie du jeu. Même si, bien sûr, les décevoir parfois n’arrive jamais…! (Rires)

     

    Instant City : Quelle a été leur réaction ? Dans le livre, vous décrivez celle de Claire qui le prend plutôt mal…

    Ulysse Terrasson : Oh oui, Claire… Je m’en veux toujours, pour Claire… Au fond, il y a eu quelque chose comme trois sortes de réactions. La réaction style Claire : « Adios, tu n’es plus mon amigos ! ». La réaction qui n’en est pas vraiment une : « Je n’arrive pas à croire que tu aies écrit un roman entier, c’est dingue ! ». Et la réaction plus positive : « J’ai l’impression de te connaître davantage, et pour ça j’ai l’impression de t’aimer davantage. ». Aussi étrange que ça puisse paraître, je préfère cette dernière sorte de réaction. Avec mon amoureuse, par exemple, c’est ce qui s’est passé : on se draguait un peu, et puis je lui ai mis mon manuscrit dans les mains. Et elle a eu l’impression de me connaître davantage. Et juste pour ça, je suis l’écrivain le plus heureux du monde !

     

    Instant City : Quels retours avez-vous de votre livre ?

    Ulysse Terrasson : Il y a votre retour, qui me fait extrêmement plaisir… En fait, il n’y en a pas encore vraiment. Pas assez, du moins. J’attends la sortie du livre ! Même les critiques, celles qui m’enfonceront six pieds sous terre, je les attends de pied ferme. Bien sûr, je veux écrire des livres que j’aimerais lire. Mais je veux aussi écrire des livres que les autres aimeraient lire. Et pour ça, je veux absolument progresser. M’améliorer. Bon, je ne rechignerai pas non plus sur les compliments, hein… Je ne sais pas pourquoi, je les trouve globalement supportables… (Rires)

     

    Instant City : Quelles valeurs vous sont les plus chères ?

    Ulysse Terrasson : Je dirais l’amour et la communication. Toutes les histoires commencent avec un manque de communication. Ça marche aussi bien avec les livres, les films, qu’avec la réalité. Quelqu’un cache quelque chose à un autre quelqu’un, et c’est parti pour les quiproquos, les malentendus, les disputes. Au fond, je crois que tous les problèmes du monde sont liés à l’ego : parce qu’on veut avoir un coup d’avance sur l’autre, parce qu’on cherche le contrôle plus qu’on ne s’abandonne, la communication vient à manquer. Et ainsi l’intimité. Et ainsi l’amour. Mais pourquoi a-t-on si peu confiance en soi qu’on craint pour notre sécurité intime ? C’est sûrement très naïf, voire carrément utopique, mais si, là maintenant, tout le monde osait se dire ce qu’il avait sur le cœur, franchement, que se passerait-il ? Les gens se comprendraient, non ? Et peut-on haïr quelqu’un qu’on comprend, quand ses lâchetés sont des failles déguisées en frimes ? Qu’est-ce qu’on a à perdre, en gagnant à redevenir humain ? Ah, euh, oups ! Pardon d’être devenu sérieux, tout à coup ! (Rires)

     

    Instant City : Parlez-nous du choix du format : des chapitres très courts.

    Ulysse Terrasson : Ça va de paire avec les séries TV que je regarde, et un conseil que m’a donné Nicolas Rey. Les séries TV, d’abord. J’ai remarqué un truc : quand je me mate un film, je le regarde jusqu’à la fin et puis voilà. Quand je me mate une série, je suis poussé par le désir de binge-watcher. Et le soir, je me retrouve à passer plus de temps devant l’écran. Alors, je me suis demandé pourquoi, sachant que les épisodes de séries sont plus courts. Et j’ai réalisé ceci : justement, ils sont plus courts. Suffisamment longs pour faire avancer la narration, et suffisamment courts pour fabriquer une petite frustration. C’est comme avec les cigarettes : à peine le temps d’en savourer une qu’elle est déjà finie. Alors, pourquoi ne pas s’en griller une autre ? Le chapitre court, c’était le moyen de créer l’équivalent de la série TV en littérature : en recréant cette petite frustration qui pousse au chapitre suivant. Le rêve de tous les écrivains, c’est que le lecteur ouvre son bouquin à 22 ou 23 h, pensant : « Je vais lire dix-quinze pages et dormir », et puis qu’il le referme à 3 h du matin en maudissant l’auteur. Ensuite, le conseil de Nicolas Rey. Il m’a dit : « L’essentiel d’un chapitre, c’est son accroche et sa chute. Ce qu’il y a à l’intérieur, au fond, le lecteur s’en fout. Ça l’emmerde. Et retiens ceci, Ulysse : il est absolument interdit d’emmerder le lecteur. » La parole de Nicolas Rey est une parole biblique, pour moi. Alors, j’ai fait tous mes efforts pour retenir ce conseil…

     

    Instant City : L’inclusion de six chapitres « mon enfant » : leur rôle, leur rédacteur ?

    Ulysse Terrasson : Là aussi, ça vient de deux choses. Il y a eu la chanson de Benjamin Biolay : « Ton héritage ». Et ensuite, il y a eu un mot écrit par mon père pour mes vingt ans. Ma sœur m’avait fait un truc formidable, pour mes vingt ans. Elle avait rempli un livre vierge d’un tas de photos de nous, de moi, de tout, quoi. Elle avait demandé à tous mes proches d’écrire un quelque chose à mon sujet, et elle avait tout glissé à l’intérieur. Parmi ces proches, forcément, il y a eu mon père. Et il m’avait écrit un quelque chose sur le temps qui passe, mon premier appartement, et pourquoi je ne retournais pas vivre chez mes parents. Ce petit mot m’a tellement ému que j’ai voulu l’insérer dans le livre. C’est le premier chapitre « mon enfant ». Et j’aimais tant le principe que j’en ai écrit cinq autres dans la même veine. Les chapitres « mon enfant » étaient pour moi l’occasion de faire le point sur ma vie, mon passé, mais également le moyen de parler à l’enfant qu’hypothétiquement j’aurai un jour. Que j’ai cru être sur le point d’avoir – mais je n’en dirai pas plus, pour ne pas spoiler. Au fond, je crois que « Plein de Promesses » ne raconte pas tant le passage à la vingtaine que le passage en général. L’idée du passage. Passage du temps, passage à la vie adulte, passage d’une génération à une autre… La transmission, si on veut. Et qu’est-ce que l’écriture, sinon une forme de transmission ?

     

    Instant City : Nicolas Rey et Frédéric Beigbeder sont vos mentors dans le livre : qu’est-ce qui vous plait chez eux ?

    Ulysse Terrasson : Dans son bouquin « Ardoise », Philippe Djian note un truc intéressant : que tous les livres qu’on lit, on les lit pour retrouver l’émotion du tout premier. Celui qui nous a ouvert les portes de la lecture. Il va encore plus loin : cette émotion originelle, c’est celle que tous les écrivains, ensuite, tentent de reproduire dans leurs écrits. Et pour moi, le tout premier livre, celui qui m’a donné le déclic, c’est « L’amour est déclaré » de Nicolas Rey. J’avais déjà pris quelques claques, avant ça. Je me rappelle « Sur la Route » de Kerouac, « Le Petit Prince » de Saint-Exupéry, « L’amour dure trois ans » de Beigbeder. Mais avec ce livre, Nicolas Rey ne s’est pas contenté d’une claque. Il m’a giflé si fort que ma vie entière s’en est retrouvée chamboulée. Je me souviens avoir ouvert le livre, m’être dit : « Bah, je vais lire dix-quinze pages et refermer le truc », puis m’être pris la première phrase dans la tronche, puis m’être pris toutes les autres aussi. J’avais l’impression d’une rencontre, pas tant avec un livre, qu’avec une âme. Une vraie personne. Un frère. J’aime cet homme. J’aime sa sincérité et ses déguisements empruntés, sa mélancolie, ses joies, son romantisme excessif comme ses confidences pudiques.

    Je me souviens, après deux-trois pages, avoir pensé : « Eh mais ça claque ! Moi aussi, je veux faire ça ! » C’est pourquoi il a autant d’importance pour moi. Parce qu’il en a eu une immense sur ma vie. Parce que c’est lui qui m’a donné envie d’écrire. Au début, bien sûr, j’ai eu envie de « faire comme ».  J’ai passé des heures à recopier sur mon ordi mes livres préférés, intégralement, afin d’en comprendre la structure, pourquoi tel chapitre est placé à tel endroit, comprendre comment tout cela est construit, et puis le style, les mots, les phrases, les paragraphes, apprendre, apprendre, apprendre. Chez Beigbeder, c’est son don pour l’aphorisme qui m’épate. « L’amour dure trois ans », « 99 francs », ce sont deux suites ininterrompues d’aphorismes déguisées en romans. Tout un tas de petites phrases que j’ai envie d’apprendre par cœur. Comme si elles avaient été écrites pour se retrouver sur Evene ou Babelio. J’adore. Et puis, il y a ses titres. « L’amour dure trois ans », par exemple. Ça fait partie du top trois de mes titres préférés. Définitivement. Avec « J’aimerais que quelqu’un m’attende quelque part » et « Quelques uns des cent regrets ». J’adore !

     

    Instant City : Parmi vos influences, vous citez « Californication », la série de Tom Kapinos jouée par David Duchovny.

    Ulysse Terrasson : Ça mêle intime et rock : ça aussi, j’adore. C’est du Bukowski mis à l’épreuve du format série. Par contre, Tom Kapinos n’est pas le seul derrière les manettes. Jusqu’à la saison 5 – il me semble –, il travaillait sur le scénario avec Gina Fattore. Et son aide à elle était essentielle : à la seconde où elle est partie, la série a tout perdu de ses envoûtements. Tom Kapinos, solo, s’est mis à se répéter, à devenir un cliché de lui-même, à faire et refaire du sous-Bukowski invraisemblable. Mais avant, ah la la, avant ! C’était un riff de Jimmy Page enrôlé autour d’un poème de Raymond Carver. C’était profondément léger, et romantique, et drôle, et triste, et humain. C’était, et c’est toujours, une gigantesque source d’inspiration pour moi.

     

     

     

     

    Instant City : Traitons de ces thèmes qui se dégagent de votre roman. Tout d’abord, la paternité. On sent bien la transformation entre l’avant et l’après vingt ans. Au départ, un jeune plutôt ado, enferré dans le reproche vis-à-vis de son père, puis cet adulte qui prend conscience qu’il y a un homme derrière ce père.

    Ulysse Terrasson : Ce qui m’intéressait dans le traitement d’une « crise de la vingtaine », c’était toutes les petites transformations qui changent un enfant en homme. Qui dans son entourage est le mieux placé pour lui filer un conseil, sinon son papa ? Sauf qu’Ulysse ne le voit pas de cet œil-là. Sur le moment, il préfère se chercher un nouveau père, en quelque sorte un mentor, dans ces figures d’écrivains qu’il adule. Sauf que, tous ces écrivains s’avèrent de la même trempe que son père : une génération d’hommes qui sortent, voient leurs amis, font la fête, souvent travaillent, ne sont donc pas forcément disponibles ou partent du principe qu’il vaut mieux laisser la jeunesse grandir par elle-même – en les laissant faire leurs propres choix, leurs propres erreurs. Toute sa vie, le héros a vu son papa comme ce type inaccessible alors que, en réalité, c’était seulement lui qui le rendait inaccessible. Il l’a tellement idéalisé qu’il en veut à présent à ce père d’être une version idéalisée de lui-même. Parler du père, c’est parler d’une version idéalisée de soi. Or, il faut accepter que le père soit juste un être humain. Derrière la fonction, il y a un homme qui a vécu et qui a plein de choses à nous apporter. Il faut sortir de l’idéalisation.

     

    Instant City : Vous avez écrit cette phrase magnifique : « Freud avait tort. Il ne s’agit pas de tuer le père, mais de lui donner naissance. » (p. 83)

    Ulysse Terrasson : Oh, merci ! Oui, c’est une de ces petites phrases que j’apprécie beaucoup dans le roman. Ça arrive justement au moment où le héros réalise qu’il a fait le con. Et puis, que la relation père-fils se déroule en deux temps : d’abord, le père permet la naissance du fils ; ensuite, le fils permet celle du père. Il découvre l’homme caché derrière la représentation qu’il s’est faite du père : un homme, juste un homme, qui fait de son mieux au quotidien, un homme comme lui-même en est un.

     

    Instant City : Le second thème, c’est la relation amoureuse des jeunes vingtenaires. On ressent à nouveau cette dualité objet du  livre : rester enfant ou devenir adulte,  la liberté sexuelle ou la quête d’un bonheur durable en couple, la parentalité ou l’avortement. Le ton utilisé pour parler des femmes oscille entre sexe et romantisme. On retrouve là beaucoup l’univers de Beigbeder et de « L’amour dure trois ans ». La femme à la fois considérée comme un partenaire sexuel et comme une Vénus transformée en Graal. Le héros oscille entre le bad boy et l’hyper romantique.

    Ulysse Terrasson : C’est vrai, il y a un peu de ça. Cette attitude a peut-être à voir avec le travail solitaire de l’écrivain qui plonge dans son intériorité. Quand on a passé le cul vissé sur une chaise pendant de longues semaines, à s’efforcer de traduire en mots ce qui nous anime à l’intérieur, eh bien, ça nous éteint un peu à l’extérieur. Alors, quand enfin on redécouvre le dehors, c’est avec l’envie d’en récolter tous les fruits ! Et puis, il y a aussi peut-être une lutte entre deux conditionnements : celui de la jeunesse, plus insouciant, avec sexe, drogue, déconne, et celui plus petit-bourgeois, avec cet autre à trouver, à chérir jusqu’à la nuit des temps, à aimer jusqu’à l’épreuve de la grande mort. Derrière ça, c’est la lutte entre le jeune et l’adulte qui est racontée. La lutte entre le boulot à trouver, le fric à gagner, les meubles Ikea à acheter, et cette sensation que, au fond, quatre murs et un toit, un frigo pour ranger la bière, et un lit aussi peut-être, ça suffit. C’est l’éternelle lutte entre la réalité et le rock ‘n’ roll. Entre la lumière et le côté obscur de la Force. Le Bien et le Mal…

     

    Instant City : « La fidélité, j’ai essayé » dit Victor. La relation plurielle semble acceptée : un phénomène visible chez les 20 ans ?

    Ulysse Terrasson : Ce sont des personnages à la recherche d’un plaisir faux, par défaut, par faiblesse un peu, par refus des responsabilités permettant le vrai bonheur. Des personnages qui essayent de s’en sortir à plusieurs, pour moins souffrir tout seul. Et puis, à plusieurs, il y a moins d’intimité : c’est plus un jeu qu’un dévouement sérieux. Si je parle autant de « crise de la vingtaine », c’est parce qu’il y a justement une crise dans ce choix à faire, entre jouer ou être. Mais je m’égare… Ce que je veux dire, c’est que ce sont des personnages blessés, aux cœurs brisés, qui tentent d’en recoller les morceaux à travers l’autre. En remplaçant la personne absente par une autre présente. Comme si ça leur suffisait pour récupérer ce quelque chose qui leur manque. Comme si c’était une solution. Enfin, du moins, ils agissent comme ça jusqu’à comprendre que, finalement, la solution est en eux. Et ce qui leur manque, ce n’est pas tant une personne que le courage d’affronter le passage du temps.

     

    Instant City : Les femmes de vingt ans prennent le contrôle et semblent plus libérées encore que leurs homologues masculins; Ingrid va jusqu’à proposer la vie à trois…

    Ulysse Terrasson : Elles sont libres. Elles sont belles. Elles veulent s’amuser, être heureuses. Pourquoi devraient-elles attendre jusqu’au mariage si elles en ont envie ? Pourquoi devraient-elles se soucier de ce que pensent la voisine, la famille, tous les qu’en-dira-t-on ? Heureusement, nous ne sommes plus dans un monde où les hommes sont les maîtres de maison. En tout cas, presque plus. En tout cas, je l’espère. Le rapport homme/femme me paraît complètement faussé. C’est seulement un rapport de personne à personne. On doit s’ôter de la tête toutes ces conneries que sont les préjugés. Pourquoi la sensibilité serait-elle l’apanage des femmes et l’adultère celui des hommes ?

    Quant à Ingrid, son comportement a plus à voir avec sa fragilité qu’avec sa sexualité – je pense. Ingrid, c’est le personnage que je trouvais le plus intéressant, quoique peut-être le plus discret. Elle est à la fois mystérieuse, fascinante, manipulatrice, et blessée, vivante, libre. Elle est bien plus libre que le narrateur, par exemple. Et cette proposition de vie à trois, ça traduit son état d’esprit : elle est tiraillée entre Ulysse et Guillaume, entre deux histoires d’amour. Elle sait que choisir engendrera une insatisfaction, alors, pourquoi choisir ? Ce n’est pas vraiment une revendication de liberté sexuelle. C’est davantage lié à sa psychologie personnelle. Les personnages sont excessifs, mais c’est peut-être parce qu’ils craignent le vide qui les attend : ce qu’ils considèrent comme la vie adulte. En fait, au fond, ils sont juste des personnages en manque d’amour. Ils demandent à être aimés, sans savoir eux-mêmes le faire. Mais dans leurs choix, on se rend compte qu’ils ne réfléchissent pas aux conséquences de leurs actes.

     

    Instant City : Le risque de grossesse fortuit est-il un vrai sujet pour les jeunes de vingt ans, l’avortement, l’alcoolisme ?

    Ulysse Terrasson : C’est vrai, c’est une question qui se pose. Dans mon entourage, ça s’est répété plusieurs fois. On picole, on couche ensemble, on avorte : ce sont des choses qui arrivent. Je me suis souvent demandé pourquoi il y a autant d’alcool dans les soirées. J’imagine que ça a toujours été le cas. Mais peut-être que la mort du Coca-Cola a joué un rôle là-dedans. Une amie de cinquante ans m’a raconté qu’avant, dans un bar, elle avait le choix entre boire un Coca ou un verre d’alcool. Qu’on pouvait boire du Coca et être cool. Aujourd’hui, dans les bars, il suffit qu’un jeune commande un Coca pour qu’on le harcèle de questions : « T’es sûr ? Tout va bien ? T’as une pancréatite aiguë, c’est ça ? Ton foie t’a lâché ? Tu as décidé de changer de camp ? Tu nous lâches pour devenir un sportif végétarien ? Vas-y, explique-nous pourquoi tu t’en vas méditer dans un monastère tibétain pendant trois ans ! Mec, je ne te reconnais plus ! ». Et c’est triste. Même si, bon, j’exagère peut-être un peu… (Rires)

     

    Instant City : La maturité : Le ton oscille entre jeunesse et maturité.

    Ulysse Terrasson : C’est ce qui m’amusait dans le livre, justement. Tout cela découle du concept initial : la crise de la vingtaine. Ce passage entre l’avant et l’après vingt ans. Les personnages, et le héros tout particulièrement, jonglent entre ces deux états d’esprit : la jeunesse insouciante, la vieillesse plus sérieuse. Et comme le passage n’est pas évident, Ulysse est sujet à quelques égarements. Avec son père et sa petite sœur, par exemple. S’il est dans le jugement, s’il regarde tout ce beau monde de haut, c’est parce qu’il ne se sent proche d’aucun d’eux. Il n’est pas encore un adulte comme son père, il n’est plus vraiment un jeune comme sa sœur. Il est perdu, complètement perdu. « Plein de Promesses », j’ai essayé d’en faire l’histoire d’un peu tout le monde. De ces gens qui, comme moi, ont enclenché le pilotage automatique une fois entré dans le système scolaire. Ces gens qui sont passés, sans réfléchir, de l’école primaire au collège, du collège au lycée, du lycée à la fac. Ces gens qui, d’un coup, au moment où il faut trouver un boulot, regardent avec nostalgie le passé, les anniversaires surprises, les premiers amours, le temps où c’était plus simple. Quand ils mouraient d’impatience d’avoir 18 ans pour quitter leurs parents, pour enfin être libres, et qui découvrent, quand ça arrive, quand enfin ils ont atteint le stade de liberté qu’ils croyaient absolu, que ce n’étaient rien d’autres que des fantasmes, des attentes cristallisées sur un chiffre, que les choses ne seront pas aussi simples que prévues…

     

    « Mon avenir est chaque jour un peu plus tracé. » (p. 102)

     

    Instant City : L’appartement et la fin des études : deux symboles forts du passage à l’âge adulte.

    Ulysse Terrasson : Carrément. Avant, il y a les journées de cours et le dodo chez les parents. C’est inscrit en soi, parce que ça a toujours été comme ça. Et puis après, boum ! Plus de journées de cours, plus de dodo chez les parents ! Plus rien. Et dans le livre, Ulysse souffre de ce plus rien. Il pensait que sa vie démarrerait à ce moment-là. Et il découvre qu’en réalité, elle s’arrête. Ses amis partent dans d’autres villes, pour leurs études. Son amoureuse veut qu’ils emménagent ensemble. Il n’a jamais vraiment décidé de ce qu’il fera quand il sera grand : et voilà qu’il l’est, grand. C’est vraiment un passage, un pont, entre deux mondes que sont la jeunesse et l’âge adulte. Et si Ulysse refuse de traverser ce pont, il voit aussi tout le monde s’occuper à le franchir. Et même lui dire : « Hé, mec ! Tu viens ? ». Et il comprend que rester jeune, ce sera peut-être rester seul. Et il n’en a pas tellement envie, finalement…

    Ulysse est quelqu’un d’un peu passif. Il attend que le monde lui apporte le bonheur plus qu’il ne part lui-même à sa recherche. Il est enchaîné à tellement de choses, quand on y pense : son pote, ses parents, sa chérie. Il a besoin d’apprendre à transcender tout ça. Il a besoin d’apprendre à devenir lui-même. Et c’est ce que raconte le roman : comment il y est parvenu. Comment il a perdu beaucoup de choses : des amis, des amours, des emmerdes. Mais aussi comment il en gagné d’autres : un père, un livre, une meilleure compréhension de lui-même. Bref, comment il est devenu adulte. C’est-à-dire : comment il a traversé le pont, vers une nouvelle vie pleine de promesses…

     

    Instant City : Vous avez répondu à beaucoup de questions. Quelle question n’aimez-vous pas que l’on vous pose ?

    Ulysse Terrasson : Je suis comme tout le monde. Quand j’entends : « T’as l’air fatigué, aujourd’hui. Tout va bien ? », ça n’est pas vraiment du miel pour mes oreilles… Mais sinon, je ne sais pas. Je n’ai absolument aucune idée. Euh, celle-ci peut-être ? (Rires)

     

    Instant City : Quelle question ne vous pose-t-on jamais alors que vous auriez aimé y répondre ?

    Ulysse Terrasson : J’aimerais bien qu’un jour quelqu’un vienne me voir pour me demander : « Tu veux boire une bière avec Dieu ? » Alors je répondrais : « Ouais, grave. » Et on me dirait : « C’est bon. Il t’attend dans son bureau. ». Je serais curieux d’avoir une conversation avec le Grand Bonhomme. Enfin, s’il existe. Enfin, même s’il n’existe pas, je serais curieux… Ah, vous vouliez dire : au sujet de mon livre ? Oh, mince… (Rires)

     

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  • Interview Exclusive | Michael Cohen

     

     

    Acteur, réalisateur et écrivain, né en 1970, étudiant au Cours Florent dès l’âge de 15 ans, Michael Cohen débute aux côtés de Francis Huster en 1992 au Théâtre Antoine, dans une pièce dédiée au compositeur Gustave Mahler : « Putzi ». Nommé aux Molière de la « révélation masculine » en 2016, il compte à son actif plus de 50 films, téléfilms ou séries tournés, huit pièces de théâtre et cela en 25 ans de carrière, ce qui témoigne d’un artiste très prolixe. C’est en 2010 qu’il réalise son premier long métrage : « Ca commence par la fin » dans lequel il joue le rôle principal, celui de Jean, qui vit une passion dévorante et destructrice avec Gabrielle, jouée par Emmanuelle Béart.

    Mais Michel Cohen n’est pas qu’un comédien, un réalisateur ou un acteur, c’est aussi un dramaturge talentueux, auteur de trois pièces : « Les abîmés » (1999), l’histoire de quatre jeunes gens abîmés, prêts à ré-apprendre et à aimer, « Le soleil est rare et le bonheur aussi » (1999), l’histoire d’un jeune couple qui vit ensemble depuis un an ou deux, mais dont chacun  malgré tout garde en lui un secret que l’autre ignore, et « Le sacrifice du cheval » (2013), sur une génération perdue et la difficulté d’aimer. En 2013, Michael Cohen publie son deuxième roman aux Editions Julliard : « Un livre », l’histoire de Thomas Milho qui découvre un matin que son ex-compagne a écrit un livre sur leur histoire. Disponible et chaleureux, il a accepté de répondre à quelques questions pour Instant City, à l’occasion de la sortie de son dernier film, « L’invitation », librement inspiré de la bande dessinée éponyme de JIM et Dominique Mermoux, parue en 2010 (Editions Vents d’Ouest).

     

    INTERVIEW

     

    IC : A 15 ans, vous vous êtes inscrit au Cours Florent ?

    Michael Cohen : J’ai rencontré quelqu’un qui allait aux cours tous les mercredis et qui m’a proposé d’y aller, ce que j’ai fait. A partir de là, j’ai assisté à tous les cours, pas seulement ceux du mercredi réservés aux étudiants. Je me suis mis à lire Tchékov, Molière, Corneille. J’ai lu et appris énormément de choses à travers les grands auteurs de théâtre. Etre comédien a été pour moi comme une vocation. Pourtant je n’étais pas dans une famille d’artistes et rien ne me prédestinait à ça. Personne ne pouvait imaginer que j’allais faire ce métier car je n’avais pas le profil pour. Dès l’âge de 10 ou 12 ans j’allais beaucoup au cinéma tout seul. Je me souviens avoir vu « Il était une fois en Amérique» ou « Le Père-Noël est une ordure ». J’aimais particulièrement Romy Schneider et Catherine Deneuve, deux actrices qui m’ont marqué très tôt. Je suis tombé amoureux des actrices. J’ai d’ailleurs par la suite  joué le fils de Catherine Deneuve dans «Le héros de la famille». C’était très émouvant. C’est une actrice qui se remet sans cesse en question, qui a le trac comme nous, qui a envie de bien faire. De fait on est face à elle comme face à une vraie partenaire et non face à une star. Je me disais :  « c’est incroyable ! »

     

    IC : Quels souvenirs gardez-vous de cette époque ?

    Michael Cohen : J’en garde le souvenir d’une époque magique, magnifique. J’ai fait des rencontres formidables, des amis que j’ai gardés. J’ai vécu des émotions incroyables : c’était un peu comme si tout s’ouvrait en moi, comme une seconde naissance. J’étais au bon endroit, exactement là où je devais être.

     

    IC : Quel est la plus forte impression que vous gardez de Francis Huster ?

    Michael Cohen : Je le croisais quand il donnait des cours magistraux auxquels on pouvait assister. J’ai eu la chance qu’il m’engage au théâtre Antoine à 19 ans pour la pièce « Putzi ». Il m’a mis le pied à l’étrier. C’est un metteur-en-scène et un professeur assez génial qui encourage à prendre des risques et à chercher une forme de liberté en permanence. C’est quelqu’un qui s’associe à une vraie folie douce dans la vie en général et dans ce métier. Avec des excès, de la flamboyance et du panache.

     

    IC : Pour quelle raison un comédien se met-il à écrire des pièces de théâtre ?

    Michael Cohen : Pour les mêmes raisons que je suis entré au cours Florent :  il y a beaucoup d’acteurs et je me suis dit « Pourquoi moi ? Il ne faut pas que j’attende qu’on vienne me chercher, il faut que j’écrive mes pièces ». J’ai commencé à écrire par nécessité avec l’envie de prouver quelque chose, de montrer ce que j’avais dans le ventre. Très vite j’ai eu l’impression que j’arrivais à raconter une histoire et des émotions qui m’étaient propres et que je pouvais en faire un spectacle.

     

    IC : Quels sont les thèmes qui vous sont chers ?

    Michael Cohen : Je parle un peu toujours du même thème : le couple, la vie à deux et le rapport à l’autre en amour,  ce que cela provoque, ce que ça construit, ce que ça détruit, comment on trouve une place dans son histoire d’amour et comment on se répare de notre enfance. La pièce « Les abîmés » que j’ai écrite,  parle  des jeunes adultes qui essaient de se réparer de leur enfance parce qu’on ne leur a  pas donné les armes pour s’aimer et pour aimer les autres. On apprend a faire beaucoup de choses dans la vie, mais on n’apprend pas à aimer les gens et à trouver sa place dans la vie à deux. Or, l’amour adulte vient de ce que nous avons vécu enfant, de ce que nous avons vu autour de nous, de notre expérience personnelle.

    Mon premier film, « Ca commence par la fin », est une conséquence plus extrême de l’amour racontée avec l’ironie du désespoir. Le tournage a été  éprouvant mais il fallait en passer par là. Je n’aurais pas pu  faire ce film  avec quelqu’un d’autre, quelqu’un avec qui je ne vivais pas car je voulais parler de cette intimité là dans le couple. La douleur devient une drogue, on est perdu on ne sait plus où on est. Jean, le personnage dans le film,  n’arrive pas a arrêter cette relation passionnelle parce que tout lui manque chez Gabrielle :  sa peau, son odeur et même la douleur qu’elle provoque chez lui. Quand on vit ce genre d’amour passion  on ne s’en rend pas compte. C’est un film brut et réel, fort et marquant. Soit le spectateur n’a jamais vécu ça et il passe à côté du film, soit il a vécu une histoire similaire et cela suscite des sensations fortes. Il m’est arrivé que des gens dans la rue m’en parlent et me disent merci pour avoir su retranscrire à l’écran ce qu’ils avaient vécu dans leur vie.

     

    IC : Pour quelle raison un acteur se met-il à réaliser des films ?

    Michael Cohen : Il y a l’envie au départ de ne pas attendre qu’on vienne vous chercher pour travailler. Mais il y a aussi le désir de raconter des histoires, de témoigner de certaines choses au sujet de la société dans laquelle je vis, du monde dans lequel je vis. Quand un comédien ne travaille pas pendant 2 ou 3 mois, il est en attente, souvent il a peur de ce qui va se passer « après » : Est-ce que ça va revenir ? On n’est jamais rassuré, à n’importe quel niveau qu’on soit, célèbre ou pas. Et s’il n’y a rien ?  Si on ne me rappelle pas ? On vit, on travaille, on existe à partir du désir de quelqu’un d’autre. Quand on fait ce métier, on doit accepter de n’être jamais serein, de vivre dans l’angoisse. C’est le prix à payer pour vivre de notre passion. On a cette chance de faire un métier qu’on a choisi, qu’on aime et ce malgré l’angoisse du lendemain. Pour ma part, je me mets à écrire. A la question « que feriez-vous si ça devait s’arrêter ? » je n’ai pas de réponse, donc je continue !

     

    IC : Parmi toutes vos casquettes (écrivain, dramaturge, réalisateur, acteur, comédien), avez-vous une petite préférence ou bien est-ce justement l’éclectisme qui vous plait ?

    Michael Cohen : C’est une question à laquelle je n’arrive jamais à répondre. A la base, mon premier désir était de devenir comédien. De là se sont rajoutées les différentes casquettes que je n’arriverais pas à dissocier.  Je ne fais pas de différence entre le théâtre et le cinéma.

     

    IC : « L’Invitation » est votre 2ème réalisation au cinéma ? Après un premier film, est-ce plus facile de monter un projet, de trouver un producteur, des financements, des distributeurs ?

    Michael Cohen : Pour les producteurs, oui. Mais pas pour les financements.  C’est très difficile. « L’invitation » est une comédie sur l’amitié, donc c’est un peu plus facile que pour mon premier film dont l’histoire était compliquée, c’est un peu plus calibré. Le sujet est assez fort avec un point de départ qui résonne chez beaucoup de gens et un budget relativement petit. Mais cela reste malgré tout extrêmement compliqué de financer les films en général. Beaucoup de films aujourd’hui s’arrêtent en cours de production à cause de cela. On a mis 2 ans à monter le film. Trouver l’argent, trouver des gens pour investir nécessite de faire des concessions comme ré-écrire certaines choses par exemple quand on vous dit :  « cette scène est trop bavarde » ou « il manque telle ou telle chose ». Cependant on ne m’a rien imposé. Pour faciliter les financements, j’avais aussi d’abord pensé à des  acteurs têtes d’affiche. Je n’aurais pas pu monter le film avec des inconnus mais il y a eu plusieurs refus. Alors j’ai pensé à Nicolas. Et là, tout est devenu tellement évident ! Dès que l’idée m’est venue, je n’ai cessé de me dire que ce rôle était pour lui. Il m’a d’ailleurs dit la même chose après la lecture du scénario : « c’est incroyable, ce rôle est fait pour moi ! ». Il se l’est un peu réapproprié, il a ré-écrit des choses. Il y a une adéquation, une communion entre nous sur ce projet.

     

    IC : Qu’est-ce qui a été plus facile du fait d’être « déjà passé par là » dans la réalisation du projet tout entier ?

    Michael Cohen : La seconde fois, je suis plus fort de l’expérience de la première fois mais il y a toujours des problèmes qu’on n’a pas anticipés. C’est comme gravir une montagne qui paraît insurmontable : une fois au sommet on se dit « voilà, on l’a fait ! ». c’est une expérience passionnante mais très compliquée. La phase la plus dure est la recherche de financement. Sur le moment on se décourage beaucoup, il y  a de nombreuses  remises en question. On ne sait jamais si on a raison ou si ce sont les autres qui ont raison. Une fois que le scénario est validé, on passe enfin à autre chose, à l’artistique et au concret.

     

    IC : Avez-vous été influencé par les critiques faites pour « Ca commence par la fin » ?

    Michael Cohen : je n’y ai pas pensé. Quand on fait les choses, quand on construit un nouveau projet, un nouveau film, l’objectif est de raconter une histoire du mieux possible. Inconsciemment, les choses que j’ai entendues sont restées en moi sans doute. Ce deuxième film est dans la continuité du premier, assez nerveux avec une énergie assez forte, il y a un vrai fil rouge entre les deux films. Pour le coup c’est mieux maîtrisé et l’expérience du premier m’a donné plus de savoir faire. Il y a une cohérence je trouve entre les deux films. En même temps, « L’invitation » est un film plus ouvert car l’amitié est un thème qui touche tout le monde, avec une relation qui a des hauts et des bas, avec des non-dits. Ce film est moins clivant que le premier.

     

    IC : Est-ce que vous retrouvez la même équipe technique de production ?

    Michael Cohen : Quelques uns mais beaucoup  n’étaient pas libres étant sur d’autres projets. C’est moitié/ moitié.

     

    IC : Comment êtes-vous tombé sur la BD de Jim ?

    Michael Cohen : On me l’a donnée à lire après la sortie de mon premier film. Ca a été un coup de foudre. J’ai eu envie tout de suite d’aller vers ce projet. J’ai même halluciné de voir que personne avant moi ne s’y était intéressé et  de pouvoir avoir les droits.J’ai rencontré Jim, je lui ai dit ce que je voulais faire. Jim est quelqu’un de curieux, ouvert, partant pour de nouvelles aventures. Je lui ai promis que je ne  gâcherai pas son travail. Quand il vend ses droits,  un auteur n’a plus de droit de regard sur l’oeuvre finale normalement, mais je lui ai toujours fait lire le scénario et il m’a donné chaque fois un retour très intelligent et très fin. Je n’étais pas tenu de le faire contractuellement, mais c’était un collaborateur avec un œil précis et des notes intéressantes.

     

    IC : Avez-vous hésité entre le rôle de Léo et celui de Raphaël ?

    Michael Cohen : Oui, tout à fait. Au début je cherchais des acteurs pour jouer le rôle de Raphaël et je pensais jouer celui de Léo et en pensant à Nicolas je me suis rendu compte que je me trompais complètement et qu’il serait un formidable Léo. Il a dit en lisant le scénario :  « Léo c’est moi » .

     

    IC : Auriez-vous une anecdote à nous raconter qui caractériserait un peu l’atmosphère sur le tournage ?

    Michael Cohen : On a tourné pendant 10 jours de nuit sur le bord d’une route en banlieue tout au début du tournage ce qui a créé  une certaine atmosphère dès le départ, un peu comme si on partait loin tous ensemble. Nous étions dans une bulle assez étrange et du coup on alternait moments d’euphorie et moments de fatigue comme si notre horloge interne avait changé de rythme. Cette sensation se retrouve dans le film. On a l’impression d’être dans un monde un peu à part. Le montage a été une autre étape de travail : j’ai redécouvert  le film. Je me suis posé en voyant les images et j’étais content. Je me disais qu’on avait réussi un pari assez fou de faire ce film, de parler de l’intime, de l’amitié, en essayant d’être un peu universel. J’aime parler de l’intimité dans l’universel, toucher à la part intime qu’on a tous et qui nous relie tous les uns avec les autres.

     

    IC : Parlez-nous de la BO du film.

    Michael Cohen : Il y a beaucoup de musiques existantes des années 90, du Gainsbourg, Balthazar, et une musique originale de Alexis Rault. La musique est ce qui coûte le plus cher dans un film.

     

    IC : « Le soleil est rare et le bonheur aussi » ce sont des paroles d’une chanson de Serge Gainsbourg : « Valse de Melody ». « L’amour s’égare au long de la vie – Le soleil est rare et le bonheur aussi – Mais tout bouge – Au bras de Melody »

    Michael Cohen : C’est quelqu’un qui a beaucoup compté dans ma vie artistique et dans ma vie tout court par ses chansons, ses films, ce qu’il était, son œuvre. Je l’ai rencontré très jeune et j’avais 20 ans quand il est mort. C’est quelque chose dont je me souviens très bien. Son style, ses chansons, son cynisme, sa clairvoyance sur la vie, sur les femmes, son ironie, comme un papa imaginaire avec sa folie, ses excès, sa façon de narguer un peu la vie, en flamboyance, avec du panache. Le personnage de l’invitation est un peu emprunt de ça, un petit côté « gainsbourien », cette impertinence avec un grand cœur. Le personnage de Léo avait déjà ce côté dans la BD et je l’ai amené plus loin dans cette direction. Un personnage aussi insupportable qu’attachant avec des répliques assez cinglantes. Même quand il « casse » son pote c’est avec tendresse et c’est pour lui dire, lui faire comprendre quelque chose, ce n’est jamais gratuit. A un moment de l’histoire, Léo doit réveiller ses amis et surtout son ami Raphaël en pleine nuit, à 3h du matin, pour lui demander de venir le chercher sur une route de campagne parce qu’il est en panne. Au début ça peut passer pour une blague de connard mais on se rend compte que Léo va faire beaucoup de bien à son meilleur ami.

     

    IC : Parlez-nous de Raphaël que vous jouez.

    Michael Cohen : Raphaël est un personnage auquel il est plus facile de s’identifier. Il n’est ni brillant, ni vraiment drôle, mais pas non plus le contraire. Il y a une forme de lâcheté dans sa vie sentimentale, il ne trouve pas sa place et c’est ça qui est touchant. Du coup il s’est renfermé intérieurement, s’est endormi, a perdu une forme de flamboyance dans sa vie. Il a besoin d’être réveillé. On peut tous passer par cette phase là :  un jour, on baisse la garde et on cesse de se battre pour se réveiller parce que la vie peut nous endormir, nous fatiguer, on peut être découragé. Raphaël ne s’en rend même pas compte, « il regarde passer les trains » comme dit sa compagne Hélène. Leo l’appelle en pleine nuit et le réveille concrètement et symboliquement.  Ca va être violent et ça va lui faire du bien. Raphaël refuse ce « test de l’amitié » , il le prend très mal. Il se cabre d’avoir été testé d’une part et d’autre part de ne pas être « le seul et l’unique » ami car Léo a appelé plusieurs amis ce soir-là afin de voir « qui » allait venir, et « qui » était un « vrai » ami. Raphaëll cherche sa place et n’arrive pas à dire les mots rassurants  qu’attend sa compagne Hélène. C’est quelqu’un qui après avoir été bousculé va retrouver son énergie interne, sa lumière. Les gens perdent un peu de cette lumière au fur et et à mesure que la vie avance, à cause des épreuves que nous traversons.

     

    IC : Est-ce vous qui avez choisi votre meilleur ami ou est-ce lui qui vous a choisi ?

    Michael Cohen : On s’est choisi tous les deux. On s’est rencontré quand j’étais à l’école parce qu’on séchait les cours sans se connaître et on se retrouvait dans les mêmes salles de cinéma pour aller voir des films. On avait la même passion pour le cinéma.

     

    IC : Quel est votre endroit préféré sur Terre ?

    Michael Cohen : Je suis un amoureux de Paris. J’adore cette ville, la plus jolie. Elle m’inspire car  on y découvre toujours des choses. J’adore la filmer, la regarder. Pourtant je suis né et j’ai grandi en banlieue mais je me sens très parisien. J’adore voyager, j’adore partir mais j’adore aussi revenir. J’aime beaucoup l’Italie pour sa nourriture et l’art.

     

    IC : Quel est la valeur qui a le plus d’importance à vos yeux ?

    Michael Cohen : La justice, être juste. Si mon fils pouvait me dire « tu as fait des erreurs mais tu as été juste » ce serait formidable.

     

     

    Bande Annonce « Ca commence par la fin » :

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    Serge Gainsbourg : « Valse de Mélody » :

    [youtube id= »CEg_ek-Nnww » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

     

     

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  • Bande Dessinée | Une Nuit à Rome (2012)

    Bande Dessinée | Une Nuit à Rome (2012)

     

     

    Imaginez… Vous avez 20 ans, vous êtes fou amoureux et vous faites une promesse à celle que vous n’oublierez jamais : passer ensemble la nuit de vos 40 ans, quoi qu’il arrive.

     

    C’est cette promesse qui hante Raphaël : revoir Marie vingt ans après ou bien résister pour sauver son couple avec Sophia ?

    Cette BD a eu un succès certain auprès du public. A croire que beaucoup se sont identifiés au héros : c’est du moins ce que laissent paraître les discussions sur les forums à ce sujet. Qui n’a pas gardé dans un coin de sa tête un souvenir de jeunesse qui remonte parfois à la surface ?  Qu’est-il ou elle devenu(e) ? Et si on se recroisait, est-ce que ce serait comme avant ?

    L’auteur s’est aussi amusé à une vidéo type « Bande-Annonce » de sa BD.

     

     

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    Une Nuit à Rome - Livre 2

     

     

    ✔ « Une Nuit à Rome » (Bamboo Edition – 2012)

    ✔ Scénario et Dessin de Jim (Thierry Terrasson) – 2 Tomes

    ✔ Prix du meilleur album au Festival européen de Nîmes en 2013

     

     

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