Étiquette : Blake Edwards

  • Diamants sur canapé | Episode 3

     

     

    La Fête…

    « 5ème Avenue, 5 heures du matin, Audrey Hepburn, Diamants sur canapé et la genèse d’un film culte » par Sam Wasson – Sonatine Editions – 2010 (Extraits)

     

    Le tournage n’a duré qu’une semaine à New-York. Le temps des scènes chez Tiffany et de quelques extérieurs. Tout le reste du film fut tourné à Los Angeles dans les studios de la Paramount. On dit que miss Hepburn aurait amené pas moins de trente-six valises ainsi que son mari, Mel Ferrer et leur fils de dix mois, Sean. On logea toute la petite famille dans une maison de Coldwater Canyon.

     

    25:17 : La fête bat son plein.

    Pour filmer la scène de la fête, Blake Edwards a l’idée d’en organiser une vraie, pour mettre les acteurs « en condition ». Rien de tel pour filmer « sur le tas » de vraies scènes de comédie hilarantes. Il s’agissait de laisser libre cours au naturel. Cette petite sauterie dura pas moins de huit jours pleins. Blake Edwards voulait de vrais acteurs pour cette scène, pas des figurants. C’est ce qu’il avait demandé au bureau de casting. Pas de grands acteurs, non, mais des acteurs de seconds rôles qui seraient capables, le moment venu, de tourner plusieurs prises d’une situation cocasse observée durant la fête. « Convaincre le studio de rémunérer des acteurs jusqu’à 125 dollars par jour quand les figurants sont beaucoup moins chers ne fut pas facile à négocier ». Il fallut une semaine, du 2 au 9 novembre, à Blake Edwards pour avoir la matière suffisante à une scène qui durerait 13 minutes dans le film. Il fallut également engager une chorégraphe, afin que chaque morceau de fête, chaque personnage mis en avant, chaque scène soit organisée et les déplacements orchestrés.

    Blake eut certaines idées, comme celle du téléphone dans la valise, du fou rire devant la glace ou de la douche. D’autres fois, il demandait aux acteurs d’improviser, comme pour la scène de la dispute. Ou encore, les idées étaient saisies au bond, comme celle de tenir ses chaussures à la main lorsqu’on a trop mal aux pieds. Blake Edwards avait organisé une vraie fête, et comme dans toutes les fêtes, certains acteurs avaient des coups de barre qui étaient filmés au vol. Une autre fois, Georges Peppard pinça les fesses de Joyce Meadows qui dansait moulée dans une robe blanche. Elle poussa un cri et la scène fut enregistrée. On ne savait jamais à quoi s’attendre !

    La scène de la chute, quant à elle, faillit tourner au drame. « Cette fois c’était l’actrice Dorothy Whitney qui s’y collait ; elle interprétait Mag Wildwood et devait tomber directement devant l’objectif en gardant les bras le long du corps. Cette pitrerie fut un véritable cauchemar pour l’actrice. Elle était terrorisée. – Je n’y arrive pas, je n’en suis pas capable ! Disait Dorothy. Blake a insisté jusqu’à ce qu’il obtienne gain de cause. » Il a fallu plus de treize prises.

    Quand Audrey Hepburn arriva sur le plateau numéro 9 de la Paramount début du mois de novembre 1960, la fête battait son plein depuis déjà plusieurs jours. 540 litres de thé glacé et de Canada Dry, de la viande froide, des sandwichs, plus de 60 cartouches de cigarettes et 20.000 dollars de frais de production. « Il y avait du monde partout ! ». On avait fait venir un enfumoir à abeilles pour recréer l’ambiance enfumée d’une fin de soirée. Audrey était coiffée d’une choucroute énorme parsemée de mèches blondes décolorées. « Entre les scènes, elle était douce, modeste et gentille avec tout le monde. Certaines stars regagnent leur loge entre les prises, mais pas elle. »

    La scène fut une réussite. A tel point que Blake et le scénariste Tom Waldman décidèrent d’en faire tout un film : c’est comme ça qu’est née l’idée de « La Party ».

     

     

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  • Diamants sur canapé | Episode 2

     

     

    Les croissants…

     

    « 5ème Avenue, 5 heures du matin, Audrey Hepburn, Diamants sur canapé et la genèse d’un film culte » par Sam WassonSonatine Editions – 2010 (Extraits)

     

    Dimanche 2 octobre 1960. New-York, 5ème Avenue, il est 5 heures du matin. La rue est déserte. Il fait froid. Audrey Hepburn, oscarisée pour son rôle dans « Vacances Romaines », s’apprête à tourner la toute première scène de « Diamants sur canapé », sous la réalisation de Blake Edwards. Une comédie ! Elle n’a jamais joué dans une comédie et malgré l’heure matinale, nerveuse, fume cigarette sur cigarette. Elle attend dans un taxi jaune l’ordre de tourner. Dans sa main, un sac en papier brun. « Action ! »

     

    Un taxi jaune apparaît. Il s’arrête le long du trottoir, devant une boutique au N°727 de la 5ème Avenue. Une jeune femme en descend, claque la portière. Elle porte une robe noire, un collier de perles, des gants noirs, des lunettes de soleil malgré l’heure matinale. Elle est coiffée d’un chignon. Sans doute rentre-t-elle d’une soirée chic. Elle lève la tête vers l’enseigne : « Tiffany ».

    « Ca tourne » ! Le second assistant-réalisateur fait signe au chauffeur de taxi qui démarre. La rue avait été spécialement évacuée pour la scène. Il fallait faire vite. Le soleil brillerait bientôt bien trop haut pour illustrer un matin aux aurores. De plus, le premier ministre soviétique, Nikita Khrouchtchev, devait faire une apparition sur cette même 5ème Avenue à 7h30 précises. Cela ne laissait donc que deux heures pour tourner. Mais Audrey Hepburn ne souhaite pas bâcler la scène. Elle se dit que si Holly, la call-girl dont elle joue le rôle, ne se sent chez elle que chez Tiffany, alors il lui faut prendre son temps et savourer cet instant comme un pur moment de bonheur. Aussi, plutôt que de s’approcher tout de suite de la vitrine, choisit-elle de s’arrêter au bord du trottoir et de lever les yeux. Blake Edwards ne lui avait-il pas demandé de se fier à son intuition là où d’autres réalisateurs exigeaient un mot-à-mot parfait ?

     

    0:48 : La jeune femme avance à petits pas telle une geisha vers la vitrine du magasin. Elle regarde les bijoux.

    Sam Wasson raconte : « Il avait fallu coudre deux robes uniquement pour ces quelques secondes. Une pour déambuler devant le magasin, fendue sur le côté afin de lui permettre de se déplacer, l’autre pour les scènes statiques, tellement ajustée qu’elle ne lui permettait aucun mouvement. Audrey devait enfiler les deux robes alternativement. »

     

    1:02 : La jeune femme tient dans sa main un petit sac de papier dont elle sort un croissant qu’elle met à la bouche et un gobelet contenant un café.

    « Comment allait-elle faire pour avaler ce truc ? Audrey ne voulait pas faire d’histoire mais elle avait les viennoiseries en horreur et avait demandé à Blake si cela le dérangerait qu’elle déambule devant la vitrine de Tiffany en mangeant plutôt un cornet de glace. Mais il avait refusé. Evidemment, sa décision était entièrement justifiée. C’était l’heure du petit déjeuner après tout et ce ne serait pas vraisemblable. »

     

    2:22 : La jeune femme jette la pochette en papier dans une poubelle avant de s’éloigner sur le trottoir. Le générique prend fin.

    « Les badauds commençaient à s’attrouper déjà par groupes de deux ou trois, et, un court instant plus tard, ce qui n’était au début qu’un petit attroupement s’était mué en une foule de curieux ». Sur une photo, on voit la foule prendre des photos du tournage, sur le trottoir d’en face. C’était la première fois qu’on tournait un film à l’intérieur du magasin Tiffany. Cet exploit avait necessité six longs mois de tractations et la contrepartie, c’était Audrey ! « Laisser une équipe entière s’installer parmi certains des bijoux les plus coûteux de la planète représentait un défi logistique et un cauchemar pour les assureurs, certes, mais d’un point de vue promotionnel, cela représentait une opportunité en or pour le joaillier. Il n’y avait qu’à mettre le collier Schlumberger au cou d’Audrey et de laisser les photographes la mitrailler. » Et en effet, c’est ce qui se passa. Audrey Hepburn fut photographiée dans la boutique Tiffany avec à son cou le collier créé par Jean Schlumberger, au centre duquel se trouvait le plus gros diamant jaune du monde, de 8 centimètres de diamètre pour un poids de 128,54 carats. « Jusque là, le collier n’avait été porté que par une seule femme, Madame Sheldon Whitehouse, épouse d’un sénateur qui avait présidé le bal donné par Tiffany en 1957. »

    Ce bijou apparaît brièvement à l’écran, protégé derrière une vitrine, dans la scène où Holly et Paul font graver la bague trouvée dans un paquet de friandises.

     

    65:26 : « Il m’est arrivé de remonter la 5ème Avenue très souvent, mais c’était la nuit. Est-ce que vous aimez Tiffany ? Ce n’est pas magnifique ? Il semble que rien de désagréable ne peut arriver dans un magasin de ce genre. En réalité je me fiche des bijoux, à part les diamants, bien entendu. Regardez ça ! Qu’est-ce que vous en dites ? Bien sûr, je serais insensée de porter des diamants avant 40 ans. »

     

     

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  • Diamants sur canapé | Episode 1

     

     

    Histoire de la Petite Robe Noire…

     

    « 5ème Avenue, 5 heures du matin, Audrey Hepburn, Diamants sur canapé et la genèse d’un film culte » par Sam WassonSonatine Editions – 2010

    Le film « Diamants sur canapé » de Blake Edwards (1961) n’aurait jamais dû voir le jour en raison de son sujet sulfureux pour l’époque. Audrey Hepburn y campe une call-girl, Holly Golightly, inspirée de la mère du romancier Truman Capote. Le scénario, rédigé par George Axelrod (« Sept ans de réflexion ») est tiré de la nouvelle éponyme « Breakfast at Tiffany’s ». A l’époque, Audrey Hepburn dans un rôle de garce généralement alloué à Bette Davis, c’est une révolution. Parce que c’était elle, soudain, vivre seule, sortir, avoir l’air sublime, boire un petit coup de trop et être célibataire ne semblait plus honteux mais amusant. Le film fut un véritable succès. Parce que c’était elle, et aussi, grâce à une certaine petite robe noire.

    La costumière, Edith Head, avec huit Oscars à son actif, était une institution à la Paramount. Elle fit la connaissance d’Audrey Hepburn sur le tournage de « Vacances Romaines ». Elle avait l’habitude de tourner avec Grace Kelly, celle « qu’elle préférait habiller » car elle avait une beauté emblématique des années 1950 : « Elle avait le tour de taille idéal, les sourcils parfaitement dessinés et rentrait tout naturellement dans le moule ». Audrey, c’était une autre histoire ! Il fallait dissimuler son cou grêle derrière des foulards ou des colliers, élargir sa carrure pour mettre son visage en valeur, cacher ses bras trop frêles sous des manches, ses jambes d’échalas sous des jupes longues et sa petite poitrine en attirant le regard sur sa taille de guêpe. Sans parler de ses sourcils trop épais…

    Pour le film « Sabrina », en 1954, Billy Wilder avait demandé à un jeune couturier parisien de 26 ans (Audrey en avait 24), Hubert de Givenchy, de transformer la jeune fille normale de Long Island en élégante parisienne. Deux brindilles se rencontrent donc au 8 Rue Alfred de Vigny, l’une de deux mètres de haut et l’autre de 1m73, aux mensurations peu généreuses : 805580. Une robe de cocktail noire au décoletté en V dans le dos, tenue par deux petits nœuds aux épaules, transforma Audrey en icône de la mode et en muse de Givenchy.

     

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    Durant l’ère victorienne, le noir était presque exclusivement réservé au deuil. C’est la couleur qui était associée à la féminité et à la séduction : il fallait que la femme attire le regard de l’homme. Dans les années 1920, les garçonnes se glissent dans les robes-tubes de satin noir. Chanel s’empare de ce concept de modernisation et la petite robe noire se démocratise. Après le Krach boursier, elle devient le symbole de la nouvelle austérité. Et après la guerre, Dior en fait, à Paris, un signe de luxe et d’élégance. Mais dans le cinéma hollywoodien des années 1950, c’est encore la couleur qui représente l’emblème de la féminité, le noir étant réservé aux femmes vénéneuses, les vamps qui font souffrir et par qui le malheur arrive (« Gilda » avec Rita Hayworth). En 1960, Hubert de Givenchy reçoit le script de « Diamants sur canapé » :

     

    « La portière du taxi s’ouvre et une fille en descend. Elle est vêtue d’une robe de soirée décolletée dans le dos et porte, en plus de son sac à main, un sac en papier brun. »

     

    La scène avait lieu au petit matin. Et Audrey était l’archétype de la fille saine et gentille : porter du noir, à New-York, alors que Holly est une fille toute simple du Texas qui ne connaît rien à la mode parisienne et n’a pas d’argent ! C’était du jamais vu. Grâce à cette scène de « Diamants sur canapé », le glamour devint accessible aux femmes de milieu modeste : n’importe qui pouvait devenir chic grâce à la petite robe noire. Pendant que Doris Day s’amusait avec des motifs floraux sur fonds de bleu et de rose, Audrey Hepburn osa la robe noire qui symbolisait le pouvoir et l’expérience sexuelle. Sur elle, cette couleur devint sophistiquée et glamour. Des millions de femmes allaient se rendre compte qu’elles pouvaient s’approprier ce qui jusque là était réservé aux femmes très riches s’habillant chez les grands couturiers français. De par sa simplicité, la petite robe noire, facile à coudre à la maison, allait entrer dans tous les foyers.

     

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