Catégorie : Musique

  • 1979, l’année qui changea le monde, Episode 08 : « The Wall » by Pink Floyd

     

    [kleo_pin type= »circle » left= »yes » right= » » top= » » bottom= » »]          « FOCUS » : un article de fond sur un thème que nos rédacteurs ont sélectionné.

     

     

    L’année 1979 est définitivement une année-charnière, comme la fin d’un cycle. Elle scelle le sort des dernières utopies. Le monde prend une pelle et enterre à la hâte les cadavres encore fumants de nos illusions perdues. Après 1979, rien ne sera plus vraiment comme avant…

     

    Coincée à la fin d’une décennie qui paraît un peu creuse, durant laquelle les dirigeants politiques semblent manquer de charisme (le pâle Carter face au cowboy médiatique Reagan, VGE après De Gaulle et Pompidou), l’année 1979 n’attire décidément pas les flashes. Et pourtant… Que d’événements considérables ont eu lieu cette année-là, autant de tremblements qui ont marqué la face du monde et dont on ressent encore les répliques quarante ans plus tard.

    Révolution iranienne, arrivée de Saddam Hussein au pouvoir en Irak, début de la Guerre d’Afghanistan qui mènera à la chute de l’URSS et à l’apparition du terrorisme islamiste, second choc pétrolier et crise économique mondiale, paix entre Israël et l’Egypte, fin des Khmers Rouges… Il n’est pas insensé de penser que 1979 a en réalité été l’année la plus importante de l’après-Seconde Guerre Mondiale.

     

    Certains disques deviennent cultes pour des raisons parfois assez obscures, qui défient les lois métaphysiques voire tout simplement l’entendement, et c’est définitivement le cas de « The Wall » de Pink Floyd. Culte, ce double-album l’est indiscutablement, d’autant plus qu’il a été adapté ensuite au cinéma par Alan Parker. Et une chose est sûre avec cet opus : il ne laisse pas indifférent. On aime ou on déteste, souvent les avis sont très tranchés, mais il déchaîne les passions.

     

    Car « The Wall », c’est un peu le début de la fin de Pink Floyd, en fait… Tout commence par un concert durant lequel Roger Waters commet l’irréparable : cracher sur un fan au premier rang, qui l’agaçait particulièrement. Après cet incident, Waters va donc rêver de pouvoir s’isoler en montant un mur autour de lui, qui ne l’empêcherait pas de jouer sur scène, mais qui lui permettrait en revanche de ne pas voir le public dans la salle. À partir de là, à mesure que Waters sombrait peu à peu dans la paranoïa, le concept de « The Wall » prenait forme. Il en composait d’ailleurs presque tous les titres, dans un climat qui devenait détestable, avec son lot de tensions, notamment avec Wright.

    Waters fait alors appel à Bob Ezrin, qui a accédé à la notoriété dans les années 70 en produisant des albums devenus célèbres, notamment pour Alice Cooper, mais aussi pour Lou Reed, Aerosmith, Peter Gabriel ou encore Kiss, et également réputé pour certaines boursouflures dont il a le secret. Wright voulait quant à lui être impliqué dans la production, au même titre qu’Ezrin, Gilmour et Waters, mais selon certains témoins de l’époque, il avait beaucoup de mal à bouger de sa chaise. Et selon le claviériste, Waters se montrait tellement parano durant l’enregistrement de l’album, au point d’emporter les bandes après les sessions de studio, qu’il était difficile de trouver sa place. Ambiance, ambiance…

    « The Wall » se démarque aussi complètement des deux productions précédentes de Pink Floyd, en paraissant sous la forme d’un double album-concept. Une bonne façon de se distinguer, d’ailleurs. Bref, il est double et ça n’est pas un détail, mais il est surtout constitué essentiellement de titres très courts. Beaucoup font d’ailleurs office d’interludes et sur les vingt-six morceaux qui composent l’album, seuls trois dépassent les cinq minutes.

    Waters ne laisse en revanche aucun temps mort, tout est lié, l’histoire se déroule, sombre, implacable, jalonnée de réminiscences de sa jeunesse anglaise : un père mort à la guerre, une mère trop possessive, un système scolaire qui tente de le faire entrer dans un moule trop étroit pour lui… Tout cela, l’auditeur va pouvoir le vivre pleinement à travers le personnage de Pink (bon, pour les noms, il faut reconnaître que le bassiste ne s’est pas trop foulé…), qui construit un mur imaginaire pour se protéger de ce qui l’entoure, avec tous les dysfonctionnements qui en résultent.

    Pink va devenir une rock star, se marier, être cocu et sombrer dans une folie quasi schizophrénique, qui va le conduire à s’imaginer en dictateur fasciste. Seul un procès, dont il serait à la fois l’accusé et le plaignant, pourrait lui rendre son humanité. Difficile aussi de ne pas y voir des indices quant à la mégalomanie grandissante de Waters…

     

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    Le concept est donc très ambitieux. La musique de Pink Floyd va se faire moins aérienne, moins éthérée que par le passé. Elle se veut plus directe, certainement moins fine également. « In The Flesh? » surprend d’ailleurs par son aspect assez rude. On remarque rapidement le travail fait sur la guitare, claire, limpide. La rythmique se résume quant à elle à sa forme la plus primaire, presque primale, et elle ne se montre jamais aventureuse. Mais Gilmour est toujours bien présent, son jeu permet de rehausser certains passages, pourtant sujets à caution (« Another Brick In The Wall Part II », adulée ou détestée, tellement loin des standards auxquels nous avaient habitués le groupe).

    De nombreux moments forts ressortent, depuis le morceau-titre, divisé en trois parties, dont la seconde deviendra un tube planétaire et un véritable cri de révolte pour tout élève comprenant l’anglais, au « Comfortably Numb », qui porte la patte de Gilmour et ressemble le plus au Pink Floyd traditionnel, mais qui divise également ; entre ceux qui y voient un des plus grands titres des Britanniques et ceux qui n’entendent qu’une tentative ruinée par la production de Ezrin. Chacun se fera son avis, mais le fait que beaucoup de groupes (dont Anathema) aient repris cette chanson devrait pourtant nous donner une vague idée de sa qualité intrinsèque.

    En revanche, certains passages de l’album s’avèrent plus étranges. La fin de l’album part en roue libre et on sent là l’influence de Bob Ezrin. Ce dernier est d’ailleurs crédité sur « The Trial », mais à l’écoute de ce morceau, on se dit que ce n’est pas du Pink Floyd. On se croirait plus face à une chute de studio de « Welcome To My Nightmare » d’Alice Cooper, avec ses chœurs presque dissonants, dans l’exagération, pour apporter la théâtralité nécessaire à un tel concept. On grincera peut-être des dents face aux paroles de « Waiting For The Worms », racistes et dérangeantes, qui expriment la haine du Pink version dictateur, on soufflera face aux nombreux titres servant d’interludes, qui font entre trente secondes et une minute trente et qui ne servent vraiment qu’à faire du liant, pour que la musique ne se taise pas, même si cela plombe parfois la dynamique de l’ensemble.

     

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    On peut faire un parallèle entre « The Wall » et l’album « The Lamb Lies Down On Broadway » de Genesis, avec lequel il partage de nombreux points communs : vision différente de la musique pratiquée (chez Genesis, cela se traduisait par des parties instrumentales plus développées, avec une guitare qui savait se faire Heavy quand il le fallait), le format double, le départ d’un membre important à l’issue de leur enregistrement : Peter Gabriel de Genesis, Richard Wright de Pink Floyd.

    Mais surtout, « The Wall », malgré son concept qui parle d’enfermement volontaire, brise les murs entre les genres. Il est devenu l’archétype du concept-album grand public ainsi que certainement le disque le plus connu de Pink Floyd, avec sa pochette simple, épurée, mais d’une efficacité rare et son hit que l’on fredonne plus facilement qu’un « Shine On You Crazy Diamond », par exemple.

    Et de surcroît, il fut un pont et une source d’inspiration pour de nombreuses formations Metal qui cherchaient à enrichir leur discours. Trent Reznor, pour ne citer que lui, ne s’est pas caché du fait qu’il s’en soit inspiré pour le terrible « The Downward Spiral » de Nine Inch Nails et qu’il apporta un souffle nouveau au Prog’ Anglais, entre concept fort et nihilisme Punk, en participant à sa mutation.

    D’où le paradoxe de « The Wall ». Album culte, précurseur, inventif et fédérateur comme rarement un album a pu l’être, mais qui tourne le dos à ce qu’était intrinsèquement Pink Floyd au moment de sa sortie, au point que des petits malins affirment qu’il s’agit tout simplement du premier album solo de Waters, entouré de « Guests » de luxe. La production, menée par Ezrin, modifie également le langage d’une formation en y amenant ses propres idées, ses propres délires, qui ne sont pas forcément ceux des Anglais, mais qui se marient tant bien que mal, à condition qu’on adhère à cela.

    « The Wall », c’est un album en déséquilibre constant, où le meilleur peut côtoyer le pire, mais qui demeure malgré tout une pierre angulaire du Rock dans sa dénomination la plus large. Et c’est ainsi qu’il s’avérera être le début de la fin pour un groupe qui se dissolvait petit à petit et qui malgré la gloire, vivait ses derniers moments avant un split inévitable…

     

    Sources : « Nightfall in Metal Earth » / « Rock Fever » / « Le Figaro Culture »

     

     

     

  • Vincent Delerm rend hommage aux moments intimes qui font une vie

     

     

    Vincent Delerm publie un nouvel album, « Panorama », accompagné du documentaire « Je ne sais pas si c’est tout le monde » sorti en salle le 23 octobre. L’un et l’autre viennent ajouter une pierre à l’édifice que représente l’œuvre de Vincent Delerm depuis quelques années : un travail intime et sensible, un hommage aux moments modestes de la vie.

     

    Voilà un disque qui tient la promesse que font toutes les chansons : simple, basique, de celles qui aident à se sentir moins seul quand on les écoute. Un des morceaux qui le composent, « Je ne sais pas si c’est tout le monde », a donné son titre au documentaire qui l’accompagne. Cette phrase, on se l’est tous dite un jour, probablement…

     

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    « Je ne sais pas si c’est tout le monde » est aussi le titre du documentaire de Vincent Delerm, sorti en salle mercredi 23 octobre ; un film fait de souvenirs dits, ou lus, par des inconnu·e·s ou des connu·e·s, parmi lesquels on retrouve Jean Rochefort, auquel le film est dédié. Car Vincent Delerm et Jean Rochefort étaient amis, et Rochefort lui a dit vouloir lui offrir la dernière journée de tournage de sa vie. C’est chose faite.

     

    « Cette femme, je l’avais vue des étés entiers. Je savais quel était son geste pour retirer son soutien-gorge, tard le soir… Sa technique pour faire pisser les filles entre deux voitures, sur un parking bondé à Toulon. » (Jean Rochefort)

     

    A la fin du plan, tout le monde a applaudi le bonhomme, son oeuvre, sa vie… Au cinéma ou en chanson, Vincent Delerm livre ses admirations. Il ne se contente pas de les citer, il raconte surtout comment elles entrent dans sa vie. Il y a Raymond Carver, Nick Drake, Alain Souchon. Et dans ce nouvel album, Agnes Varda

     

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    Si Vincent Delerm s’est fait connaître au début des années 2000 avec des chansons écrites comme des scénarios de poche, depuis quelques albums, ses textes sont plutôt faits d’instantanés : rien de spectaculaire, mais des instants furtifs que notre mémoire archive sans qu’on l’ait décidé. Ses chansons rendent hommage aux moments modestes qui font une vie.

     

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    Vincent Delerm s’est imposé une contrainte digne de Georges Perec pour les dix morceaux de ce nouvel album : il en a confié les arrangements à dix artistes différent·e·s. Delerm a écrit les paroles dans un deuxième temps, en s’adaptant aux ambiances inventées par ses acolytes : Clément Ducol et Maxime Le Guil, Peter von Poehl, Keren Ann, Yael Naïm Dan Lévy, ou le groupe belge Girls in Hawaii.

    Dans la chanson « Fernando De Noronha », Delerm parle de son fils aîné. Il écrit comme si l’on suivait le fil de ses pensées à voix haute.

     

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    Pour son premier film, Vincent Delerm prolonge donc son travail ultrasensible sur l’intime, la mémoire et le rapport aux autres. Qu’est-ce qui nous construit ? Que ressentent les gens autour de nous ? Nos émotions et sensations n’appartiennent-elles qu’à nous ?

     

    Chaque personnage, célèbre ou anonyme, livre à Vincent Delerm quelque chose de lui, définissant sa sensibilité et sa manière de voir l’existence. Témoignages qui font sourire parfois, serrent le coeur souvent, conjuguent l’intime et l’universel. En filigrane, les propres émotions de l’auteur se dessinent le long d’un film musical, photographique, dont la narration est comme un fil invisible.

     

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    « Panorama », c’est le titre de son nouvel album, « Je ne sais pas si c’est tout le monde », c’est le titre de son film. Vincent Delerm est en concert à la Cigale à Paris, à la fin du mois d’octobre, au début des mois de novembre et de décembre. Il arpentera ensuite la France en 2020 et son film sera également projeté dans la plupart des villes de sa tournée, au moment de son passage.

     

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    Sources : France Inter / Wikipedia

     

     

     

  • Madonna Vs Mylène

     

     

    Madonna affiche une carrière tellement dense qu’elle aurait pu s’arrêter en pleine gloire, il y a déjà plus d’une quinzaine d’années. Finir en beauté à 45 ans avec son chef d’œuvre, « American Life », et laisser derrière elle une pléthore de tubes, une armée d’amants, un monceau de pouvoir et d’argent. Tout ce qui représente une certaine idée du glamour, pour une femme érigée en idole absolue. Forte, obstinée, talentueuse, perfectionniste et de surcroît… bitch.

     

    Attention, à partir de maintenant, j’avance en terrain miné, avec le risque de me prendre une bonne fatwa de la part de la communauté LGBT… Allez, je me lance… Madonna ne s’est jamais embarrassée d’un quelconque amour propre quant à son originalité intrinsèque et sa capacité à créer du neuf. Elle n’a fait que surfer, certes plus qu’adroitement, sur ce qui flottait dans l’air du temps, voire même d’aller récupérer des concepts underground oubliés, de les remettre au goût du jour et finir par les transformer en hype universelle, comme le « Voguing », cette danse communautaire très codée, inventée dans les « Houses » au tout début des années 80 à New York.

     

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    Neuf ans plus tard, avec des danseurs émérites et le soutien indéfectible de Jean Paul Gaultier, à l’époque lui aussi au top, Madonna impose à la terre entière, sans forcer sa nature, cette façon de danser qui fédérera presque toute la communauté gay au sein de son club d’admirateurs et lui permettra accessoirement d’écouler des millions d’albums. En 1991, le documentaire « In Bed With Madonna » parachève l’oeuvre de grand ratissage, pour séduire toujours plus de gays à travers le monde.

     

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    Madonna poursuit dans cette même direction avec ses albums suivants et pousse les curseurs encore plus à fond, en exploitant à merveille l’imagerie homo tout en usant et abusant de références pointues, entre bondage et SM soft, en passant par les accessoires, la nudité, la gestuelle et les gros mots en concert, dans le seul but de séduire et flatter ce goût pour l’impertinence et l’interdit que tous les gays de la planète cultivent. La vulgarité, comme une délicieuse crème glacée, avec pleins de trucs croustillants dessus…

    Si Madonna est une artiste douée d’un talent certain, elle est de surcroît une femme d’affaires redoutable, dont le seul défaut est probablement de penser qu’elle a encore vingt ans, toujours autant irrésistible, dangereusement exclusive et sulfureuse. Et il n’y aura personne dans son entourage proche pour oser lui signifier qu’à un moment donné, pourtant… Car le temps fait son ouvrage et Madonna, avec ses 60 ans au compteur, s’est transformée ces dernières années en Mado, tenancière de maison close…

     

     

     

    Botoxée, figée, plastifiée, sous blister, la Madone continue aujourd’hui d’exhiber outrageusement son fessier et de se trémousser dans le cadre de prestations scéniques toujours plus embarrassantes. Et cela fait déjà plusieurs albums qu’elle tente de surfer sur les succès de ses rivales, mais le constat n’en est que plus pathétique… Ce qui hier paraissait cool et branché est devenu aujourd’hui peau tendue artificiellement et chagrin.

    Celle qui donna pourtant la vocation à Lady Gaga, Britney Spears, Miley Cyrus, Rihanna, Ariana Grande, en est réduite à tenter de se mesurer à cette armée de poupées luisantes, hyper sexuées et toujours plus jeunes. Et même si Madonna revient aujourd’hui avec un album et une tournée plus intimiste, il y a belle lurette que ses producteurs, musiciens et songwriters ne lui ont pas offert un tube en or massif, du niveau de « Vogue », « Justify My Love », « Frozen » ou encore « Open Your Heart », pour ne citer que ceux-là…

     

     

     

    Mylène Farmer, de son côté, est une exclusivité bien française et accessoirement, elle aussi, l’égérie de nos gays hexagonaux, que l’on retrouve plutôt dans des secteurs socio-professionnels tels que coiffure, coloriste et tout ce qui se rattache plus généralement au monde du maquillage. Mylène Farmer serait en quelque sorte la Madonna du pauvre, comme une cousine de province montée à Paris… Biiim ! Deuxième fatwa sur ma tronche !

    Même si ses chansons fleurent bien la mélancolie surannée, qui pourrait être liée à une adolescence entière passée en chambre de bonne à Cholet, avec toilettes sur le palier, lors de ses concerts, on a la nette impression que Mylène a toujours un peu louché sur ce que Madonna présentait, et il faut bien le reconnaître, avec nettement plus de hauteur et de professionnalisme au crédit de l’Américaine.

    Et malgré une armée de danseurs et une profusion d’effets pyrotechniques sur scène, avec costumes et câbles de remorquage en acier tressé pour léviter dans les airs, les chansons proposées par notre Mylène nationale semblent toujours sorties d’un autre âge, mal arrangées, assorties de beats incertains et de vagues mélodies technoïdes qui sonnent comme ce que l’on peut entendre sur les attractions de fêtes foraines.

    Mylène Farmer ou la Sabine Paturel en version « Darkly »…

     

     

     

  • 1979, l’année qui changea le monde, Episode 04 : « Sugarhill Gang »

     

    [kleo_pin type= »circle » left= »yes » right= » » top= » » bottom= » »]          « FOCUS » : un article de fond sur un thème que nos rédacteurs ont sélectionné.

     

     

    L’année 1979 est définitivement une année-charnière, comme la fin d’un cycle. Elle scelle le sort des dernières utopies. Le monde prend une pelle et enterre à la hâte les cadavres encore fumants de nos illusions perdues. Après 1979, rien ne sera plus vraiment comme avant…

     

    Coincée à la fin d’une décennie qui paraît un peu creuse, durant laquelle les dirigeants politiques semblent manquer de charisme (le pâle Carter face au cowboy médiatique Reagan, VGE après De Gaulle et Pompidou), l’année 1979 n’attire décidément pas les flashes. Et pourtant… Que d’événements considérables ont eu lieu cette année-là, autant de tremblements qui ont marqué la face du monde et dont on ressent encore les répliques quarante ans plus tard.

    Révolution iranienne, arrivée de Saddam Hussein au pouvoir en Irak, début de la Guerre d’Afghanistan qui mènera à la chute de l’URSS et à l’apparition du terrorisme islamiste, second choc pétrolier et crise économique mondiale, paix entre Israël et l’Egypte, fin des Khmers Rouges… Il n’est pas insensé de penser que 1979 a en réalité été l’année la plus importante de l’après-Seconde Guerre Mondiale.

     

    Sorti en 1979, le tube « Rapper’s Delight » de Sugarhill Gang fut le premier tube de l’histoire du rap. Alors coup de génie ou imposture ? Peut-être un peu des deux, mon capitaine…

     

    C’est à eux que le hip-hop doit son immense popularité aujourd’hui. Bien avant que Jay-Z, Snoop Dogg et Kanye West ne débarquent dans nos vies… Et quand, il y a quarante ans, en 1979, ils ont eu la brillante idée d’enregistrer le morceau « Rapper’s Delight », le premier succès rap de l’histoire, The Sugarhill Gang ne se doutait pas une seule seconde qu’il allait propulser le hip-hop, alors un mouvement éphémère local, au rang de phénomène culturel mondial. « J’aurais jamais cru que ça prendrait de telles proportions. À l’époque, on nous décourageait de faire du hip-hop, personne ne respectait ça », explique à l’Agence France-Presse Grandmaster Caz. Ce pionnier est l’un des co-auteurs de « Rapper’s Delight », même s’il n’a jamais été officiellement crédité pour ses paroles.

    Sorti en 1979, ce morceau s’est inscrit dans l’histoire comme le premier tube de rap, permettant au monde entier de découvrir un genre musical nouveau. Surtout, il a permis de graver dans le vinyle cette musique née dans les « block parties » du quartier new-yorkais du South Bronx. « Avoir enregistré en studio est la chose la plus intelligente qu’on pouvait faire pour le hip-hop », se remémore pour l’Agence France-Presse Master Gee, l’un des trois rappeurs de The Sugarhill Gang, interviewé au cours de l’inauguration d’un musée à Washington en janvier. « Commercialement, on était les premiers. C’est comme si on avait marché sur la Lune », explique le rappeur, âgé aujourd’hui de 57 ans.

     

    Tout commence le 6 mars 1979, dans un loft de Manhattan…

    Le soir de son anniversaire, Sylvia Robinson, chanteuse et productrice noire américaine de R’n’B, découvre une musique dont elle ignorait jusqu’à l’existence : le Rap. A cette époque, l’Amérique danse sur les tubes disco de Donna Summer et le Royaume-Uni ne jure que par le « Post Punk » de Police, The Clash ou The Cure. Les rappeurs, eux, se produisent depuis une décennie sur les trottoirs du Bronx et de Harlem, mais personne n’a encore songé à capturer leurs sons. En vingt-quatre heures, flairant le gros coup, Sylvia va monter son label, Sugar Hill Records, et réunir dans un studio trois rappeurs inconnus. Le groupe, baptisé « The Sugarhill Gang », enregistre sur-le-champ une chanson, « Rapper’s Delight », qui deviendra le plus grand tube de l’histoire du rap (15 millions de singles vendus en quinze ans) et lancera cette musique dans le monde entier.

    Retour sur cette nuit de mars 1979 où Sylvia reçoit « un coup de poing en pleine figure ». Ce soir-là, les DJ font scratcher sur les platines les riffs de James Brown. Portés par ces tempos endiablés, des rappeurs prennent tour à tour le micro, improvisant des joutes verbales saccadées. « Ils ont créé l’ambiance extatique d’un choeur de gospel, raconte-t-elle, mais leurs rythmes étaient imprégnés de groove, de blues et de jazz. La foule répondait, chantant aussi énergiquement qu’elle dansait sur le beat ». En rentrant chez elle, Sylvia compose un morceau dont la mélodie, simple mais poignante, s’appuie sur la ligne de basse du célèbre « Good Times » de Chic. Reste à trouver des interprètes…

     

    Mais Sylvia ne connaît aucun rappeur…

    « A l’époque, j’avais 16 ans, se rappelle son fils, Joe Robinson. Je connaissais une pizzeria où travaillait un certain Big Bank Hank, 21 ans, pizzaiolo le jour, rappeur la nuit. J’ai immédiatement emmené ma mère l’auditionner ». Enthousiaste, Big Bank chasse ses clients, ferme sa devanture et commence à rapper dans la voiture de Sylvia. Sur le trottoir, Master Gee, 16 ans, les entend et se lance dans un duel vocal avec Big Bank. Sur ce débarque un troisième rappeur, Wonder Mike, 21 ans. La productrice les conduit dans un studio et recrute six musiciens supplémentaires. Les neuf ne s’étaient jamais rencontrés avant. Le temps d’écouter la composition de Sylvia, et Master Gee attaque : « I said a hip hop the hippie the hippie to the hip hip hop, a you don’t stop… ». Wonder Mike prend le relais : « See, I am Wonder Mike and I like to say hello: to the Black, to the White, the Red and the Brown… ». Les autres enchaînent. Une seule prise suffit : quinze minutes de rap improvisé jusqu’à l’épuisement sur une musique Funky.

    Une semaine plus tard, le single fait un carton. « Tout le monde se demandait d’où venait cette musique étrange : une suite d’onomatopées, de flashs sonores et de mots destinés à frapper l’auditeur », se remémore Joe, qui, depuis 1985, est devenu un membre du groupe. Le public était envoûté et les mots « Rap » et « Hip-Hop » ont envahi le circuit commercial. « Rapper’s Delight » devient ainsi l’hymne du Rap et déferle sur les pistes de danse.

    Toutefois, son accueil dans les milieux du Bronx est moins chaleureux : un soir, un DJ de New York passe le tube dans un club et se retrouve avec un pistolet pointé sur la tempe. « Je te fais exploser la cervelle si tu ne jettes pas cette merde à la poubelle ! », menace ce puriste de la vieille école. Pour lui, Sugarhill Gang ne représente pas l’esprit des pionniers et diffuse des rimes sans contenu. Bambaataa ira jusqu’à dire que cette formation de Noirs se prostitue en imitant les niaiseries des Blancs. Et pourtant, un an après la sortie de ce tube, la première émission radiophonique de rap, « Mr Magic’s Rap Attack », annonce au monde l’arrivée d’un nouveau courant musical…

     

    D’une musique pour draguer les filles…

    « Rapper’s Delight » s’est donc vendu à des millions d’exemplaires à travers le monde et a même eu l’honneur d’être introduit en 2011 à la très prestigieuse Bibliothèque du Congrès à Washington. C’est à quelques minutes de là que s’est ouvert début 2019 un musée éphémère du Hip-Hop, où étaient exposés plusieurs centaines de micros dédicacés, disques de platines, produits dérivés, posters… La parfaite représentation de quarante ans d’histoire, dont les trois acolytes Hen Dogg (décédé depuis), Wonder Mike et Master Gee sont à l’origine. Loin de lui, pourtant, l’idée de marquer la musique quand Master Gee se met derrière un micro à la fin des années 1970. « Je voulais juste avoir un rencard avec une fille ! » rigole-t-il. « J’étais au lycée, je rappais à des fêtes de mon quartier. Je voulais juste me décrire pour m’assurer que les gens sachent qui j’étais ».

    À l’époque, le Hip-Hop est une culture balbutiante dont le Rap est l’expression musicale et qui tourne autour de quatre éléments : la danse, le graffiti, le « MCing » (la manière de rapper) et le « DJing » (la maîtrise des platines). Pour enregistrer « Rapper’s Delight », The Sugarhill Gang se paie donc le luxe de reprendre la célèbre ligne de basse de « Good Times », le tube du groupe de disco Chic, également utilisée en 1980 par Queen dans « Another One Bites the Dust ». « Avant de rapper, j’étais un DJ et le disco était à la mode à l’époque. Il y avait le funk avec des artistes comme Parliament-Funkadelic, Nile Rodgers… On prenait des éléments dans toutes les musiques autour de nous », explique Master Gee.

     

    … à l’émergence d’un rap « conscient »

    À ses débuts, le rap est festif et aborde des thèmes légers, comme la fête, la drague et l’amour de cette musique, médium utilisé par une minorité noire et discriminée pour s’exprimer. « C’était une libération, un nouveau moyen marrant de s’exprimer », rembobine Grandmaster Caz, qui, du haut de ses 57 ans, continue d’arborer avec fierté ses chaînes « bling-bling ». Au musée de Washington, Grandmaster Caz et The Sugarhill Gang se sont produits pour un concert « old school » avec un autre précurseur du genre : Melle Mel. Ce dernier faisait partie du groupe Grandmaster Flash and the Furious Five, qui en 1982 a sorti une autre pierre angulaire du rap : « The Message ».

    Ce morceau est le premier à avoir décrit avec réalisme la vie et la pauvreté dans les ghettos. Un style « conscient » qui a profondément marqué cette musique, souvent vue, notamment en France, comme le moyen d’expression des sans-voix. Et encore une fois, la révolution est arrivée par accident. « Je voulais juste faire quelque chose de différent, pour me démarquer des textes de base », se rappelle Melle Mel, âgé également de 57 ans. « Il s’est avéré que c’était du rap conscient, mais je voulais juste changer de style ». Si Melle Mel estime maintenant que leur chanson est « la plus importante de l’histoire du rap », le pari était loin d’être gagné lors de son enregistrement.

     

    « Personne n’y croyait vraiment. Je ne pensais pas que ça allait être un succès populaire, parce que c’était un morceau sérieux. Le hip-hop était une manière de s’échapper. Les gens voulaient s’amuser. »

     

    La recette a pourtant pris : grâce à ce tube, les membres du groupe sont devenus les premiers artistes Rap à être introduits au Rock and Roll Hall of Fame, panthéon du rock et de la musique populaire américaine, en 2007. « Cela a permis de mettre notre musique au niveau où elle devait être : aux côtés de tous les autres grands genres », ajoute Melle Mel. Et même si les nouveaux artistes du moment ne connaissent pas forcément leur nom et leurs tubes, les pionniers restent confiants quant à l’évolution du Rap. « On n’arrête pas ce qui est inéluctable et on ne tue pas ce qui est immortel. C’est ça le hip-hop », sourit Master Gee.

     

    [arve url= »https://vimeo.com/157887069″ align= »center » title= »The Sugarhill Gang : « Rapper’s Delight » (1979) » maxwidth= »891″ /]

     

    [arve url= »https://vimeo.com/182059976″ align= »center » title= »Sugarhill Gang Interview (2016) » maxwidth= »900″ /]

     

    Sources : Le Point / L’ExpressTélérama

     

     

     

  • Philippe Cohen Solal : La naïveté de croire

     

     

    « Il n’y a pas de stratégie, et encore moins de recettes marketing. J’ai juste la naïveté de croire que si un disque est bon, ça va se savoir. Je compte sur la curiosité de chacun ». C’est ainsi qu’est né au milieu des années 90 le label ¡Ya Basta! Records, « en référence au sous-commandant Marcos, bien-sûr, mais aussi pour dire à la scène tek-house qui commençait à ne faire que se copier : ça suffit, passons à autre chose ».

     

    ¡Ya Basta!, un label de qualité fondé par un artiste éclectique, Philippe Cohen Solal, qui avant d’en arriver là, a déjà accumulé bon nombre d’expériences qui ont façonné la curiosité de cet amoureux de musiques. D’abord réalisateur-programmateur, puis animateur sur les fréquences des radios « libérées », il fut pendant trois ans directeur artistique chez Polydor, avant de s’illustrer au tournant des années 90 avec la première vague électronique française, sur la compilation « Paris Union Recording ».

    Après son expérience « pénible » chez Polydor, il le reconnaîtra plus tard, Philippe Cohen Solal profite de cette courte période de transition professionnelle pour vagabonder, flâner à sa guise. C’est ainsi qu’il découvre un jeune artiste, alors totalement inconnu, qui joue devant les terrasses des cafés parisiens, Keziah Jones. Il produit ensuite un album tek-house, « Bass Academy », un projet finalement avorté, qui l’amène à revenir chez Virgin Sound, « pour éponger les dettes »…

     

    « Je suis devenu producteur et éditeur malgré moi. J’ai trop vu de majors saccager les projets des artistes. Si j’avais pu rencontrer la bonne personne, je n’en serai pas là. Un label, ça prend du temps ». La durée, telle sera l’autre fil inducteur de ¡Ya Basta!…

     

    Mais ¡Ya Basta!, c’est aussi et surtout une histoire d’amitié, symbolisée par un Crew, décliné au fil du temps en de multiples identités : Boyz From Brazil, Stereo Action Unlimited, Fruit Of The Loop… C’est d’ailleurs ce qu’évoque la première compilation du label sortie en 2000, « Rue Martel », qui a connu plus qu’un simple succès d’estime, avec son « Hi-Fi Trumpet » qui a tout du classique, même si Philippe Cohen Solal et Christoph H. Müller, musicien venu de la sphère électronique suisse et son alter ego sur la plupart des projets, l’ont bel et bien couché sur le papier.

    Après une poignée de vinyles et une pelletée de remixes, ils publieront d’ailleurs en cette même année 2000 la suite de leurs aventures, intitulée « The Boyz From Brazil », avant que ces deux sculpteurs de sons redécollent leurs oreilles pour le projet Gotan, initié avec le guitariste Eduardo Makaroff, un Argentin installé de longue date à Paris.

     

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    Avec Gotan Project, direction d’autres cieux, plus mélancoliques, du côté de l’Argentine… Quelques maxis et le premier album « La Revancha del Tango » sorti en 2001 suffisent à imposer sur les pistes noires du monde entier l’improbable succès de cet autre « Nuevo Tango » auquel peu croyait au tout début. Depuis, les trois compères ont creusé leur propre sillon, en donnant une suite au projet originel, de moins en moins électronique, de plus en plus cinématique… Avec à la clef un chapelet de chansons qui s’inspirent des compositeurs les plus emblématiques du style portègne, de celles qui font tout le cachet de l’album studio suivant paru en 2006, « Lunático »…

    Et puis en 2010, un « Tango 3.0 » est venu boucler ce triptyque autour de la rénovation du tango, inscrivant sur l’étendue de la Toile internet cette musique que l’on crut du passé. Dépassée ? Tout le contraire, Gotan Project ose avec cet album des rencontres inédites (entre autres avec le son de la Nouvelle-Orléans et la guitare Surf) au cœur du nouveau millénaire, redonnant au Tango sa définition première : un hybride qui n’en finit plus d’étendre ses connexions.

    Quinze ans pour une kyrielle de maxis et divers remixes, mais juste six disques labellisés ¡Ya Basta!. Dix si l’on ajoute ceux de David Walters, un jeune homme à tout faire tout seul, signé sur le label en 2002, celui de Féloche, un drôle de musicien voyageur qui a mis une décennie à fignoler tel un artisan son premier disque, impur choc des cultures qui le place quelque part entre la Louisiane et la banlieue parisienne, et enfin celui d’El Hijo de la Cumbia, le bad boy du nouveau soundclash made in Buenos Aires.

    Certes, le catalogue affiche peu de sorties. Mais ce choix affirme une cohérence, un label de qualité en ces temps de frénésie discographique. Car moins, c’est souvent mieux. « J’ai toujours voulu sortir peu de disques. Juste les bons. Et me donner les moyens de soigner chaque détail, à commencer par l’artwork et le visuel ». C’est aussi cela la marque de fabrique de ¡Ya Basta!. Chaque pochette, le moindre flyer, tous les clips répondent à une exigence esthétique, à des parti-pris en rupture avec les clichés. Une signature spécifique, celle du regard oblique et élégant de la vidéaste et plasticienne Prisca Lobjoy.

     

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    Le sens de ce nécessaire superflu fit la différence de cette entité qui s’épanouit au moment même où la fameuse French Touch explosait les charts de la planète musique. ¡Ya Basta! en fit partie, mais en électron libre. C’est d’ailleurs outre-Manche que le label obtiendra ses premiers soutiens, les plus fidèles et attentifs à leur univers, que l’on ne peut se résoudre à classer dans un registre bien particulier. « J’ai toujours souhaité inclure des musiques du monde entier, sans jamais chercher à faire des fusions du genre World Music ». Le menu de chaque galette se compose ainsi d’une somme d’ingrédients ajoutés avec parcimonie pour concocter une mixture au goût d’inédit. Entre science et mélodie, pour paraphraser l’appellation de leurs Editions, inspirée de William Orbit.

     

    « Chez ¡Ya Basta!, il y a ce souci permanent de composer, et pas simplement de recycler. Nous, on voulait vraiment créer notre propre univers. Gotan Project n’aurait pu être constitué que de reprises. Nous n’en avons fait que quelques-unes, et à chaque fois, il s’agit de repères, et encore assez flous. » 

     

    A l’image du « Chunga’s Revenge » de Frank Zappa convoqué dans le premier opus de Gotan Project… On trouvera d’autres reprises dans l’album  « The Moonshine Sessions », entre une version imparable d’Abba et une vision improbable des Sex Pistols. Encore une galette préparée avec soin, plusieurs années d’allers et retours, de détours aussi. Du bluegrass trempé dans un drôle d’alambic : un bain de jouvence rétrofuturiste. Le futur, parlons-en justement : « Au lieu de vouloir grossir en signant des projets à tout prix, je préfère me concentrer sur quelques projets auxquels je crois vraiment. J’ai envie d’en faire avant tout mon laboratoire d’idées, sans me prendre la tête. Ce qui ne veut pas dire que je ne suis pas ouvert aux collaborations. Bien au contraire ». D’une référence au mouvement zappatiste à une mise en application de la théorie de la décroissance, ¡Ya Basta! a décidément de la suite dans les idées.

     

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    Aujourd’hui, en marge de Gotan Project, Philippe Cohen Solal continue à cultiver son goût immodéré pour les collaborations, notamment avec La Dame Blanche (Yaité Ramos et Baby Lotion). Ils reprennent ensemble la chanson populaire parigote « A Paris » de Francis Lemarque, dans une version Caliente chantée par la cubaine au cigare, qui arpente les scènes internationales depuis plusieurs années en égrénant son Cuban Trap. Ici, le rythme Cumbia avec accordéon et programmation électronique n’en finit pas de rendre un chaleureux et dansant hommage à Paris.

     

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  • Histoire d’un Hit : « Gaby » d’Alain Bashung (1980)

     

     

    Alain Bashung nous quittait le 14 mars 2009. A l’occasion du 10ème anniversaire de sa disparition, de nombreux hommages à son talent et à l’héritage musical qu’il nous laissait lui sont rendus. Revenons aujourd’hui sur l’histoire de l’un de ses plus grands tubes « Gaby Oh! Gaby », sorti en 1980.

     

    C’est l’histoire d’une chanson qui était vouée à n’être que la face B d’un autre single et qui deviendra pourtant l’un des hymnes du rock français des années 80. « Gaby Oh! Gaby », écrite par Boris Bergman, signe également le début des années-succès pour Alain Bashung, alors âgé de 33 ans, lui qui essayait de percer depuis le milieu des années 60 et son premier single sorti en 1966 chez Barclays, « Pourquoi Rêvez-Vous des Etats-Unis ? ».

     

    Reportage : L. Hakim / N. Berthier / M. Savineau

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    De « Max Amphibie » à « Gaby » et ses blagues

    « Gaby Oh! Gaby » devait d’abord s’appeler « Max Amphibie », en référence à Max Amphoux, éditeur des chansons d’Alain Bashung et de son parolier Boris Bergman. Une première maquette fut enregistrée, que l’on peut découvrir sur le coffret « Alain Bashung, Immortel, l’Intégrale 1977-2018 », sorti à l’occasion des dix ans de la disparition du chanteur. Une version moins rock, plus douce. Et surtout sans les paroles rajoutées au dernier moment par Boris Bergman, au départ pour faire une blague à son complice de toujours.

    « Alors à quoi ça sert la frite si t’as pas les moules ? Ça sert à quoi le cochonnet si t’as pas les boules » : deux phrases désuètes et joliment décalées pour faire rire Bashung, comme une sorte de rituel entre eux. « Moi, je rajoutais toujours des bêtises sur les textes » se souvient Boris Bergman. « D’habitude, il éclatait de rire et on recommençait. Mais là, il s’est marré après. La version qui figure sur le disque est donc la première version enregistrée ».

     

    Nouveau souffle

    Avec ces paroles étonnantes et un son inédit, un souffle nouveau s’était définitivement levé sur le rock français. « Ils ont mélangé une espèce d’argot de musiciens avec de l’argot des banlieues. Le texte est complètement surréaliste. Ça donne quelque chose d’incroyable que l’on n’avait jamais entendu », selon Stéphane Deschamps, auteur de « Alain Bashung, sa belle entreprise » (Ed. Hors Collection).

    Une simple private joke devenue un tube intemporel, et qui a surtout permis à Alain Bashung d’accéder à la notoriété et de continuer sa belle et longue carrière. Quelques mois seulement après la sortie de « Gaby Oh! Gaby », le duo Bergman-Bashung frappait de nouveau un grand coup avec « Vertiges de l’Amour ».

     

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  • The Cure, 40 ans de musique et de laque

     

     

    En mai dernier, le tout premier album de The Cure, « Three Imaginary Boys », fêtait son 40ème anniversaire, avec son ambiance post-Punk minimaliste, sa pochette rose bonbon et ses appareils ménagers.

     

    Pour les fans les plus pointus ou les historiens du rock, la rencontre entre les trois membres fondateurs du futur groupe The Cure, Lol Tolhurst, Michael Dempsey et Robert Smith, qui en deviendra le leader charismatique, remonte à 1976. Après plusieurs formations successives aux doux noms de The Group, The Obelisks, Malice ou encore Easy Cure (on se rapproche…), les trois acolytes finirent par arrêter leur choix sur le nom qui leur permettra de traverser quarante années de musique. S’ensuivent des petits concerts ici et là et c’est finalement en 1978 que celui dont la coupe de cheveux fut copiée plus tard par Tim Burton bombarde les maisons de disques avec une maquette composée des quatre premiers titres originaux de The Cure.

    Chris Parry, l’ex-manager des Jam, directeur artistique chez Polydor, souhaite à l’époque fonder son propre label indépendant (Fiction Records). Il perçoit de suite avec The Cure l’opportunité de concrétiser son projet. Cette histoire d’amour et de fidélité durera jusqu’en 2001. Avec l’avènement du mouvement Punk à la toute fin de cette décennie, The Cure commence à s’inventer en se créant enfin une identité propre, tandis que l’Angleterre rentre dans une crise économique durable, implacable, qui laissera sur le carreau un bon nombre de Britanniques.

    Tandis que les Sex Pistols et surtout The Clash se font les nouveaux chantres de l’opposition à la première ministre Margaret Thatcher et à sa politique d’austérité, The Cure, même s’ils surfent dans un premier temps sur cette vague Punk, vont quant à eux privilégier les contenus plus littéraires et poétiques à la basique contestation politique. Et face au marasme général, Robert Smith, qui écrit tous les textes des chansons du groupe, distille plutôt un spleen romantique tout droit sorti des poèmes de Baudelaire ou d’Edgar Allan Poe.

    Tel un message subliminal, le premier single du groupe, « Killing an Arab », dont le thème est emprunté à un texte d’Albert Camus, offre d’ailleurs une lecture à peine voilée du racisme ambiant qui prévaut en Angleterre durant ces années de profonde mutation. Trois ans après leurs débuts dans la petite ville anglaise de Crawley, The Cure font leur toute première apparition télé en décembre 1979 au Théâtre de l’Empire à Paris, dans le cadre de l’émission « Chorus » d’Antoine de Caunes. On notera le pyjama rose du poupon Robert Smith qui n’avait pas encore adopté le fameux look curiste qu’il arborera ensuite.

     

    [arve url= »https://www.dailymotion.com/video/xn3itu » title= »The Cure, First TV appearance (Paris, Dec. 08, 1979) » description= »The Cure Chorus » align= »center » maxwidth= »900″ loop= »no » muted= »no » /]

     

     

    Entretemps, Robert Smith fera quelques vacations en tant que simple guitariste au sein du groupe Siouxsie and The Banshees. Il en gardera dès lors cet esprit Glam-Rock en version dark (eye liner, rouge à lèvres baveux, tenue de corbeau, cheveux crêpés et fixés avec trois tonnes de laque), qui deviendra dans les années 80 une esthétique à part entière baptisée « Gothique », et la silhouette reconnaissable entre toutes de cet enfant-adulte à la mine narquoise originaire de Crawley dans le Sussex.

    Pour l’adolescent français tout juste sorti de l’enfance, The Cure s’impose ainsi comme une expérience sensorielle, vestimentaire et intellectuelle ; une empreinte qui façonnera durablement son ADN, avec une approche particulière du monde qui l’entoure, cette manière diffuse d’entretenir la flamme d’une éternelle mélancolie et ce grand écart entre réalité et imagination morbide.

    Pour toutes ces raisons, The Cure deviendra le groupe qui sous-tendra le mieux les doutes existentiels qui peuvent naturellement traverser cette période-clé chez l’adolescent, avant qu’il ne devienne un homme, un vrai… ou pas… En recherche permanente de repères et de modèles à singer, le jeune bien souvent en lutte avec l’autorité parentale et le monde qui l’entoure, se choisit alors cette panoplie et la posture qui va avec.

     

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    Et ça n’est pas avec le premier album « Three Imaginary Boys », ni même avec sa réédition agrémentée du premier single et futur classique du groupe, « Boys Don’t Cry », que la métamorphose se produit. Car tout est question de timing… Non, c’est surtout avec la trilogie sortie entre 1980 et 1982, « Seventeen Seconds », « Faith » et « Pornography », (les) trois (meilleurs) albums, peut-être un peu (ou sûrement) sous influence des quatre groupes majeurs de l’époque que sont Joy Division, Sisters of Mercy, Bauhaus et Killing Joke, que The Cure prend véritablement son envol pour devenir le groupe représentatif des errements de cette génération tiraillée entre la musique Punk qu’elle juge un peu trop violente à son goût, du Rock FM lavasse et du Funk joyeux et sautillant.

    Mais les influences et les citations, qu’elles soient en musique, au cinéma ou dans tout autre domaine artistique, sont des volutes et des boucles… Aujourd’hui, rétrospectivement, The Cure doit en effet en partie son son aux groupes cités plus haut, comme inversement d’autres groupes tels que The Smashing Pumpkins, Placebo ou plus récemment The XX se sont par la suite grandement goinfrés des accords et des tonalités du groupe toujours en noir.

    A commencer par ce fameux son de basse utilisé par toutes ces formations, comme un poids, une ombre, une menace latente qui revient sans cesse sur tous leurs morceaux et qui ici est distillé par le guitariste Simon Gallup, comme un poison moelleux ; une gravité, une mélancolie qui vous ensorcelle et qui sera la signature de The Cure pendant plusieurs années. On appellera ce nouveau genre musical la « Cold Wave ».

    Rester dans sa chambre des après-midi d’automne et d’hiver entiers, avec en fond musical « A Forest », « Secrets », « The Hanging Garden » ou « Primary », s’avérait être une expérience immersive assez saisissante. Le son lourd et amniotique qui vous enveloppait, la voix douce et lointaine de Robert Smith, caressante, qui accompagnait ces mélodies lancinantes et dépressives.

     

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    Avec le recul, la filiation entre le premier album « Three Imaginary Boys » sorti en 1979, qui s’inscrivait encore dans cette mouvance post-Punk, et ce que le groupe allait proposer par la suite, ne semblait pas si évidente que cela. Et même si, au premier abord, « Seventeen Seconds » fût difficile d’accès, il finit par trouver son public et ses fans. « Faith », enregistré dans la foulée, poussait plus loin encore les frontières de cet univers musical glacial et déprimant à souhait. Quant au troisième volet de la trilogie, « Pornography », il devait parachever l’oeuvre, avec ses batteries lourdes et martiales, ses textes morbides, cauchemardesques, et toujours ce son de basse qui vous enveloppe autant qu’il vous étrangle. De tous les groupes de l’époque, malgré ses spécificités, The Cure est celui qui va marquer le plus l’inconscient collectif.

    Alors, comme souvent, après une ascension à ce point fulgurante, The Cure va connaître ensuite une période plus décousue. Peut-être que Robert Smith ne souhaite pas non plus être enfermé dans un genre ; probablement pressent-il que ce succès si rapide risque de le condamner pour l’éternité à ces ambiances atmosphériques et quasi expérimentales. Toujours est-il que les fans de la première heure sont assez déconcertés à l’écoute des singles qui vont suivre…

    Tout en voulant goûter de nouveau à d’autres influences, Robert Smith opte pour le tout synthétiseur avec « Let’s Go to Bed », « The Walk » ou encore une heureuse anomalie et le son jazzy barré de « Love Cats ». Nous entrons en effet à ce moment précis en pleine révolution électronique, avec Depeche Mode, Soft Cell, Visage, XTC, New Order, Anne Clark, OMD, Ultravox, The Human League et bien d’autres groupes émergeants de l’époque.

     

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    En 1984, The Cure sort enfin un véritable nouvel album, psychédélique et déroutant : « The Top ». Plusieurs directions et autant de styles abordés. Mais une fois encore, pour les aficionados, cette livraison ne fait pas l’unanimité. Mis à part « The Caterpillar », « Birdmad Girl » ou peut-être « Shake Dog Shake », les autres morceaux du 33 tours nous laissent quelque peu dubitatifs. Le succès est relatif et les critiques musicaux restent sur leur faim. Mais Robert Smith ne se résigne pas et continue à chercher la recette gagnante. Il veut remporter le jackpot avec un album qui plaira au plus grand nombre.

    Deux ans plus tard, l’album « The Head On The Door » et ses tubes planétaires « In Between Days » et « Close To Me » déferlent sur toutes les radios. A l’heure du tout clip vidéo, chaque chanteur, chaque groupe, se doit d’avoir son clip pour illustrer et soutenir les ventes de disques. Celui réalisé pour « In Between Days » va marquer les esprits durablement. Le réalisateur Tim Pope deviendra d’ailleurs le directeur artistique attitré du groupe, affichant une liste impressionnante de clips produits entre 1982 et 1997. Dépositaire du style, il saura parfaitement retranscrire en image l’esprit de The Cure, comme une marque déposée doublée d’un concept fort.

     

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    The Cure entre ainsi dans la cour des grands. On les voit partout, en particulier en France, jusque chez Michel Drucker le samedi soir dans son émission de variétés Champs Elysées. Un succès cependant à double tranchant, car les fans de la première heure ne s’y reconnaissent plus du tout ; ce qui faisait le sel du groupe, son identité… Et ils n’aiment pas cette façon qu’a Robert Smith de se diluer pour essayer de plaire au plus grand nombre. The Cure perd certes une partie de ses fans parmi les plus radicaux, mais en conquiert quatre fois plus par ailleurs. The Cure devient mondialement connu…

    Là encore, l’album « The Head On The Door » n’est pas désagréable et l’on y retrouve parfois un peu de l’esprit sombre et dépressif des débuts, avec notamment deux morceaux, « A Night Like This » et « Sinking » qui clôt l’album. Mais les deux véritables tubes n’ont quant à eux rien de déprimant, et c’est probablement pour cette raison qu’ils deviennent de tels monuments. Ils s’inscrivent plutôt dans un registre Pop-Folk et même si les textes ne sont pas très portés sur la gaudriole, on sent que le divorce est désormais consommé avec leur première période musicale.

    Fort de cet énorme succès, The Cure publie son septième opus en 1987, « Kiss Me Kiss Me Kiss Me », un double album qui propulse définitivement le groupe en orbite, en se voulant encore plus gros et plus fort que le précédent, qui avait pourtant ouvert la voie à tous les records… Mais cette fois-ci, cette nouvelle salve de chansons fait l’effet d’un gavage d’oie. Les concerts qui vont suivre la sortie des deux singles qui seront eux aussi des tubes (« Why Can’t I Be You » et « Just Like Heaven », un morceau intégralement instrumental) se joueront cette fois dans des stades, à l’instar de Depeche Mode, INXS ou U2, ces groupes qui cartonnent à la fin de ces années 80.

     

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    The Cure est au firmament, à son apogée, en proposant une musique plus variée que jamais ; un son Rock et Folk qui enterre définitivement les ambiances Cold Wave des débuts. Pourtant, en 1989, prenant tout le monde à revers et surtout les fans de la première heure qui n’y croyaient plus, arrive « Disintegration ». De tous les albums confondus, Robert Smith tient enfin son chef d’œuvre absolu… Le disque qui réconcilie les anciennes et les nouvelles influences. Un album dense, puissant, sombre et magnifique, où chaque morceau est un diamant noir ciselé, aux multiples facettes.

    Sous ses abords rutilants de magnifique production promise au succès facile, se cachent dans « Disintegration », en deuxième écoute, des mélodies entêtantes et précieuses. Et hormis les tubes que l’on entend sans cesse sur les ondes (« Lullaby », « Fascination Street » et « Lovesong »), toutes les chansons s’avèrent essentielles à cet édifice grandiose, qui forme une cathédrale élevée à la gloire de Robert Smith et de la contre-culture. L’album dont rêvaient tous les admirateurs depuis « Pornography ». On retrouve d’ailleurs ce son lourd et ces guitares qui pleurent, comme la pluie battante.

    En cette année 1989 qui marque l’avènement des sons électroniques et de l’Acid House, il faut reconnaître que le pari de prendre le contre-pied des tendances émergeantes en revenant ainsi à ses fondamentaux, après dix années d’exposition et de succès, pouvait paraître quelque peu osé. Mais le pari de reprendre l’expérience Cold Wave laissée en friche sept ans plus tôt s’avère payant, car écouter à fond les douze morceaux qui composent « Disintegration », c’est sentir un vent puissant et mélancolique souffler dans les cheveux. Nous revoilà donc adolescents…

     

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    L’album qui suivra en 1992, « Wish », semble vouloir garder le même cap que son prédécesseur. Les dix morceaux qui le composent sont cependant moins inspirés et on sent bien que Robert Smith peine à réitérer le même exploit. Nous rêvions tous en secret d’une nouvelle trilogie mais le miracle n’aura pas lieu. Certes, « High » ressortira de l’ensemble mais hélas, le reste évoque plus le pot pourri que le disque qui marquera les esprits. Même si « Wish » est à ce jour, en terme de ventes, le plus gros succès national et international de The Cure, en se plaçant pour la toute première fois de l’histoire du groupe numéro 1 des charts en Angleterre, la fée de l’inspiration semble cette fois-ci bel et bien envolée…

    « Wild Mood Swings », le nouvel album qui sort quatre ans plus tard ne parviendra pas non plus à nous réveiller de notre profonde léthargie. Après des tensions au sein du groupe, des procès et des portes qui claquent, Robert Smith tente d’intégrer d’autres musiciens à ce nouveau projet. Le résultat final n’est que chansons banales, rythme général décousu, sans aucune ligne réelle qui pourrait donner de la cohérence à l’ensemble.

    En 2000, Robert Smith, toujours accroché à la barre du vaisseau contre vents et marées, sort « Bloodflowers » et tente une nouvelle fois de rééditer le miracle « Disintegration ». C’est peine perdue. L’album s’écoute sans que l’on ne retienne un seul des morceaux qui le composent. Il en ressort une énième redite paresseuse et l’on ne croit plus à cette mélancolie d’adolescent blafard ; indigeste et tout au plus bourratif.

    On aurait pu penser avec l’album éponyme « The Cure » sorti en 2004 qu’enfin, les compteurs allaient être remis à zéro et que nous allions assister à une vraie renaissance. Robert Smith & Co nous proposent cette fois-ci un album plus sec, moins produit et plus rock. Des riffs de guitare tonitruants pour des chansons paradoxalement sans véritable force… On n’y ressent ni la ferveur d’antan, ni le renouveau escompté, voire espéré. C’est comme si le logiciel « The Cure » avait été installé dans votre esprit et qu’il devait désormais en théorie façonner à l’infini les mêmes morceaux, même si dans la pratique, on s’éloignait de plus en plus de l’univers originel du groupe.

    Le dernier album paru à ce jour s’intitule « 4 :13 Dream ». Nous sommes en 2008, à savoir presque trente ans après la sortie de la graine originelle, « Three Imaginary Boys ». Tout ce qui pouvait nous ramener à ce qu’était The Cure vingt ans plus tôt n’est plus que vain espoir. On cherche sur chacun des morceaux ce qui pourrait ressembler à du Cure d’avant, neuf et débarrassé de tous les tics encombrants.

    Et pour la première fois, il faut se rendre à l’évidence : il est difficilement envisageable de parvenir à écouter les treize morceaux d’une seule traite, tant l’expérience est douloureuse pour les oreilles. Pathétiques ritournelles qui semblent encore avoir été créées par des algorithmes piochant ici et là dans la discographie du groupe, entre envolées pop, solos de guitare reconnaissables ou encore la façon de chanter de son leader. Tout sonne faux. Tout tourne à vide.

    Au point que certains en oublient que Robert Smith est un grand guitariste et un immense artiste, probablement un des musiciens parmi les plus influents du 20ème Siècle, qui a aussi consacré des Debussy, Rachmaninov, Ravel, Satie, Messiaen, Chostakovitch, Prokofiev, Bernstein, Riley, Cage, Villa-lobos, Morricone et bien d’autres encore. Conféré son passage télé chez Ardisson en juillet 2003, quand une bande d’idiots semblent ne pas avoir conscience qu’ils sont face à un artiste majeur, à l’immense culture et à la sensibilité exacerbée. On peut comprendre que Smith ait souvent fui les plateaux télé pour privilégier la scène, là où tout est vrai…

     

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    Depuis 2009, The Cure, réduit désormais à trois membres, se contente donc d’écumer les festivals à travers le monde. Sa popularité est pourtant restée intacte, malgré les errements artistiques des vingt dernières années. Robert Smith se cantonne à reprendre indéfiniment ses standards, en surfant depuis dix ans sur la vague de la nostalgie en tube. Tous les vieux dinosaures n’ont d’ailleurs jamais autant tourné dans ces festivals. Et chaque année, on ressort de son bocal telle ou telle célébrité d’un autre siècle…

    Quel étrange paradoxe, qui d’un côté montre l’accélération exponentielle de la technologie et des rapports froids et déshumanisés qui l’illustrent, et de l’autre, inversement, cette course effrénée à la nostalgie et au passéisme, où l’on n’a de cesse que de convoquer les fantômes et divers motifs d’antan. Que ce soit pour la musique ou pour le cinéma, du reste… Toutes ces vieilles badernes ont décidément encore de beaux jours devant elles, à ressasser leurs vieux titres ou se contenter comme Depeche Mode de continuer à enregistrer des disques ineptes, tandis que leurs concerts ne reposent pratiquement plus que sur leurs gloires passées.

    Alors, dans un futur plus ou moins proche, Robert Smith tentera-t-il une nouvelle fois de franchir le Rubicon en poussant la porte d’un studio d’enregistrement. ll sait au fond de lui que malgré l’érosion du temps, l’attente est restée intacte, pour les vieux fans de la première heure que nous sommes restés, qui passent toujours en boucle chez eux les morceaux qui ont tant compté pour eux, quand ils avaient 13 ans, qu’ils étaient dans leur chambre et qu’il pleuvait dehors…

     

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  • Strip Steve : En toute discrétion

     

     

    Derrière « Strip Steve » se cache un jeune Dj producteur d’origine bordelaise, Théo Pozoga. Expatrié à Berlin et affilié depuis ses débuts au label Boysnoize Records, l’artiste français cultive la rareté et la discrétion en ne nous distillant avec parcimonie que quelques productions chaque année.

     

    Tout porte à croire que Strip Steve n’est pas Français… Il vit à Berlin, signe quasiment toutes ses productions sur la plateforme de Boys Noize Records et en reste l’un des solides piliers. Sa house intelligente (qui a pris le pas sur ses premières productions de 2007 qui lorgnaient plutôt sur l’electro) revêt aujourd’hui les mêmes couleurs que celles du label suédois Local Talk et il peut ainsi arriver que le garçon fasse quelques incursions plus au Nord, en s’éloignant de la mère-patrie allemande, comme pour sa collaboration en 2016 avec l’artiste Librarian et sa nouvelle chapelle Made in Danemark, Waxtefacts (Straydogpalace, Real D, Interstate, DJ Storch), dont Strip Steve est l’un des parrains.

     

     

     

    Et pourtant, Théo Pozoga vient bien de Bordeaux. Artiste rare et confidentiel, si Strip Steve n’est pas sur toutes les lèvres, c’est qu’il ne le souhaite pas, se limitant à une ou deux releases maximum par an – toujours impeccables, soit dit en passant. Ce qui ne l’empêche pas de balancer des remixes, des mixes ou des tracks de temps à autre, ou d’avoir des projets annexes comme son duo avec SCNTST, 2 High.

     

     

     

    Strip Steve sort son premier Ep en 2007 sur le label berlinois Boysnoize Records, « Skip School Ep », et nous distille depuis sa house punchy et brillante, inspirée tant du hip-hop ou de la soul que du bon vieux son à l’ancienne de Chicago. Deep house mélancolique et harmonieuse, EQ réglé sur « Vintage » et volonté limpide de ne pas livrer ce que l’on attend de la house music. La formule Strip Steve marche toujours…

     

    https://soundcloud.com/trax-magazine/strip-steve-cause-its-cold-outside

     

     

    Découvrons maintenant (ou redécouvrons) le clip de son titre « Hood », extrait de l’album  « Micro Mega » sorti en 2012.

    Attention, tuerie absolue…

     

     

     

    Et pour ne pas nous quitter comme ça, retrouvons Strip Steve en 2014 à la Boiler Room Berlin pour un Dj Set marqué au sceau de l’Europe (vous comprendrez…)

     

    [youtube id= »U32bhGj5aQU » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Liens externes » class= » » id= » »]

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Boysnoize Records

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Strip Steve @ Discogs

    [kleo_icon icon= »link » icon_size= »large »] Strip Steve @ Soundcloud

     

     

     

  • 1979, l’année qui changea le monde, Episode 02 : London Calling

     

    [kleo_pin type= »circle » left= »yes » right= » » top= » » bottom= » »]          « FOCUS » : un article de fond sur un thème que nos rédacteurs ont sélectionné.

     

     

    L’année 1979 est définitivement une année-charnière, comme la fin d’un cycle. Elle scelle le sort des dernières utopies. Le monde prend une pelle et enterre à la hâte les cadavres encore fumants de nos illusions perdues. Après 1979, rien ne sera plus vraiment comme avant…

     

    Coincée à la fin d’une décennie qui paraît un peu creuse, durant laquelle les dirigeants politiques semblent manquer de charisme (le pâle Carter face au cowboy médiatique Reagan, VGE après De Gaulle et Pompidou), l’année 1979 n’attire décidément pas les flashes. Et pourtant… Que d’événements considérables ont eu lieu cette année-là, autant de tremblements qui ont marqué la face du monde et dont on ressent encore les répliques quarante ans plus tard.

    Révolution iranienne, arrivée de Saddam Hussein au pouvoir en Irak, début de la Guerre d’Afghanistan qui mènera à la chute de l’URSS et à l’apparition du terrorisme islamiste, second choc pétrolier et crise économique mondiale, paix entre Israël et l’Egypte, fin des Khmers Rouges… Il n’est pas insensé de penser que 1979 a en réalité été l’année la plus importante de l’après-Seconde Guerre Mondiale.

     

    Never Mind The People

    Du côté de l’Angleterre, l’arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher en mai 1979 laisse présager des lendemains bien douloureux. Le pays se débat en effet dans une crise économique et sociale terrible, ultime convulsion d’un monde en pleine mutation. Les usines et les mines de charbon ferment les unes après les autres, laissant sur le bord de la route deux générations de Britanniques, condamnés au chômage de masse et à une inéluctable paupérisation.

    « L’hiver du mécontentement », le roman de Thomas B. Reverdy, dont le nom a figuré sur la liste du Goncourt en 2015, a pour cadre cette Grande-Bretagne de 1978-1979, paralysée par des grèves monstrueuses qui vont finir par propulser à la tête du gouvernement une inconnue, Margaret Thatcher, femme inflexible.

    Le pays entre dans une nouvelle ère, celle des jeunes loups aux dents aiguisées, bientôt connectés à l’ensemble de la planète, sans morale, sans dieu, vénérant le fric plus que leur propre mère. Ils préparent la grande révolution à venir, celle qui n’a pas besoin de grand soir, de rêves romantiques, d’idéaux en stuc… Ils veulent prendre les commandes de la City, devenir banquiers, actionnaires, hommes d’affaires, assureurs, courtiers, avocats fiscalistes… Et les ouvriers qui crèvent dans leurs bâtiments de briques insalubres, ils s’en foutent, à vrai dire…

     

    « Le reste, on va le liquider. Privatisations, faillites en série, licenciements massifs. Ce sera les grands soldes d’hiver, avant changement de collection (…). Les chômeurs seront de plus en plus nombreux. Mais au moins, ils seront de droite. »

     

    C’est dans ce contexte que sort l’album « London Calling » des Clash  : un album dont la chanson-titre est un appel à la révolte des laissés-pour-compte dans une Angleterre qui a vu le rock devenir punk dans la foulée des tensions sociales. Quarante ans après, l’hymne punk « London Calling » fait partie de la légende du rock.

     

    Punk, la musique de la colère

    Les Beatles sont séparés depuis moins de dix ans et l’époque du Peace & Love et des bed-in semble désormais bien lointaine. La situation économique et sociale a fait surgir de nulle part le Punk, la musique du désespoir et de la colère portée telle un étendard par des groupes comme les Sex Pistols. « Le mouvement punk arrive. C’est un grand coup de pied dans la fourmilière. On ne sait pas bien jouer mais on a une énergie… On va vous montrer. On est là pour défoncer la porte et c’est ce que l’on va faire. » (Alain Lahana, producteur de festivals)

    Et puis un jour de décembre 1979 explose sur les ondes le titre « London Calling ». Un appel à la résistance qui ramène les Anglais quarante ans en arrière, quand ils écoutaient Radio Londres. Un hymne subversif signé The Clash, un groupe punk né en 1976 dans la banlieue londonienne de Ladbroke Grove, sous l’impulsion du duo Joe Strummer et Mick Jones, tous deux à la guitare et au chant.

    Avec ce troisième album studio, The Clash nous livre un instantané saisissant de l’époque et un chef-d’œuvre qui marquera l’histoire de la musique en devenant l’un des meilleurs albums de rock de tous les temps. « London Calling » est un mélange de styles musicaux extrêmement convaincant, animé par une passion pour l’action et un désir féroce de justice sociale, hurlant des paroles qui restent finalement très actuelles.

     

    « London calling to the faraway towns
    Now war is declared, and battle come down
    London calling to the underworld
    Come out of the cupboard, you boys and girls
    London calling, now don’t look to us. » 

     

    Le premier couplet est sans équivoque :

    « L’appel de Londres aux villes lointaines
    Maintenant la guerre est déclarée et la bataille approche
    L’appel de Londres au monde souterrain
    Sortez du placard, vous tous garçons et filles. » 

     

    Et les icônes en prennent un coup…

    « Phoney Beatlemania has bitten the dust » 
    « Toute cette Beatlemania bidon a mordu la poussière »

     

    Le regard sur le monde est désabusé, sans illusion :

    « The ice age is coming, the sun’s zooming in
    Engines stop running, the wheat is growing thin
    A nuclear error, but I have no fear
    ‘Cause London is drowning, and I live by the river. »

    « L’âge de glace arrive, le soleil se rapproche de plus en plus
    Les machines s’arrêtent, les récoltes de blé sont maigres
    Une erreur nucléaire, mais je n’ai pas peur
    Car Londres est en train se noyer et je vis près de la Tamise. »

     

    L’album « London Calling », The Clash l’ont voulu double mais vendu au prix d’un simple, avec déjà dans l’idée d’en faire tant un manifeste social qu’un appel à la résistance. Et sa pochette reprend la police de caractères et la mise en page du premier album d’Elvis Presley sorti 23 ans plus tôt. Déjà 23 ans… Juste 23 ans, on ne sait plus bien comment le dire. En tout cas, les deux covers semblent vouloir exprimer la même énergie et la même rage, entre un Paul Simonon fracassant sa basse sur scène et Presley qui fait souffler avec son album un vent délibérément nouveau sur la musique américaine. Le monde change, de plus en plus vite…

     

     

     

    « Ils se permettent de dire : on vient de là mais on le réinterprète et on a le droit de faire ce qu’on veut. C’est une manière de dire on vous emmerde ! » (Manuel Rabasse, auteur de « Anarchy in the UK » publié aux Editions Camion Blanc)

     

    The Clash ont gravé dans le marbre de la légende du rock un hymne punk qui a secoué le monde bien au-delà des frontières de la vieille Angleterre. Le magazine Rolling Stone a d’ailleurs classé « London Calling » à la 8ème place dans la longue liste des 500 plus grands albums de tous les temps. Avant leur séparation en 1986, Joe Strummer et ses acolytes nous livreront encore deux monuments, « Should I stay or Should I Go? » et « Rock The Casbah ».

     

    [youtube id= »EfK-WX2pa8c » align= »center » mode= »normal » maxwidth= »900px »]

     

     

    « London Calling » fête donc ses quarante ans, et c’est l’occasion rêvée pour rendre hommage à l’album culte de The Clash, avec une exposition événement dans la capitale britannique.

     

    Le carnet d’un tout jeune Joe Strummer, sa machine à écrire, la basse cassée par Paul Simonon sur la scène du Palladium à New York, le brouillon des paroles de « London Calling », les baguettes de Topper Headon, des tenues portées sur scène, des photos, des films… Du 15 novembre 2019 au printemps 2020, le Museum of London accueillera une exposition gratuite consacrée à l’une des figures de proue du mouvement Punk outre-Manche.

    Le mythique troisième album de The Clash « London Calling » a eu, dès sa sortie le 14 décembre 1979, un impact déterminant. « Un cri de ralliement pour les Londoniens et à travers le monde. Les paroles de l’album reflètent les problématiques de l’époque, dont beaucoup sont encore d’actualité », affirme Beatrice Behlen, conservatrice principale du département Mode et Arts Décoratifs du Museum of London. Une contemporanéité renforcée par l’émancipation du Punk « traditionnel » pour des influences musicales plus diverses.

    Un livre célébrera également l’anniversaire de l’album. Les fans y trouveront des reproductions de manuscrits, des photos et du contenu inédit… à feuilleter avec la réédition de « London Calling » en CD incluse. Et les plus nostalgiques ont jusqu’au 11 octobre pour explorer leur grenier à la recherche de leur bon vieux magnétophone, afin de profiter de la réédition de l’album sur cassette (également disponible en CD et vinyle).

     

    Sources : eil.com / Wikipedia / Causeur

     

     

     

  • Amelie Lens, Belle et Rebelle

     

     

    Amelie Lens est une DJ et productrice de musique électronique belge. Ancienne mannequin, notre belle née à Vilvoorde en 1990 n’a pas perdu de temps pour se faire un nom et devenir en quelques années une icône de la scène Techno actuelle. Respectée par ses pairs et applaudie aux quatre coins du monde pour ses DJ sets puissants et durs, la jeune flamande n’en est pourtant qu’au début de sa carrière, qui promet déjà d’être tout bonnement colossale.

     

    Physique androgyne, visage aux traits angéliques, silhouette longiligne, Amelie Lens interpelle. Et au premier abord, on s’attend effectivement plus à trouver la jolie brune sur un podium de mode que derrière les platines. Mais dès la première écoute de ses sets, nous comprenons rapidement que la DJ n’est pas là que pour le décor, tant elle envoie une techno brute, puissante, acide et qui déménage vraiment.

    Amelie Lens incarne cette nouvelle scène féminine underground, à l’instar des Charlotte de Witte, Justine Perry ou encore Deborah de Luca. Elle offre un son authentique, brut, cru, qui démonte tous les clichés en emportant son public dans un monde parallèle qui le déconnecte de toute réalité. C’est une musique hors du temps, on perd la notion d’espace, on est centré sur le moment même. C’est probablement pour toutes ces raisons que les tracks d’Amelie nous embarquent à ce point.

    Il y a là une dimension presque ésotérique. Elle fait voyager ses fans entre basses lourdes, mélodies qui encerclent le tempo et qui n’ont de cesse que de jouer aux montagnes russes. Il se produit alors quelque chose d’impalpable et d’indéfinissable avec sa musique, dont on ressent les effets sur le corps comme sur les battements du coeur, et qui vous laisse le souvenir d’un voyage qui aurait suspendu le temps.

     

    La trajectoire fulgurante d’Amelie Lens

    Née le 31 mai 1990 à Vilvoorde en Belgique, Amelie Lens ressent très tôt une véritable passion pour la musique électronique. Mais c’est à l’âge de 15 ans que la jeune mannequin découvre la Techno, lors d’un set au Festival de Dour, un moment très fort qui va la destiner à un avenir bien différent de celui qui lui était promis. La musique va désormais devenir sa raison d’être. Depuis cette révélation, Amelie Lens n’a eu de cesse que de se bâtir une notoriété internationale significative, la propulsant en quelques années d’un relatif anonymat au statut de DJ et producteur qu’on s’arrache partout dans le monde. Elle a de surcroit fondé en 2018 sa propre marque, son empreinte : Lenske Records.

    Depuis la sortie de son premier EP en février 2016, Amelie Lens prend donc d’assaut la scène ; « Exhale » y devient sa signature, le titre incontournable qui marque véritablement son ascension irrésistible dans le cercle très fermé des plus grands DJ internationaux. Le morceau « Exhale », tiré de cet EP éponyme sorti à l’époque sur Lyase Recordings, est devenu un classique que l’on peut entendre dans tous les clubs dédiés à la Techno, et ce titre démontre l’ingéniosité et la grande créativité de la petite Belge qui monte. On y retrouve une harmonie, une force, et Amelie Lens capte à merveille notre ouïe puis notre coeur…

    Son track « Exhale » devient ainsi le titre phare du circuit européen en 2016. Il est applaudi par tous les vétérans les plus respectés de cette scène Techno, parmi lesquels le producteur américain Maceo Plex, et retient l’attention d’artistes de renom tels que Pan Pot, qui la signent sur leur label Second State. Amelie Lens effectue alors de nombreuses tournées en Europe, en Amérique du Nord, avec des prestations remarquées à La Plage du Glazart pour Cercle en 2017 ou encore au festival Awakenings aux Pays-Bas en 2018. Elle a fait ses débuts à Chicago en 2019 et continue ses tournées en Amérique du Sud et en Asie.

    Ecoutez « Exhale » de Amelie Lens, extrait du EP éponyme « Exhale » sorti sur Lyase Recordings en 2016.

     

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    Dès 2015, Amelie Lens commence à poster ses premiers mix sur Soundcloud. Elle sort ainsi deux podcasts intitulés « Amelie Lens Podcast 1 »  suivi un an plus tard du numéro 2.

     

     

     

    Après le succès de son premier EP « Exhale » chez Lyase Recordings en 2016, la productrice enfonce le clou. Elle rejoint le label de Pan Pot, Second State (Berlin), et se retrouve aux côtés des Dj internationaux les plus talentueux, de Tassilo Ippenberger et Thomas Benedix qui forment le duo Pan Pot à la productrice anglaise Bec, en passant par Luigi Madonna, Roman Lindau ou encore Michael Klein. Elle sort alors son second EP en août 2016, intitulé « Let it Go ». Sur ce petit format composé de quatre titres, « Wild », « Linger On », « Let It Go » et « The Finest Hour », la productrice belge pose sa voix sur les morceaux et confirme son goût pour les sons acid et dark.

    Ecoutez le EP « Let it Go » sorti sur Second State, en 2016.

     

     

     

    Toujours en 2016, la jeune productrice retravaille le track original « Prophecy » du producteur italien Mathame. Le remix de Amelie Lens est une interprétation plus sombre et très dynamique créant une ambiance assez oppressante.

    Ecoutez « Prophecy » de Mathame, remixé par Amelie Lens, en 2016.

     

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    Second State s’avère être bien plus qu’une agence ou un label pour Amelie ; elle en a fait sa seconde famille. La jolie Belge célèbre la fin de l’année 2016 en signant le morceau « Paralyzed » qui apparaît sur la compilation « SUM » du label berlinois, aux côtés des artistes du rosters dont BEC, Frazier, Gellert, The Reason Y, Stephan Hinz et VONDA7 ou encore Clint Stewart. Le titre « Paralyzed » installe une atmosphère sombre et plutôt froide, notamment avec des effets acid dispersés sur toute la piste et une grosse reverb sur les vocals.

    Ecoutez « Paralyzed » de Amelie Lens, sorti sur la compilation « SUM » de Second State, en 2016.

     

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    Après une année riche en production et un début de carrière plus que prometteur, l’année 2017 s’annonce pour Amelie Lens toute aussi chargée. Elle signe un troisième EP nommé « Contradiction », toujours sur Second State. Cet EP démarre par son titre éponyme, avec une énorme grosse caisse. Des fragments de la voix luxuriante d’Amelie Lens introduisent une fièvre acidogène qui se fond dans une mélodie robuste et profondément énergique. Le second track « Drift » est similaire et prouve une fois de plus que l’approche minimaliste de la productrice est redoutable. Enfin, avec « Resonance », Lens propose la version la plus psychédélique de l’EP. Elle utilise un simple synthétiseur qu’elle module pour produire une atmosphère sombre de sons percutants et intenses.

    Ecoutez « Drift » de Amelie Lens, extrait du EP « Contradiction », sorti sur Second State, en 2017.

     

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    Puis suit un quatrième EP sur le même label, intitulé « Stay With Me ». Proposant quatre tracks dont trois originaux « Follow », « Stay With Me » et « Winter » (en hommage à son chat blanc du même nom) et un Perc Remix de « Stay With Me », Amelie Lens affirme davantage son goût pour l’acid, notamment avec son titre principal « Stay With Me ».

    Ecoutez « Stay With Me » de Amelie Lens, extrait du EP éponyme sorti sur Second State, en 2017.

     

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    Toujours en 2017, sur le label espagnol créé par Pig & Dan, Elevate, la productrice signe « Nel », son cinquième EP. Ce format court présente trois pistes, « Restless », « Nel » et « Force To Move ». Des morceaux hypnotisants aux nappes synthétiques sombres et menaçantes.

    Ecoutez « Nel » de Amelie Lens, extrait du EP éponyme, sorti sur Elevate, en 2017.

     

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    Pour clôturer cette année 2017, Amelie Lens cosigne avec son compatriote Farrago le EP « Weight Of The Land » sorti sur le label berlinois Arts. Cet opus compile trois tracks originaux dont « Weight Of The Land », « Purge » et « Cycling The Sun », accompagnés d’un remix du track principal par François X. Très bien accueilli par les critiques, ce maxi nous distille une techno moderne, minimaliste et élégante.

    Ecoutez « Weight Of The Land » de Amelie Lens & Farrago, extrait du EP éponyme, sorti sur Arts, en 2017.

     

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    L’année 2017 s’achève, la notoriété d’Amelie Lens est au plus haut. Entre deux sessions de studio, elle s’est produite dans le monde entier. L’année 2018 est déjà là et s’annonce encore comme une année importante pour l’artiste belge. Elle signe un titre original intitulé « Render » et remixe le morceau « Fenix » de Regal, sortis tous les deux sur le label espagnol Involve Records.

    Ecoutez « Render » de Amelie Lens sorti sur Involve Records, en 2018.

     

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    Cette même année, âgée de 28 ans, la jeune flamande crée son propre label Lenske Records, qui compte déjà dans ses rangs de talentueux artistes tels que Farrago, Milo Spykers et Airod. Le troisième EP de Lenske, c’est Amelie qui le signe. « Basiel » (en référence au nom de son filleul) compte trois pistes : « Never The Same », « Energize » et « Basiel ».

    Ecoutez « Basiel » de Amelie Lens, extrait de son EP éponyme sorti sur Lenske, en 2018

     

     

     

    Après de nombreux EP signés sur son nouveau label Lenske et le succès de ses premières soirées Exhale à Londres, Amsterdam, Paris et Madrid, Amelie Lens trouve tout de même le temps de remixer le track mythique de Adam Beyer « Teach Me ». Elle propose deux relectures du morceau original : la première techno, puissante, comme elle sait si bien le faire ainsi qu’une seconde plus acid, dans laquelle l’artiste utilise sa voix en boucle pour distiller une énergie folle dans la première moitié du track, avant que des percussions diablement efficaces ne prennent le contrôle et poussent l’atmosphère du morceau dans des contrées plus sombres et menaçantes.

    Ecoutez « Teach Me » de Adam Beyer remixé par Amelie Lens, paru sur Drumcode, 2018

     

     

     

    En 2019, Amelie Lens signe un nouvel EP chez Second State intitulé « Hypnotized ». Elle y présente deux tracks puissants, « Hypnotized » et « Access », ainsi qu’un remix du duo belge Joyhauser.

    Ecouter « Hypnotized » de Amelie Lens, extrait du EP éponyme, sorti sur Second State en 2019.

     

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    Lenske, la griffe d’Amelie Lens

    En 2018, la jeune DJ commence gentiment mais sûrement à intégrer le cercle très fermé des DJ et producteurs à la renommée internationale et elle décide de lancer son propre label, Lenske Records. Cette empreinte, la jeune belge la veut sous le signe d’une techno pure et dure et invite Farrago à co-signer le premier EP du label, « Risin’ » publié en juin 2018. Un second EP, « Infinite », sort en septembre et c’est Milo Spykers, le jeune espoir belge, qui nous offre quatre titres techno d’une rare puissance. Le troisième EP, « Basiel », est signé par la boss en personne. Puis suit le quatrième EP en février 2019, « Voltage », qui met en lumière le travail du parisien Airod. Deux autres maxis lui ont déjà succédé cette année, « Observable 93 » toujours de Milo Spykers et « Neontrance » de Farrago.

     

    Exhale : l’évènement techno mondial incontournable by Amelie Lens

    Exhale, avant d’être le doux nom des soirées techno parmi les plus courues du monde, reprend le nom du premier EP de la belle Amelie, sorti chez Lyase Recordings deux ans plus tôt. Le lancement des fêtes d’Amelie a donc lieu à Fabric London en octobre 2018, avec des invités de choix, parmi lesquels Slam, Matrixxman, Kobosil, Cleric et Farrago. Les évènements s’enchaînent en famille avec Regal, Mylo Spykers et à Paris avec Fjaak, BEC et Farrago. La fin de l’année 2018 est marquée par sa fête à Fabrik Madrid avec Pan Pot.

     

    Amelie Lens, avant…

    Amelie Lens a commencé sa carrière en tant que mannequin dès l’âge de 15 ans. Elle a vécu dans les grandes capitales européennes de la mode, entre Londres, Milan, Paris et Athènes et a travaillé pour les plus grandes marques, telles que Jean-Paul Gaultier, Levi’s, H&M ou Maison Martin Margiela (à lire l’interview d’Amelie Lens pour le magazine : Guido.be).

     

     

     

    Depuis qu’elle est DJ, Amelie voyage désormais aux quatre coins du globe et libère sur scène une énergie débordante unique. Elle peut enchaîner trois gigs dans la nuit, notamment pour les soirées exceptionnelles comme le nouvel an. Très proche de sa grand mère, la jeune artiste n’hésite pas à l’emmener avec elle et à lui faire découvrir sa vie de DJ dans les capitales où elle se produit.

    Sur son compte Instagram @amelie_lens, elle partage sa vie trépidante de DJ en publiant de nombreuses stories on stage, ses photos lifestyle et celles de ses chats. Pour leur prouver son amour, elle a créé un compte Instagram officiel intitulé @ameliescathouse. Mettant à l’honneur Winter, Morris et Franck, les petites boules de poil posent sur ses machines, avec ou sans leur maîtresse.

     

    Les DJ sets de Amelie Lens à écouter

    Amelie Lens est résidente au Labyrinth Club, à Hasselt. C’est dans ce club qu’elle livre ses fameux sets « All Night Long » durant lesquels elle enchaîne des bombes techno pendant plus de huit heures.

     

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    Son live pour Cercle à Paris, en juin 2017, comptabilise à ce jour plus de 7,7 millions de vues. Ce DJ Set reflète parfaitement son style techno, acid et dark.

     

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    En 2019, la DJ belge remet le couvert en jouant à nouveau pour Cercle dans un cadre exceptionnel, l’Atonium à Bruxelles. Un set mémorable et grandiose sous le signe de la techno.

     

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    Sources : Wodj Mag / Trax Mag / MixMag

     

     

    [kleo_divider type= »full » double= »no » position= »center » text= »Pour aller plus loin » class= » » id= » »]

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