Étiquette : Hervé Muller

  • Hervé Muller a rejoint son pote Jim…

     

     

    Son nom n’évoquera pas forcément grand chose aux jeunes générations, mais Hervé Muller était l’une des plumes les plus affutées des magazines Best, Actuel ou Rock & Folk, de la fin des années 60 au début des 80′. Il nous quittait le 22 mars 2021, sur la pointe des pieds…

     

    Le journaliste et auteur, né dans l’est de la France et âgé de 72 ans, souffrait depuis les années 80 de fibromyalgie, une maladie rare qui lui occasionnait, entre autres, de terribles troubles du sommeil. Entre la fin des 60’s et celle des 70’s, cet ami intime de Jim Morrison aura collaboré à Best, Actuel, Rock & Folk, Libé et le Matin de Paris.

    Si une de ses vieilles connaissances, une autre légende du journalisme musical, Gérard Bar-David, ne nous avait pas alertés, nous ne l’aurions probablement jamais su… Car cette triste nouvelle, nous aurions dû l’apprendre dans les colonnes de Libération ou de Rock & Folk, deux médias amnésiques qui existent pourtant toujours aujourd’hui, avec lesquels Hervé Muller avait pendant longtemps collaboré et apposé sa fameuse signature au bas de nombreux articles. Hélas, plus personne au sein de ces rédactions ne semble vouloir s’en souvenir…

    Hervé Muller était pourtant un immense rock-critic, même s’il était aussi doté d’un solide caractère de cochon. Fameux journaliste rock à Actuel, Best, Rock & Folk, correspondant aux USA de Libé, auteur à succès et biographe de Jim Morrison, Hervé était un vrai héros du rock, jusqu’à ce que la maladie le rattrape au crépuscule des années 80.

     

     

     

    Au printemps 1971, c’est chez Hervé Muller qu’échoue Jim Morrison une nuit, ramassé ivre mort devant la porte de la Cantine du Circus par un ami du journaliste, Gilles Yepremian. Les deux hommes se lieront d’amitié. Muller consacrera une première biographie au Roi Lézard en 1973, « Jim Morrison, au-delà des Doors », puis nous livrera sa version des faits sur les derniers jours du leader des Doors à Paris, avec « Jim Morrison, mort ou vif », publié en 1991, vingt ans après la disparition de Morrison.

    A la fin des années 70, Hervé Muller assure la rubrique rock du Matin de Paris. Au même moment, après avoir produit le premier album éponyme de Trust en 1979, il devient le manager d’un jeune espoir de la variété-rock hexagonale, du nom de Jean-Patrick Capdevielle. La même année, ce dernier cartonne avec son hit « Quand t’es dans le désert », extrait de son premier 33 tours. Mais au début des années 80, Hervé Muller s’installe à New York et disparaît des écrans-radars. On le retrouve à Paris quinze ans plus tard, en 2006, lorsqu’il témoigne dans un documentaire de Michaëlle Gagnet consacré à Morrison, intitulé « Les derniers jours de Jim Morrison ».

    Son vieux compère Gérard Bar-David lui rendait ainsi un dernier hommage, dans un article intitulé « Le dernier voyage d’Hervé Muller », publié sur son site Gonzo Music le 11 mai 2021 : « Atteint de de fibromyalgie, une maladie rare qui lui occasionnait, entre autres, de terribles troubles du sommeil, il pouvait s’endormir en un clin d’œil, en plein jour, comme s’il tombait en état de léthargie instantanée. Il souffrait également du « Complexe de Diogène », entassant chez lui tout ce qu’il pouvait. Sans doute aussi la solitude devait lui peser. Hervé ne devait pas vraiment supporter l’homme qu’il était devenu.

    Gravement malade, il devait absorber une foultitude de médicaments, dont certains contre l’hypertension artérielle. Or il semblerait que ces derniers temps, il aurait omis de suivre son traitement. Le médecin-légiste a conclu qu’il était décédé d’un arrêt cardiaque. Et aujourd’hui, nous avons enfin pu accompagner Hervé Muller pour son dernier voyage. C’était au Père-Lachaise, juste à côté de là où repose son vieux pote Jim depuis déjà un demi-siècle et, de surcroit, le jour anniversaire de la mort de Bob Marley. Un signe !  Nous sommes le mardi 11 mai 2021… So long Hervé Muller… »

     

     

     

  • Jim Morrison, derniers jours à Paris

     

     

    Fondé en juillet 1965 à Los Angeles, The Doors n’aura existé que huit ans. Huit années et six albums studio enregistrés par la formation originelle, qui ont suffi à faire entrer ses membres dans la légende. D’abord avec des titres emblématiques qui ont jalonné la carrière du groupe, comme « Break On Through » ou « Light My Fire », mais aussi et surtout grâce à son leader, le chanteur Jim Morrison.

     

    Poète maudit, véritable performer, cet artiste charismatique et tourmenté a eu une vie pour le moins tumultueuse, faite d’excès en tout genre. Sa disparition précoce, le 03 juillet 1971 à Paris, a contribué à créer la légende mais a mis un terme à l’une des aventures musicales parmi les plus novatrices du 20ème siècle. The Doors sera finalement dissout en 1973, deux ans après la mort de son chaman. Six ans plus tard, la voix de Jim Morrison sur le titre « The End » contribuera à façonner une autre légende, celle du film de Francis Ford Coppola :  « Apocalypse Now ».

    Lorsqu’il arrive à Paris le 12 mars 1971, Jim Morrison a 27 ans et il semble décidé à tourner définitivement la page de ses années Doors. Condamné par la justice américaine pour son comportement jugé obscène lors de la première date de leur grande tournée américaine, à Miami le 1er mars 1969, après un an et demi d’un procès qui l’aura terriblement éprouvé, il souhaite changer de vie, se réinventer, et surtout laisser derrière lui son pire ennemi : l’alcool. Gilles Yepremian a fréquenté le chanteur à l’époque, après l’avoir recueilli un soir, ivre mort. « Le rock le fatiguait. Il s’autodétruisait à petit feu, pour casser cette image de rock star qui lui collait à la peau ».

     

     

     

    « A 27 ans, je suis trop vieux pour être chanteur de rock… »

    Jim Morrison, très affecté par les disparitions récentes de Brian Jones, Janis Joplin ou Jimi Hendrix, n’a plus goût à rien, à part pour la poésie, mais qui ne parvient cependant pas à lui rendre un semblant d’équilibre et de sérénité. Sam Bernett dirigeait alors le Rock’n’Roll Circus, une boîte à la mode, dont l’ex-leader des Doors devint un client assidu. « C’était un garçon dont le comportement pouvait changer du tout au tout en l’espace d’une minute. Il pouvait être agréable, adorable, de bonne compagnie et de bonne conversation, mais le problème, c’est qu’il buvait énormément, et dès lors qu’il avait dépassé la limite, il devenait vite insupportable et ingérable ».

    Le Rock’n’Roll Circus, cette discothèque parisienne où se retrouvaient les célébrités du moment, en ce début des années 70. De nombreuses anecdotes racontent les nuits sulfureuses durant lesquelles se croisait toute la faune d’artistes aux tenues excentriques, de Michel Polnareff à Yves Saint Laurent et Pierre Bergé, venus s’encanailler avec les mauvais garçons, les dealers et les groupies accrochées aux pattes d’eph’ de Keith Richards, Mick Jagger ou Jimi Hendrix.

     

    « Pourquoi je bois ? Pour pouvoir écrire de la poésie… »

    A Paris, Jim Morrison chine chez les bouquinistes, sur les quais de Seine. Lui qui veut devenir poète, il lit beaucoup et aime s’asseoir durant des heures sur un banc, place des Vosges, pour écrire ce qui ne restera que l’ébauche de son oeuvre littéraire. « Il dit qu’il veut mener les adolescents au-delà de l’odyssée juvénile traditionnelle. Il veut leur faire atteindre le champ symbolique de l’inconscient, dans le cadre d’un projet à la fois culturel et poétique. » (Hervé Luxardo, historien, Université Paris III Sorbonne).

     

    « Jim Morrison est mort, mais son corps bouge encore. » (Le Figaro, juillet 1971)

    Mais dans la nuit du 2 au 3 juillet 1971, le corps sans vie de Jim Morrison est retrouvé à Paris, dans la baignoire de l’appartement qu’il occupe avec sa compagne Pamela Courson, au 3ème étage du 17/19 Rue Beautreillis, dans le quartier du Marais. Ce décès aux circonstances mystérieuses ne sera rendu public que quelques jours plus tard par ses amis Agnès Varda et Alain Ronay, qui organiseront à la hâte ses obsèques au Père Lachaise, auxquelles n’assisteront d’ailleurs que cinq personnes. Arrêt cardiaque ? Overdose ? Suicide ? Complot de la CIA ? Étrangement, la police n’ordonne aucune autopsie, suscitant des interrogations qui n’en finiront plus, dès lors, de nourrir le mythe du chanteur poète au destin tragique.

    Avec cette mort brutale, Jim Morrison rejoint le Club des 27, constitué de ces icônes libertaires, parmi lesquelles Janis Joplin, Brian Jones, Jimi Hendrix ou Robert Johnson, toutes foudroyées à 27 ans, et qui se seront, chacune à leur manière, brûlé les ailes dans un combat perdu d’avance contre leurs démons intérieurs. En 1970, il ironisait, en déclarant à qui voulait bien l’entendre : « Vous êtes en train de boire avec le numéro 4 », comme pour conjurer le sort. Ou pas…

     

     

     

    Entre espoir et dérive, en éclairant les circonstances de la disparition du Roi Lézard et ses zones d’ombre, le documentaire d’Olivier Monssens, « Jim Morrison, derniers jours à Paris », produit en 2021 pour Arte, tente ainsi de percer le mystère de l’homme derrière la légende, et en particulier de celui qu’il était devenu ces derniers mois à Paris, après avoir fui les États-Unis, laissant derrière lui sa panoplie de rock star.

    Dans cet exil volontaire, le génie tourmenté balance entre espoirs d’une nouvelle vie auprès de ses héros littéraires, Rimbaud en tête, et errance autodestructrice dans un Paris où la contreculture commence à flirter avec l’héroïne. Enrichie de nombreuses archives, une enquête sur un cold case, doublée d’un portrait brossé par ceux qui l’ont connu pour, peut-être, refermer le dossier Morrison, un demi-siècle après sa mort. Entre portrait documenté et investigation, un retour sur les derniers mois du chanteur des Doors, Jim Morrison, dont la mort brutale et mystérieuse à Paris en juillet 1971 n’a cessé de nourrir le mythe.

    A checker également l’ouvrage « Jim Morrison, mort ou vif » publié en juin 1991 par le chroniqueur Hervé Muller, qui nous a quittés en mars 2021. On lui doit d’ailleurs certains des tout derniers clichés de Morrison saisis à Paris, parmi lesquels la photo à la une de cet article… So long, Mr Muller.

     

    Quand je jette un regard en arrière sur ma vie
    Je suis frappé par des cartes postales
    Instantanées, détériorés,
    Posters fanés d’un temps qui m’échappe…

     

    Documentaire d’Olivier Monssens (France, 2021, 52 mn)

    [youtube id= »kOXmNWJeOHk » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

    Documentaire de Michel Dailloux (France, 2006, 50 mn)

    [youtube id= »1F3Oyy-KTuQ » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]